7291

Culture générale

La citoyenneté

La citoyenneté est une notion en évolution. Elle est passée d’une conception restreinte sous l’Antiquité à une conception plus globale avec la Révolution Française. Au XXe siècle, la citoyenneté s’étend à l’ensemble de la population nationale majeure, elle s’accompagne de droits et aussi de devoirs. Avec l’Europe et la mondialisation, la citoyenneté dépasse le cadre national, englobe de plus en plus de droits. Cependant, c’est une notion en crise, en perte de repères.


Df.La citoyenneté est une notion ancienne, aussi ancienne que la cité. Le terme vient du latin civitas. Le citoyen est celui qui adhère aux règles et aux finalités de la cité, ce qui lui vaut de bénéficier de prérogatives, droits et devoirs constitutifs de la citoyenneté.

La notion de citoyenneté évolue en même temps que le cadre politique dans lequel elle s'exerce. À l'époque contemporaine, la citoyenneté est un ensemble de droits et de devoirs permettant de participer à la vie sociale de l’État. C’est une notion en mouvement, en devenir.


Section 1 : L’évolution de la notion de citoyenneté


Les origines de la notion de citoyenneté sont dans l’Antiquité, au cœur de la cité et plus précisément à Athènes, où le peuple gouverne au lieu de simplement élire des hommes chargés de gouverner. À Rome, la citoyenneté, d’abord accordée à un nombre restreint d’habitants, a ensuite dépassé le cadre de la cité et est devenue un statut juridique diffusé au gré des conquêtes militaires.
Ex.Ainsi, l’édit de Caracalla en 212 accorde la citoyenneté romaine à tous les habitants de l’Empire.



Df.Aristote définit la cité comme un ensemble déterminé de citoyens et le citoyen se définit par la participation à une fonction judiciaire et à une magistrature.
Seuls les citoyens peuvent posséder des terres et exercer les droits civiques ; ils ont des devoirs envers l’État : le service militaire de 2 ans, la contribution aux dépenses publiques et la participation au gouvernement de la cité.
L’assemblée du peuple représente la participation délibérative des citoyens. Le droit de vote est exercé par tête et une indemnisation pour la participation à la vie de la cité, le misthos, est instituée, rétribuant la présence à l’assemblée athénienne.
Les magistratures sont également le signe de la participation des citoyens. Nombreuses et spécialisées, elles sont attribuées par tirage au sort, pour tenir en échec le prestige de l’origine, de la richesse ou de la gloire militaire, pour limiter les visées autoritaires d’un individu ou d’un groupe.
Enfin, chaque membre de la communauté peut se voir reconnaître un rôle dans la fonction de jugement, au sein du tribunal populaire, l’héliée, dont les membres, là encore, sont tirés au sort.
Le recours au tirage au sort, plutôt qu’à l’élection, permet de répartir plus largement la souveraineté populaire. Au lieu de fonctionnaires compétents, ce sont les citoyens qui gèrent eux-mêmes l’État. Les citoyens peuvent délibérer, gouverner ou juger. Malgré tout, la citoyenneté est un privilège rare dont ne bénéficient pas, loin s'en faut, tous les habitants d'Athènes. Sont exclus : les femmes, les étrangers et les métèques (statut intermédiaire entre celui de citoyen et d'étranger), les mineurs et les esclaves. Les femmes et les mineurs, bien que non-citoyens, ne sont pas pour autant exclus de la vie de la cité. Ils jouent un rôle important dans les cérémonies religieuses qui ont souvent un aspect politique.
Sous la République romaine, le droit de cité complet comprend six libertés. Il s’agit des droits de vote, d’éligibilité aux magistratures, de servir dans une légion, d’en appeler à un tribunal populaire contre la sentence d’un magistrat, de posséder, acquérir et transmettre par testament, et de contracter mariage régulièrement. En contrepartie, les citoyens romains doivent être dignes de la vertu civique (il s’agit d’un ensemble de valeurs comprenant la maîtrise de soi, la mesure, le sérieux, la discipline, le respect de la hiérarchie, l’application, le respect de la parole donnée, l’esprit de sacrifice, l’attachement à l’ordre établi, le sens du sacré. Le citoyen doit répondre à une trilogie exigeante : virtus, pietas, fides !), ils doivent accomplir le service militaire (10 ans), payer l’impôt (jusqu’en -167), et faire preuve d’évergétisme (faire profiter la collectivité de ses propres richesses).

