Introduction
Le mot même de procès politique renvoie bien évidemment à une tradition que l’on peut penser éloignée de la justice. L’image, parfois authentique, parfois fantasmée, de la justice aveugle pesant avec objectivité le pour et le contre de ses décisions est sans doute illusoire dans bien des cas, mais le mythe même ainsi représenté demeure, pour le meilleur ou le pire, le fondement de notre vision d’une cour et d’un procès, la base morale sur laquelle tout est censé, normalement, se jouer.
L’ajout du mot politique est bien évidemment capital car il crée une contradiction qui met à bas ce fondement, ou cette illusion si l’on prend un point de vue plus cynique.
Df.Un procès politique est, par définition, une opération dénuée d’objectivité, d’équilibre, nécessairement biaisée par des critères idéologiques. Techniquement, un procès politique peut être décrit comme un procès vidé du concept de justice même, ce qui rend son existence, et sa représentation cinématographique, fascinante.
Car que reste-t-il quand le principal, la nature même de ce qui devrait être représenté (la loi, l’indépendance, l’impartialité) n’est même plus envisagé ? Il reste des corps, des gestes, les rites de la cour, les formes de la loi, l’enveloppe vidée donc de son contenu.
C’est cette théâtralisation de gestes devenus essentiels, car vidés de tout le reste, que nous allons ici tenter de décrire, en voyant comment les films qui ont évoqué les procès politiques ont, précisément, exposé une forme d’exaltation scrupuleuse des apparences de la justice, comme si c’était un moyen de la faire surgir là où elle ne pouvait exister.
C’est ce système que nous nous proposons ici de décrire, à travers un ensemble de films fort disparates, que ce soit par leurs nationalités (France, États-Unis, Afrique, Italie, Allemagne), l’époque de leur tournage, ou même leurs orientations idéologiques.
Rq.Tous ont néanmoins un point commun : ils ont voulu filmer la loi sans justice, et ont souvent fait surgir des similitudes plus troublantes encore par leur disparité.