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Jurisprudence



Le Conseil constitutionnel a été saisi, le 24 décembre 1998, par MM Paul Girod, Nicolas About, Louis Althapé, Jean-Paul Amoudry, Philippe Arnaud, Jean Arthuis, Denis Badré, René Ballayer, Mme Janine Bardou, MM Michel Barnier, Bernard Barraux, Jean-Paul Bataille, Jacques Baudot, Georges Berchet, Jean Bernard, Daniel Bernardet, Roger Besse, Jacques Bimbenet, Jean Bizet, Paul Blanc, Maurice Blin, André Bohl, Christian Bonnet, James Bordas, Jean Boyer, Louis Boyer, Joël Bourdin, Gérard Braun, Dominique Braye, Michel Caldaguès, Robert Calmejane, Jean-Claude Carle, Gérard César, Jean Chérioux, Jean Clouet, Gérard Cornu, Charles-Henri de Cossé-Brissac, Jean-Patrick Courtois, Charles de Cuttoli, Xavier Darcos, Jean Delaneau, Jean-Paul Delevoye, Robert Del Picchia, Fernand Demilly, Marcel Deneux, Gérard Deriot, Charles Descours, Michel Doublet, Alain Dufaut, Xavier Dugoin, André Dulait, Ambroise Dupont, Jean-Léonce Dupont, Daniel Eckenspieller, Jean-Paul Emin, Jean-Paul Emorine, Michel Esneu, Hubert Falco, Jean Faure, André Ferrand, Hilaire Flandre, Jean-Pierre Fourcade, Bernard Fournier, Philippe François, Yves Fréville, Yann Gaillard, René Garrec, Jean-Claude Gaudin, Philippe de Gaulle, Patrice Gélard, Alain Gérard, Francis Giraud, Alain Gournac, Adrien Gouteyron, Louis Grillot, Georges Gruillot, Hubert Haenel, Mme Anne Heinis, MM Pierre Hérisson, Rémi Herment, Daniel Hoeffel, Jean Huchon, Jean-Paul Hugot, Jean-François Humbert, Claude Huriet, Roger Husson, Pierre Jarlier, Charles Jolibois, Bernard Joly, André Jourdain, Jean-Philippe Lachenaud, Lucien Lanier, Jacques Larché, Patrick Lassourd, René-Georges Laurin, Dominique Leclerc, Jacques Legendre, Serge Lepeltier, Jean-Louis Lorrain, Roland du Luart, Jacques Machet, Kléber Malécot, André Maman, Pierre Martin, Paul Masson, Serge Mathieu, Louis Mercier, Michel Mercier, Jean-Luc Miraux, Louis Moinard, Philippe Nachbar, Lucien Neuwirth, Mme Nelly Olin, MM Paul d'Ornano, Joseph Ostermann, Charles Pasqua, Michel Pelchat, Jean Pépin, Alain Peyrefitte, Guy Poirieux, Ladislas Poniatowski, Jean Puech, Jean-Pierre Raffarin, Henri de Raincourt, Charles Revet, Henri Revol, Henri de Richemont, Philippe Richert, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Josselin de Rohan, Jean-Pierre Schosteck, Michel Souplet, Louis Souvet, Martial Taugourdeau, Henri Torre, René Trégouët, François Trucy, Jacques Valade, André Vallet, Xavier de Villepin et Serge Vinçon, sénateurs, et par MM Philippe Douste-Blazy, Jean-Louis Debré, José Rossi, Pierre Albertini, Pierre-Christophe Baguet, Jacques Barrot, Dominique Baudis, Jean-Louis Bernard, Claude Birraux, Mmes Marie-Thérèse Boisseau, Christine Boutin, MM Loïc Bouvard, Jean Briane, Dominique Caillaud, René Couanau, Charles de Courson, Yves Coussain, Marc-Philippe Daubresse, Léonce Deprez, Renaud Donnedieu de Vabres, Jean-Pierre Foucher, Claude Gaillard, Germain Gengenwin, Gérard Grignon, Hubert Grimault, Pierre Hériaud, Mmes Anne-Marie Idrac, Bernadette Isaac-Sibille, MM Jean-Jacques Jégou, Christian Kert, Edouard Landrain, Jacques Le Nay, Jean Leonetti, François Léotard, Roger Lestas, Maurice Ligot, François Loos, Christian Martin, Pierre Méhaignerie, Mme Louise Moreau, MM Jean-Marie Morisset, Arthur Paecht, Dominique Paillé, Henri Plagnol, Jean-Luc Préel, Marc Reymann, Gilles de Robien, François Rochebloine, Rudy Salles, André Santini, François Sauvadet, Michel Voisin, Jean-Jacques Weber, Pierre-André Wiltzer, René André, André Angot, Mme Martine Aurillac,