Rq.L’extension de la citoyenneté à l’époque impériale fait perdre le sens de la notion de citoyenneté. Le citoyen n’est pas l’homme libre jouissant de droits politiques au sein de la cité, il s’agit désormais d’une masse d’individus distincts par leurs origines, (géographique, familiale...). La citoyenneté est réduite à un statut civil, les droits politiques passent au second plan. Elle a désormais une fonction d’identification et de protection ; l’exercice de la citoyenneté se réduit au respect de la loi. La citoyenneté romaine ne donne pas droit de participer à la vie politique, qui est réservée à des castes aristocratiques ou oligarchiques. Le cens permet de discriminer parmi les citoyens ceux qui sont éligibles aux magistratures. Si quelques-uns peuvent, grâce à leur réussite économique, participer à la vie politique, il ne s'agit que d'une ouverture minime de l'aristocratie. En fait, c'est parce que la citoyenneté et les fonctions sociales sont disjointes, parce que l'exercice du pouvoir effectif ne lui est pas associé, que la citoyenneté a pu être accordée plus largement.

Avec la chute de l'Empire Romain, la notion de citoyenneté disparaît. Les bouleversements opérés dans l’Empire par les migrations barbares modifient radicalement la situation juridique et sociale des habitants. Certes, le titre de civis n’est pas totalement oublié, car subsistent en Occident des cités, surtout en Italie, dont les habitants n'ont pas complètement perdu le sens municipal, le sens de la cité. Cependant, l’universalité du titre et du statut de citoyen s’est perdue. La restauration de l’Empire par Charlemagne, couronné empereur à Rome, ne rétablit pas pour autant, sur l’étendue des terres qui en font partie, un statut de citoyen pour tous ceux qui y sont englobés. Et si L'Empire Romain d'Orient persiste et tente de reprendre à son compte l’héritage romain, le titre de civis est désormais réservé à ceux qui habitent en ville. À cette notion de civitas, d'appartenance à la communauté politique des citoyens, se substitue celle d'imperium, c'est à dire la domination du groupe par un chef. Dans les États médiévaux en construction, le citoyen s’efface au profit du sujet.
En revanche, il n'est est pas de même dans les cités-États italiennes, fortes d'une autonomie locale. Avec la présence du Saint-Empire puis avec la redécouverte du droit romain aux XIème et XIIème siècles, les cités renouent avec leur prestigieux héritage romain. Ainsi, à la fin du XIIème siècle, les habitants des cités italiennes ne sont plus simplement des homines, les hommes de la ville, mais des citoyens, membres d'une communauté. Ces citoyens ont le droit de participer à l’assemblée populaire de leur cité, même si cette assemblée reste dominée dans toutes les villes par les aristocrates, eux-aussi citoyens qui accaparent souvent les fonctions politiques de la commune. Les statuts communaux du XIIIème siècle précisent les droits et devoirs de ceux qui sont citoyens : habiter en permanence en ville, y posséder une maison, être soumis à l’assiette de l’impôt, remplir son devoir militaire (et donc avoir les moyens financiers de se procurer et d'entretenir son équipement). Il y a donc bien, dans les cités-États italiennes, des habitants non-citoyens, des habitatores, qui sont exclus de la vie politique et administrative de la ville.
Les juristes fondent avant tout la citoyenneté sur la naissance. Le droit de citoyenneté se transmet de père en fils. Au XIVème siècle, une deuxième forme de citoyenneté est admise par la réception d’un nouveau citoyen dans la communauté, principalement en raison de ses mérites spéciaux (on pouvait mettre à la disposition d’une cité ses qualités d’enseignant ou de médecin). Ainsi se dégagent deux formes de citoyenneté sur le plan juridique, ce qui n’exclut pas par ailleurs qu’un individu puisse jouir d’une double citoyenneté. En France, avec l'essor de la bourgeoisie marchande, les bourgeois revendiquent un rôle politique dans la gestion de leur ville. Il faut cependant attendre la Renaissance pour que le terme de citoyen fasse sa réapparition.

