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Exemples en droit privé

Sujet n°1 : L'action en justice dans l'intérêt d'autrui (sujet d'actualité en procédure civile)



Tel que posé, le sujet renvoi à la notion d'action en justice (article 30 du Code de procédure civile) et plus précisément aux conditions de l'action en justice. En effet, pour pouvoir agir il faut avoir un intérêt à le faire c'est-à-dire tirer un avantage quelconque à la saisine du juge (moral, pécuniaire, patrimonial..). Or, cet intérêt, précise la jurisprudence, doit présenter certains caractères : il doit être né et actuel, légitime et surtout personnel.
Or, le sujet est « l'action dans l'intérêt d'autrui ». Cela semble contradictoire. Il convient de rechercher si cette situation est envisageable en procédure civile et d'identifier au brouillon les cas dans lesquelles cela peut se présenter. Il faut, d'une part, travailler sur le principe de base qui est l'exigence de cet intérêt personnel (origine de l'exigence, raison de cette dernière, manifestation de celle-ci)  Il faut, d'autre part, essayer de voir si l'action dans l'intérêt d'autrui est permise par le procédure civile française et si oui, identifier les cas possibles d'action dans l'intérêt d'autrui et les personnes physiques ou morales qui sont habilitées à porter ces actions en justice particulières.


Il ressort des différents éléments étudiés que s'opposent deux façons de considérer l'action en justice exercée pour autrui : celle classique qui proscrit l'action pour autrui et réserve l'action en justice uniquement à la protection de l'individu qui l'exerce et celle plus contemporaine qui permet d'ouvrir l'action à des personnes autres que celle titulaire du droit d'agir à titre personnel. La question est alors de savoir comment le droit procédural civil français est parvenu à combiner ces différentes conceptions.

  • Le plan doit être  la réponse à la problématique. Si votre problématique est claire et précise, le plan le sera également.

Quel type de plan adopter ?

  • La problématique repose sur le fait que la procédure civile française est ambigüe quant à la question de l'action dans l'intérêt d'autrui. Cette ambigüité doit ressortir dans le plan et il apparait clairement un mouvement, une « oscillation » entre d'un côté l'affirmation d'un principe clair : l'exigence d'un intérêt personnel et d'un autre côté la multiplication d'exceptions sporadiques en faveur de l'action dans l'intérêt d'autrui. Le plan peut être bâti sur cette idée.


Phrase d'attaque possible : Il est possible de partir de l'adage classique « nul ne plaide par procureur » ; Il est également possible de se baser sur l'actualité puisque qu'un projet de loi (avril 2013) actuellement en discussion au parlement vise à offrir aux associations agréées de consommateurs une action en réparation des préjudices individuels subis par un groupe de consommateurs lésés par un produit (class action).


Action (latin : actio ) : droit d'agir en justice ; droit subjectif processuel d'être entendu par le juge ; définition légale à l'article 30 du Code de procédure civile.
Action définie comme un droit autonome : par rapport au droit substantiel et par rapport à la demande en justice (acte)

Intérêt : notion imprécise : avantage que l'action est susceptible de procurer au plaideur (matériel ou moral). La demande doit être susceptible d'améliorer sa condition juridique. Utilité de l'action. Intérêt ne se confond pas avec le préjudice.
Appréciation souveraine par juges du fond.
Condition essentielle : pas d'intérêt, pas d'action.
Condition d'existence du droit d'agir (art. 31 Code de procédure civile).

Distinction intérêt/ qualité (titre juridique permettant d'exiger un examen de la prétention). Notions souvent confondues car la qualité se ramène à l'obligation de justifier d'un intérêt. Mais distinction possible :
  • Qualité = condition supplémentaire : restriction parmi les personnes ayant un intérêt à agir.
Les actions dites attitrées se rencontrent dans plusieurs domaines (divorce, état des personnes, nullité relative du contrat).
  • Qualité = condition autonome : action attribuée pour défendre un intérêt déterminé autre que son propre intérêt personnel

Intérêt d'autrui : intérêt individuel autre que l'intérêt personnel du demandeur.
Distinction :
  • intérêt général : intérêt de la société dans son ensemble (Seule le ministère public a compétence pour le défendre) ;
  • intérêt collectif : ce n'est ni l'intérêt général, ni la pluralité d'intérêts particuliers. Intérêt collectif d'une profession, grandes causes (lutte contre racisme et les discriminations par exemple).

