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Culture générale

Le terrorisme mondial

Le terrorisme, moyen d’action au service d’une fin, se développe au XIXe siècle. De politique au XXe siècle, il est devenu principalement religieux au XXIe siècle. Ce phénomène touche l’ensemble des États, ce qui a conduit la communauté internationale ainsi que l’Europe à prendre des mesures pour empêcher les attentats. Les États se dotent de moyens de plus en plus intrusifs qu’il faut articuler avec les libertés publiques.


L’expression « terrorisme » est née avec la Révolution Française au cours de la période qui a suivi la chute de Robespierre ; elle désignait la politique de Terreur des années 1793-1794. Cette expression réapparaît vers la fin du XIXème siècle.
Df.Le terrorisme est un moyen d’action au service d’une fin qui prétend rendre légitime ce mode d’action. Il s’inscrit classiquement dans le cadre de l’affrontement de deux groupes ou entités disposant de moyens asymétriques. C’est un moyen de répandre la terreur et non une fin en soi ; c’est un équilibre entre violence physique, effroi collectif et responsabilisation des autorités politiques. Généralement arme du faible contre le fort, le terrorisme peut au contraire être une arme d’État qui permet de terroriser discrètement une communauté. Dans toutes ces acceptions, le terrorisme désigne une lutte qui revendique une dimension politique.


Section 1 : L’histoire du terrorisme


Des formes primitives de terrorisme apparaissent dans les meurtres systématiquement commis par les Zélotes contre l’occupant romain du royaume de Judée ou encore dans l’action, au Moyen Âge, de la secte dite des « assassins » retranchée dans la forteresse d’Alamut au nord de l’Iran actuel. Cette secte dirigeait ses tueurs contre ses ennemis politiques musulmans puis contre les chefs des croisés. Mais il s'agissait principalement de s'attaquer aux chefs ennemis et non de terroriser la population.


C'est au XIXème siècle que le terrorisme se développe. Dès les premiers attentats de l’époque moderne, les terroristes s’en sont toujours pris à l’ordre établi de leur temps. Grâce à l’invention de l’explosif chimique et des médias de masse, le terrorisme politique acquiert une visibilité qui n’est pas proportionnelle à son efficacité. Le terrorisme moderne commence avec une série d’attentats. Il frappe ses victimes pour ce qu’elles représentent, moins pour les faire disparaître que pour que cela se sache.
Le terrorisme est désormais caractérisé par la stratégie des « 3 s » : secret, surprise et symbole. L’organisation terroriste cherche à la fois à se dissimuler avant d’agir, à créer la confusion et l’affolement dans le camp ennemi (plutôt qu’à lui infliger un réel dommage matériel) et à transmettre un message.
Ex.C'est dans cette dynamique que s'inscrit le terrorisme moderne qui apparaît véritablement avec le terrorisme révolutionnaire russe, notamment avec l’assassinat du gouverneur de Saint-Pétersbourg par le groupe Narodnaïa Volia (la volonté du peuple) qui s'oppose au gouvernement tsariste (après plusieurs essais infructueux, il assassine le tsar Alexandre II). Ce mouvement s’inspire des œuvres de Bakounine et de Netchaïev ; il incarne une volonté populaire. Toutes les composantes du terrorisme moderne sont là: la bombe, le pistolet et le manifeste, une idéologie qui justifie l’assassinat des puissants afin de provoquer l’effondrement du Système, une structure clandestine quasi sectaire, le goût du martyre... Les premiers terroristes russes s’efforcent de ne s’en prendre qu’aux représentants de l’autocratie, d'éviter les victimes civiles (ainsi, en 1905, Kaliaïev, au moment de lancer une bombe sur le Grand-Duc Serge, préfère renoncer plutôt que de risquer la vie des enfants assis à côté de lui. C’est le thème des Justes de Camus).

Ce terrorisme politique révolutionnaire connaît un équivalent en Europe occidentale avec le terrorisme anarchiste qui vise à abattre la Troisième République, construite dans le sang par la répression de la Commune en 1871, et la bourgeoisie qui la dirige. Dans les années 1890, les attentats meurtriers se multiplient en France. Ces attentats visent les symboles du pouvoir :
Ex.le capital (attentat contre la Bourse le 5 mars 1886), l'armée (attentat conte la caserne Lobau le 15 mars 1892), la justice (attentat contre les juges Benoît et Bulot les 11 et 27 mars 1892), le pouvoir législatif (Auguste Vaillant lance une bombe à clous en plein hémicycle à l'Assemblée nationale le 9 décembre 1893), le patronat (attentat contre la société des mines de Carmaux le 8 novembre 1893), le pouvoir exécutif (le 24 juin 1894, l'Italien Caserio assassine le président de la République Sadi Carnot), l’Église (attentat contre l'église de La Madeleine le 15 mars 1894).