Df.Sous l’ancien droit, Jean Bodin formule une définition du citoyen qui diffère de celle de l’Antiquité. Cette définition est valable quel que soit le régime. Le citoyen est désormais sujet du roi, il doit reconnaissance et obéissance au souverain.
Leurs rapports sont des obligations mutuelles et exclusives. Cependant, la véritable naissance de la citoyenneté est symbolisée par la Révolution.

Le siècle des Lumières va entraîner le débat sur la personne, en interrogeant la place de l'individu dans la société et leurs relations mutuelles. Cette approche est celle des théoriciens du contrat social et des droits subjectifs. Elle part de l'analyse du passage de l'homme de l'état de nature à la société grâce à un contrat social. Ce contrat préserve et organise collectivement les droits naturels dans la société ; il est le fondement du lien social.
La citoyenneté va revenir en force par la guerre d'indépendance et la fondation de la démocratie aux États-Unis. Et bien sûr avec la Révolution Française de 1789. Elle fait table rase de tous les privilèges : le « citoyen » devient le titre universel de tous les hommes ;
Tx.la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 constitue un moment crucial de cette évolution.

Source : Domaine public.



La Révolution consacre un nouvel être politique, le citoyen, en transférant la souveraineté du roi à la Nation. Les citoyens sont alors le corps politique souverain de l’État et ne peuvent participer au pouvoir qu’en constituant la Nation.

Avec la Constitution de 1791, première constitution écrite française, le suffrage universel ne voit pas le jour, malgré l'affirmation de l'égalité en droit dans la Déclaration des Droits de l'homme et du Citoyen.
Rq.Une distinction est instaurée, celle entre les citoyens actifs et les citoyens passifs. Les hommes de plus de 25 ans qui ne sont pas en situation de dépendance (les domestiques), qui paient un cens au moins égal à la valeur de trois journées de travail sont déclarés "citoyens actifs" (sauf s'ils sont en état d'accusation ou s'ils ne rapportent pas un acquit général de leurs créanciers après avoir été constitués en état de faillite ou d'insolvabilité, prouvé par pièces authentiques). Les autres demeurent "citoyens passifs". Les femmes sont d'emblée privées du droit de vote en raison de leur incapacité civile. Sur 20 millions d'habitants, environ 10 millions sont des électeurs potentiels, mais seulement 4 d'entre eux sont des citoyens actifs. Être électeur, c'est donc exercer une fonction, et non disposer d'un droit. La participation politique des citoyens passifs est donc limitée, sans que leur qualité de citoyens soit niée.
Pour Sieyès, père de cette constitution, cette exclusion est légitime car le vote n'est pas un droit mais est une fonction, par conséquent seuls les individus ayant les capacités (intelligence, niveau économique) d'exercer cette fonction doivent y participer. Sieyès distingue les « citoyens actifs », ceux qui paient suffisamment d’impôts directs et qui sont capables de voter, des citoyens passifs, dont les ressources ne permettent pas une imposition, et incapables de voter. Sieyès justifie cette position en constatant que seuls les citoyens riches contribuent à la bonne marche de l'économie nationale et qu'il est par conséquent juste qu'ils influent sur la vie politique par le vote.

