Maîtriser les outils

Ordre public et restrictions à la publicité

Attention

Du point de vue de la publicité, certains produits font l'objet d'interdictions ou de limitations légales et réglementaires. Les impératifs de santé publique, d'ordre public, justifient des atteintes importantes à la liberté contractuelle et à la circulation des produits.

Il n'est pas toujours évident de tracer une frontière nette entre publicité commerciale et l'information en matière de pratiques massivement développées sur Internet, tout particulièrement en matière de comparaisons tarifaires présentées « en ligne ». Ainsi, la Cour d'appel de Grenoble a récemment eu l'occasion de sanctionner les pratiques d'un célèbre site de comparaison des prix en relevant que : « Constitue une pratique commerciale déloyale le fait pour un site comparateur de prix d'omettre de s'identifier comme site publicitaire, le fait de ne pas mettre à jour en temps réel les prix, de ne pas indiquer les périodes de validité des offres, les frais de livraison et les caractéristiques principales des produits et de diffuser des informations erronées sur le mode de fonctionnement du site ». Le site « Kelkoo » a donc été condamné sous astreinte à cesser ces pratiques. En revanche le fondement textuel sur lequel la sanction se fonde n'est pas clairement précisé par la Cour d'appel de Grenoble Il est possible de justifier la condamnation aussi bien par l'application de l'article L. 121-1, I, 2° du Code de la consommation (pratique critiquée fondée sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur et portant sur certains éléments dont la disponibilité du produit, les caractéristiques essentielles, le prix, les conditions de livraison du bien ou du service) que par l'application de l'article L. 121-1, II du Code de la consommation (omission, dissimulation, fourniture de manière inintelligible, ambiguë ou à contretemps d'une information substantielle ou absence de mention du caractère commercial du message, la disposition étant applicable aux pratiques qui visent les « non-professionnels »).

En savoir plus : Les pratiques du comparateur de prix Kelkoo

Anne DEBET « Les pratiques du comparateur de prix Kelkoo de nouveau condamnées » in « Communication Commerce électronique », n° 3, Mars 2011, comm. 25.

1. En ce qui concerne le tabac

La loi n° 91-32 du 10 janvier 1991, dite loi « Evin » interdit également toute forme directe ou indirecte de publicité en faveur du tabac et des produits du tabac, sauf dans le cadre spécifique des publications et les services en ligne réservés aux professionnels, ou qui ne sont pas principalement destinés au marché communautaire, dans les limites très strictes de l'article L. 3511-3 du Code de la santé publique (CSP). Le contrevenant s'expose selon les dispositions de l'article L. 3512-2 du CSP, à une peine de 100000 euros d'amende. L'accroissement du prix des cigarettes a favorisé le développement de sites de ventes de cigarettes en ligne. Le site « e-tabac.com » a fait l'objet d'une plainte de l'Administration des douanes et ses dirigeants ont été condamnés par un jugement du Tribunal correctionnel de Meaux, du 13 mars 2007.

La Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) a par deux arrêts du 5 mars 2009, validé les condamnations prononcées, par des juridictions françaises, à l'encontre des responsables de publications périodiques, pour propagande et publicité en faveur du tabac contraires aux dispositions du Code de la santé publique (E. Derrieux « Interdiction de propagande et de publicité pour le tabac », in RLDI, avril 2009, p. 32 et s.).

À consulter sur : ZDNet.fr

Le 13 octobre 2009 la presse a relayé une « information » selon laquelle la vente de cigarettes sur Internet serait possible en France à partir du 1er janvier 2010. Après réunion avec les buralistes disposant du monopole de la distribution du tabac, plusieurs Ministres, dont Madame R. Bachelot, Ministre de la santé, ont démenti formellement l'existence d'un quelconque projet favorable au commerce électronique du tabac.

2. En ce qui concerne l'alcool et les produits alcoolisés

La loi 01-32 du 10 janvier 1991, dite loi « Evin » (Loi n° 91-32 du 10 janvier 1991, relative à la lutte contre le tabagisme et l'alcoolisme, JORF, 12 janvier 1991) codifiée aujourd'hui au Livre III, du Code de la santé publique (CSP), a imposé, après des débats parlementaires houleux, le principe d'une prohibition de la publicité en faveur de l'alcool sous toute ses formes, qu'elle soit directe, ou indirecte. Dans le contexte de cette politique, le contrevenant s'exposait à une amende de 75000 euros, le maximum pouvant être porté à la moitié du montant des dépenses consacrées à l'opération illicite. (art. L. 3351-7 du CSP).