En principe, la procédure civile française est claire : on ne peut agir en justice que pour défendre son propre intérêt. On ne peut donc pas agir en défense de l'intérêt d'autrui : « Nul ne plaide par procureur ».
Expliquer le sens de la règle et son évolution
Règle de plus en plus écornée.
Question d'actualité : Introduction dans notre droit d'une class action à la française.
Volonté de mettre en place une action de groupe permettant aux associations de consommateurs d'agir en justice pour demander réparation de préjudices individuels subis par des consommateurs. Hypothèse d'un préjudice de masse (tabac, produits de consommation...).

Idée émise par Jacques Chirac en janvier 2005 dans un discours. Souhait de mettre en place une meilleure protection des intérêts des consommateurs. Un groupe de travail se met en place et une première proposition émane de Serge Guinchard : mettre en place une « action en déclaration de responsabilité pour préjudice de masse ». Toutefois, ce n'est pas ce qui est finalement retenu dans le projet de loi déposé le 8 novembre 2006 visant à modifier le code de la consommation. (Projet de loi en faveur de la protection des consommateurs).
Le projet prévoit que seuls les préjudices matériels pourraient faire l'objet de cette action et pour un montant maximum de réparation de 2000 euros par plaignant. (peu satisfaisant). En janvier 2008, le projet devait être discuté. Mais pour des raisons politiques, il a été retiré de cette législature.

La question reste cependant d'actualité :
  • En janvier 2008, une mission de réflexion portant sur « l'objectif général de croissance » a été confiée à J. Attali. Parmi les propositions de cette commission, une action de groupe au profit des consommateurs.
  • Un autre groupe de travail chargé de réfléchir à la « dépénalisation de la vie des affaires » et présidé par J. M. Coulon a remis son rapport le 20 février 2008. Parmi les propositions visant à rendre la voie civile plus attractive, création d'une action de groupe avec système d'opt-in pour les consommateurs.
  • Enfin, sous la pression de l'Union européenne, le projet de loi relatif à la consommation du 30 avril 2013 voit le jour. Il vise à introduire la class action en matière de préjudice à la consommation dans le Code de la consommation aux articles L. 423-1 et suivants. Les associations agréées se verraient dotées de la faculté d'engager ces actions. Le projet est actuellement en discussion devant le parlement.

Au regard de ces éléments, se pose la question de savoir si la défense des intérêts d'autrui est possible dans notre système procédural civil actuel et si oui, à quelles conditions ?

Annonce de plan : A cette question, il est possible de répondre que le principe demeure celui de la prohibition de ce type d'action en droit français (I). Cependant, pour être en phase avec les exigences européennes et les évolutions du monde moderne (action des groupements), il apparaît que l'admission de l'action dans l'intérêt d'autrui se fait jour et se manifeste de façon sporadique (II).



Chapeau : Seul peut agir en justice celui qui a un intérêt propre à se manifester devant le juge. Effectivement, l'exigence d'un intérêt personnel demeure classique en procédure civile (A). Toutefois, il peut arriver que la personne titulaire du droit d'action soit dans l'impossibilité de l'exercer. Le droit procédural organise alors la possibilité d'une représentation à l'action qui ne méconnait pas l'exigence de principe d'un intérêt personnel (B).


Art. 31 du Code de procédure civile : l'action est ouverte àtous ceux qui ont un intérêt...
A qualité pour agir celui qui a un intérêt personnel au succès ou rejet d'une prétention. Dans ce cas qualité absorbée par intérêt : l'intérêt donne qualité à agir.
  • En principe, le droit d'action n'existe qu'au profit de ceux qui justifie d'un intérêt personnel à agir (caractère direct ambigu car renvoi au préjudice direct).
Le résultat de l'action doit donc pouvoir profiter personnellement à celui qui agit.
Justification : Le meilleur moyen d'assurer le respect de la règle de droit, c'est de confier sa défense à celui qu'elle intéresse personnellement.
  • La règle vaut aussi bien pour les personnes physiques que pour les personnes morales : Une personne morale a un patrimoine propre. Le groupement peut donc agir dans un intérêt personnel en invoquant par ex. une atteinte à l'un de ses droits patrimoniaux.
  • Donc impossibilité d'agir pour défendre l'intérêt de quelqu'un d'autre. C'est la formule un peu archaïque : nul ne plaide par procureur !
Cons. const. 25 juillet 1989 : valeur constitutionnelle au fait qu'une action individuelle ne peut être introduite contre la volonté de la personne concernée.
  • Si l'on n'agit pas dans un intérêt personnel, le droit d'agir n'existe pas. La demande est irrecevable. Sanction par une FNR (122).