Sont citoyens français selon cette constitution : ceux qui sont nés en France d'un père français ; ceux qui, nés en France d'un père étranger, ont fixé leur résidence dans le Royaume ; ceux qui, nés en pays étranger d'un père français, sont venus s'établir en France et ont prêté le serment civique. Enfin ceux qui, nés en pays étranger, et descendant, à quelque degré que ce soit, d'un Français ou d'une Française expatrié(e) pour cause de religion, viennent demeurer en France et prêtent le serment civique. Ceux qui, nés hors du royaume de parents étrangers, résident en France, deviennent citoyens français, après cinq ans de domicile continu dans le royaume, s'ils y ont, en outre, acquis des immeubles ou épousé une Française, ou formé un établissement d'agriculture ou de commerce, et s'ils ont prêté le serment civique. De plus, le pouvoir législatif peut, pour des considérations importantes, donner à un étranger un acte de naturalisation, sans autres conditions que de fixer son domicile en France et d'y prêter le serment civique.
La citoyenneté française peut se perdre par diverses causes: la naturalisation en pays étranger, la condamnation aux peines qui emportent la dégradation civique, tant que le condamné n'est pas réhabilité, un jugement de contumace, tant que le jugement n'est pas anéanti, l'affiliation à tout ordre de chevalerie étranger ou à toute corporation étrangère qui supposerait, soit des preuves de noblesse, soit des distinctions de naissance, ou qui exigerait des vœux religieux.

Avec la Constitution de 1793, première constitution républicaine française, cette distinction entre citoyens disparaît, le suffrage devient universel masculin. Le critère de la citoyenneté devient alors l’adhésion volontaire à des valeurs politiques communes.
Tx.Ainsi, la Constitution de l’an I, dans son article 4, pose une définition très large du citoyen : « Tout homme né et domicilié en France, âgé de 21 ans accomplis, tout étranger âgé de 21 ans accomplis qui, domicilié en France depuis une année, y vit de son travail ou acquiert une propriété ou épouse une Française ou adopte un enfant ou nourrit un vieillard, tout étranger enfin, qui sera jugé par le corps législatif avoir bien mérité de l’humanité, est admis à l’exercice des droits des citoyens français. »
Cette citoyenneté se perd par la naturalisation en pays étranger, par l'acceptation de fonctions ou faveurs émanées d'un gouvernement non populaire, par la condamnation à des peines infamantes ou afflictives, jusqu'à réhabilitation. L'exercice des droits de citoyens est suspendu par l'état d'accusation et par un jugement de contumace tant que le jugement n'est pas anéanti.

Avec la Constitution de 1795, celle du Directoire, le suffrage universel disparaît, de même que la conception large de citoyenneté. Désormais, est citoyen, tout homme né et résidant en France, qui, âgé de vingt et un ans accomplis, s'est fait inscrire sur le registre civique de son canton (les jeunes gens doivent prouver qu'ils savent lire et écrire, et exercer une profession mécanique ou exercer les opérations manuelles de l'agriculture), qui a demeuré depuis pendant une année sur le territoire de la République, et qui paie une contribution directe, foncière ou personnelle. Les Français qui auront fait une ou plusieurs campagnes pour l'établissement de la République sont citoyens, sans aucune condition de contribution. L'étranger devient citoyen français, lorsque après avoir atteint l'âge de vingt et un ans accomplis, et avoir déclaré l'intention de se fixer en France, il y a résidé pendant sept années consécutives, pourvu qu'il y paie une contribution directe, et qu'en outre il y possède une propriété foncière, ou un établissement d'agriculture ou de commerce, ou qu'il y ait épousé une femme française.
L'exercice des droits de citoyen se perd par la naturalisation en pays étranger, par l'affiliation à toute corporation étrangère qui supposerait des distinctions de naissance, ou qui exigerait des vœux de religion, par l'acceptation de fonctions ou de pensions offertes par un gouvernement étranger, par la condamnation à des peines afflictives ou infamantes, jusqu'à réhabilitation. L'exercice des droits de citoyen est suspendu par l'interdiction judiciaire pour cause de fureur, de démence ou d'imbécillité, par l'état de débiteur failli, ou d'héritier de la succession d'un failli, par l'état de domestique à gages, par l'état d'accusation ou par un jugement de contumace, tant que le jugement n'est pas anéanti.
De plus, tout citoyen qui aura résidé sept années consécutives hors du territoire de la République, sans mission ou autorisation donnée au nom de la nation, est réputé étranger.
Rq.Avec cette constitution, les non-citoyens (domestiques, illettrés, pauvres) ne sont même pas citoyens passifs, ils sont totalement exclus du système politique.