Avant l'adoption de la loi « Hôpital, patients, santé et territoires », dite loi « Bachelot », les règles principales étaient très restrictives selon les dispositions de l'article L. 3322-9 du Code de la santé publique. Néanmoins, on pouvait déjà constater que, cet article comportait déjà un certain nombre de dérogations, par exemple au profit de la presse écrite, de la radio, etc., sous certaines conditions, interprétées par la jurisprudence de manière très restrictive (Affaire « Heineken », CA Paris, A, 14e ch., sect. A, 13 février 2008) en refusant la publicité pour l'alcool sur support numérique, dont certains auteurs ont déduit l'interdiction de la vente d'alcool sur Internet (T. Verbiest, « Alcool et Internet », in Journal du Net, 4 novembre 2003).

L'analyse est démentie, de toute évidence, par la pratique réelle du commerce électronique sur le terrain.

Exemple

Les professionnels de la filière viticole défendent âprement leurs intérêts sur certains sites Internet et font jouer tous les mécanismes du « lobbying » sur certains sites. T. Verbiest, « Alcool et Internet », in Journal du Net, 4 novembre 2003.

Sur la discussion au Parlement de la loi « Hôpital, patients, santé et territoires », du 21 juillet 2009, dite loi « Bachelot »[1] :

Désormais, du point de vue de la vente d'alcool, l'article 94 de la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l'Hôpital, patients, santé et territoires, dite loi « Bachelot » prévoit que la vente à distance est considérée comme une vente à emporter (cf. : article 3322-9 du CSP).

En ce qui concerne l'évolution des contraintes législatives relatives à la publicité pour l'alcool sur « Internet » les débats ont été très vifs.

À l'occasion du débat parlementaire relatif à l'adoption de la loi relative à la modernisation de l'économie, dite « LME » du 4 août 2008, il avait déjà été envisagé d'autoriser la publicité pour l'alcool sur « Internet », mais le Sénat avait finalement rejeté cette possibilité. L'interdiction de toute publicité pour l'alcool était donc maintenue, y compris sous forme de messages électroniques. Récemment une « ouverture » tempérée avait été admise, par Mme le Ministre.

Deux amendements (amendement n°80 et amendement n°530) avaient ensuite été proposés à l'occasion de la discussion au Parlement de la loi « Bachelot » envisageant l'autorisation de la publicité pour l'alcool sur Internet dans certaines limites.

L'article 97 de la loi 2009-879 du 21 juillet 2009 a modifié l'article 3323-2 du CSP qui prévoit désormais que : la propagande ou la publicité, directe ou indirecte, en faveur des boissons alcooliques dont la fabrication et la vente ne sont pas interdites sont autorisées :

« 9° Sur les services de communications en ligne à l'exclusion de ceux qui, par leur caractère, leur présentation ou leur objet, apparaissent comme principalement destinés à la jeunesse, ainsi que ceux édités par des associations, sociétés et fédérations sportives ou des ligues professionnelles au sens du code du sport, sous réserve que la propagande ou la publicité ne soit ni intrusive, ni interstitielle ».

La Cour de cassation entend toujours imposer une grande  sévérité en ce qui concerne le respect des dispositions du Code de la santé publique du point de vue de la promotion de l'alcool et de ses produits comme en témoigne, plusieurs décisions récentes (Cour de cassation, 1re chambre civile, 22 mai 2008, n° de pourvoi : 07-14.984 ; Cour de cassation, 1re chambre civile, 23 février 2012 n° de pourvoi : 10-17.887). Ainsi, une publicité pour une boisson alcoolique ne peut pas utiliser des références visuelles ou textuelles étrangères aux indications énumérées au Code de la santé publique et promouvoir, de façon directe ou indirecte, une image de convivialité ou des « valeurs » associées à la boisson pour inciter le public à la consommer. Un arrêt mérite une attention particulière car il relève une situation inédite marquant le grand degré d'imagination des publicitaires. (Cour de cassation, 1re chambre civile, 20 octobre 2011, n° de pourvoi : 10-23.509). Une société diffusant une célèbre marque de whisky avait mis en place sur un site Internet un « jeu-concours » fondé sur une logique de parcours initiatique valorisant les caractéristiques de la marque. L'Association nationale de prévention en alcoologie et addictologie (ANPAA) avait assignée la société pour que la plupart des visuels et des mentions utilisés soient purement et simplement retirés. La Cour de cassation considère que certaines mentions qui n'avaient pas été exclues suite à l'analyse d'une cour d'appel doivent impérativement retirés. La décision qui démontre la plus extrême rigueur est fondée sur les dispositions de l'article L. 3323-4 du Code de la santé publique ; et rappelle que : « la publicité autorisée en faveur de boissons alcooliques est limitée à l'indication du degré volumique d'alcool, de l'origine, de la dénomination, de la composition du produit, du nom et de l'adresse du fabricant, des agents et des dépositaires ainsi que du mode d'élaboration, des modalités de vente et du mode de consommation du produit ; qu'elle peut seulement comporter, outre ces indications, des références relatives aux terroirs de production, aux distinctions obtenues, aux appellations d'origine telles que définies à l'article L. 115-1 du Code de la consommation ou aux indications géographiques telles que définies dans les conventions et traités internationaux régulièrement ratifiés ainsi que des références objectives relatives à la couleur et aux caractéristiques olfactives et gustatives du produit ».