=> L'exigence d'un intérêt personnel à agir n'exclut pas que l'on soit représenté à l'action. Nécessité de distinguer existence et exercice de l'action :
  • La condition d'intérêt est appréciée sur la tête du représenté qui est titulaire du droit d'action. C'est lui qui a qualité.
  • Le représentant exerce l'action et doit seulement justifier d'un pouvoir de représentation. Il n'a pas qualité mais pouvoir.
C'est donc seulement l'exercice de l'action qui est confié à un tiers. Mais ce tiers n'est pas titulaire du droit d'agir. Le titulaire du droit d'action est le représenté : c'est lui qui doit justifier d'un intérêt perso. (et donc de la qualité).
Il s'agit bien d'une action dans un intérêt personnel. Mais cette action est exercée par un représentant.
Le représentant n'est pas titulaire d'un droit d'agir dans l'intérêt d'autrui.
Il exerce l'action appartenant à autrui parce qu'il a reçu un pouvoir de représentation : un pouvoir d'agir au nom et pour le compte d'autrui.
Le représentant doit justifier d'un pouvoir qui l'autorise à agir. Il ne peut pas décider de sa propre initiative de représenter autrui.
Le pouvoir de représentation a différentes sources :
  • Pouvoir d'origine légale : Habilitation donnée par la loi => représentation d'un incapable, représentant légal d'une société.
  • Pouvoir d'origine judiciaire : Habilitation donnée par le juge => désignation d'administrateur ad hoc lorsque les intérêts d'un mineur sont en opposition avec ceux de ses représentants légaux.
  • Pouvoir d'origine conventionnelle : Mandat (nécessité d'une procuration écrite et spéciale) => syndic de copropriété peut agir au nom du syndicat des copropriétaires s'il est autorisé par un vote de l'assemblée générale ; représentant d'une association doit être désigné dans les statuts et dans le silence des statuts il faut une délibération de l'assemblée générale (Soc. 16 janv. 2008).
  • Sanction du défaut de pouvoir : nullité pour irrégularité de fond (article 117 du Code de procédure civile). Exception de procédure.

Transition : Il semble ressortir de ce qui a été vu que la procédure civile française ne laisse que peu de place à l'action dans l'intérêt d'autrui puisque le principe demeure celui de l'exigence d'un l'intérêt personnel et tout au plus, admet-on le mécanisme de la représentation. Cependant, depuis plusieurs années, la procédure a dû s'adapter aux exigences européennes qui poussent aux actions dans l'intérêt d'autrui. Par ailleurs, les exigences propres à l'action en justice des groupements (associations, sociétés...) ont conduit à l'admission ponctuelle d'actions dans l'intérêt d'autrui.


Chapeau : L'hypothèse est cette fois distincte de la représentation (titulaire du droit d'action est le représenté). Dans ce cas de figure, la personne est titulaire du droit d'agir pour défendre l'intérêt d'autrui. Elle a reçu qualité pour défendre un intérêt déterminé qui n'est pas son intérêt personnel (art. 31 in fine du Code de procédure civile). Le droit procédural organise alors une véritable atteinte à la règle « nul ne plaide par procureur » et ce, pour des raisons pragmatiques : offrir notamment aux groupements (associations, syndicat...) une potentialité d'action en justice plus adaptée à leur particularité. Ainsi, si l'action dans l'intérêt d'autrui est accrue au profit des groupements (A) ; elle demeure limitée au profit des particuliers (B).