Certains, pourtant, vont au-delà et s'en prennent indistinctement aux « bourgeois ».
Ex.Ainsi, en 1893, Émile Henry commet un attentat dans un café, attentat qui fait 20 blessés dont un succombe à ses blessures. Arrêté, jugé et exécuté, il déclare qu’il n'y a pas de bourgeois innocents.

Procès des Trente le 6 août 1894 devant la Cour d’Assises de la Seine. Source : BNF.

Alors que ces événements contribuent à isoler les anarchistes du mouvement ouvrier dont ils se réclament et que la population française se trouve plongée dans un climat de terreur et d'anxiété, des intellectuels se montrent solidaires des actes de terrorisme et soutiennent les militants anarchistes, notamment à l'occasion de l'adoption des lois scélérates et du "procès des Trente" en août 1894 : ce sont les débuts de la théorisation intellectuelle de la violence politique.
En savoir plus : Les lois scélérates de 1893-1894

En effet, une série de trois lois est votée dans l'urgence afin de lutter contre ces actions anarchistes qui visent à déstabiliser la société. Le 11 décembre 1893, soit deux jours après l'attentat d'Auguste Vaillant visant les députés, Jean Casimir-Perier soumet à la Chambre des députés un ensemble de mesures pour sauvegarder l’ordre et les libertés publiques, ce sont les « lois scélérates ». Il s'agit de modifications de la loi de 1881 sur la liberté de la presse qui ne punissait que la provocation directe aux crimes et aux délits ; désormais la provocation indirecte, l'apologie, est elle aussi punie et un juge peut ordonner la saisie des journaux et imprimés et l'arrestation préventive des auteurs et imprimeurs. La seconde loi votée le 18 décembre 1893 concerne les associations de malfaiteurs et vise particulièrement les groupes anarchistes, alors nombreux et très actifs. Elle permet d’inculper tout membre ou sympathisant sans faire de distinction. Elle encourage également à la délation : « Les personnes qui se seront rendues coupables du crime (d’association de malfaiteurs) seront exemptes de peine si, avant toute poursuite, elles ont révélé aux autorités constituées l’entente établie ou fait connaître l’existence de l’association ». La troisième loi, votée le 28 juillet 1894, est sans doute la plus marquante pour les anarchistes puisqu'elle les vise directement en les nommant et en leur interdisant tout type de propagande. C'est à la suite de cette loi que de nombreux journaux anarchistes comme Le Père peinard, qui avait déjà été saisi avant, sont interdits. Cette loi permet une véritable chasse aux sorcières, des milliers de perquisitions et d'arrestations débouchent notamment sur le Procès des Trente. Elle ne sera abrogée qu’en 1992. La question de l’équilibre entre les libertés publiques, notamment la liberté d’expression, et la lutte contre le terrorisme se pose déjà.

Au début du XXème siècle, le terrorisme recouvre plusieurs réalités.
Une partie du mouvement anarchique s'oriente vers le banditisme pour exprimer ses revendications et obtenir les moyens financiers de continuer la lutte. C'est notamment le cas de la « Bande à Bonnot » qui, en 1911 et 1912 multiplie les braquages violents.
Le terrorisme devient un moyen au service de l’indépendance nationale. Avant la Première Guerre Mondiale, divers mouvements nationalistes apparaissent en Europe. Ces derniers revendiquent l’indépendance de leur pays, le droit de former une nation. Pour servir leur cause, les nationalistes se servent des armes du terrorisme. Les attentats font rage. Le plus célèbre est celui commis par un Serbe à l’encontre de l’archiduc François-Ferdinand d’Autriche le 28 juin 1914. Cet événement marque le début de la Première Guerre mondiale.
Assassinat de l’archiduc François-Ferdinand, héritier de l'Empire austro-hongrois, et de son épouse, Sophie Chotek, duchesse de Hohenberg, par le nationaliste serbe Gavrilo Princip, membre du groupe Jeune Bosnie (Mlada Bosna) le 28 juin 1914. Source : https://www.museedelagrandeguerre.com


Le terrorisme renaît à la fin de la guerre avec la fondation de l'IRA en janvier 1919. L’Armée Républicaine Irlandaise naît dans le contexte de la guerre civile d’indépendance en Irlande. Elle mène des actions violentes contre les Britanniques afin de les obliger à rendre une autonomie totale au pays. Lorsque l’indépendance de l’Irlande sera décrétée, l’organisation s’amoindrira. Elle reprendra toutefois les armes pour combattre en faveur des Catholiques d’Irlande du Nord et pour la réunification de l’île.
Des membres de l'IRA défilent devant leur chef, Eamon de Valera, en 1922. Source : Wikipédia.