Enfin, au XIXème siècle, avec la succession rapide des régimes politiques, le citoyen et la citoyenneté connaissent une éclipse et sont supplantés par d’autres concepts : celui de classe, cher à la doctrine marxiste, celui de nation, celui d’État. Cependant, même si le concept n’est plus à la mode, la pratique de la citoyenneté par la participation politique, notamment par l’exercice du droit de vote, s’enracine dans la vie quotidienne, des hommes en tout cas.

Section 2 : La citoyenneté contemporaine


Au XXème siècle, une citoyenneté pleine et entière est progressivement reconnue à des catégories auparavant exclues : les femmes (par l'ordonnance du 21 avril 1944) et les militaires (par la loi de 1972). Seuls demeurent exclus, de droit, les jeunes gens non majeurs (avant 18 ans) et les étrangers non communautaires (qui n’ont pas la nationalité d’un des pays membres de l’Union européenne).


La citoyenneté française est liée à deux conditions : la nationalité d'une part, et la jouissance des droits civils, civiques et politiques d’autre part.

La nationalité française s’acquiert
de plusieurs façons.
Tout d'abord par le « droit du sang » : est français tout enfant dont au moins l’un des deux parents est français.
La nationalité s'acquiert également par le « droit du sol » : un enfant né en France d’un parent étranger lui-même né en France est français de naissance (c'est ce que l'on appelle le "double droit du sol"). Pour l’enfant né en France de parents étrangers nés à l’étranger, la nationalité française lui revient automatiquement et de plein droit à sa majorité (c'est ce qu'on appelle le "droit du sol simple différé") s’il réside en France à cette date, et s’il a eu sa résidence habituelle en France pendant une période continue ou discontinue d’au moins 5 ans depuis l’âge de 11 ans. Avant sa majorité, il peut acquérir la nationalité sur demande de ses parents (entre 13 et 16 ans), ou sur demande personnelle (entre 16 et 18 ans), avec des conditions de durée de résidence en France. Depuis le 1er mars 2019, pour les enfants nés à Mayotte, l’acquisition de la nationalité française à raison de la naissance et de la résidence en France est soumise à la preuve qu’au moins l’un de ses parents résidait en France de manière régulière, sous couvert d’un titre de séjour, et de manière ininterrompue depuis plus de trois mois.
La nationalité s'acquiert également par le mariage.
Tx.Depuis la loi du 24 juillet 2006 relative à l’immigration et à l’intégration, un étranger uni à un conjoint français depuis quatre ans, et justifiant d’une communauté de vie affective et matérielle réelle, peut demander à acquérir la nationalité française.
Le délai est porté à cinq ans lorsque le demandeur ne justifie pas avoir résidé de manière ininterrompue pendant au moins trois ans en France à compter du mariage ou, en cas de résidence à l’étranger, lorsque son conjoint français n’était pas inscrit au registre des Français établis hors de France. Le demandeur doit également avoir un niveau de connaissance de la langue française suffisante, « selon sa condition ». Il ne doit pas avoir subi de condamnation pénale pour un crime ou un délit constituant une atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation ou un acte de terrorisme, ni avoir été condamné à une peine d’au moins 6 mois de prison sans sursis.
Ainsi, la communauté de vie entre les époux ne doit pas avoir cessé et ne doit pas cesser dans l’année qui suit l’enregistrement de la déclaration sinon il y aura présomption de fraude qui permettra au ministère public de contester l’enregistrement de la déclaration dans un délai de 2 ans (si le délit de mariage de complaisance est caractérisé, une peine de 5 ans d’emprisonnement est encourue ainsi qu’une amende de 15 000 euros). Le Gouvernement peut s’opposer à l’acquisition de la nationalité française dans un délai de 2 ans, à compter de la date du récépissé remis à l’intéressé lorsque l’ensemble des pièces ont été déposées, pour indignité ou défaut d’assimilation : il devra faire procéder à une enquête. Le demandeur doit respecter notamment les valeurs de la République telle que la tolérance, le principe de laïcité et d’égalité. Il doit également respecter ses obligations légales telles que payer ses impôts ou ses contraventions. Si le demandeur est en situation de polygamie effective ou s’il a été condamné pour violences ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente sur un mineur de 15 ans (telle que l’excision par exemple) cela équivaut obligatoirement à un défaut d’assimilation.