Action des syndicats dans l'intérêt personnel d'un salarié : substitution syndicale.
  • La loi peut autoriser un syndicat à agir pour défendre l'intérêt individuel d'un salarié (ou plus.). Les habilitations législatives se sont multipliées dans le Code du travail.
Ex.Ex. : possibilité d'agir pour faire respecter le principe d'égalité entre hommes et femmes (art. L 1144-2 du Code du travail.), pour protéger victime d'une discrimination (1134-2 du Code du travail).
  • Le syndicat n'a pas à justifier d'un mandat du salarié. Ceci montre qu'il ne s'agit pas d'une représentation mais d'une action de substitution. Les actes de procédure sont établis au nom du syndicat.
  • Le but est d'assurer la protection des victimes de violation du droit du travail en évitant un procès entre l'employeur et son salarié. Protection de salariés placés dans une situation d'infériorité ou de précarité.
  • Le salarié doit être informé par écrit et ne pas s'être opposé à l'action (silence de 15 jours vaut acceptation). Il peut intervenir à l'instance et y mettre fin.
  • On pourra voir dans ce mécanisme l'existence d'un mandat tacite et donc d'une représentation. Il n'en est rien et la jurisprudence st en ce sens : il s'agit « d'une action de substitution qui est personnelle au syndicat et non une action en représentation » (Soc. 1er fév. 2000).

=> Il s'agit donc bien d'une action propre du syndicat qui a qualité à agir dans l'intérêt d'autrui.


La défense collective des intérêts individuels de leurs membres (Ligues de défenses)
Certaines associations sont constituées pour rassembler des personnes dont les intérêts individuels sont atteints (ex. : association d'usagers, comité de soutien...).
  • La jurisprudence civile admet l'action de l'association en défense de l'intérêt de ses membres : théorie de « l'action associationnelle ».
  • Il faut que cette défense soit prévue par le pacte social. Les membres, pas forcément tous, doivent avoir subi une atteinte à leurs intérêts individuels. Ils peuvent agir en même temps que l'association (ce qui exclut l'idée de mandat).
  • Atteinte à la règle « nul ne plaide par procureur » : l'association n'agit pas en défense de son intérêt personnel (certains y voient néanmoins un préjudice par ricochet pour l'association...). Elle agit pour la défense de l'intérêt individuel des membres.
  • Ici la qualité à agir n'est pas attribuée par la loi mais par la jurisprudence (civile).
  • Moyen d'assurer une défense plus efficace d'intérêts particuliers.

•  L'action en représentation conjointe
  • Action autorisée par la loi du 18 janv. 1992 pour les associations de consommateurs agréées. L'association va agir en réparation du préjudice subi individuellement par des consommateurs si ce préjudice est causé par le même professionnel.
Il faut un mandat écrit donné par 2 consommateurs au moins. L'exigence d'un mandat pourrait donc laissait entendre qu'il s'agit d'une hypothèse de représentation à l'action. Cependant, l'action confine à une action propre de l'association => Hypothèse hybride.
Remarque : peu de succès en pratique (Conditions d'ouverture strictes et couteuses).
  • Action étendue aux associations agréées de protection de l'environnement (loi 2 fév. 1995) et d'investisseurs en produits financiers (loi 8 août 1994).

Autre hypothèse :
  • La loi du 16 nov. 2001 a permis aux associations de la lutte contre les discriminations d'exercer toutes les actions naissant d'une discrimination en droit du travail (art. L. 1134-3 du Code du travail.). Action en faveur d'un salarié ou d'un candidat à un emploi. Il faut l'accord écrit de l'intéressé qui peut toujours intervenir à l'instance et y mettre un terme => Lien avec le schéma de la substitution syndicale.
  • Un décret du 20 août 2008 étend le champ d'action des associations de lutte contre les discriminations. Un article 1263-1 du Code de procédure civile prévoit désormais que ces associations peuvent exercer les actions en justice qui naissent de la loi du 27 mai 2008 en faveur de la victime d'une discrimination (loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire en matière de lutte contre les discriminations). Nécessité d'un accord écrit.
  • Loi du 13 février 2014 sur la consommation qui introduit en France pour la première fois l'action de groupe au profit des associations habilitées de défense des consommateurs. Ces dernières auront la possibilité de saisir le juge après avoir été averties de l'existence d'un préjudice de masse. L'action est enclenchée sans mandat à la base. Véritable action pour autrui. La loi n'a pas encore été promulguée et fait ce jour l'objet depuis le 17 février d'un recours auprès du Conseil constitutionnel. A suivre...
Ceci confirme la tendance d'une plus grande admission de l'action des associations.



=> Quelques hypothèses permettent de penser qu'une personne physique peut agir dans l'intérêt d'autrui. En réalité ces hypothèses sont très discutées car certains y voient de simples techniques de représentation.