3. En ce qui concerne les jeux en ligne

Fin 2008, 25000 sites de jeux illégaux avaient été recensés dans le monde, dont 5000 environ opéraient en langue française. M. F. Trucy, rapporteur de la Commission des finances du Sénat a rédigé un rapport sur «  l'évolution des jeux de hasard et d'argent » (L. Costes : présentation du rapport de M. F. Trucy, in RLDI, 2006, n° 21, p. 29) afin d'envisager des réponses adaptées à la montée en puissance des sites de jeux de hasard en ligne.

La licéité des sites de jeux et paris en ligne a longtemps été contestée par le droit français. Les sociétés exploitant des casinos ont été tentées par l'expérience des jeux en ligne notamment pour le poker, jeu en pleine vogue actuellement : La Cour d'appel de Versailles jurisprudence a ainsi considéré (CA Versailles, 9e ch., 4 mars 2009, note MT, in RLDI, mars 2009, p. 59 et s. ; note A. Debet : « Poker en ligne : le groupe Partouche sauve la mise en appel », in CCE, mai 2009, comm. p. 46.) a récemment décidé,

  • d'une part, qu'un site de poker en ligne, accessible depuis la France et destiné à un public français constitue « une maison de jeux de hasard au sens de la loi du 12 juillet 1983 », mais a,

  • d'autre part, prononcé la relaxe du groupe « Partouche international » et de deux individus, en relevant que « leur implication dans le lancement et le développement du site n'était pas suffisamment caractérisée ». CA Versailles, 9e ch., 4 mars 2009, JurisData n° 2009-002147.

De nombreux contentieux opposent périodiquement le PMU à des sites de paris en ligne situés à l'étranger, notamment la société maltaise « Zeturf Ltd ». L'extranéité de la situation justifie alors la mise en œuvre de règles de conflits pour déterminer quelle est la loi applicable dans le « cyberespace ».

En vertu de la loi du 21 mai 1836 et de la loi du 12 juillet 1983, la publicité en faveur des loteries et des jeux de hasard est interdite. La publicité pour les jeux en ligne l'objet de polémiques importantes comme en témoignent deux avertissements du Conseil supérieurs de l'audiovisuel (CSA) (M. –A. Ledieu : « CSA – Deux avertissements du CSA contre la publicité pour des sites de paris en ligne », in CCE, juin 2009, p. 88.). La station de radio privée « Europe 1 » a été mise en demeure pour avoir diffusé à plusieurs reprises un message publicitaire en faveur du site de paris en ligne « BetClic », et la station de radio privée « RMC » a reçu de son côté une lettre pour avoir annoncé la diffusion d'une nouvelle émission en partenariat avec le site de jeux et paris en ligne « Unibet ».

Dans le domaine du « sponsoring », une plainte a été déposée contre un club de football professionnel français, (l'Olympique Lyonnais), qui souhaitait que ses joueurs arborent sur leurs maillots le nom et le « logo » de « BetClic » à l'occasion d'un match de la Ligue des champions se déroulant en Belgique.

La Commission européenne a multiplié les procédures d'infraction à l'encontre des monopoles historiques, dès lors, pour tenir compte de ces orientations et des critiques formulées contre le système juridique français, le Ministre du Budget, M. Eric Woerth a envisagé une « ouverture maîtrisée du jeu en ligne » et ses services ont élaboré un projet législatif organisant un marché dans lequel l'activité des sites illégaux se développe. En raison de longues négociations l'adoption du texte au Parlement a pris du retard. Le 27 août 2009, les services de la Commission ont considéré que le texte proposé, correspondait pour l'essentiel à leurs demandes.

De fait, la France avait annoncé l'ouverture à la concurrence du marché des jeux en ligne aux opérateurs privés au 1er janvier 2010 dans trois secteurs, ceux des paris hippiques et des paris sportifs, et celui du poker. Le projet de loi (M. A. Ledieu : « Projet de loi sur l'ouverture à la concurrence du marché des jeux sur Internet », in CCE, avril 2009, p. 51) sur l'ouverture à la concurrence du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne a été présenté le 5 mars 2009 par le Ministre du Budget. Le projet de loi a été présenté à l'Assemblée nationale le 9 octobre 2009 pour y être discuté en première lecture le 13 octobre 2009 (voir site).

