Commentaire
Si la IIIème République n'a ni déclaration des droits, ni préambule, elle s'est pourtant attachée à adopter de « grandes lois » sur des libertés et droits fondamentaux qui aujourd'hui encore, fondent en partie notre Etat de droit : juridiction administrative (1872), liberté de la presse (1881), droit syndical (1884), liberté d'association (1901), séparation des églises et de l'Etat (1905), libertés locales (1871 pour les départements, 1884 pour les communes), etc.
La IIIème République définit la loi, comme étant l'œuvre du Parlement. La proposition est donc exacte, mais largement incomplète, et cela pour deux raisons. D'une part, le Président de la République dispose d'un pouvoir réglementaire d'exécution de la loi existante (art. 3 LC 25 février 1875 : il assure l'exécution des lois). Ces actes de l'exécutif restent cependant des actes de nature réglementaire. D'autre part, la pratique va aller au-delà de ces actes réglementaires d'application : devant la paralysie des chambres à faire la loi pendant et après le premier conflit mondial, le parlement a pris l'habitude d'autoriser l'exécutif à édicter des règlements à sa place, d'où l'apparition des « décrets-lois ». Le législateur fixe à l'avance le contenu des décrets-lois et pour un temps déterminé. Une fois élaborés par le gouvernement, ces décrets-lois devaient être soumis à la ratification du parlement. Par cette ratification, ces actes de nature administrative devenaient législatifs. Cette technique pallia si bien la défaillance du régime, qu'elle devint à cette époque le mode habituel d'élaboration de la législation.
La « crise du 16 mai » change le régime en profondeur : effacement du chef de l'Etat, désuétude du droit de dissolution, ce qui entraîne la toute puissance des assemblées. Par ailleurs, les Lois constitutionnelles ne dissocient pas pouvoir constituant et pouvoirs constitués parlementaires ; la loi qui ne connaît pas de limite, est l'œuvre du Parlement. La combinaison de tous ces éléments contribue au glissement de la souveraineté : la souveraineté devient parlementaire.