L'action sociale ut singuli
  • Action exercée par un ou plusieurs associés d'une société contre les dirigeants pour demander réparation du préjudice subi par leur société dans l'hypothèse d'une faute de gestion (ex. : art L. 223-22 du Code de commerce pour les sociétés commerciales).
  • L'action intentée est celle de la société et c'est sur la tête de la société qu'est apprécié l'intérêt à agir.
  • Certains auteurs estiment qu'il s'agit d'une hypothèse de représentation (pouvoir). D'autres y voient une action de substitution dans laquelle le substituant a une action propre (qualité pour exercer l'action d'autrui).

L'action oblique
  • Art. 1166 du Code civil : les créanciers peuvent exercer tous les droits et actions de leur débiteur, à l'exception de ceux qui sont exclusivement attachés à la personne.
Hypothèse du débiteur négligent, ce qui met en péril les intérêts de son créancier.
  • Là encore doctrine très divisée :
Certains y voient une représentation du débiteur : l'action oblique n'est pas une action propre du créancier mais l'action du débiteur exercée indirectement au nom et pour le compte du titulaire (Jean Carbonnier).
D'autres estiment qu'il ne s'agit pas d'une représentation mais d'une substitution au débiteur défaillant (action propre du substituant). Jurisprudence semble plutôt en ce sens.

A titre conclusif, le sujet se prête à une ouverture brève sur la mise en place dans le domaine du droit de la consommation de class action au profit d'associations agrées courant 2014 par le projet de loi relatif à la consommation. (Lorsque ce projet sera adopté, les éléments de droit positif issu de la loi nouvelle pourront être intégrés au II-A-2°).

Sujet n°2 : Le principe de loyauté dans le procès civil



Le sujet ici proposé peut surprendre dans le sens ou dans les principes directeurs du procès civil (article 1 à 24 du Code de procédure civile), il n'est fait aucune allusion à un tel principe dans ce type de procès. Pire encore, il semble que d'autres principes déjà présents dans le Code suffisent à garantir une forme de loyauté dans les échanges entre les parties et dans le rapport au juge. Le principe du contradictoire notamment, institué à l'article 16 du Code de procédure civile en est l'exemple marquant. Il s'adresse d'ailleurs aux rapports entre les parties et au juge lui-même. Cependant, au terme d'une recherche rapide, il apparait que la jurisprudence laisse apparaître une référence fréquente à ce principe : loyauté des preuves, loyauté des débats...Depuis le début des années 2000, ce principe est utilisé de manière récurrente par les cours et tribunaux et sa consécration est réelle de la part de la Cour de cassation. La difficulté du sujet réside donc dans cette situation paradoxale de l'absence de textes consacrés à ce principe et de sa consécration jurisprudentielle.


Il existe au regard des éléments précédemment évoqués qu'il y a une incohérence entre les textes et la jurisprudence. L'absence de textes en la matière ne veut pas forcément dire que le principe n'a pas de consistance effective puisqu'il est quotidiennement utilisé devant les cours et tribunaux français ; Par conséquent se pose la question de sa place effective, de son impact réel et de son utilité dans le procès civil français.


  • Le plan doit être  la réponse à la problématique. Si votre problématique est claire et précise, le plan le sera également.

Quel type de plan adopter ?

  • La problématique repose sur le fait que le principe de loyauté n'est pas connu des textes de la procédure civile française, mais qu'il semble mis en exergue par la jurisprudence qui en fait un principe incontournable du procès civil. Dès lors se pose la question de la consistance effective du principe de loyauté dans le procès civil. Cette  interrogation doit ressortir dans le plan et il doit laisser clairement apparaître l'hésitation que l'on peut avoir sur la réalité et l'intérêt de ce principe. En effet, du fait de l'absence de consécration textuelle, sa valeur semble incertaine. Par ailleurs, la jurisprudence est constante sur l'application concrète de ce principe dans le procès civil.


Phrase d'attaque possible : Il est possible de partir de la décision de la première chambre civile de la Cour de cassation du 7 juin 2005 qui consacre officiellement le principe de loyauté des débats dans le procès civil en reprenant les mêmes termes que ceux utilisés par le Code de procédure civile pour le principe du contradictoire, mais en les adaptant ici au principe de loyauté. Volonté de consacrer un nouveau principe directeur du procès civil ?


