Cette longue période n'est pas homogène sur le plan politique, tant elle a vu se succéder des régimes différents qui se sont opposés et se sont constitués en réaction aux régimes précédents. Au cours de cette période, la France a fait l'expérience de deux types de monarchies, d'une république et d'un régime impérial. Ces divers régimes ont parfois cherché à imiter, dans des contextes nécessairement différents, les régimes qui pouvaient leur servir de modèles, qu'il s'agisse des régimes révolutionnaires ou ceux du Consulat et de l'Empire. Mais cette période est marquée par la recherche d'un régime d'équilibre des pouvoirs qui ne sera atteint qu'en 1870 avec les éléments du régime parlementaire. Mais une nouvelle guerre retarda de quelques années l'installation de ce régime.
La chute de Napoléon Bonaparte, due la défaite militaire, a été proclamée par le Sénat qui constata sa déchéance et proclama roi Louis XVIII, le frère de Louis XVI. Le Sénat, de façon peu glorieuse, en profita pour élaborer, le 6 avril 1814, une Constitution dite « sénatoriale » qui sauvegardait certains acquis du régime ancien, ainsi que les privilèges des sénateurs, et le retour de la monarchie, présentée comme étant librement acceptée par le peuple français. Revenu de son exil anglais, dans les « fourgons des armées étrangères » selon certains, Louis XVIII, qui prenait le titre de « roi de France et de Navarre » révéla ses intentions dans la Déclaration de Saint Ouen du 2 mai 1814 dans laquelle il annonçait les bases d'un nouveau régime, car il ne se considérait pas lié par le projet du Sénat : gouvernement représentatif, bicaméralisme, maintien des biens nationaux et respect des libertés publiques. Il s'agissait de réaliser une synthèse délicate entre les valeurs de la Révolution, sur lesquelles il n'était plus possible de revenir, et les principes et le vocabulaire de l'Ancien Régime. C'est sur ces bases que fut rédigée la Charte du 4 juin 1814. L'application de celle-ci fut interrompue par le retour triomphal de Napoléon Bonaparte depuis l'île d'Elbe et l'épisode des Cent jours, entre mars et juin 1815 : la rédaction par Benjamin Constant de l'acte additionnel aux Constitutions de l'Empire du 22 avril 1815, marque une tentative désespérée d'instaurer un régime impérial moins autoritaire. La défaite de Waterloo en juin 1815 sonna le glas de ces espoirs et la seconde abdication de Napoléon I, après celle de 1814.
Cet épisode napoléonien constitue une parenthèse au sein des monarchies constitutionnelles inaugurées en 1814 et qui s'achèvent en 1848. La Monarchie de juillet s'achève par une nouvelle révolution, essentiellement parisienne, qui donne naissance à la Seconde république, ainsi dénommée car les hommes au pouvoir pensaient que la République était définitivement installée. Elle ne fut cependant que de courte durée (1848-1851), car le coup d'Etat de Louis- Napoléon Bonaparte, neveu du premier empereur, a donné naissance à un nouveau régime impérial (1851-1870).
Section 1. Les Chartes constitutionnelles (1814-1848)
§1. La Restauration (1814-1830)
est précédée de principes généraux intitulés « Droit public des Français » qui reprennent les apports principaux de la Déclaration de 1789, mais dans un cadre d'une monarchie renforcée. Le compromis illustre l'impossibilité de rayer vingt-cinq ans d'histoire : sont ainsi maintenus l'égalité des Français devant la loi, l'égale admission aux emplois civils et militaires, la liberté de religion, mais le catholicisme est proclamée religion d'Etat, la liberté d'opinion, et le maintien des propriétés acquises depuis la Révolution.
Louis XVIII
La Charte, octroyée par Louis XVIII, et non la Constitution, terme qui évoquait trop la période révolutionnaire, consacre une place prépondérante au Roi, dont la personne est inviolable et sacrée, autour duquel s'organisent les autres pouvoirs. C'est à lui qu'appartient la puissance exécutive, et il est le chef suprême de l'Etat. Il propose la loi, la sanctionne et aucun amendement n'est recevable sans son accord. Il désigne les ministres, mais ils sont « responsables » pénalement devant les assemblées et qui peuvent être membres d'une des deux assemblées. Il dispose du droit de dissolution de la chambre basse mais il doit provoquer de nouvelles élections.
Le pouvoir législatif est partagé entre deux assemblées, la chambre des pairs nommés à vie ou de façon héréditaire par le roi, et la chambre des députés des départements élus pour cinq ans par un suffrage tellement censitaire qu'il ne permet qu'à 110 000 hommes d'être électeurs sur 30 millions d'habitants.
C'est la pratique qui va faire émerger le régime parlementaire. Les ministres vont considérer qu'ils ne peuvent se maintenir en fonctions lorsqu'ils n'ont plus la confiance des chambres, même s'ils ne sont pas juridiquement obligés de le faire. Les ministres prennent aussi l'habitude d'être dirigés par l'un d'entre eux, qui est un véritable chef du gouvernement et la solidarité gouvernementale apparaît.
Charles X
Louis XVIII est remplacé par Charles X , son frère, en 1824, qui se fait sacrer à Reims afin de « renouer avec la chaîne des temps ». La vie politique est marquée par la volonté du roi d'assumer tous ses pouvoirs et une opposition entre le monarque et la Chambre des députés qui estime que le gouvernement doit avoir sa confiance. La dissolution de la Chambre en 1830 va entraîner la chute du régime.
§2. La Monarchie de Juillet (1830-1848)
Elle naît d’une révolution (les Trois Glorieuses, qui sont des journées insurrectionnelles de juillet 1830) qui chasse Charles X, à la suite de la publication de quatre ordonnances royales particulièrement réactionnaires notamment sur la liberté de la presse et la restriction de la loi électorale qui étaient une réponse aux élections qui avaient suivi la dissolution. Le roi pouvait en effet prendre sous cette forme toutes les « mesures nécessaires pour l'exécution des lois et la sûreté de l'Etat », à côté des lois, par une sorte de pouvoir normatif concurrent (art. 14 de la Charte de 1814). Les libéraux qui s'emparent du pouvoir appellent sur le trône Louis-Philippe d'Orléans, héritier de la branche cadette des Bourbons.
Louis-Philippe 1er
Une nouvelle Charte est rédigée, qui porte la date du 14 août 1830, qui reprend le texte précédent de 1814 tout en supprimant certains de ses aspects les plus archaïques :
- le roi n'est plus de France mais des Français,
- la religion catholique n'est plus que celle de « la majorité des Français »
- et la France « reprend ses couleurs », c'est-à-dire que la monarchie adopte la cocarde tricolore, selon la formule de l'article 67 de la Charte.