Avec la Seconde Guerre Mondiale, le terrorisme devient libérateur. C’est au nom de l’indépendance nationale que l’Europe occupée connaît la Résistance, condamnée comme terroriste par l’occupant et la Gestapo. Avec la fin de la guerre, les indépendantismes nationaux se font entendre. La décolonisation de certains pays du Maghreb et du Proche-Orient se fait pacifiquement mais, pour d'autres, elle demeure problématique. Des groupes radicaux utilisent alors le terrorisme meurtrier comme une arme de résistance, à leurs yeux légitime.
Ex.Ce terrorisme de libération commence en Palestine le 22 juillet 1946 avec l'attentat de l'hôtel King David, perpétré par l'Igourn, une organisation sioniste extrémiste.
En France, c'est avec le cas algérien qu’émerge ce type de terrorisme politique, avec la création en 1954 du FLN (Front de Libération National) qui multiplie les attentats en France et en Algérie. Ces attentats ne visent pas uniquement l'armée d'occupation coloniale, mais aussi les civils (19 000 victimes civiles). En réaction, l'OAS (Organisation de l'Armée Secrète) qui refuse la décolonisation, multiplie, elle aussi, les attentats (notamment celui du Petit-Clamart en 1962 contre le général De Gaulle).

Une partie des intellectuels de l'époque servent de caution morale à ce terrorisme politique particulier.
Rq.Ainsi, en 1961, en plein troubles algériens, le martiniquais Frantz Fanon publie Les damnés de la terre. Ce livre, préfacé par Jean-Paul Sartre, est une charge contre la colonisation et ses conséquences ; il justifie le recours à la violence légitime.

C'est finalement dans les années 1970, avec notamment le conflit israélo-palestinien et l'opposition idéologique entre bloc de l'Est et bloc de l'Ouest, que naît le terrorisme moderne dans sa version la plus achevée. En effet, les années 1970-1980 sont célèbres, entre autres, pour les mouvements de contestations pacifistes. Cependant, certains groupes ont également donné naissance à des branches beaucoup plus radicales. Pour défendre leurs idéaux ou renverser le pouvoir en place, certains mouvements recourent à la violence.
Ex.C’est ce que l’on voit en 1959, à Cuba, avec le renversement du dictateur Batista par les guérilleros de Fidel Castro et du Che Guevara. Aux États-Unis, après l’assassinat de Martin Luther King, des groupes comme les Black Panthers sèment la panique parmi la population blanche pour défendre les droits des Noirs. En Italie, les Brigades rouges débutent leur campagne de terreur à travers le pays. En Allemagne, la Fraction Armée Rouge, dite aussi « bande à Baader » s'en rendue coupable de plusieurs braquages de banques et d'attentats à la bombe contre des bâtiments militaires américains et des institutions publiques. En France, le groupe d'extrême gauche « Action directe », dirigé par Jean-Marc Rouillan, pratique l'assassinat politique (notamment celui du PDG de Renault Georges Besse en 1986). La droite compte aussi son lot d’attentats, généralement perpétrés à l’encontre des étrangers. C’est, par exemple, le cas extrême de groupuscules comme le Ku Klux Klan (KKK) qui, de 1865 à 1940, cherche à terroriser les Noirs par des lynchages ou des assassinats.

À la fin des années 1970, le terrorisme islamiste fait son apparition. En 1979 a lieu la Révolution islamique en Iran. Le régime du Chah est renversé. L'ayatollah Khomeyni proclame officiellement la république islamique d'Iran dont la constitution s'appuie sur une stricte interprétation du Coran. À partir de cette époque, un nouveau modèle politique voit le jour dans certains pays musulmans. L’aspect religieux est de plus en plus présent dans les revendications.
Les premiers attentats suicides ont lieu au début des années 1980.
Ex.En effet, en 1983, une série d’attentats sont perpétrés par la branche libanaise du Hezbollah contre les armées américaines et françaises. Avec la création du Hamas en 1987, ces attentats kamikazes se développent, principalement les attentats à la bombe.