=> « la loyauté » : le mot « loyauté » est dérivé de « loyal » qui est issu, par évolution phonétique de « legalis » c'est-à-dire de ce qui est conforme à la loi. A l'origine donc les termes légal et loyal étaient proches.
Ils se sont ensuite distingués, le terme « loyal » perdant son sens juridique pour désigner les valeurs morales de droiture et de probité Dans le langage d'aujourd'hui, la loyauté est une notion qui relève davantage de la morale que du juridique. En ce sens, elle peut être distinguée de la légalité au sens strict qui désigne la conformité d'un comportement à une règle spécifique et écrite. La loyauté est une notion beaucoup plus vaste et donc plus fuyante.

Le terme « loyauté » n'est donc pas un terme juridique mais il infiltre de nombreux domaines juridiques. Ainsi, il est question de loyauté :
  • En matière de concurrence : concurrence déloyale.
  • En matière contractuelle : bonne foi au stade de l'exécution (art. 1134 al. 3). Mais le principe de bonne foi s'étend aujourd'hui à la période pré-contractuelle et à la conclusion du contrat.
  • En matière processuelle : la loyauté désigne alors selon le Voc juridique Cornu « le bon comportement qui consiste pour chaque adversaire à mettre l'autre à même d'organiser sa défense en lui communiquant en temps utile ses moyens de défense et de preuve ».
Cette dernière définition établit donc un lien évident entre la loyauté et le procès.

=> « le procès » : deux sens
  • litige soumis à un tribunal, contestation pendante devant une juridiction : sens plus subjectif non retenu ici.
  • terme synonyme de procédure, d'instance : sens à retenir car étudier la loyauté ds le procès civil, c'est s'interroger sur le respect des règles de droiture lors de l'instance et ceci indépendamment de toute idée de contestation soumise à un juge.
=> « le procès  civil » :
exclusion donc des autres procès : pénal et adm même si des préoccupations similaires peuvent se rencontrer : question de la loyauté de la preuve dans le procès pénal = question récurrente ds la jurisprudence de la ch criminelle de la cour de cassation

=> « dans le »  à distinguer de « lors de » : ce qui nous intéresse ici ce n'est  pas le fond du litige (par exemple l'examen par le juge des conditions d'exécution d'un contrat pour savoir si l'une des parties a agi de façon loyale). Seule la forme importe. Il faut se demander si les règles de procédure civile garantissent la loyauté des débats, des échanges...

  • A priori, le principe de loyauté n'est pas un principe qui traditionnellement intéresse le procès civil.
Rq.Remarque : en comparaison, les pénalistes se sont plus tôt intéressés à la question. Ainsi Bouzat dans un article paru aux mélanges Hugueney en 1964 intitulé « la loyauté ds la recherche des preuves » tentait déjà de définir la loyauté. Selon lui, « la loyauté est une manière d'être dans la recherche des preuves conforme au respect des droits  de l'individu et à la dignité de la Justice ».

  • Le terme n'apparait pas ds l'index du Code de procédure civile.
  • Pourtant, la loyauté préoccupe :
    • La doctrine (thèse notamment celle de Emma Boursier + articles notamment : Miniato : L'introuvable principe de loyauté en procédure civile : D. 2007, chron p. 1035). Certains l'envisagent comme un nouveau principe directeur du procès.
Proposition en ce sens dans le rapport Magendie I de 2004.Il suggère que l'article 2 du CPC soit ainsi rédigé « les parties diligentent loyalement la procédure sous les charges qui leur incombent ... »
    • Les juges : La jurisprudence insiste de plus en plus sur l'exigence de loyauté au sein du procès.
    • Principes Ali-Unidroit (ppes et règles transnationales de procédure civile) prévoient qu'une partie qui a agit de mauvaise foi pendant le procès peut être condamnée à une amende.
Elle est même présentée comme étant une question à la mode (v. Perrot : RTD civ. 2006, p. 151 pour qui « la loyauté tend à devenir une tête d'affiche tant chez certains auteurs qu'en jurisp »).


Au regard de ces éléments, Qu'est ce qui rend la loyauté aussi essentielle aujourd'hui ?

=> La loyauté est-elle un nouveau principe directeur du procès civil ? Quelle est sa place effective dans le procès civil ?

Annonce de plan : A cette question, il est possible de répondre que la valeur de ce principe demeure incertaine (I). Pour autant, la jurisprudence consacre de manière constante l'application effective de ce dernier (II).


Chapeau : La difficulté pour apprécier la valeur du principe de loyauté dans le procès civil provient de l'ambiguïté de sa consécration. En effet, il n'a y a pas à proprement parler une consécration réelle. Cette dernière apparaît douteuse (A). Par ailleurs, bien pire, son autonomie peut par ailleurs sembler discutable. En effet, d'autres principes directeurs du procès civil lui fond « de l'ombre » (B).