Des règles contraignantes ont été prévues pour les sites de « jeux en ligne » sous forme d'un cahier des charges très précis.

Exemple

Les machines à sous devraient demeurer interdites, les licences seraient accordées pour cinq ans renouvelables, le taux de retour aux joueurs des mises devrait être fixé dans une fourchette stricte, etc. agréés.

L'organisation illégale de jeux sur Internet devrait être punie d'une peine de trois ans d'emprisonnement et de 45000 euros d'amende, portée à sept ans et 100 000 en cas d'infraction commise en bande organisée.

Les opérateurs agréés devraient pouvoir diffuser des messages publicitaires sur tous les types de supports, y compris sur Internet sous la surveillance de l'Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP). En revanche, la publicité pour des services de jeux ou de paris en ligne ne disposant pas de l'agrément devrait être interdite et punie par une peine de 30000 euros d'amende au minimum, le montant de l'amende pouvant atteindre quatre fois le montant des dépenses publicitaires consacrées à l'opération illicite...

La pression du droit européen semblait avoir finalement abouti à l'évolution de notre système juridique (L. Grynbaum, « Projet de loi jeux et paris en ligne : une ouverture mesurée à la concurrence partiellement conforme au droit communautaire », in RLDI, mai 2009, p. 65 et s.). Le système retenu après réflexion par les autorités françaises devrait autoriser dans des conditions restrictives les paris hippiques et sportifs en ligne ou le poker. Les réflexions ayant abouti au projet de loi actuel peuvent être consultées sur les sites suivants :

Cependant, un arrêt de la Cour européenne de justice du 8 septembre 2009, affaire C 42-07 (Bwin International Ltd / Departamento de Jogos da Santa Casa da Misericórdia de Lisboa) pourrait selon certaines opinions remettre en cause cette ouverture programmée de plus en plus contestée par bon nombre de députés et de sénateurs ou, à tout le moins, justifier d'une nouvelle rédaction du texte très restrictive comme le démontrent de très nombreux amendements.

Sur l'essentiel de cette affaire très médiatisée, on rappellera simplement que la société de paris en ligne « Bwin », sise à Gibraltar, ayant conclu un contrat de sponsoring avec la Ligue de football professionnel portugaise, l'opérateur « historique » de loterie «  Santa Casa » a ensuite multiplié les recours en justice afin de dénoncer cet accord au nom de la défense de son « monopole exclusif sur les paris sportifs et autres loteries ».

La Cour a décidé en substance que : estimé qu'alors même que la législation portugaise constitue une « restriction à la libre circulation des services », que celle-ci est « justifiée » par des raisons impérieuses « d'intérêt général », telle que la « lutte contre la criminalité ». Les magistrats relèvent spécialement que : « compte tenu de l'importance des sommes qu'ils permettent de collecter et des gains qu'ils peuvent offrir aux joueurs, ces jeux comportent des risques élevés de délits et de fraudes », et que « les jeux de hasard accessibles par l'Internet comportent des risques de nature différente et d'une importance accrue par rapport aux marchés traditionnels de tels jeux en ce qui concerne d'éventuelles fraudes commises par les opérateurs contre les consommateurs ».

La Cour souligne aussi que : « Les États membres sont libres de fixer les objectifs de leur politique en matière de jeux de hasard et, le cas échéant, de définir avec précision le niveau de protection recherché. Toutefois, les restrictions qu'ils imposent doivent satisfaire aux conditions qui ressortent de la jurisprudence de la Cour en ce qui concerne leur proportionnalité ».

Par voie de conséquence, la Cour admet « qu'une autorisation limitée des jeux dans un cadre exclusif présente l'avantage de canaliser l'exploitation de ceux-ci dans un circuit contrôlé et de prévenir les risques d'une telle exploitation à des fins frauduleuses et criminelles » et « qu'il convient d'admettre à cet égard que l'octroi de droits exclusifs pour l'exploitation des jeux de hasard par l'Internet à un opérateur unique, tel que Santa Casa, qui est soumis à un contrôle étroit des pouvoirs publics peut, dans des circonstances telles que celles de l'affaire au principal, permettre de canaliser l'exploitation de ces jeux dans un circuit contrôlé et être considéré comme apte à protéger les consommateurs contre des fraudes commises par des opérateurs ».

