Sujet : Les nouvelles formes d'inégalités.
En savoir plus
- Il est très important de commencer par définir le terme d' « inégalités ». Le terme est au pluriel donc il faut lister les différentes sortes d'inégalités possibles.
- « Inégalité » : différence d'accès à des positions ou ressources rares et socialement valorisées.
A distinguer de différence et de discrimination.- Différence/ inégalité/ injustice : différences « de la nature » ne constituent pas en soi des inégalités (sexe, taille, couleur de peau etc.) sauf si cette différence fait l'objet d'une hiérarchisation au sein d'une société donnée. Mais cette inégalité n'est pas forcément considérée comme injuste, si elle repose sur un principe de différenciation jugé légitime comme le mérite. Ex : des écarts de salaire (inégalités) sont considérés comme « justifiés » par la différence de qualification ; mais encore faut-il s'entendre sur le bien-fondé du critère de différenciation en question (pourquoi pas la pénibilité par ex ?), sur le bien-fondé de la taille de l'écart jugée comme plus ou moins légitime etc. Et qui tranche ? Conception culturelle/ située des inégalités (mouvante, propre à chaque société) et de la justice.
- Discriminations : terme largement employé dans les démocraties actuelles ; désigne traitement différent, producteur d'inégalité, subi par des individus en fonction de critères jugés illégitimes > ex : traitement différencié en fonction de la nationalité ou de la majorité civile pas jugé illégitime ; en fonction de la couleur de peau ou du sexe, si.
- « Inégalité » : différence d'accès à des positions ou ressources rares et socialement valorisées.
- L'autre terme central, qui permet de problématiser le sujet, est « nouvelles ». Il s'agit donc de situer le sujet dans le temps : anciennes versus nouvelles formes d'inégalités.
Idée dans le sujet d'un changement de forme > le débat n'est pas réduction, augmentation, voire disparition.
Suppose un avant/après: avant = inégalités en termes de classes sociales > après = inégalités liées aux catégories sociales ?
Sujet « à plat » qu'il faut faire l'effort de problématiser, ie le transformer en question.
Dans quelle mesure de nouvelles formes d'inégalités ont-elles remplacé, à partir des années 1970, les inégalités qui s'étaient constituées au sein de la société industrielle ?
I. Des transformations sociales qui ont fait émerger de nouvelles inégalités
A. La montée des inégalités intra-catégorielles
Les inégalités aujourd'hui sont de moins en moins inscrites dans le collectif. Montée des inégalités intracategorielles, par ex au sein d'une même PCS (par ex, entre les cadres (Boltanski, 1982, Les cadres ; ou, au sein de la catégorie ouvriers, entre insiders et outsiders).
Ce que Jean-Paul Fitoussi et Pierre Rosanvallon appellent un « nouvel âge des inégalités » : aux « inégalités structurelles »s'ajoutent des « inégalités dynamiques ».
Les premières, qui correspondent aux inégalités traditionnelles (hiérarchies des revenus, inégalités de conditions de vie selon les catégories socioprofessionnelles par exemple), se maintiennent voire s'accentuent. Les secondes traduisent un élargissement du champ des inégalités, il s'agit notamment d'inégalités intra-catégorielles qui procèdent d'une « requalification de différences à l'intérieur de catégories auparavant jugées homogènes ».
Ainsi, « les inégalités sont devenues « fractales », elles se répliquent au sein de chaque catégorie en fonction de dimensions nouvelles ».
Par exemple, les conditions d'insertion professionnelle – à niveau de qualification égal ou au sein d'une même catégorie sociale – peuvent être très différentes. Les enquêtes sociologiques démontrent alors que « le type d'intégration professionnelle a un meilleur pouvoir explicatif que la catégorie socioprofessionnelle pour tout ce qui relève de l'état de bien-être général (dans sa dimension physique, mentale et sociale) ». Ces nouvelles formes d'inégalités très liées donc aux transformations du monde du travail.
B. L'apparition de critères d'inégalités plus différenciés
- Sociétés plus multiculturelles + installation du chômage de masse conduisent à la montée en visibilité d'un nouveau critère d'inégalités : appartenance nationale ou ethnico-raciale.
- Arrivée des femmes sur le marché du travail salarié + augmentation de la sensibilité aux inégalités de genre conduisent de la même manière à la plus grande visibilisation des inégalités de genre (paradoxalement à une période d'égalisation des conditions hommes-femmes).
- Montée du chômage de masse > émergence également de la problématique des inégalités entre générations (Louis Chauvel,Le Destin des générations, 1998).
- Recomposition des inégalités territoriales.
II. Une évolution des paradigmes qui a amené un changement de regard sur les inégalités
A. De la fin annoncée des classes sociales...
- Tournant des années 1980 : montée en puissance d'un paradigme individualiste au détriment d'une sociologie « classiste » d'inspiration marxiste/ plus déterministe.
- Thèse de la « moyennisation » (Mendras).
- Contexte idéologique aussi : légitimation des inégalités en les expliquant davantage par la responsabilité individuelle (cf Castel). Volonté d' « encadrer » les prestations sociales (voire de culpabiliser leurs bénéficiaires).
- Les inégalités traditionnelles, liés aux classes sociales, font l'objet de moins de travaux durant les années 1980-90 (petit retour depuis).
B. ... à leur remplacement par d'autres approches des inégalités
- Thématiques « à la mode » de l'égalité des chances (dans la lignée de Rawls), de l'approche plus individualiste et juridique de la discrimination.
- Travaux sur l'intersectionnalité : prise en compte du genre et de l'ethnie qui permettent de renouveler les travaux classiques sur les inégalités de classe sociale.
En conclusion, on peut noter que ces nouvelles formes d'inégalités non seulement n'empêchent pas le maintien des inégalités traditionnelles mais, souvent, s'articulent avec elles.
- Caractère central des inégalités économiques avec dimension cumulative avec les inégalités sociales.
- Articulation entre inégalités de classe, de genre et ethnique (voire spatiales) ; articulation entre inégalités économiques et culturelles (cf. maintien des inégalités face à la réussite scolaire ou face aux pratiques culturelles > théorie de l'omnivore de Peterson.
- Concernant les générations, Chauvel montre l'articulation entre logique de générations et de classes mais aussi articulation des rapports de classe et de genre.