  • Silence des textes. Aucune des dispositions du Code de procédure civil ne font allusion à ce principe. En particulier, les principes directeurs : article 1 à 24 de ce code ignorent la loyauté. Il y a une non prise en compte textuelle de la proposition du rapport Magendie de 2004 qui visant à introduire ce principe nouveau.
  • Cependant, on peut être perdu car il existe une réelle consécration jurisprudentielle. : Cass. civ. 1e, 7 juin 2005 (D. 2005, p. 2570) vise loyauté des débats dans une formule calquée sur celle de l'art. 16 du Code de procédure civile.
Dès lors on peut s'interroger sur le ou les fondements de cette consécration ? (lien avec art. 6 CEDH) => Portée générale ? En tout cas, moyen autonome de cassation.


  • Question de l'utilité du principe : norme autonome de référence ?
  • Articulation et recoupements avec d'autres principes :
=> Principe du contradictoire de l'article 16 du Code de procédure civile.
Affirmation classique : le contradictoire est la garantie d'une justice loyale (Solus et Perrot). Voir en ce sens, l'art. 763 du Code de procédure civile : Le juge de la mise en état veille au déroulement loyal de la procédure, spécialement à la ponctualité de l'échange des conclusions.
=> Devoir de coopération à la manifestation de la vérité (art. 10 Code civil)
=> Loyauté du juge recoupe son exigence d'indépendance et d'impartialité ?
  • Certains dénoncent son inutilité car la loyauté recouperait le principe de la légalité. Cependant, le principe de loyauté est peut-être utile car il permet d'aller plus loin en sanctionnant ce qui n'est pas illégal. Voir la comparaison entre loyauté et légalité/ liciété spécialement  à propos de la preuve.
Transition : Il semble ressortir de ce qui a été vu que le principe de loyauté peine à trouver une assise solide. Sa valeur reste incertaine. On doute de son utilité et de son autonomie par rapport à d'autres principes directeurs du procès civil. Et il est possible de penser que tant que le législateur n'interviendra pas, il en sera ainsi. Cependant, il est impossible de nier son utilisation toujours plus grande et l'on ne peut que constater les manifestations effectives et fortes de ce principe au cœur du procès civil.


Chapeau : Le principe de loyauté tel que développé par les cours et tribunaux va trouver à s'appliquer de manière forte dans deux secteurs du procès civil. Il y a par conséquent une exigence de la loyauté dans la preuve qui doit être apporté dans le procès civil  (A) et une exigence de loyauté dans le déroulement des débats ayant lieu dans le procès civil (B).


=> Loyauté dans la production des éléments  de preuve
  • Exigence de loyauté et production forcée de pièces :
Loyauté vecteur de transparence et s'oppose aux stratégies de dissimulation de la part de ceux qui détiennent des éléments de preuve. ? Preuve favorisée par la loyauté
  • Exigence de loyauté et production spontanée des pièces :
Voir la jurisprudence qui autorise qu'une pièce soit produite à l'audience en dehors des cas limitativement énoncés à l'article 445 du Code de procédure civile (note en délibéré) dès lors que la pièce en question, déterminante pour l'issue du litige, était connue de la partie adverse, laquelle s'était abstenue de la produire dans la mesure où elle lui était défavorable :
Cass. civ. 1e 7 juin 2005 (D. 2005, p. 2570) : CA ne saurait écarter des débats une pièce produite en cours de délibéré par une partie, alors que cette pièce, comportant des éléments susceptibles de modifier l'opinion des juges, lui a été adressée le jour même  de l'audience de plaidoiries mais avait été reçue par l'adversaire qui s'était abstenu de la communication, plus d'un mois avant la clôture des débats.