La Cour relevant que : « le secteur des jeux de hasard offerts par l'Internet ne fait pas l'objet d'une harmonisation communautaire » conclut « qu'un État membre est donc en droit de considérer que le seul fait qu'un opérateur tel que Bwin propose légalement des services relevant de ce secteur par l'Internet dans un autre État membre, où il est établi et où il est en principe déjà soumis à des conditions légales et à des contrôles de la part des autorités compétentes de ce dernier État, ne saurait être considéré comme une garantie suffisante de protection des consommateurs nationaux contre les risques de fraude et de criminalité, eu égard aux difficultés susceptibles d'être rencontrées, dans un tel contexte, par les autorités de l'État membre d'établissement pour évaluer les qualités et la probité professionnelles des opérateurs ».

L'arrêt du 8 septembre 2009 permettait donc aux adversaires des paris et jeux en ligne d'espérer une remise en cause définitive de l'ouverture des jeux de hasard et paris sur Internet, toutefois le projet de loi relatif à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne, a été adopté en première lecture par l'Assemblée nationale le 13 octobre 2009. Le texte est consultable sur le site.

La CJUE a, dans un arrêt du 3 juin 2010 concernant la société Sporting Exchange agissant sous le nom de « Betfair » établie au Royaume-Uni, (aff. C-203/08, Sporting Exchange Ltd c/ Minister van Justitie) de nouveau rappelé que « l'interdiction des jeux de hasard sur Internet par un État membre de l'Union européenne n'est pas contraire au droit communautaire ».

En savoir plus : La CJUE

« La CJUE confirme qu'un État membre peut interdire les jeux sur internet », in Revue Lamy Droit de l'Immatériel – 2010, Revue Lamy Droit de l'Immatériel – 2010, ACTUALITÉS ACTIVITÉS DE L'IMMATÉRIEL, LES GRANDS SECTEURS DE L'IMMATÉRIEL , RÉSEAUX/INTERNET.

Le Conseil constitutionnel a considéré que la loi du 12 mai 2010 était conforme à la Constitution, (Cons. const., déc. n° 2010-605 DC, 12 mai 2010, JO 13 mai 2010, p. 8897).

L'entrée en vigueur de la loi n° 2010-476 du 12 mai 2010 ouvrant à la concurrence et à la régulation le secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne, et l'attribution d'un agrément par l'ARJEL à la société maltaise « Zeturf » (ARJEL, déc. n° 2010-080, 26 juill. 2010, Zeturf France limited : Journal Officiel 1er Août 2010) permettant à cette dernière de proposer une offre de paris hippiques en ligne n' pas éteint le contentieux qu'avait fait naître le site. Après le Conseil d'État (CE, 5e et 4e ss-sect. réunies, 9 mai 2008, n° 287503, Sté Zeturf Limited : JurisData n° 2008-073519, Comm. com. électr. 2008, comm. 92, nos obs.) et la Cour de cassation (Cass. com., 10 juill. 2007, n° 06-13.986, FS-P+B+I, Sté Zeturf Limited c/ GIE Pari Mutuel Urbain : JurisData n° 2007-040137 ; Comm. com. électr. 2007, comm. 123, nos obs.), le Conseil constitutionnel a lui aussi pris position en retenant la constitutionnalité des dispositions de la loi du 2 juin 1891, fondement législatif au monopole du PMU. Le Conseil constitutionnel, saisi le 29 septembre 2010 par la Cour de cassation, d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) posée par la société « Zeturf », a donc déclaré la loi du 2 juin 1891 réglementant l'autorisation et le fonctionnement des courses de chevaux, dans sa rédaction antérieure à la loi du 12 mai 2010, conforme à la Constitution. La CJUE, quant à elle, a été saisie d'un recours préjudiciel en interprétation par l'arrêt du Conseil d'État précité (demande de décision préjudicielle, aff. C-212/08). La Cour de justice de l'Union européenne a été saisie d'un renvoi préjudiciel en interprétation portant sur la compatibilité de la réglementation française des jeux, antérieure à 2010, avec le principe de libre prestation des services, dans l'affaire dite « Zeturf ». La CJUE considère que, sous certaines conditions, qu'elle définit strictement, l'octroi de droits exclusifs dans le domaine des jeux à un organisme unique soumis à un contrôle étroit des pouvoirs publics (comme le PMU), est de nature à permettre de maîtriser et limiter les divers risques consubstantiels du secteur des jeux et paris. (CJUE, 30 juin 2011, aff. C-212/08).

En savoir plus : L'affaire Zeturf

Anne DEBET, « L'affaire Zeturf devant le Conseil constitutionnel », in Communication Commerce électronique n° 2, Février 2011, comm. 13.

