» Acquisition
Introduction
Questions sur le texte :
« Avant-propos Une longue carrière passée en compagnie du droit invite à poser les questions essentielles. Qu’est-ce que « le Droit » ? Comment se forme-t-il ? Pourquoi toute société exige-t-elle un droit ? D’où vient cette singulière habitude de respecter les lois, auxquelles seuls quelques « anormaux » n’obéissent que contraints ? La réponse, dira-t-on, appartient aux philosophes. Mais l’historien du droit qui parcourt les siècles, visite des sociétés aux fortunes diverses, ne peut échapper à de telles interrogations. Les Manuels qu’il fréquente consacrent des chapitres aux « sources du droit ». le terme est ambigu. Il s’entend des documents qui font connaître les règles, leur mise en œuvre, l’indifférence ou le mépris qui les mènent à l’oubli. Ce sont, dit-on parfois, les « sources historiques ». « Les sources » sont aussi les actes créateurs des règles, les hommes qui les suscitent ou les imposent, Souverains, législateurs, juges, praticiens, docteurs, ou discrets conseillers, qui, parfois dictent le droit. On est ainsi conduit au cœur du problème, lorsque, dépassant l’étude des documents, sans doute indispensable, on s’attache à l’apparition des règles, à leur domination et, finalement à leur déchéance. Il s’agit alors de « la naissance du droit », ou, plutôt, si l’on prête attention aux variétés du Monde, de « la naissance des droits ». Naissance parfois difficile, qui exige la force et impose la contrainte ; naissance presque insensible dans d’autres circonstances, lorsque le groupe social se trouve progressivement enserré par des règles, qu’il na pas vu venir. L’Histoire offre des exemples des unes et des autres, avec, pour chacune, de multiples variantes. Elle en connaît même qui échappent à ces cadres, commodes, mais trop simplistes. Historien, nous suivrons ces « naissances », lorsque des documents (écrits ou solides traditions) le permettent (…). La diversité de ces « naissances » est liée à l’histoire des régimes politiques, royaumes, républiques, cités ou empires. On pourrait donc en suivre le développement progressif dans leur succession chronologique, depuis les royautés mésopotamiennes du IIIe millénaire avant notre ère jusqu’aux mutations d’un IIe millénaire qui va vers sa fin. Une autre voie mérite d’être explorée, encore que l’on n’en puisse méconnaître les risques. Le fil directeur sera de se demander « d’où vient le droit » ? Qui le crée et l’impose, selon quelles procédures, au nom de qui, ou de quoi ? Partant de ces questions majeures, peut-être sera-t-il possible de saisir de plus près celle qui les domine toutes : Qu’est-ce que le droit et d’où vient-il ? Dans un telle perspective nous rencontrerons d’abord un droit sans juristes ? Puis, modifiant les axes de nos prises de vue, nous nous attacherons successivement : - aux Législateurs, dont la volonté fait le droit, - aux Juristes, praticiens, docteurs, juges, qui le préparent, l’enseignent ou le modèlent. Paris, novembre 1996 »
J. Gaudemet, Les naissances du droit. Le temps, le pouvoir et la science au service du droit, coll. « Domat droit public », Montchrestien, Paris, 3e éd., 2001.
1. Comment comprenez-vous l’expression un « droit sans juristes » ? 2. A quoi peut faire référence aux cours des siècles (Moyen Âge à nos jours) l’expression « Législateurs, dont la volonté fait le droit » ? 3. Quels peuvent être quelques exemples permettant d’illustrer la phrase « Juristes, praticiens, docteurs, juges, qui le préparent, l’enseignent ou le modèlent » ?
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