MM Jean-Yves Besselat, Jean Besson, Henry Chabert, Jean-Marc Chavanne, Richard Cazenave, François Cornut-Gentille, Charles Cova, Arthur Dehaine, Patrick Delnatte, Nicolas Dupont-Aignan, Hervé Gaymard, Lucien Guichon, Gérard Hamel, Christian Jacob, Jacques Kossowski, Lionnel Luca, Gilbert Meyer, Charles Miossec, Renaud Muselier, Patrick Ollier, Serge Poignant, André Schneider, Bernard Schreiner, Frantz Taittinger, Michel Terrot, Jean Ueberschlag, Jean Valleix, François Vannson, Jean-Luc Warsmann, François d'Aubert, Jacques Blanc, Pierre Cardo, Pascal Clément, Francis Delattre, Franck Dhersin, Gilbert Gantier, Claude Goasguen, François Goulard et Guy Teissier, députés, dans les conditions prévues à l'article 61, alinéa 2, de la Constitution de la conformité à celle-ci de la loi relative au mode d'élection des conseillers régionaux et des conseillers à l'Assemblée de Corse et au fonctionnement des conseils régionaux ;



Le Conseil constitutionnel,

Vu la Constitution ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment le chapitre II du titre II de ladite ordonnance ;

Vu le code électoral ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu la décision du Conseil constitutionnel n° 82-146 DC du 18 novembre 1982 ;

Vu les observations du Gouvernement enregistrées le 8 janvier 1999 ;

Le rapporteur ayant été entendu ;



1. Considérant que les députés défèrent au Conseil constitutionnel la loi relative au mode d'élection des conseillers régionaux et des conseillers de l'Assemblée de Corse et au fonctionnement des conseils régionaux, et notamment les articles 3, 4, 13, 20, 22, 23 et 27 ; que les sénateurs contestent pour leur part les articles 3, 4, 13, 16, 17, 20, 21, 22, 23, 24 et 27 ;

- SUR LES SEUILS INSTITUES PAR LES ARTICLES 3 ET 4 :

2. Considérant qu'aux termes du quatrième alinéa de l'article L. 338 du code électoral, dans sa rédaction issue de l'article 3 de la loi déférée : "Les listes qui n'ont pas obtenu au moins 3 % des suffrages exprimés ne sont pas admises à la répartition des sièges" ; qu'aux termes du troisième alinéa de l'article L. 346 du même code, tel qu'il résulte de l'article 4 de la loi déférée : "Seules peuvent se présenter au second tour les listes ayant obtenu au premier tour un nombre de suffrages au moins égal à 5 % du total des suffrages exprimés. La composition de ces listes peut être modifiée pour comprendre des candidats ayant figuré au premier tour sur d'autres listes, sous réserve que celles-ci aient obtenu au premier tour au moins 3 % des suffrages exprimés et ne se présentent pas au second tour. En cas de modification de la composition d'une liste, le titre de la liste et l'ordre de présentation des candidats peuvent également être modifiés." ;

3. Considérant que, selon les députés requérants, ces seuils dénaturent l'objectif du législateur qui est d'éviter la dispersion des suffrages et l'absence de majorité stable ; qu'à cette fin, le projet de loi prévoyait des seuils de 10 % des suffrages exprimés pour qu'une liste puisse se présenter au second tour et de 5 % pour qu'elle puisse fusionner avec une autre ; que, "dans une représentation proportionnelle à deux tours, comportant un correctif majoritaire, la fixation de seuils suffisamment élevés, comparables à ceux du scrutin municipal, était indispensable pour répondre à l'objectif affiché" ; que ceux qui ont été retenus sont "incompatibles avec la nécessité d'un choix clair" ; que les dispositions contestées violeraient de ce fait l'"objectif constitutionnel de clarté" qui s'impose au législateur ;