Peu après la promulgation de la loi du 12 mai 2010, le TGI de Paris (TGI Paris, réf., 6 août 2010, RLDI 2010/63, n° 2083) saisi sur le fondement de l'article 21 de la loi précitée qui attribue la compétence à cette juridiction pour statuer sur les demandes d'interdiction des sites n'ayant pas obtenu l'agrément de l'ARJEL, statuant en la forme des référés a rappelé à propos de la société « Stanjames » établie à Gibraltar offrant des paris sportifs et hippiques ainsi que des jeux en ligne aux internautes français sans que cette société ait obtenu l'agrément de ARJEL, que la violation de l'article 21 de la loi du 12 mai 2010 était avérée. En effet, si les jeux et paris par internet bénéficient d'une ouverture partielle à la concurrence, l'article 3, II, précise que le régime des « droits exclusifs délivrés par l'État » est maintenu, dès lors, les activités de loterie demeurent un monopole attribué par l'État et seuls les sites autorisés par l'ARJEL peuvent exercer leur activité auprès des parieurs et joueurs en France. Dans cette affaire le président de l'ARJEL avait demandé l'interdiction de l'accès au site. Le jugement du TGI de Paris fait droit à cette demande, la procédure étant jugée conforme aux dispositions de l'article 61 de la loi du 12 mai 2010, alors même que le décret d'application prévu par le texte n'était pas encore publié, l'obligation de « « filtrage » imposée par la loi étant quant à elle entrée en vigueur. Du point de vue de la procédure stricto sensu le TGI rappelle que l'article 61 de la loi n'impose pas que l'exploitant ou l'éditeur du site soit partie à l'instance ; seuls sont concernés par la procédure initiée par le président de l'ARJEL, les hébergeurs (art. 6, I, 2, de la loi du 21 juin 2004 dite « LCEN ») et les fournisseurs d'accès internet (art. 6, I, 1, de la loi du 21 juin 2004 dite « LCEN »). Les fournisseurs d'accès ont naturellement critiqué ces dispositions, mais la nécessité d'arrêter l'accès à des sites non-autorisés situés en dehors du territoire français et souvent même en dehors de l'Union européenne, justifie que le président de l'ARJEL « passe » par l'hébergeur du site et les fournisseurs d'accès pour rendre l'interdiction effective, alors que l'assignation des exploitants des sites contestés, ne cessant pas spontanément leur diffusion après avoir été mis en demeure, n'est que facultative.

En savoir plus

Luc GRYNBAUM, « Injonction aux fournisseurs d'accès internet d'interdire l'accès à un site illicite de jeux en ligne », in Revue Lamy « Droit de l'Immatériel », 2010, 64, ACTUALITÉS, CRÉATIONS IMMATÉRIELLES, ÉCLAIRAGE ; Anne DEBET, « Après le référé LCEN, le référé jeux en ligne » in « Communication Commerce électronique », n° 2, Février 2011, comm. 12.

En savoir plus : Licéité des loteries publicitaires et autres concours en ligne

En dehors des dispositions de la loi du 12 mai 2010, la question de la licéité des loteries publicitaires et autres concours en ligne est parfois contestée en justice, lorsque l'ordre public et la déontologie ne sont pas respectés.

En savoir plus : Licéité et illicéité des jeux-concours en ligne ?

Axelle LAVAUD, « Licéité et illicéité des jeux-concours en ligne ? » in « Communication Commerce électronique », n° 6, Juin 2011, alerte 46 .

La loi n° 2010-476 du 12 mai 2010, relative à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard « en ligne », après avoir été déclarée conforme à la Constitution par décision du Conseil constitutionnel n° 2010-605 du 12 mai 2010, est entrée en vigueur le 13 mai 2010. Désormais il existe donc un cadre juridique spécifique pour les jeux et paris diffusés et organisés par l'intermédiaire d'un service de communication au public en ligne », dont les modalités juridiques sont distinctes de celles applicables aux jeux organisés parle PMU, la Française de jeux, les casinos, sous leur forme traditionnelle. Le contrat « de jeux en ligne » est un contrat d'adhésion, (art. 10, 2° de la loi), car il a été tenu compte par le législateur du profond déséquilibre existant entre les opérateurs professionnels et les joueurs, simples particuliers. La protection des personnes vulnérables est l'un des objectifs de la loi qui a été complétée par de nombreux décrets afin de réguler l'activité de manière précise et rigoureuse. Le premier chapitre de la loi est d'ailleurs applicable à « l'ensemble des jeux d'argent et de hasard » : qui d'après l'article 1er : « ne sont ni un commerce ordinaire, ni un service ordinaire ; dans le respect strict du principe de subsidiarité ils font l'objet d'un encadrement strict au regard des enjeux d'ordre public, de sécurité publique et de protection de la santé des mineurs ». Les jeux d'argent sont donc tous interdits aux mineurs, même émancipés.

