Maîtriser les droits des personnes

Les perquisitions domiciliaires

La perquisition domiciliaire n'est prévue par la loi que dans le cadre des enquêtes de police et au cours de l'instruction (Cass. crim.[1] 29 mars 1994, Bull. crim.[3] n° 118[2]). Toutefois, elle peut être pratiquée au cours de la phase de jugement lorsque la juridiction compétente a ordonné un supplément d'information comportant l'exécution d'un tel acte (art. 283, 463, 512 et 538 Code de procédure pénale).

Dans le cadre des enquêtes de police, le régime des perquisitions est différent selon que l'enquête est de flagrance ou pas. En outre, les perquisitions réalisées au cours d'une instruction répondent au même régime que celles effectuées dans le cadre d'une enquête de flagrance.

1. La perquisition dans le cadre de l'enquête de flagrance ou au cours de l'instruction

Dans le cadre d'une enquête de flagrance et au cours de l'instruction, la perquisition est coercitive (art. 56, 59, 92 à 96, 152 Code de procédure pénale). Elle n'est possible que pour les crimes et délits dont la peine encourue est une peine d'emprisonnement.

Elle doit être faite :

  • soit par un officier de police judiciaire, spontanément (en enquête de flagrance lorsque l'infraction vient de se commettre ou l'a été dans un temps proche) ou sur commission rogatoire ;

  • soit par un juge d'instruction.

La perquisition doit répondre à des conditions de fond et de forme.

a. Les conditions de fond :

* Le moment :

L'article 59 Code de procédure pénale prévoit que les perquisitions domiciliaires ne peuvent pas avoir lieu de nuit, c'est-à-dire avant 6 heures du matin ou après 21 heures ; toutefois, celles commencées de jour peuvent se poursuivre de nuit.

Par exception, les perquisitions peuvent avoir lieu de nuit en cas de réclamation ou d'acceptation du chef de la maison (art. 59 Code de procédure pénale), en cas de proxénétisme (art. 706-35 Code de procédure pénale) et en cas de trafic de stupéfiants.

En outre, la loi du 9 mars 2004 autorise les perquisitions de nuit en matière de criminalité organisée (à l'article 706-73 Code de procédure pénale), sur décision motivée en droit et en fait du juge des libertés et de la détention, saisi par le Procureur de la République (dans les conditions de l'article 706-89 code de procédure pénale).

* En présence de la personne :

La perquisition doit avoir lieu en présence de la personne soupçonnée d'avoir participé à l'infraction ou de détenir des pièces à conviction ou, à défaut d'un de ses représentants ou encore à défaut de deux témoins (art. 57 Code de procédure pénale).

* Le lieu :

La perquisition doit avoir lieu au domicile des personnes qui paraissent avoir participé aux faits ou détenir des pièces ou objets relatifs aux faits incriminés.

Lorsque la perquisition se déroule au domicile d'un professionnel tenu au secret professionnel, des garanties supplémentaires sont prises en raison de l'existence du secret.

  • Dans le cabinet ou au domicile d'un avocat, l'article 56-1 du Code de procédure pénale dispose que les perquisitions ne peuvent être effectuées que par un magistrat (procureur si flagrance ou juge d'instruction) et en présence du bâtonnier ou de son délégué. En outre, depuis la loi du 15 juin 2000, le bâtonnier peut s'opposer à ce qu'un document fasse l'objet d'une saisie s'il estime celle-ci irrégulière (par exemple si la correspondance traite de la défense pénale de la personne poursuivie). Le document litigieux est alors placé sous scellé fermé, un procès verbal est dressé mais n'est pas versé au dossier, et c'est le juge des libertés et de la détention qui est chargé de statuer sur cette contestation, dans un délai de cinq jours suivant réception des pièces. En outre, les circulaires d'application de la loi du 15 juin 2000 précisent que si l'avocat, chez qui la perquisition a eu lieu, a été mis en examen, son conseil désigné doit être également convoqué.

  • Dans le cabinet d'un notaire, d'un avoué, d'un huissier ou d'un médecin, les perquisitions doivent être effectuées par un magistrat en présence d'une personne responsable de l'organisation professionnelle ou de l'ordre dont relève l'intéressé (art. 56-3 Code de procédure pénale).