4. Considérant, en premier lieu, que la Constitution ne confère pas au Conseil constitutionnel un pouvoir général d'appréciation et de décision identique à celui du Parlement ; qu'il ne lui appartient donc pas de rechercher si l'objectif que s'est assigné le législateur aurait pu être atteint par d'autres voies, dès lors que les modalités retenues par la loi ne sont pas, comme en l'espèce, manifestement inappropriées à l'objectif visé, qui est de favoriser la constitution d'une majorité dans les conseils régionaux tout en assurant une représentation des différentes composantes du corps électoral ;

5. Considérant, en second lieu, que les dispositions critiquées ont fixé sans ambiguïté les règles relatives au nouveau mode du scrutin régional ; que le législateur n'est pas resté, en les énonçant, en deçà de la compétence que lui confèrent les articles 34 et 72 de la Constitution s'agissant de la libre administration des collectivités territoriales ;

6. Considérant qu'il y a lieu, dès lors, de rejeter les griefs sus-énoncés ;

- SUR LES CONSEQUENCES TIREES DE L'AGE DES CANDIDATS PAR LES ARTICLES 3 et 16 :

7. Considérant qu'aux termes du troisième alinéa de l'article L. 338 du code électoral, dans sa rédaction issue de l'article 3 de la loi déférée : "Si aucune liste n'a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés au premier tour, il est procédé à un second tour. Il est attribué à la liste qui a obtenu le plus de voix un nombre de sièges égal au quart du nombre des sièges à pourvoir, arrondi à l'entier supérieur. En cas d'égalité de suffrages entre les listes arrivées en tête, ces sièges sont attribués à la liste dont les candidats ont la moyenne d'âge la moins élevée. Cette attribution opérée, les autres sièges sont répartis entre toutes les listes à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne, sous réserve de l'application du quatrième alinéa ci-après." ; qu'en vertu du sixième alinéa du même article : "Si plusieurs listes ont la même moyenne pour l'attribution du dernier siège, celui-ci revient à la liste qui a obtenu le plus grand nombre de suffrages. En cas d'égalité de suffrages, le siège est attribué au moins âgé des candidats susceptibles d'être proclamés élus." ; que l'article 16 applique la même priorité d'âge à l'élection de l'Assemblée de Corse ;

8. Considérant que, pour les sénateurs requérants, ces dispositions violeraient un principe fondamental reconnu par les lois de la République selon lequel, en cas d'égalité de suffrages, la "prime majoritaire" ou le dernier siège devrait bénéficier, respectivement, à la liste ayant la moyenne d'âge la plus élevée ou au plus âgé des candidats susceptibles d'être proclamés élus ;

9. Considérant que, en tout état de cause, la règle invoquée ne revêt pas une importance telle qu'elle puisse être regardée comme figurant au nombre des "principes fondamentaux reconnus par les lois de la République" mentionnés par le premier alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 ; que, par suite, le grief doit être rejeté ;

- SUR L'OBLIGATION D'ASSURER LA PARITE ENTRE CANDIDATS FEMININS ET MASCULINS ENONCEE PAR LES ARTICLES 4 ET 17 :

10. Considérant que le deuxième alinéa de l'article L. 346 du code électoral dans sa rédaction issue de l'article 4 de la loi déférée, dispose que : "Chaque liste assure la parité entre candidats féminins et masculins" ; que l'article 17 complète l'article L. 370 du même code afin d'étendre cette obligation aux élections à l'Assemblée de Corse ;

11. Considérant que les sénateurs requérants estiment ces dispositions contraires à l'article 3 de la Constitution, à l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, ainsi qu'à la chose jugée par le Conseil constitutionnel dans sa décision susvisée du 18 novembre 1982 ;