En savoir plus : Analyse de la loi du 12 mai 2010

Éric A. CAPRIOLI, « Paris en ligne », in Communication Commerce électronique n° 7, Juillet 2010, comm. 79 ; David BOSCO et Jean-Michel MARMAYOU, « Propositions pour une loi à l'essai . - À propos de la loi du 12 mai 2010 sur les jeux et paris en ligne », in Communication Commerce électronique n° 9, Septembre 2010, étude 16.

En savoir plus : Conséquences fiscales de l'ouverture des jeux en ligne

Olivier de MATTOS, « Prélèvements sur les jeux et paris en ligne : la procédure fiscale d'accréditation internationale est fixée », in Communication Commerce électronique n° 7, Juillet 2010, alerte 78.

La publicité pour les jeux d'argent est, par voie de conséquence, interdite dans les supports spécifiquement destinés aux mineurs. Les opérateurs doivent, de même, informer tout joueur potentiel de l'interdiction aux mineurs. L'article 3 de la loi précise qu'il convient de « limiter et d'encadre l'offre et la consommation de jeux et d'en contrôler l'exploitation afin de prévenir le jeu excessif ou pathologique et protéger les mineurs, d'assurer l'intégrité, la fiabilité et la transparence des opérations de jeu, de prévenir les activités frauduleuses ou criminelles, ainsi que le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme, etc. ». L'article 7 de la loi confirme la volonté de régulation exprimée par le législateur : ainsi, l'opérateur doit diffuser des messages de « mise en garde » dans toute communication commerciale, il doit faire référence à un numéro de téléphone vert dédié à l'information et à l'assistance des joueurs afin de limiter les risques de dépendance et les formes pathologiques de jeu. Naturellement, l'article 26 de la loi prohibe la participation «  aux jeux en ligne », des personnes « interdites de jeu » et l'article 30 de son côté, interdit le « jeu à crédit ». L'alinéa 2 de l'article 69 de la loi impose au Gouvernement, avant le 31 décembre 2011, de rendre compte de son action contre le jeu excessif au Parlement.

La loi du 12 mai 2010 au-delà de la volonté « régulatrice » précédemment décrite, organise la un nouveau secteur d'activité à la concurrence, encouragée par une jurisprudence, pour le moins ambiguë de la CJCE (CJCE, 9 septembre 2009, C-42/07 « Santa Casa » ; CJCE, 6 octobre 2009, C-153/08, « Commission c/ Espagne » ; CJUE, 8 juillet 2010, C-447-08 « Otto Sjöberg » et C-448-08 « Anders Gerdin »).

Seuls sont autorisés : les paris hippiques en la forme mutuelle, les joueurs jouant les uns contre les autres, (décret n° 2010-498 du 27 mai 2010 relatif à la définition des courses hippiques supports des paris en ligne et aux principes généraux du pari mutuel publié au JO du 18 mai 2010, p. 9164), des paris sportifs en la forme mutuelle ou à cote les joueurs jouant alors contre l'opérateur, (décret n° 2010-483 du 12 mai 2010, relatif aux compétitions sportives et aux types de résultats sportifs définis par l'ARJEL, publié au JO du 13 mai 2010, p. 8932), et enfin les « jeux de cercle » comme le « poker ».

Seules les entreprises titulaires d'un agrément délivré par l'Autorité de régulation des jeux en ligne, (ARJEL) sont susceptibles de proposer des offres de jeux en ligne, en France, les modalités d'agrément sont nombreuses et énumérées par le décret 2010-482 du 12 mai 2010 (JO du 13 mai 2010, p. 8930). Par exemple, il est , selon les dispositions de l'article 20 du décret précité, nécessaire que les opérateurs aient leurs sièges sociaux en France, dans un Etat membre de l'Union européenne, ou dans un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention de « lutte contre la fraude et l'évasion fiscale ». L'opérateur proposant des jeux en ligne, doit selon les dispositions de l'article 15 du même décret justifier de son identité, son adresse, sa solidité financière, etc. L'article 21 du même texte précise que l'agrément est délivré pour cinq ans n'est pas cessible.

Le décret n° 2010-518 du 19 mai 2010[4], relatif à la mise à disposition de l'offre de jeux et de paris par les opérateurs agréés de jeux ou de paris en ligne, publié au JO du 20 Mai 2010 précise quelles sont les caractéristiques générales de l'offre de jeux et de paris proposée par les opérateurs agrées de jeux ou de paris en ligne, les conditions d'ouverture et de fonctionnement du compte joueur, la lutte contre le jeu excessif et pathologique.

L'ARJEL est une autorité administrative indépendante dont le décret n° 2010-481 du 12 mai 2010 détermine l'organisation et le fonctionnement (Cf. : JO du 13 mai 2010, p. 8927). Elle comporte un collège, une commission de sanctions, et des commissions spécialisées (article 35 du décret). Consulter le site Internet de l'ARJEL.