Cet arrêt va très loin car il sous-entend que l'adversaire aurait du communiquer spontanément cette pièce défavorable

=> La loyauté dans l'obtention des éléments de preuve
La preuve obtenue de manière déloyale est déclarée irrecevable.
  • Jurisprudence abondante de la chambre sociale :
Cass Soc. 20 novembre 1991 : refuse d'admettre comme mode de preuve des fautes du salarié, l'enregistrement effectué au moyen d'une caméra dissimulée sur le lieu de travail en précisant alors que « si l'employeur a le droit de contrôler et de surveiller l'activité de ses salariés pendant le temps de travail, tout enregistrement, quels qu'en soient les motifs, d'images ou de paroles à leur insu, constitue un mode de preuve illicite ».
Dans le même sens, Cass. Soc. 14 mars 2000 : « seul l'emploi de procédé clandestin de surveillance est illicite ». Par conséquent, constituent un mode de preuve valable des écoutes téléphoniques dont les salariés ont été dûment avertis. Peu importe alors que le procédé ait englobé des conversations tenues à titre privé, l'essentiel étant que le salarié n'ait pas été dupé et ainsi empêché de mesurer la portée de ses paroles. Dans cette circonstance, la récolte de la preuve se fait loyalement.
Critère d'appréciation plus affiné : preuve par SMS  n'est pas déloyale (Cass. soc., 23 mai 2007, JCP 2007, II, 10140, note Weiller).
  • Loyauté de la preuve également affirmé par la chambre commerciale :
CA a pu valablement écarter des débats un enregistrement téléphonique obtenu de façon déloyale : Cass. com., 25 fév. 2003, (Comm. com. élec. 2004, n° 43).
Plus récemment, Cass. com. 3 juin 2008 : « l'enregistrement d'une communication téléphonique réalisé par une partie à l'insu des l'auteur des propos constitue un procédé déloyal rendant irrecevable sa production à titre de preuve.
  • Alignement de la 2e chambre civile :
Civ. 2e 7 oct. 2004 (D. 2005, jurisp p. 122): au visa de l'article 9 CPC et de l'article 6 CSDH : « l'enregistrement d'une conversation téléphonique privée, effectuée et conservé à l'insu de l'auteur des propos invoqués, est un procédé déloyal rendant irrecevable en justice la preuve ainsi obtenue » :
Référence à la loyauté mais implicite. Néanmoins, le visa de l'article 6 de la CSDH est une indication de l'importance  conférée à la loyauté : elle apparait comme un élément du droit à un procès équitable

La loyauté des débats a été affirmée avec force par Cass. Civ. 2e 23 octobre 2003 (bull civ II n°326 ; D. 2003 IR p. 2726) : hypothèse dans laquelle des conclusions récapitulatives déposées à 8 jours de l'ordonnance de clôture ont été déclarées irrecevables en raison du comportement déloyal du plaideur qui avait déjà, précédemment, le jour même pour lequel la clôture de l'instruction était annoncée, déposé des conclusions et communiqué des pièces dt l'irrecevabilité pour cause de tardiveté avait été soulevée (sanction compte tenu du comportement passé).

La loyauté impose alors une communication mutuelle et ponctuelle des moyens et preuves. Les liens entre la loyauté et le  principe du contradictoire sont alors évidents.

Mais la référence à la loyauté présente une réelle utilité car :
  • Le principe du contradictoire crée l'obligation de communication entre les parties. Il est à l'origine de cette obligation mise à la charge des parties.
  • La loyauté sert plutôt à expliquer ce que doit être une mise en œuvre effective et régulière de la contradiction. Aspect plus pratique. En ce sens,  l'article 763 du cpc énonce que le juge de la mise en état « a mission de veiller au déroulement loyal de la procédure spécialement à la ponctualité de l'échange des conclusions et de la communication des pièces » : loyauté = notamment ponctualité.
  • V. la jurisp relative aux conclusions tardives : on constate alors que la loyauté sert de critère pour décider du rejet ou non  de pièces ou conclusions tardives.
Ainsi : Cass. civ. 2ème, 2/12/2004 (Bull civ. II n°514 ) constitue un comportement contraire à la loyauté des débats tendant à surprendre l'adversaire la communication, quelques instants avant la clôture, laquelle avait été reportée à deux reprises, d'une pièce détenue depuis plusieurs mois.
V. aussi Cass. civ. 2ème 4/3/2004 (Bull. Civ. II n°91) à propos du dépôt d'ultimes conclusions et de la  communication d'une nouvelle pièce le jour même de l'ordonnance de clôture alors que la date de celle-ci avait déjà été repoussée.
V. aussi Cass. civ. 2ème 23/10/2003 : Bull civ. II n° 326 : op cit.
Implications nouvelles ? => Principe de concentration des moyens.
Consacré par la Cour de cassation, AP, 7 juillet 2006 (Cesareo). Certains y voient une implication de l'exigence de loyauté procédurale.
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