Dans les années 1990, le terrorisme politique se vide peu à peu de toute sa substance. Il se banalise, se déstructure, jusqu'à devenir, parfois, un simple instrument criminel comme Les « Forces armées révolutionnaires de Colombie » (FARC).
Drapeau des FARC-EP, un groupe de guérilla colombienne. Source : Wikipédia - CC BY-SA 3.0..


En revanche, le terrorisme religieux progresse, le combat religieux est un combat mondial.
Ex.En Algérie, le Groupe Islamique Armé (GIA) va jouer un rôle crucial. Il veut imposer, si besoin par la force au reste du monde, un islam originel. L'actuelle organisation AQMI (Al-Quaïda au Maghreb islamique) est un des héritages directs du GIA algérien.

Progressivement émergent, dans le mouvement djihadiste, des figures de proue qui facilitent le recrutement nécessaire aux filières terroristes.
Ex.Le plus emblématique est Oussama Ben Laden. Avec la création de « Al-Qaïda » (la « base » en arabe), il fait connaître au monde le terrorisme globalisé. Il n’a pas de projet politique cohérent mais il proclame une haine de l’Amérique et une prétention de libérer le monde musulman de sa domination. Ce mouvement se concentre sur les USA (le grand Satan) et va perpétrer l'attentat le plus retentissant du XXIème siècle, celui du 11 septembre 2001.
Photo non datée montrant l’ancien leader d’Al Qaïda, Oussama Ben Laden. Source : AFP.



Pendant tout le XXème siècle, les terrorismes semblent se classer en trois formes majeures, suivant leurs objectifs politiques, se donnant toutes l’État comme ennemi principal.
  • un terrorisme de type révolutionnaire. Il est « vertical » en ce qu’il vise l’État au nom du peuple et que son objectif est de détruire des institutions. Des anarchistes de la Belle Époque aux Brigades Rouges, il se propose de renverser l’ordre établi par une stratégie d’ébranlement. L’acte terroriste doit servir de catalyseur à la mobilisation du peuple et d’accélérateur à la Révolution ;
  • un terrorisme « territorial », indépendantiste ou anticolonialiste, celui de l’IRA irlandaise, du PKK kurde et de dizaines de mouvements de libération. Il a pour but de chasser un occupant, ou un groupe allogène. Il emploie une stratégie, souvent complémentaire de la guérilla, de la négociation politique et de la pression idéologique : décourager la puissance étrangère, faire payer sa présence d’un tel prix, en pertes matérielles et politiques, qu’elle doive partir ou céder. L’enjeu est l’occupation d’une terre ;
  • un terrorisme « instrumental » de pure contrainte ; il est souvent transnational. Il constitue un élément de menace et de négociation. Il vise à obtenir un avantage précis: la libération d’un prisonnier, contraindre une puissance étrangère à cesser de soutenir telle faction ou de s’interposer dans tel conflit… Des actions de ce type, parfois commanditées par un État, ont des objectifs précis. La France en a eu la démonstration avec les campagnes terroristes de 1986 (dont l’attentat de la rue de Rennes) et de 1995 (avec, notamment, celui du métro Saint-Michel). Ils étaient respectivement liés aux affaires libanaises et algériennes. Ce terrorisme s’en prend au détenteur d’une autorité à qui il cherche à imposer une décision, ou au possesseur d’une ressource, qui peut être éventuellement l’argent ou l’accès aux médias… La méthode est indirecte en ce qu’elle vise à modifier un rapport de forces mais n’est pas censée apporter la victoire finale.
Bien entendu, dans la pratique, ces trois modèles se mêlent inextricablement : il n’est pas rare de voir des terroristes exercer un chantage à objectifs limités, mais dans le cadre d’une lutte de libération nationale, tout en se réclamant d’une finalité globale comme l’effondrement du capitalisme international.

Section 2 : Le terrorisme au XXIème siècle


En raison de la puissance des pays occidentaux (notamment de leur capacité nucléaire), toute tentative d'agression frontale est vouée à l'échec. En conséquence, les modes d'actions asymétriques, la guérilla et le terrorisme, sont l'unique stratégie pour les États et les organisations qui se trouvent, pour des raisons quelconques, en situation d'affrontement avec une ou plusieurs de ces grandes puissances.
Depuis les attentats du 11 septembre 2001 à New-York, le mot « terrorisme » et les actes qu’il recouvre ont pris un sens nouveau. Ils sont associés à une violence extrême, dirigée contre un État ou un modèle de société, en faisant de nombreuses victimes civiles innocentes. C’est ce qui fait d’ailleurs la spécificité du terrorisme moderne. La majorité des attentats récents ont des motifs religieux, mais d'autres sont motivés par d'autres causes comme par l'indépendantisme (c'est le cas pour les attentats commis par des Tchétchènes en Russie). En outre, de nouveaux acteurs s’adonnent au terrorisme, des entités non-politiques (mafias, sectes…). Ces terrorismes divers et variés ont remplacé le terrorisme organisé et politique du siècle dernier.
Le 11 septembre 2001, deux avions de ligne détournés par des pirates de l'air détruisent les tours jumelles du World Trade Center situées dans le quartier de Manhattan à New York. Source : https://www.revuedesdeuxmondes.fr


