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3.2 Maîtriser les échanges professionnels et les services dématérialisés


1. Notaires



En raison de la mise en place de l’acte authentique électronique dès 2008, les notaires ont très tôt développé des outils numériques pour faciliter l’établissement, la signature et l’archivage électronique.

Cette réflexion prend la forme aujourd’hui d’une laquelle énonce les règles que doivent respecter les prestataires de services à destination des notaires, de leurs clients et de leur partenaires : non commercialisation des données ; information claire, loyale et transparente ; sécurité et confidentialité ; réversibilité des données.

Les notaires ont à leur disposition de nombreux outils adaptés à leur besoin :
  • Télé@ctes : permet d’effectuer par voie électronique des dépôts d’actes auprès des services de publicité foncière (actes de vente, actes constituant une servitude, actes portant convention de rechargement de l'hypothèque conventionnelle) ;
  • PACSEN : registre dématérialisé des Pacs notarié ;
  • PERVAL : base de données d’estimations immobilières ;
  • FCDDV : fichier central des dernières volontés.

L’acte authentique électronique (AAE) a été rendu possible par un décret n° du 10 août 2005 qui a modifié le décret n° 71-941 du 26 novembre 1971 relatif aux actes établis par les notaires (art. 16 à 20-1) lequel prévoit :
  • l’utilisation un système de traitement et de transmission de l'information agréé par le Conseil supérieur du notariat et garantissant l'intégrité et la confidentialité du contenu de l'acte, au moyen de systèmes intéropérables (art. 16) ;
  • l’utilisation d’un procédé de signature électronique qualifiée au moyen d’une clé Réal qui assurera l’identification de celui qui appose sa signature (art. 17) ;
  • la mise en place d’un registre centralisé de ces actes : le Minutier Central Electronique des Notaires de France (MICEN) pour garantir l’intégrité et la lisibilité des actes.

L’AAE à distance s’est développé depuis 2018 pour permettre à une partie d’être présente dans l’étude de son notaire et de participer à la présentation de l’acte par visioconférence par le notaire instrumentaire (art. 20). A titre exceptionnel pendant la crise sanitaire, le notaire instrumentaire a pu établir un acte notarié sur support électronique lorsqu'une ou toutes les parties ou toute autre personne concourant à l'acte ne sont ni présentes ni représentées (décret n° du 3 avril 2020).

La procuration notariée à distance (décret n° du 20 nov. 2020), lorsqu'une ou les parties à cet acte ne sont pas présentes devant lui permet notamment à une partie de participer à l’établissement d’un acte notarié à partir de n’importe quel endroit au moyen d’un système de visioconférence.

Les sociétés privées identifiées par la chambre des notaires comme proposant une signature électronique qualifiée sont notamment : DocuSign, CertEurope, ChamberSgn, UniverSign, YouSign

Le 117ème congrès des notaires (Le numérique, l'Homme et le droit - Accompagner et sécuriser la révolution digitale, sept. 2021) a été l’occasion pour la profession de formuler des propositions notamment la création d’un acte électronique authentique augmenté (avec des contenus numériques complexes).

2. Commissaires de justice



Les huissiers de justice, qui fusionnent au 1er juillet 2022 avec les commissaires priseurs pour former la profession de commissaire de justice, ont perçu assez tôt l’intérêt de la dématérialisation de certaines de leurs missions. Habilités à la même période que les notaires (décret n° du 10 août 2005) à établir des actes électroniques, ils ont élaboré des outils pour faciliter la communication de ces actes, notamment le Réseau Privé Sécurisé des Huissiers (RPSH) qui leur permet de signifier des actes par voie électronique :
  • le destinataire de l’acte doit d’abord consentir à cette modalité en justifiant de son identité. Le consentement porte sur des actes dont la nature est précisée pour une durée donnée (art. 73-1 du décret n° du 29 février 1956) ;
  • le commissaire de justice peut ensuite mettre l’acte à la disposition du destinataire dans un coffre-fort électronique placé sous la responsabilité de la chambre nationale.

Plus récemment, ils ont développé divers services dématérialisés notamment :
  • medicys.fr : plateforme de médiation de la consommation ;
  • filecys.fr : plateforme de dépôt de fichiers ;
  • credicys.fr : plateforme de recouvrement à l’amiable des factures et des créances impayées.


Focus sur le procès verbal de constat sur internet

Conformément à son statut, un huissier de justice peut, « commis par justice ou à la requête de particuliers, effectuer des constatations purement matérielles, exclusives de tout avis sur les conséquences de fait ou de droit qui peuvent en résulter » (ord. n° du 2 nov. 1945, art. 1er).

Lorsque le constat est réalisé pour des faits commis à partir d'un service de communication en ligne, la jurisprudence exige le respect de règles techniques () ; reprises dans la norme AFNOR NF Z 67-147, sept. 2010) :
  • l'huissier doit décrire précisément le matériel utilisé (système d'exploitation, navigateur) car le système peut interférer sur la page web consultée ;
  • l'huissier doit mentionner l'adresse IP qu'il utilise pour la connexion pour s'assurer qu'il s'est connecté au moment indiqué ;
  • l'huissier doit se connecter directement sur internet sans serveur intermédiaire qui fausserait le contenu du site visité ;
  • l'huissier doit effacer, avant de procéder au constat tous les caches, les fichiers temporaires et les formulaires qui fausseraient également le contenu du site visité ;
  • l'huissier doit vérifier que l'horodatage de l'ordinateur correspond à la réalité au moment du constat.