12. Considérant que, en l'état, et pour les motifs énoncés dans la décision susvisée du 18 novembre 1982, la qualité de citoyen ouvre le droit de vote et l'éligibilité dans des conditions identiques à tous ceux qui n'en sont exclus ni pour une raison d'âge, d'incapacité ou de nationalité, ni pour une raison tendant à préserver la liberté de l'électeur ou l'indépendance de l'élu, sans que puisse être opérée aucune distinction entre électeurs ou éligibles en raison de leur sexe ; que, par suite, les dispositions contestées doivent être déclarées contraires à la Constitution ;

- SUR LA MODIFICATION DE LA COMPOSITION DU COLLEGE ELECTORAL SENATORIAL APPORTEE PAR LES ARTICLES 20 ET 21 :

13. Considérant que l'article 20 prévoit que le collège électoral sénatorial comprendra, à la place des "conseillers régionaux élus dans le département" mentionnés par le 2° de l'article L. 280 du code électoral dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la loi déférée, "des conseillers régionaux et des conseillers de l'Assemblée de Corse désignés dans les conditions prévues par le titre III bis du présent livre" ; qu'il modifie à cet effet les termes de l'article L. 280 ; que l'article 21 modifie pour sa part le titre III bis du livre deuxième du code électoral, tant pour les conseils régionaux que pour l'Assemblée de Corse, afin de fixer les règles de désignation des conseillers appelés à siéger dans les collèges électoraux sénatoriaux réunis dans chaque département ;

14. Considérant que, selon les sénateurs requérants, en permettant la participation à l'élection des sénateurs de conseillers régionaux qui ne seraient pas élus dans le département dans lequel se déroule l'élection sénatoriale, mais dans un autre département de la région, les articles 20 et 21 contreviendraient à la règle de valeur organique fixée par l'article L.O. 274 du code électoral selon laquelle les sénateurs sont élus "dans les départements" ;

15. Considérant que l'article L.O. 274 du code électoral, aux termes duquel : "Le nombre de sénateurs élus dans les départements est de 304", ne fait pas obstacle à ce que les dispositions législatives relatives au régime électoral du Sénat organisent la participation au collège électoral sénatorial de délégués de collectivités territoriales autres que ceux élus dans le département ; que le grief doit être en conséquence écarté ;

- SUR LA PROCEDURE DE "VOTE BLOQUE" INSTITUEE PAR LE 2° DE L'ARTICLE 22 :

16. Considérant qu'aux termes de l'avant-dernier alinéa de l'article L. 4311-1 du code général des collectivités territoriales, introduit par le 2° de l'article 22 : "A l'issue de l'examen du budget primitif, le président du conseil régional peut soumettre à un vote d'ensemble du conseil régional le projet de budget initial, qu'il peut modifier après accord du bureau par un ou plusieurs des amendements soutenus ou adoptés au cours de la discussion. Cette procédure peut également s'appliquer à deux autres délibérations budgétaires relatives au même exercice hormis le compte administratif." ; qu'en vertu de l'article 27, la portée de l'article 22 est transitoire ;

17. Considérant que les deux requêtes estiment la procédure instituée par le 2° de l'article 22 contraire aux exigences constitutionnelles, et notamment au principe de libre administration des collectivités territoriales, en ce qu'elle aboutirait, selon les sénateurs requérants, à "un véritable dessaisissement de l'assemblée délibérante de son pouvoir de modifier, si elle le souhaite, les recettes ainsi que les crédits inscrits dans les chapitres ou les articles du projet de budget" ; que les sénateurs requérants soutiennent en outre que cette procédure, en permettant l'exécution d'un budget sans que les votes émis par l'organe délibérant au cours de la discussion aient été pris en compte, méconnaîtrait les articles 13 et 14 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ; que les députés requérants estiment au surplus que le législateur serait resté en deçà de sa compétence en ne précisant pas davantage les cas et conditions dans lesquels le président du conseil régional pourrait mettre en oeuvre les dispositions contestées ;

18. Considérant que l'article 14 de la Déclaration de 1789 n'implique pas de règles particulières d'adoption, par l'organe délibérant d'une collectivité territoriale, des dispositions financières et fiscales ; que si, en vertu de l'article 72 de la Constitution, "les collectivités territoriales s'administrent librement par des conseils élus", c'est "dans les conditions prévues par la loi" ;