Si les attaques terroristes sont principalement des attaques à la bombe, deux autres types de terrorisme inquiètent les États : le cyberterrorisme et le bioterrorisme. Le cyberterrorisme est lié au développement des systèmes informatiques et à la vulnérabilité des réseaux de communication. Régulièrement, des hackers piratent des données et bloquent en partie le réseau. Ce terrorisme menace particulièrement l'économie des pays développés. Le bioterrorisme a été médiatisé par l'attentat au gaz sarin dans le métro de Tokyo en 1995, puis par les lettres piégées à l’anthrax en 2001 aux États-Unis. Les produits chimiques et biologiques sont faciles à produire, peu chers, très meurtriers et quasiment indétectables. L'un des risques les plus important est le virus de la variole, maladie infectieuse la plus meurtrière de l'histoire, éradiquée mais dont il subsiste plusieurs souches.
Pour beaucoup, le terrorisme, et principalement le terrorisme islamique, constitue la principale menace du XXIème siècle. Pour la combattre, les gouvernements développent une série de mesures juridiques préventives et répressives. Pour certains, la lutte contre le terrorisme est devenu un véritable combat du Bien contre le Mal.


La Lutte contre le terrorisme n'a pas attendu les attentats du 11 septembre. En 1937, à la suite du meurtre du roi de Yougoslavie en 1934, une conférence internationale à Genève adopte les premières conventions juridiques contre le terrorisme politique.
Depuis 1972, l’assemblée de l’ONU a adopté de nombreuses résolutions au sujet du terrorisme ; le Conseil de Sécurité s’est, lui aussi, saisi du sujet et a fini par donner naissance au Comité du Contre-terrorisme en septembre 2001.
Rq.En effet, le 11 septembre 2001 marque un véritable tournant. Cet attentat est certes considérable par le nombre de victimes (environ 3300), mais les moyens utilisés (le détournement d’avions de ligne) sont une méthode classique. En revanche, il a atteint les États-Unis au cœur de leurs métropoles ; il a frappé le monde entier par son côté spectaculaire. Cet attentat a été extrêmement médiatisé. Il a été le point de départ d’une politique occidentale sécuritaire, d’une « guerre au terrorisme » comme l’a déclaré le président américain. Cet attentat a eu pour conséquence l’adoption de lois censées permettre à la fois une meilleure anticipation du risque terroriste (les lois sur le renseignement) et donner aux États les moyens de sanctionner les terroristes une fois appréhendés (avant leur passage à l’acte de préférence). Apparaissent alors le Patriot Act accordant des pouvoirs exceptionnels à la police et aux renseignements américains, des tribunaux militaires d’exception et le bagne de Guantánamo. Ces dispositifs sont très contestés en ce qu’ils portent atteinte aux droits de l’homme.

La plupart des États se sont dotés d’une législation spécifique pour combattre les activités terroristes. La participation à une action terroriste est une circonstance aggravante qui permet une sanction plus lourde et des garanties procédurales plus ténues. Ce qui entraîne d’ailleurs des difficultés dans l’attribution ou non du qualificatif de terroriste. Qualifier un adversaire de terroriste, c’est le discréditer. Il n’existe aucune liste consensuelle des organisations terroristes, certaines organisations sont considérées comme terroristes par certains États et pas par d’autres (c’est le cas par exemple de l’ETA qui n’est plus considérée comme une organisation terroriste par l’Union Européenne depuis 2009 mais qui l’est toujours pour les États-Unis).

