Commentaire
Dans la Nuit du 4 août 1789 les députés de l'Assemblée nationale constituante proclament l'abolition des droits féodaux. Il s'agit pour eux d'apporter une réponse aux révoltes dans les campagnes. Cette séance parlementaire marque la disparition des distinctions en ordres et des particularismes locaux, l'instauration de l'égalité de tous les citoyens devant la Loi. Elle sera reprise ensuite dans la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Cette abolition sera appliquée toutefois avec mesure : sont abolis sans indemnité, les seuls les droits féodaux pesant sur les personnes (par exemps la corvée obligatoire ou la dîme ecclésiastique). Mais il n'est nullement envisagé de rompre avec la monarchie. Pour les révolutionnaires de 1789, il a toujours été question de limiter la monarchie, et non de la supprimer. Preuve en est que parmi les vœux exprimés dans les cahiers de doléances de 1788, on trouvait le maintien de la monarchie.
C'est par un coup d'Etat juridique que les Etats Généraux réunis en 1789 vont se transformer en Assemblée nationale qui se décrète également constituante. En effet, comme vu précédemment, les Etats Généraux sont convoqués par le monarque et se réunissent par ordre. Au contraire, l'Assemblée nationale constitue une assemblée unique, représentant la nation dans son ensemble, sur le principe un représentant une voix. Le passage des Etats Généraux à l'Assemblée nationale se fait au moment où Sieyès et le Tiers Etat invitent le 17 juin 1789 les députés des deux autres ordres à les rejoindre. Et à l'occasion du Serment prononcé dans la Salle du Jeu de paume, elle se déclare constituante. Le 27 juin, après avoir essayé de s'y opposer, le roi accepte la fusion des trois ordres et reconnaît l'Assemblée nationale constituante.
Si la Révolution a posé le principe de la souveraineté, elle l'a transférée du monarque à la nation, et non au peuple. Ainsi, les deux représentants de la nation sont le Corps législatif qui est élu, et le roi qui ne l'est pas. De même, et a contrario, les administrateurs sont élus alors qu'ils ne sont nullement des représentants. En conséquence, 1789 consacre les principes de la représentation et de la souveraineté de la nation. Conséquences, le suffrage n'est pas (encore) un droit mais est une fonction. Et l'on distingue les citoyens actifs et les citoyens passifs, même si les premiers comme les seconds disposent de tous les droits proclamés par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. L'électorat-fonction repose sur le cens.
On entend par «Révolution française », l'entrée dans une nouvelle période juridique, constitutionnelle et institutionnelle. Elle est une période de bouleversements, d'expérimentations, de flux et de reflux. Si l'adoption de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et celle de la première constitution écrite en 1791 sont des évènements marquants de la Révolution, ils n'en marquent pas pour autant la conclusion. La Révolution -ou période révolutionnaire- durera encore quelques années.