19. Considérant qu'il était loisible au législateur, afin de prendre en compte les difficultés actuelles de fonctionnement des conseils régionaux, d'instituer la procédure d'adoption du budget prévue à l'article 22 ; que, dès lors que le conseil régional est libre de rejeter le texte qui lui est soumis en application dudit article, le législateur n'a ni privé l'organe délibérant de la région d'attributions effectives, ni méconnu le principe du consentement des citoyens, par leurs représentants, aux charges publiques énoncé par l'article 14 de la Déclaration de 1789, ni contrevenu à celui de l'égale répartition de la contribution commune affirmé à l'article 13 du même texte ; qu'enfin le grief tiré de ce que le 2° de l'article 22 serait entaché d'une incompétence négative manque en fait ;

20. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à mettre en cause la constitutionnalité du 2° de l'article 22 ;

- SUR L'EXTENSION DE LA PROCEDURE INSTITUEE PAR L'ARTICLE L. 4311-1-1 DU CODE GENERAL DES COLLECTIVITES TERRITORIALES PREVUE PAR L'ARTICLE 23 :

21. Considérant que l'article 3 de la loi n° 98-135 du 7 mars 1998, relative au fonctionnement des conseils régionaux, a introduit dans le code général des collectivités territoriales un article L. 4311-1-1 ; que celui-ci prévoit que, si le budget n'a pas été adopté au 20 mars de l'exercice auquel il s'applique, ou au 30 avril de l'année de renouvellement des conseils régionaux, le président du conseil régional présente dans un délai de dix jours à compter de cette date ou du vote de rejet, si celui-ci est antérieur à cette date, un nouveau projet, intégrant, le cas échéant, un ou plusieurs amendements présentés lors de la discussion ; que ce projet de budget est réputé adopté, sauf si une motion de renvoi est votée par la majorité absolue des membres du conseil régional, la liste des signataires figurant sur la motion de renvoi ;

22. Considérant que l'article 23 de la loi déférée, lequel, en vertu de l'article 27, n'a qu'une portée transitoire, étend le champ d'application de cette procédure aux délibérations fixant le taux des taxes locales et à deux autres délibérations budgétaires, faisant l'objet d'un vote de rejet, hormis le compte administratif ; que, s'agissant du budget primitif et de la fixation du taux des taxes locales, l'article 23 prévoit en outre la mise en jeu de la responsabilité du président du conseil régional ; que de nouvelles précisions sont apportées quant aux conditions de mise en oeuvre de la procédure instituée par l'article L. 4311-1-1, notamment pour ce qui est des délais ;

23. Considérant que les deux requêtes adressent à l'article 23 les mêmes critiques qu'à l'article 22 ; qu'il y a lieu, dès lors, de rejeter leurs griefs pour les motifs déjà exposés à propos de l'article 22 ;

- SUR L'ARTICLE 24 :

24. Considérant que l'article 24 de la loi déférée complète l'article L. 4133-4 du code général des collectivités territoriales par les deux alinéas suivants :

"Les séances de la commission permanente sont publiques.

Néanmoins sur la demande de cinq membres ou du président du conseil régional, la commission peut décider, sans débat, à la majorité absolue des membres présents ou représentés, qu'elle se réunit à huis clos" ;

25. Considérant que, pour les sénateurs requérants, le législateur a ainsi entravé la libre administration des collectivités territoriales ; qu'il n'appartiendrait, selon eux, qu'à chaque conseil régional "lorsqu'il établit son règlement intérieur dans le mois qui suit son renouvellement, de décider s'il entend que les séances de sa commission permanente soient publiques ou non" ;

26. Considérant qu'en imposant aux débats de la commission permanente le principe de la publicité, plutôt que de laisser au règlement intérieur du conseil régional le soin de déterminer cette règle de fonctionnement, le législateur a restreint la libre administration d'une collectivité territoriale au point de méconnaître les dispositions de l'article 72 de la Constitution ; qu'il y a lieu, par suite, de déclarer l'article 24 non conforme à la Constitution ;

- SUR LES MODALITES D'ENTREE EN VIGUEUR DE LA LOI PREVUES PAR LES ARTICLES 13, 20 ET 27 :

