3) Les courriers électroniques
Le problème qui se pose est de savoir si l'employeur peut lire le courrier électronique de son salarié.
En raison de l'application horizontale des droits fondamentaux, la protection des droits fondamentaux de la convention européenne des droits de l'homme s'étend aux personnes de droit privé.
Ainsi dans les litiges opposant les salariés –licenciés- et les employeurs, s'est posée la question de savoir si le salarié avait une vie privée sur son lieu de travail ?
La jurisprudence française y a répondu par l'affirmative dès 2001, dans l'arrêt Nikon du 2 octobre 2001[1] « le salarié a droit au respect de l'intimité de sa vie privée, même au temps et au lieu de travail, que celle-ci implique en particulier le secret des correspondances ; que l'employeur ne peut dès lors sans violation de cette liberté fondamentale prendre connaissance des messages personnels émis par le salarié et reçus par lui grâce à un outil informatique mis à sa disposition pour son travail et ceci même au cas où l'employeur aurait interdit une utilisation non professionnelle de l'ordinateur »
, ainsi il bénéficie du secret des correspondances et l'employeur ne peut donc regarder les courriels personnels de son salarié.
Cette jurisprudence a été confirmée par la Cour de cassation dans un arrêt de sa chambre sociale du 12 octobre 2004[2] en étendant la protection de la vie privée du salarié et de ses correspondances même au cas où l'employeur aurait interdit une utilisation non professionnelle de l'ordinateur (Bull. 2004, V, N° 245, p. 226).
Par la suite, la Cour de cassation a mis une limite à l'intimité de la vie privée du salarié sur son lieu de travail lorsque le salarié n'identifie pas les documents et fichiers comme personnels : « sauf risque ou événement particulier, l'employeur ne peut ouvrir les fichiers identifiés par le salarié comme personnels contenus sur le disque dur de l'ordinateur mis à sa disposition qu'en présence de ce dernier ou celui-ci dûment appelé »
(Cass. soc.[4] 17/05/2005 Affaire Cathnet science[3]).
Cette position a été complétée par deux arrêts de la chambre sociale de la Cour de cassation en date du 18 octobre 2006[5] : « les documents, dossiers et fichiers détenus par le salarié dans le bureau ou sur l'ordinateur de l'entreprise mis à sa disposition, sauf lorsqu'il les identifie comme étant personnels, sont présumés avoir un caractère professionnel, de sorte que l'employeur peut y avoir accès hors sa présence »
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La Cour de cassation a confirmé sa position dans l'affaire dite du corbeau, (Cass. soc. 17/06/09, n°08-40274)[6] en décidant que : « sauf risque ou événement particulier, l'employeur ne peut ouvrir les messages identifiés par le salarié comme personnels contenus sur le disque dure de l'ordinateur mis à sa disposition qu'en présence de ce dernier ou celui-ci dument appelé »
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Il y a donc une présomption de dossier professionnel ; pour qu'un dossier ou courriel soit considéré comme personnel, il faut qu'il n'y ait aucun doute sur son caractère personnel, il faut donc une mention, un titre « personnel » ou « privé ».