Enfin, il existe une procédure de naturalisation. Un étranger majeur, résidant habituellement sur le sol français depuis au moins cinq ans, peut demander à être naturalisé. La décision est prise de façon discrétionnaire par l’administration qui peut refuser la naturalisation même si les conditions sont réunies. La durée de résidence peut être réduite à deux ans si le demandeur a accompli avec succès deux années d’études dans un établissement d’enseignement supérieur français ou s’il a rendu, ou peut rendre, « des services importants à la France ».
Tx.Dans tous les cas, depuis la loi du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l’immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité, il doit justifier de son « assimilation à la communauté française » lors d’un entretien individuel. Celui-ci évalue, « selon sa condition » (le niveau d’études notamment), sa bonne connaissance de la langue française et des droits et devoirs conférés par la nationalité française, ainsi que des principes et valeurs essentiels de la République.
À l’issue de l’entretien, l’intéressé signe la Charte des droits et devoirs du citoyen. Le candidat doit aussi faire preuve de bonnes mœurs et ne pas avoir fait l’objet de condamnation empêchant l’acquisition de la nationalité française.

En France, les droits civils, civiques et de famille s’acquièrent à la majorité ou par la naturalisation, ils regroupent plusieurs droits. Il s’agit du droit de vote et d'éligibilité, du droit de porter une décoration, du droit d'exercer une fonction juridictionnelle ou d’être juré-expert, du droit de représenter ou d'assister une partie devant la justice, du droit de témoigner en justice autrement que pour y faire de simples déclarations, du droit de faire partie d’un conseil de famille, d’être tuteur (si ce n’est de ses propres enfants), curateur, subrogé tuteur ou conseil judiciaire, du droit de port d’armes, de faire partie de la garde nationale, de servir dans les armées françaises et du droit d’enseigner et d’être employé dans tout établissement d’instruction à titre de professeur, maître ou surveillant.
Il est possible à un citoyen français d'être déchu de ces droits et donc de perdre sa citoyenneté. En effet, l’interdiction des droits civiques, civils et de famille est une sanction pénale. Depuis l’entrée en vigueur du nouveau Code pénal en mars 1994, elle est devenue une peine complémentaire, ne revêtant donc plus de caractère automatique, et elle s'applique sur une durée temporaire. Avant cette date, les auteurs de crimes étaient privés des droits civiques, civils et familiaux durant toute leur vie et les auteurs de délits durant dix ans.
Tx.Désormais, selon l'article 131-26 du Code pénal, l'interdiction des droits civiques, civils et de famille porte sur le droit de vote et d'éligibilité, le droit d'exercer une fonction juridictionnelle ou d'être expert devant une juridiction, de représenter ou d'assister une partie devant la justice, le droit de témoigner en justice autrement que pour y faire de simples déclarations, le droit d'être tuteur ou curateur. Cette interdiction ne peut excéder une durée de dix ans en cas de condamnation pour crime et une durée de cinq ans en cas de condamnation pour délit. La juridiction peut prononcer l'interdiction de tout ou partie de ces droits. L'interdiction du droit de vote ou l'inéligibilité emporte l’interdiction ou l'incapacité d'exercer une fonction publique.