Les grandes nations occidentales découvrent leur extrême fragilité, confrontées à des groupes terroristes inattaquables car sans territoire, qui viennent d’accéder au statut d’acteurs mondiaux. Le terrorisme actuel n'est pas le fait d’États mais de groupes transétatiques, difficilement visibles, très difficilement perméables aux services de renseignements. Ce sont des groupes organisés, disposant de moyens importants, qui n'hésitent pas à fomenter des attentats. Depuis les attentats de 2001, Al-Quaïda est devenue une sorte de label sous la bannière duquel de nombreuses organisations djihadistes se regroupent, même sans avoir de lien véritable avec Al-Qaïda. Une nouvelle génération de terroristes islamiques est désormais active et elle cherche à recruter dans le monde entier, y compris au sein des démocraties occidentales (ces jeunes partis faire le djihad en Syrie en sont l'exemple le plus frappant).
Rq.Les États victimes découvrent également le prix des attaques terroristes. L'effondrement des tours jumelles a coûté 7 milliards de dollars, les primes des assurances ont bondi de 30 % en moyenne. Les attentats de Bali, d’Égypte, de Tunisie mettent à mal le tourisme qui est une, si ce n'est la principale source de revenus de ces pays. Le marché mondial de la protection contre le terrorisme est évalué à 100 milliards de dollars et celui de la protection des réseaux d’information à 50 milliards. En revanche, ces attentats sont relativement peu coûteux à préparer (les attentats du 11 septembre 2001 auraient coûté entre 200 000 et 500 000 dollars, ceux de Bali en 2002 moins de 50 000), et les organisations terroristes utilisent des circuits opaques pour financer leurs opérations.

Les États tentent d’endiguer ce phénomène causé par l’extrémisme idéologique, les conflits violents, les atteintes aux droits de l’homme. Ils veulent rompre le lien entre terrorisme et résistance. Ils s’attaquent aux moyens financiers des terroristes (par exemple, le Gafi, Groupe d'action financière sur le blanchiment de capitaux, réunit 25 États occidentaux ; il a établi des normes internationales pour lutter contre le financement du terrorisme) et sécurisent leurs territoires et leurs moyens de transport, sanctionnent les « états-voyous » (Libye, Syrie), favorisent l’émergence d’États de droit, censés être le meilleur rempart contre le terrorisme.
L'Europe préconise, entre autres, d’établir une définition commune du terrorisme pour tous les États européens ; d’instaurer une clause de solidarité qui invite les États européens à mettre tous leurs moyens à disposition lorsque l’un d’entre eux est victime du terrorisme ; de nommer un « Monsieur terrorisme » chargé de coordonner les actions des États membres et les positions de l’Europe ; de promouvoir le programme Eurojust ou encore le mandat d’arrêt européen. En 2016, EUROPOL se dote d'un centre européen de lutte contre le terrorisme.
Désormais, c'est le spectre de l'auto-radicalisation, alimentée par l'ère internet, qui semble se proposer comme la véritable menace des années à venir.
Rq.De plus, la médiatisation de l'Islamisme terroriste a pour conséquence indirecte l'apparition d'un mouvement du "contre-djihad" violent, incarné notamment par le Norvégien Anders Behring Breivik (qui parvient à assassiner 77 personnes lors des attentats d'Oslo du 22 juillet 2011) ou encore par Brenton Tarrant (qui en 2019, déclarant agir contre « le Grand remplacement » et le « génocide blanc », massacre 51 personnes dans des attaques visant deux mosquées en Nouvelle-Zélande).

Les États frappés par le terrorisme doivent faire face à deux difficultés. Trouver un équilibre, difficile à réaliser, entre la lutte contre le terrorisme et le respect de droits et des libertés et répondre aux critiques concernant les failles des services de renseignements. Ainsi, à la suite des attentats terroristes en Israël en 2023 et en Russie en 2024, les services de renseignement ont été mis en cause.
Pour la 1ère fois, une résolution sur le financement du terrorisme a été adoptée au Conseil de Sécurité en mars 2019. Il s’agit d’une décision politique de référence sur le sujet réaffirmant les obligations des États, notamment la pénalisation du financement des organisations, des actes et individus terroristes ; appelant à amplifier l’emploi et l’efficacité des mesures de gel des avoirs dans la lutte contre le terrorisme ; priant instamment les États membres d’évaluer et anticiper les risques de financement du terrorisme, de créer de cellule de renseignement financier et de renforcer la coopération internationale.

En France, plus de 20 lois antiterroristes ont été votées en moins de 15 ans. L'arsenal juridique français avait déjà été renforcé par la loi du 21 décembre 2012. Depuis 2013, trois lois ont permis d’adapter le cadre législatif de la France aux nouvelles formes de menace. Elles ont tout à la fois aggravé les mesures répressives, étendu l’application du code pénal aux infractions de nature terroriste commises à l’étranger par les ressortissants français ou par des étrangers résidant habituellement en France. Elles ont également introduit dans le droit français des mesures de police administrative novatrices en matière d’accès ou de sortie du territoire ou sur les contenus illicites des sites Internet.
Le Gouvernement a aussi décidé dès avril 2014 d'un plan d'actions contre les filières djihadistes et la radicalisation. Plus de 2 500 signalements de radicalisation ont été portés à la connaissance des autorités.