L'Autorité de régulation des jeux en ligne est chargée de mettre en place des moyens de régulation, d'information et de contrôle pour protéger les joueurs, prévenir de l'addiction au jeu et lutter contre la fraude.

Décisions adoptées le 07 octobre 2010 par le collège de l'ARJEL.

Le 07 octobre, le collège de l'Autorité de régulation des jeux en ligne a adopté plusieurs décisions portant délivrance d'agrément ou homologation de logiciel de jeux ou de paris, relatives à l'inscription de nouvelles catégories de compétitions et types de résultats pouvant faire l'objet de paris en ligne et à la constitution d'une commission spécialisée.

Au-delà de la délivrance des agréments, elle est selon l'article 34 du décret du 12 mai 2010 chargée de surveiller les opérations de paris et jeux en ligne, de proposer au Gouvernement un chier des charges, de rendre des avis sur des projets relatifs aux jeux en ligne, de suggérer des modifications du régime juridique applicable aux jeux en ligne au Gouvernement. L'ARJEL doit rendre un rapport annuel afin de rendre compte de ses missions. L'ARJEL dispose d'un pouvoir d'enquête lui permettant de demander des informations, d'accéder à des locaux professionnels ou de réclamer des auditions (article 42 du décret). L'article 44 du décret rappelle que l'ARJEL a le pouvoir de sanctionner les opérateurs ne respectant pas les dispositions légales et réglementaires applicables à leurs activités. Le collège de l'ARJEL saisit la commission de sanctions quand une mise en demeure adressée à un opérateur est demeurée infructueuse (article 43 du décret). Le décret 2010-495 du 14 mai 2010 (relatif à la procédure de sanction applicable aux opérateurs agréés de jeux ou de paris en ligne, publié au JO du 15 mai 2010, p. 9052) prévoit que la commission de sanctions peut prononcer diverses sanctions : avertissement, suspension de l'avertissement pour trois mois au plus, sanctions pouvant être remplacées, ou assorties, de mesures pécuniaires (article 43 du décret). Les décisions de la commission sont susceptibles d'appel devant le Conseil d'Etat sous la forme d'un recours en plein contentieux. Le décret n° 2010-509 du 18 mai 2010, publié au JO du 19 mai 2010, précise les obligations imposées aux opérateurs agréés de jeux ou de paris en ligne en vue du contrôle des données de jeux par l'Autorité de régulation des jeux en ligne.

  1. Descriptif simple

    Loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires.

    Type de texteLoi
    Date21/07/2009
    Consultez le texte
  2. Date15/01/2009
    JuridictionCour de cassation chambre civile 2
    Pourvoi07-20955
    TypeNationale
    PublicationPublié au bulletin
    Numéro d'affaire07-20955
    Consultez le texte
  3. Date06/11/2008
    JuridictionCour de cassation chambre civile 2
    Pourvoi07-17445
    TypeNationale
    Résumé

    Le juge compétent pour liquider une astreinte, lorsque le débiteur demeure à l'étranger, est celui du lieu d'exécution de l'injonction.

    Un juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Paris est donc compétent pour se prononcer sur la demande en liquidation d'une astreinte assortissant une injonction de mettre fin à l'adresse d'un site internet situé à l'étranger mais accessible depuis le territoire français.

    En retenant qu'une telle injonction devrait être exécutée en France, la cour d'appel a procédé à une interprétation nécessaire, exclusive de dénaturation, de l'ordonnance ayant fixé l'obligation sous astreinte

    Mots clésCompétence territoriale, Règles particulières, Astreinte, Débiteur demeurant à l'étranger, Juge de l'exécution, Juge du lieu d'exécution de l'injonction
    PublicationBulletin 2008, II, n° 232
    Numéro d'affaire07-17445
    Textes Appliqués

    articles 38 et 39 du règlement (CE) n° 44/2001 du 22 décembre 2000

    Consultez le texte
  4. Descriptif simple

    Le décret n° 2010-518 du 19 mai 2010, relatif à la mise à disposition de l'offre de jeux et de paris par les opérateurs agréés de jeux ou de paris en ligne, publié au JO du 20 Mai 2010 précise quelles sont les caractéristiques générales de l'offre de jeux et de paris proposée par les opérateurs agrées de jeux ou de paris en ligne, les conditions d'ouverture et de fonctionnement du compte joueur, la lutte contre le jeu excessif et pathologique.

    Type de texteDécret
    Date19/05/2010
    Consultez le texte
PrécédentPrécédentSuivantSuivant
AccueilAccueilImprimerImprimer A. LE POMMELEC et D. VALETTE - UNJF