La déchéance de nationalité concerne uniquement les personnes qui ont acquis la nationalité française et qui possèdent une nationalité étrangère peuvent être déchues (interdiction de l’apatridie), elle est prononcée pour des motifs spécifiques, notamment pour atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation ou pour un crime ou un délit constituant un acte de terrorisme. Elle peut aussi viser un individu ayant commis « au profit d’un État étranger, des actes incompatibles avec la qualité de Français, et préjudiciables aux intérêts de la France », comme l’espionnage. En pratique, la totalité des récentes déchéances de nationalité concerne le terrorisme ; elles sont en augmentation depuis 2015 même si elles restent rares : une vingtaine depuis 2019, contre 16 entre 1996 et 2016.
Ex.Par exemple, en mai 2023, une Franco-Turque de 25 ans, née à Lyon, a ainsi perdu la nationalité française après avoir été définitivement condamnée en 2017 pour avoir projeté un attentat en France. Il s’agit de la première femme dans ce cas de figure en France.


Df.En France, la citoyenneté peut être définie comme l’octroi et l’exercice des droits politiques de vote et d’éligibilité dans le cadre d’une communauté politique formée par des citoyens réunis. La citoyenneté s’analyse par rapport aux droits qu’elle octroie et par rapport au cadre dans lequel elle s’exerce.

Tx.Ainsi, le citoyen se caractérise avant tout par les droits civiques qui sont attachés à sa qualité et que l’on retrouve en partie énumérés dans la Déclaration des Droits de L’homme et du Citoyen. La citoyenneté repose avant tout sur la liberté et l’égalité des droits (art. 1er). C’est la condition de son inscription dans l’espace public. Pour participer à l’activité politique, le citoyen se voit garantir ce que l’on appelle les droits et libertés de première génération. Il dispose de la possibilité de parler, d’écrire et d’imprimer librement (art. 11), sans être inquiété pour ses opinions (art. 10) ; ces droits civiques sont garantis par la force publique (art. 12) et plus particulièrement le droit de propriété (art. 17) ; la participation active du citoyen à la sphère politique passe par sa participation, directe ou par l’intermédiaire de ses représentants, à l’élaboration de la loi (art. 6) ou par son admissibilité à toute dignité, place ou emploi public (art. 6). Dans la Constitution de 1958, le citoyen est tout d’abord présenté comme le détenteur de la souveraineté qu’il exerce par l’élection de ses représentants (art. 3 de la Constitution de 1958).
Le rôle du citoyen est donc strictement inscrit dans la démocratie représentative. Les élections du Président de la République et de l’Assemblée nationale sont en fait les rares moments où tous les citoyens expriment leurs vœux de façon commune. Seul le référendum permet de consulter la collectivité des citoyens en dehors de ces élections. Au plan local, c’est le principe de la libre administration des collectivités locales qui garantit la participation des citoyens (art. 72 de la Constitution). Lors de la crise des Gilets Jaunes en 2018-2019, l’idée d’un référendum d’initiative citoyenne est avancée mais elle est repoussée par le gouvernement.

