Commentez le texte suivant en vous aidant du cour et de quelques manuels. Le contexte est celui de la régence de Philippe d'Orléans et du destin du testament successoral de Louis XIV. La thématique juridique est, quant à elle, celle des lois fondamentales du royaume et le sujet, celui de l'indisponibilité de la couronne. Il faut donc replacer le document dans son contexte historique, tout en insistant sur les points de droit pour construire le plan.
Edit de juillet 1717 (Isambert, Rec. gén. des anc. lois françaises, t. XXI, p. 141).
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Le 2 septembre 1715, au lendemain de la mort du roi Louis XIV, se tient une séance solennelle dans la grand chambre du Parlement de Paris, réunissant les cours souveraines, les princes du sang et les ducs et pairs. Il s'agissait de la coutume pour proclamer la Régence ; c'est à cette occasion que le duc d'Orléans, Philippe, se fait proclamer régent. Au cours de la séance il est donné lecture du testament de Louis XIV et de l'édit d'août 1714 relatif au droit de succession des bâtards. C'est tout l'enjeu du document à commenter, l'édit du 1er juillet 1717 pris par le jeune roi Louis XV. Il invite à réfléchir à la notion de lois fondamentales du royaume et de théorie statutaire.
Dès 1716, en effet, le régent Philippe d'Orléans avait demandé à Louis XV un lit de justice pour revenir sur la décision de Louis XIV modifiant la coutume successorale (I) et ainsi rappeler la règle d'indisponibilité de la couronne, au risque de révoquer l'acte pris par le roi soleil deux ans auparavant légitimant ses fils adultérins (II).
I. L'« attentat à la couronne »
A la fin de son règne, Louis XIV est confronté à une grave crise successorale (A). Fort de son autorité exceptionnelle, il n'hésite pas à substituer sa propre volonté à la coutume dynastique (B). C'est ce que rappelle Louis XV au début de son édit.
- A. Une crise successorale
C'est dans ce contexte difficile que Louis XIV décide de réagir en outrepassant ses droits de monarque et en disposant le couronne.
- B. Louis XIV viole la loi de succession dynastique
Cet acte constitue une violation manifeste des lois fondamentales du royaume. Il cause du reste une émotion considérable dans l'entourage royal, risquant de nuire au « bien de l'État ». C'est ce qu'exprime clairement l'édit de 1717 qui déclare que la décision de Louis XIV est « le sujet d'une division présente entre les princes de notre sang et les princes légitimés, dont les suites commencent à se faire sentir, et que le bien de l'état exige qu'on arrête dans sa naissance ». Saint-Simon y voit à l'époque un véritable « attentat à la Couronne ». Il propose même dans ses Mémoires sur les légitimés de 1720, de juger « criminel de lèse-majesté » l'auteur de cette « disposition si monstrueuse [...], nulle en soi, honteuse pour lui, injurieuse à la nation, si dangereuse pour ceux qui règnent tour à tour suivant la loi salique, odieuse aux hommes et impie devant Dieu ».
Selon les termes mêmes de l'édit de Louis XV, « le bien de l'État » exigeait donc « qu'on arrête dans sa naissance » « le sujet » de cette division.
II. Les lois fondamentales supérieures à la volonté du prince
La violation royale de la loi de succession est si manifeste à l'époque que les princes du sang, les grands et tous les corps constitués auraient pu rappeler le roi au respect des lois fondamentales. Mais en 1714 ils n'en ont ni l'intention ni les moyens tant le roi conserve toute son autorité. Ce n'est qu'après sa mort, le 1er septembre 1715, qu'est officiellement rappelée la règle d'indisponibilité de la couronne (A) et qu'est entérinée, par l'édit de 1717, la révocation de la déclaration royale de 1714 en faveur des légitimés (B).
- A. L'indisponibilité de la couronne : un principe réaffirmé par Louis XV
Dans l'édit de Marly, Louis XIV avait en effet confondu héritier et successeur. Or la succession au trône de France n'est pas simplement héréditaire : elle est surtout statutaire, c'est-à-dire réglée par des normes particulières qui lui sont propres. Le futur roi, avant même d'accéder au trône et du vivant du roi régnant, possède déjà un droit à succéder qu'il tient directement de la coutume et dont il ne peut être privé ; il est l'héritier nécessaire. Même le grand Louis XIV ne pouvait donc modifier l'ordre successoral en se donnant des successeurs par légitimation. Les édits d'août 1374 et de novembre 1392 avaient d'ailleurs déjà formellement exclu les bâtards de la succession royale, lesquels ne furent effectivement jamais admis au trône.
Le conseil de régence statuant en juillet 1717 ne pouvait donc que redire le droit.
- B. La révocation
Louis XV déclare donc solennellement à la fin de l'édit et sur le fondement des lois fondamentales : « À ces causes [...] révoquons et annulons ledit édit du mois de juillet 1714 et ladite déclaration du mois de mai 1715 ». La décision de Louis XIV était définitivement annulée. Maigre consolation pour le duc du Maine et le duc d'Anjou, ils sont conservés dans leurs honneur et dignité mais sans toutefois « qu'ils puissent se dire et qualifier princes de notre sang, ni que ladite qualité puisse leur être donnée ». Un an plus tard néanmoins, le lit de justice du 26 août 1718 leur fait perdre ces mêmes honneurs.
Avec l'édit de 1717 on observe que les règles qui président à la succession royale constituent un ordre statutaire qui assure, au-delà de la personne du roi et de sa volonté, permanence et continuité à l'Etat.