  • Dans les locaux d'une entreprise de presse ou de communication audiovisuelle, les perquisitions doivent aussi être diligentées par un magistrat (art. 56-2 Code de procédure pénale) qui doit veiller à ce que les opérations ne portent atteinte au libre exercice du métier de journaliste et ne constituent pas un obstacle injustifié à la diffusion de l'information.

La loi du 4 janvier 2010 sur le secret des sources journalistiques a étendu le régime des perquisitions contrôlées par un magistrat au domicile des journalistes et à leur véhicule.

La protection est étendue aux locaux des agences de presse, au domicile des journalistes, lorsque les investigations réalisées sont liées à leur activité professionnelle, ainsi qu'aux véhicules professionnels.

Comme pour les avocats, la loi de 2010 a instauré une procédure d'opposition à la saisie de documents lors de la perquisition : le journaliste – ou, en son absence, son représentant – peut s'opposer à la saisie d'un document qu'il jugerait irrégulière. Dans ce cas, le document litigieux doit être placé sous scellé fermé et transmis sans délai au juge des libertés et de la détention qui, après avoir entendu le magistrat et le journaliste, décide soit la restitution immédiate du document s'il estime qu'il n'y a pas lieu à le saisir – ce qui implique également la destruction du procès-verbal des opérations et la cancellation de toute référence à ce document dans le dossier de la procédure –, soit le versement du scellé et du procès-verbal au dossier de la procédure.

Au total, les règles applicables aux journalistes deviennent d'une certaine manière plus favorables que celles qui s'appliquent aux avocats : le journaliste peut, contrairement à l'avocat, s'opposer, durant la perquisition, à la saisie d'un document qui permettrait d'identifier l'une de ses sources. Il appartient ensuite au juge des libertés et de la détention de se prononcer sur la nécessité de saisir ce document et de le verser au dossier de procédure.

b. La condition de forme :

Un procès verbal doit être établi et signé par l'officier de police, rédacteur de l'acte. Ce procès-verbal n'a pas nécessairement à être signé par la personne présente mais en cas d'assistance par les deux témoins, ceux-ci devront signer le procès-verbal.

2. La perquisition au cours de l'enquête préliminaire de police (absence de flagrance et d'instruction)

La personne à l'encontre de qui la perquisition est diligentée est présumée innocente et la police est en simple enquête préliminaire ; une telle perquisition ne peut donc pas être coercitive. Plusieurs conditions sont requises :

* la personne concernée doit donner son assentiment exprès :

Aux termes de l'article 76 du Code de procédure pénale, cette perquisition suppose l'accord du maître des lieux qui en est l'objet, lequel doit la délivrer sous la forme d'une autorisation écrite et expresse, à défaut de laquelle la perquisition serait nulle pour excès de pou¬voir. Des exceptions sont prévues par la loi du 9 mars 2004 (art. 76 al 4 du code de procédure pénale) : la perquisition est possible sans l'assentiment de la personne chez qui elle a lieu sur autorisation du juge des libertés et de la détention pour les nécessités de l'enquête, relativement à un délit puni d'une peine d'emprisonnement égale ou supérieure à 5 ans.

* les horaires de la perquisition :

La perquisition doit être faite aux heures légales et par conséquent ne peut avoir lieu de nuit sauf en cas :

  • de réclamation ou d'acceptation du maître des lieux (art. 59 et 76 Code de procédure pénale) ;

  • d'autorisation du juge des libertés et de la détention pour les infractions en matière de criminalité organisée prévues par l'article 706-73 du Code de procédure pénale mais seulement lorsque ces opérations ne concernent pas des locaux d'habitation (art. 706-90 Code de procédure pénale) ;

  • de recherche et constatation des infractions de trafic de stupéfiants.

  1. Cass. Crim. : Chambre criminelle de la Cour de cassation

  2. Date29/03/1994
    JuridictionChambre criminelle de la Cour de cassation
    Pourvoi93-84995
    TypeNationale
    Résumé

    Toute perquisition implique la recherche, à l'intérieur d'un lieu normalement clos, notamment au domicile d'un particulier, d'indices permettant d'établir l'existence d'une infraction ou d'en déterminer l'auteur.

    Mots clésInstruction, Perquisition, Définition
    PublicationBulletin criminel 1994 N° 118 p. 259
    Textes Appliqués

    Articles 56, 57, 96, 171, 173 du Code de procédure pénale.

    Consultez le texte
  3. Bull. Crim. : Bulletin des arrêts de la Cour de cassation (Chambre criminelle)

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