Tx.La loi du 13 novembre 2014 renforce les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme. Un des principaux décrets d'application, publié le 14 janvier 2015, met en place l’interdiction de sortie du territoire des ressortissants français projetant de participer à des activités terroristes à l’étranger. Le décret relatif au blocage de sites incitant à des actes de terrorisme a été publié le 4 février. Enfin, le décret permettant le déréférencement dans les moteurs de recherches a, de son côté, été publié le 4 mars.
La loi sur le renseignement a été promulguée le 25 juillet 2015 avec deux objectifs : donner un cadre légal précis aux services de renseignements pour les autoriser à recourir à des moyens techniques d'accès à l'information (notamment de recueillir, en temps réel, les données de connexion relatives à des personnes préalablement identifiées comme présentant une menace, de mettre en place un « algorithme » traitant les données de connexion de tous les connectés et visant à détecter une menace terroriste mais sans procéder à l’identification des personnes concernées par l’analyse des données autres que celles suspectées de terrorisme) et garantir le respect des libertés publiques et le respect de la vie privée. La loi prévoit notamment de subordonner le recours aux mesures de surveillance à l’autorité du pouvoir politique et à un double contrôle, celui d’une autorité extérieure indépendante, et celui du Conseil d’État, sauf en cas d'urgence absolue. Cette loi a été critiquée avec virulence, accusée d'instaurer une surveillance de masse. La CNIL a d'ailleurs émis des réserves sur cette loi.
Ces dispositifs ont été complétés en 2016, par la loi renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l'efficacité et les garanties de la procédure pénale, en 2017, par la loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme et en 2021, par la loi relative à la prévention d'actes de terrorisme et au renseignement. Ces lois ont permis de pérenniser des mesures de police administratives, de faciliter le partage des renseignements et d’ instaurer une mesure judiciaire applicable aux auteurs d’infractions terroristes, décidée à l’issue de leur peine en considération de leur particulière dangerosité, afin de les soumettre à certaines obligations, en vue de prévenir la récidive et d’assurer leur réinsertion.

Le gouvernement cherche également à lutter contre le financement des groupes terroristes. Il cherche à identifier les mouvements financiers suspects, à les surveiller et à agir notamment par le gel des avoirs détenus par les financeurs ou les acteurs du terrorisme.
Rq.
Logo de la DGSE

En France, outre les spécialistes de la DST, le ministère de l'intérieur s’appuie sur la Direction nationale de l'antiterrorisme de la police judiciaire et sur les renseignements généraux. Une refonte des services de renseignement policier est décidée en 2007 et donne naissance à la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI) en 2008, qui devient l’actuelle DGSI (Direction Générale de la Sécurité Intérieure) en 2014. Les agents de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) travaillent hors du territoire national, à la compréhension et à l’affaiblissent des structures terroristes avant qu'elles ne frappent la France.
Le plan Vigipirate se fonde sur l'évaluation des menaces. Le Premier ministre prend la décision de déclencher le plan et juge du niveau d'alerte qui s'impose. Dès le niveau orange, le survol des sites sensibles est interdit et des patrouilles sont mises en place.
Au fond, à chaque attentat terroriste, les gouvernements renforcent leur arsenal juridique (par exemple, en 2021 est promulguée la loi confortant le respect des principes de la République, qui, en réponse à l'assassinat terroriste de l'enseignant Samuel Paty en octobre 2020, établit un délit d'entrave à la fonction d'enseignant) et leur service de renseignements.