3. Avocats



Les avocats tirent également profit de la dématérialisation de certaines de leurs activités notamment dans la communication entre eux, avec les juridictions et avec les experts judiciaires :
  • RPVA : le Réseau Privé Virtuel des Avocats permet aux avocats de communiquer par voie électronique pour l’envoi de leurs conclusions et de leurs pièces à leurs confrères et aux juridictions judiciaires ;
  • Télérecours : la plateforme Télérecours permet de communiquer par voie électronique des requêtes, des mémoires et des actes de procédure entre les juridictions administratives et les parties ;
  • OPALEXE : plateforme de dématérialisation des expertises judiciaires pour permettre d’échanger les pièces et documents de procédure entre les parties et l’expert, avec un suivi par les greffiers et les magistrats.

Plus récemment, les avocats ont développé des services dématérialisés dans le cadre de la transformation numérique de la profession :
  • e-barreau : intégrée au RPVA, e-barreau est la plateforme de gestion des affaires suivie par l’avocat, mais aussi un outil de signature et d’archivage des actes avocats électroniques, un outil de cloud sécurisé des documents de l’avocat ;
  • e-actes : plateforme de rédaction d’actes électroniques sous signature privée. Elle propose notamment la possibilité de signer électroniquement la convention de divorce par consentement mutuel (e-DCM) ;
  • e-mediation : plateforme de visioconférence dans le cadre des modes alternatifs de règlement des litiges.

4. Justice



Le ministère de la justice porte depuis quelques années un plan de transformation numérique pour « rendre la justice plus accessible, plus efficace et plus transparente » en vue notamment d' « offrir la possibilité d'une dématérialisation totale des procédures civiles et pénales ».

Ex.

En matière civile par exemple, le projet PORTALIS concrétisé par le portail justice.fr doit devenir :
  • pour les justiciables : un portail d'information et accès au dossier en ligne ;
  • pour les greffiers : un portail de suivi des affaires civiles ;
  • pour les auxiliaires de justices : un portail de communication électronique de documents plus volumineux.
  • pour les magistrats : un portail de suivi et outils d'aide à la rédaction des décisions.

De nombreux outils sont en développement pour améliorer la communication de bout-en-bout.
Ex.Certains comme DATAJUST, dispositif d'IA pour l'indemnisation des victimes de dommages corporels, ont été abandonnés.

La loi n° du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice et ses décrets d'application a accéléré la transformation, notamment :
  • la consécration du principe des échanges électroniques avec les juridictions (art. 850 du CPC) ;
  • la création d'une procédure sans audience (art. L. 212-5-1 du COJ) ;
  • le recours au dossier de procédure numérique (art. 801-1 du CPP).

Le développement des modes alternatifs de règlement des différends (not. arbitrage, médiation, conciliation) depuis 30 ans s'est également épanoui par la dématérialisation dans ce qui est appelé selon les terminologies les MARC numériques, les MERL (Modes Electroniques de Résolution des Litiges), les MARCEL (Modes Alternatifs de Résolution des Conflits en Ligne) ou les RELD (Règlements En Ligne des Différends).

  • 2004 : création du Médiateur du Net par le Forum des droits sur l'internet ;
  • 2013 : médiation en ligne des litiges de consommation (Directive n° relative au règlement extrajudiciaire des litiges de consommation et Règlement n° relatif au règlement en ligne des litiges de consommation) ;
  • 2019 : encadrement national des MARD en ligne (Loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 ; Décret n° du 25 octobre 2019 relatif à la certification des services en ligne de conciliation, de médiation et d'arbitrage et Décret modificatif n° du 29 janvier 2021).

Tx.Art. 4-1 à 4-7 de la loi n° du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIème siècle.

La possibilité pour des opérateurs privés de proposer de manière rémunérée ou non :
  • un service d'arbitrage en ligne : procédure et sentence dématérialisées ;
  • un service de médiation en ligne : mise en relation avec un médiateur ou saisine et procédure en ligne ou négociation semi-automatisée ;
  • un service de conciliation en ligne : mise en relation avec un conciliateur ou saisine et procédure en ligne ou négociation semi-automatisée ;
  • un service d'aide à la saisine des juridictions en ligne.

Le prestataire de service :
  • doit respecter la législation sur les données à caractère personnel ;
  • doit respecter l'obligation de confidentialité sauf accord contraire des parties ;
  • doit délivrer une information détaillée sur les modalités du service ;
  • ne peut proposer un service ayant pour seul fondement un traitement algorithmique ou automatisé de données à caractère personnel ;
  • doit accomplir sa mission avec impartialité, indépendance, compétence et diligence.

Rq.Même si une certification existe, le prestataire de service n'a pas l'obligation d'être certifié.

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