L'utilisation du poste informatique
Comme on a pu le constater pour le respect du secret de la correspondance en interne, la vie privée des personnes doit en principe être respectée pendant le travail. Mais, le respect n'est pas total et doit se concilier avec les nécessités professionnelles.
![]() | Outre les articles 8 de la CEDH et 9 du code civil qui rappelle le nécessaire respect de la vie privée et de l'intimité des personnes en tous lieux (Sur ce point, un arrêt de la Cour Européenne des Droits de l'homme rendu 4 mai 2000 confirme « qu'aucune raison de principe ne permet d'exclure les activités professionnelles ou commerciales de la notion de vie privée ».), l'article L1121-1 du Code du travail précise que |
Important :
Se basant sur ce corpus de principes légaux, la jurisprudence refuse que les fichiers «personnels» soient ouverts hors la présence du salarié et/ou du collaborateur, admet que les fichiers «professionnels» et non identifiés comme «personnels» soient ouverts en l'absence du salarié et sanctionne le cryptage de document à l'insu de la hiérarchie.

Dans un arrêt du 17 mai 2005[1], à propos des fichiers et dossiers identifiés par le salarié comme étant personnels, la chambre sociale décida qu'en principe l'employeur ne peut ouvrir les fichiers identifiés par le salarié comme étant «personnels» en dehors de sa présence, sauf s'il a été dûment appelé et qu'il n'a pas répondu. Cette solution a été rendue, alors même que les fichiers dont il était question étaient pornographiques.
: Jurisprudence
Extrait de l'arrêt Soc., 17 mai 2005 (Philippe K. / Cathnet-Science) :
La Cour de cassation, chambre sociale, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par Philippe K., en cassation d'un arrêt rendu le 6 novembre 2002 par la cour d'appel de Paris (22ème chambre, section A), au profit de la société Cathnet-Science anciennement dénommée Nycomed Amersham Medical Systems, défenderesse à la cassation. Sur le moyen unique Vu les articles 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 9 du Code civil, 9 du nouveau Code de procédure civile et L. 1121-1 du Code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Philippe K., engagé comme dessinateur le 23 octobre 1995 par la société Nycomed Amersham Medical Systems dénommée désormais Cathnet-Science, a été licencié pour faute grave le 3 août 1999 au motif qu'à la suite de la découverte de photos érotiques dans un tiroir de son bureau, il avait été procédé à une recherche sur le disque dur de son ordinateur qui avait permis de trouver un ensemble de dossiers totalement étrangers à ses fonctions figurant notamment sous un fichier intitulé "perso" ;
Attendu que pour dire que le licenciement reposait sur une faute grave, la cour d'appel énonce qu'il apparaît en l'espèce que l'employeur lorsqu'il a ouvert les fichiers de l'ordinateur du salarié, ne l'a pas fait dans le cadre d'un contrôle systématique qui aurait été effectué en son absence et alors qu'un tel contrôle n'était permis ni par le contrat de travail, ni par le règlement intérieur, mais bien à l'occasion de la découverte des photos érotiques n'ayant aucun lien avec l'activité de Philippe K., ce qui constituait des circonstances exceptionnelles l'autorisant à contrôler le contenu du disque dur de l'ordinateur, étant rappelé que l'accès à ce disque dur était libre, aucun code personnel n'ayant été attribué au salarié pour empêcher toute autre personne que son utilisateur d'ouvrir les fichiers ;
Attendu, cependant, que, sauf risque ou événement particulier, l'employeur ne peut ouvrir les fichiers identifiés par le salarié comme personnels contenus sur le disque dur de l'ordinateur mis à sa disposition qu'en présence de ce dernier ou celui-ci dûment appelé ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que l'ouverture des fichiers personnels, effectuée hors la présence de l'intéressé, n'était justifiée par aucun risque ou événement particulier, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Quant à l'identification des dossiers et fichiers «personnels» ou «professionnels», la Chambre sociale de la Cour de cassation précise, dans un arrêt rendu le 18 octobre 2006, que « les dossiers et fichiers créés par un salarié grâce à l'outil informatique mis à sa disposition par son employeur pour l'exécution de son travail sont présumés, sauf si le salarié les identifie comme étant personnels, avoir un caractère professionnel de sorte que l'employeur peut y avoir accès hors sa présence »
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Important :
De plus, la jurisprudence sanctionne le cryptage sur le poste informatique à l'insu de la hiérarchie. Dans un arrêt du 18 octobre 2006, la chambre sociale de la Cour de cassation a confirmé la faute grave justifiant le licenciement d'un salarié qui cryptait son poste informatique.
En l'espèce, un salarié avait crypté son ordinateur empêchant ainsi son employeur d'y avoir accès et de consulter les documents qui s'y trouvaient en son absence. Ce dernier a estimé qu'il s'agissait d'une faute grave justifiant son licenciement sans préavis.
La Cour de cassation lui a donné raison aux motifs que les dossiers et fichiers créés par un salarié grâce à l'outil informatique mis à sa disposition par son employeur pour l'exécution de son travail sont présumés avoir un caractère professionnel de sorte que l'employeur peut y avoir accès hors sa présence et consulter les dossiers qui s'y trouvent.
: Jurisprudence
Extrait de l'arrêt Soc. 18 oct. 2006 :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt attaqué (Rennes, 21 octobre 2004) d'avoir dit son licenciement fondé sur une faute grave, en violation de l'article L 122-14-3 du code du travail ;
Mais attendu que les dossiers et fichiers créés par un salarié grâce à l'outil informatique mis à sa disposition par son employeur pour l'exécution de son travail sont présumés, sauf si le salarié les identifie comme étant personnels, avoir un caractère professionnel de sorte que l'employeur peut y avoir accès hors sa présence ; que la cour d'appel, qui a constaté que Jérémy L.F. avait procédé volontairement au cryptage de son poste informatique, sans autorisation de la société faisant ainsi obstacle à la consultation, a pu décider, sans encourir les griefs du moyen, que le comportement du salarié, qui avait déjà fait l'objet d'une mise en garde au sujet des manipulations sur son ordinateur, rendait impossible le maintien des relations contractuelles pendant la durée du préavis et constituait une faute grave ; que le moyen n'est pas fondé.