À ces droits correspondent des devoirs qui sont théoriquement la contrepartie des droits du citoyen. Mais sur un plan juridique, ils ne sont pas nombreux.
Tx.Le citoyen doit contribuer aux dépenses publiques à raison de ses facultés (art. 13 de la Déclaration des Droits de L’Homme et du Citoyen). S’il est agent public, il doit rendre compte de son administration (art. 15). Il doit enfin respecter la liberté d’autrui (art. 4) et se soumettre à la loi (art. 7).
En revanche, en France le droit de vote n’est pas obligatoire. De plus, depuis la réforme du service militaire, le citoyen échappe largement aux sujétions liées à la défense nationale.
Cependant, la notion de citoyenneté ne peut plus se réduire aux seuls droits politiques de vote et d'éligibilité.
Rq.Pour le sociologue britannique T.H. Marshall, il existe trois éléments qui composent la citoyenneté : les droits civils, les droits politiques et les droits sociaux.
La citoyenneté civile est composée de droits nécessaires à la liberté individuelle. Elle comprend notamment la liberté de la personne, la liberté de parole, de pensée, mais aussi le droit à la propriété privée, le droit de conclure un contrat, le droit à la justice et l'égalité devant la loi.
La citoyenneté politique, c'est la citoyenneté classique, qui concerne le libre exercice des droits politiques, le vote et l'éligibilité.
La citoyenneté sociale concerne les droits qui garantissent à chacun un niveau de bien-être économique et social. Ces droits sont apparus avec la naissance et la consolidation de l’État-providence ; il s'agit de l'assurance maladie, de l'assurance chômage, de l'instauration d'un salaire minimum...

La notion de citoyenneté n'est donc pas une notion figée, elle évolue, elle progresse et elle englobe de plus en plus de droits. Elle repose sur l’adhésion à un certains nombres de valeurs qui sont reconnues comme références majeures par la communauté des citoyens.
Avec l’Europe, une citoyenneté européenne se dessine.
Tx.Le traité sur l’Union européenne, signé à Maastricht le 7 février 1992, a institué une citoyenneté de l’Union. Cette citoyenneté recouvre les droits politiques mais aussi la libre circulation et le séjour ainsi que des garanties juridiques accordées aux citoyens d’États européens. Cette nouvelle citoyenneté comprend également le droit de pétition auprès du Parlement européen et le droit de déposer une plainte auprès du Médiateur européen, institué en 1995, en cas de mauvais fonctionnement d’une institution communautaire.

La véritable nouveauté réside dans les volets politique et administratif de la citoyenneté européenne.
Tx.En effet, les citoyens européens bénéficient d’un droit de vote et d’éligibilité aux élections municipales de l’État membre dans lequel ils résident (article 22 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE)).
Ils ne peuvent cependant être élus à des fonctions exécutives ou participer à la désignation des électeurs ou des membres d’une assemblée parlementaire. Ce droit de vote et d’éligibilité vaut également pour les élections au Parlement européen. Cette innovation majeure du traité de Maastricht souffre cependant d’un manque d’effectivité qui conduit à en relativiser la portée. Le taux de participation de ces « électeurs migrants » est en effet très faible.
Tx.Dans le volet politique, le second apport du traité sur l’Union européenne de 1992 réside dans la protection garantie par les autorités diplomatiques et consulaires de chaque État membre à tout citoyen de l’Union qui se trouve sur le territoire d’un pays tiers, dans lequel son État d’origine n’est pas représenté (article 23 du TFUE).
Enfin, un droit d’initiative citoyenne des lois a été créé par le traité de Lisbonne (article 11 du Traité sur l’Union Européenne) : un million de citoyens issus « d’un nombre significatif d’États membres » peuvent inviter la Commission à soumettre une proposition d’acte juridique à l’Union sur un sujet particulier.

Sy.La citoyenneté est aujourd’hui remise en question au niveau national. Faut-il dissocier nationalité et citoyenneté pour offrir le droit de vote à des non nationaux, au risque, peut-être de faire perdre à la notion de citoyenneté, son caractère d’adhésion volontaire à une communauté politique ? De plus, l’exigence de participation contenue dans le concept de citoyen n’est-elle pas en train de s’éroder au profit de la seule affirmation de droits liés notamment à l’État providence ? L’abstentionnisme, la fin du service militaire, le développement de la fraude fiscale, la montée des individualismes sont des signes d'une modification des rapports entre l’individu et le corps social. De nombreux citoyens sont ainsi persuadés n'avoir que des droits et pas de devoirs. La perte de repères, la crise de la représentation fragilisent la citoyenneté.
Fermer