Des milliers de personnes font l'objet d'une fiche de renseignements. Ce système de fichage est l'une des sous-catégories du fichier des personnes recherchées, le FPR. Ce fichier géant répertoriait plus de 400 000 individus au 1er novembre 2010. Il sert à faciliter les recherches effectuées par les services de police et de gendarmerie à la demande des autorités judiciaires, militaires ou administratives selon la CNIL. Créé à la fin des années 1960, le FPR regroupe des catégories de personnes très variées, comme les mineurs fugueurs (« M »), les évadés, (« V ») ou les personnes privées de sortie du territoire (« IT », pour interdiction de territoire). La sous-catégorie « S » (pour sûreté de l'État) désigne les personnes potentiellement menaçantes pour la « sûreté de l'État ». En 2012, 5 000 noms y étaient répertoriés. À l'origine, cette catégorie avait été créée pour contrôler les déplacements des diplomates. Puis, elle s'est étendue à la menace terroriste. La fiche S est un outil de contrôle des renseignements à disposition des services de police et de gendarmerie, qui sert surtout à contrôler les déplacements Ce fichier S est subdivisé en plusieurs échelons qui correspondent à une échelle de vigilance graduée jusqu'à 16.
Les fichiers sont incontestablement un outil, le tout est de les rendre performants et surtout respectueux des libertés individuelles. Certains politiques appellent à un Patriot Act en France, à un renforcement des fichiers, à la conservation des données, au rétablissement des frontières ou au moins des contrôles dans l'espace Schengen. Avec le dernier attentat dans un train, des voix s’élèvent pour réclamer un contrôle des bagages et des portiques de sécurité comme dans les aéroports.
Le danger de ce type de politique est double. Tout d'abord le risque de dérive sécuritaire et liberticide est réel. Pour être plus efficace dans la lutte contre le terrorisme sous toutes ses formes, le gouvernement prend des mesures de plus en plus drastiques, limitant les libertés au profit de la sécurité. Ainsi, le recours à l’état d’urgence à la suite des attentats de 2015, 2019 et 2020 a été critiqué. Ensuite, la définition même du terrorisme est problématique. Il existe plus d'une centaine de définitions du terrorisme. Dans les pays en guerre, qualifier l'adversaire de terroriste est une manière de préciser que le mauvais camp, le camp illégitime est celui de l'adversaire, et que le bon camp, le camp légitime est le camp d’appartenance. Dans les pays en paix, qualifier un groupe de terroriste permet au pouvoir en place d'alerter la population de la menace potentielle, de proportionner les mesures de sécurité et de montrer son action en se légitimant par la lutte antiterroriste pour assurer la sécurité. Dans les deux cas, qualifier l'adversaire de « terroriste » est une manière de se légitimer.

L'appellation « terroriste » est donc toujours contestée. Les tentatives pour une définition universelle du concept soulèvent invariablement des débats parce que des définitions variées peuvent être employées en vue d'inclure les actions de certains partis, et d'exclure celles des autres.
Df.Ainsi, selon le Code pénal français (art. 421-1) : Constituent des actes de terrorisme, lorsqu'elles sont intentionnellement en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l'ordre public par l'intimidation ou la terreur lesinfractions suivantes :
  • Les atteintes à la vie… ;
  • Les vols, les destructions, les dégradations et détériorations ainsi que les infractions en matière informatique… ;
  • La fabrication ou la détention de machines ;
  • Le fait d'introduire dans l'atmosphère une substance de nature à mettre en péril la santé de l'homme ou des animaux ou le milieu naturel ;
  • Le fait de participer à un groupement formé ou à une entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d'un des actes de terrorisme.

Cette définition peut être différemment interprétée.
Ex.Ainsi, en 2015, le procès du groupe de Tarnac, a conduit à s'interroger sur la définition du terrorisme en droit français : pour le ministère public les sabotages de plusieurs lignes de TGV en 2008 doivent être jugés avec la circonstance aggravante d’« entreprise terroriste » alors que pour la juge d'instruction, il n'y a pas de caractère terroriste : si les sabotages ont occasionné un « désagrément aux usagers » et « désorganisé » le réseau SNCF, ils n’ont à aucun moment « intimidé ou terrorisé tout ou partie de la population », au sens de l’article 421-1 du Code pénal qui définit l’infraction terroriste. Lors des différents procès, la charge de terrorisme est abandonnée (le 10 janvier 2017, la Cour de cassation écarte définitivement la qualification de terrorisme), les différents prévenus sont relaxés de tous les motifs de mise en examen à l'exception de celui de « refus de se soumettre à un prélèvement biologique ». Le principal prévenu, Julien Coupat estime que « l'antiterrorisme est la forme moderne du procès en sorcellerie. Au final, le groupe de Tarnac était une fiction et cette affaire est considérée comme un fiasco judiciaire. Elle montre cependant que le qualificatif de « terroriste » doit être utilisé avec précaution, dans le respect des libertés publiques.



Sy.Le débat entre ce qui relève du terrorisme (et donc d'un régime juridique d'exception) et ce qui relève du combat politique ou d'une infraction de droit commun n'est donc pas près d'être tranché. La question très complexe de l’équilibre entre sécurité et liberté ne l’est pas non plus.
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