27. Considérant que les articles 13 et 20 modifient respectivement les articles L. 363 et L. 280 du code électoral ; que, dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la loi déférée, l'article L. 280 prévoit que le collège électoral sénatorial se compose "2° Des conseillers régionaux élus dans le département" et l'article L. 363 qu'"en cas d'annulation de l'ensemble des opérations électorales dans un département, il est procédé à de nouvelles élections dans ce département dans un délai de trois mois." ; que, dans leur rédaction issue de la loi déférée, l'article L. 280 prévoit que le collège électoral sénatorial se compose "2° Des conseillers régionaux et des conseillers de l'Assemblée de Corse désignés dans les conditions prévues par le titre III bis du présent livre" et l'article L. 363 qu'"en cas d'annulation de l'ensemble des opérations électorales dans une région, il est procédé à de nouvelles élections dans cette région dans un délai de trois mois" ;

28. Considérant que les députés et sénateurs requérants estiment que, dans le silence des dispositions finales de la loi, les articles 13 et 20 sont d'application immédiate ; qu'ils en déduisent qu'en cas d'annulation des opérations électorales de 1998 dans un département, celui-ci serait privé de représentation au conseil régional jusqu'au prochain renouvellement général des conseils régionaux, et que les conseillers régionaux élus en 1998 dans les départements dans lesquels se dérouleront les élections sénatoriales de 2001 ne pourraient pas participer à ces élections ; qu'ils soutiennent que les situations ainsi créées sont contraires aux principes d'universalité du suffrage et d'égalité devant le suffrage ; qu'ils font par ailleurs valoir qu'en cas de dissolution d'un conseil régional avant le prochain renouvellement général des conseils régionaux, coexisteraient des conseils régionaux élus selon deux modes de scrutin différents, ce qui porterait selon eux atteinte au principe d'égalité ; qu'enfin, selon les deux requêtes, les dispositions finales de la loi, faute d'avoir réglé ces difficultés, seraient entachées d'incompétence négative ;

29. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte implicitement mais nécessairement de la loi que les articles L. 280 et L. 363, ainsi que les autres dispositions du code électoral, sont applicables, dans leur rédaction antérieure à la publication de la loi déférée, tant qu'il n'a pas été procédé au renouvellement d'un conseil régional ; qu'ainsi, manquent en fait les griefs tirés de ce qu'en cas d'annulation des opérations électorales de 1998 dans un département, celui-ci se verrait privé de représentation au conseil régional et de ce que, dans certains départements, les conseillers régionaux ne pourraient participer aux élections sénatoriales de 2001 ;

30. Considérant, en deuxième lieu, que, si la dissolution d'un conseil régional était prononcée, en application de l'article L. 4132-3 du code général des collectivités territoriales, avant le prochain renouvellement général des conseils régionaux, l'élection du conseil régional consécutive à cette dissolution se ferait selon le nouveau mode de scrutin ; que la coexistence temporaire de conseils régionaux élus selon des modes de scrutin différents n'est pas contraire au principe d'égalité dès lors qu'elle résulte de modalités d'entrée en vigueur de la loi fondées, comme en l'espèce, sur des critères objectifs et rationnels ; que le grief invoqué doit ainsi être rejeté ;

31. Considérant, enfin, qu'il résulte de ce qui précède que les modalités d'entrée en vigueur de la loi déférée ne comportent pas de lacune ; que le grief tiré d'une méconnaissance par le législateur de l'étendue de sa compétence doit, dès lors, être rejeté ;

32. Considérant qu'il n'y a lieu, pour le Conseil constitutionnel, de soulever d'office aucune question de conformité à la Constitution ;



Décide :

Article premier :

Le troisième alinéa de l'article 4, l'article 17 et l'article 24 sont déclarés contraires à la Constitution.

Article 2 :

Les autres dispositions contestées sont déclarées conformes à la Constitution.

Article 3 :

La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 14 janvier 1999, où siégeaient : MM Roland DUMAS, président, Georges ABADIE, Michel AMELLER, Jean-Claude COLLIARD, Yves GUÉNA, Alain LANCELOT, Mme Noëlle LENOIR, M Pierre MAZEAUD et Mme Simone VEIL.

Le président,

Roland DUMAS