1. Le juge du Moyen Âge à nos jours
La place et le rôle du juge n'est pas semblable en tout lieu en en tout temps. Le juge est un acteur essentiel pour trancher les litiges en application de normes juridiques ou selon l'équité. Dans l'histoire des modes de réglemente des conflits, les personnes en charge de rendre la justice sont diverses et recouvrent deux catégories. Des personnes privées peuvent être investies de la prérogative de juger. Des juges dont cela est la fonction sont désignés par le pouvoir détenteur de rendre la justice. Ils agissent en son nom pour dire le droit. Avec le développement de l’État, cette seconde voie a renforcer le métier de juge.
1.1. Des juges non juristes
Rendre la justice n'a pas été de tout temps l'affaire de magistrats professionnels formés au droit. Dans le cadre de tribunaux, des personnes non juristes peuvent être sollicitées pour participer au fonctionnement de la justice. Une spécialisation s'est affirmée pour faire du juge le représentant de l'autorité détentrice du pouvoir de rendre la justice.
1.1.1. Participer à la justice
Depuis l'Antiquité, le recours à des juges non-professionnels existe pour participer à l'exercice de la justice. Ainsi, par exemple, à Athènes, le tribunal de l'Héliée est institué par Solon (640-558). Il s'agit d'un tribunal où siègent les citoyens athéniens tirés au sort. Juger est un droit des citoyens tant au civil qu'au pénal. Ils votent sur la culpabilité et la peine. A Rome, les citoyens participent aussi à la justice. Inscrit sur une liste, un citoyen remplissant certaines conditions (homme libre, avoir au moins 25 ans, disposer d'une certaine fortune) peut être choisi comme juge par les parties.
Au début du Moyen Âge, une semblable pratique existe en lien avec la tradition germanique et l'exercice de la justice populaire. Sous les Mérovingiens, un tribunal, le malberg ou mallus, existe. Il s'agit du tribunal de tous les hommes libres au niveau local (centaine ou vicaria). Pour rendre la justice ordinaire, ils sont choisis par le comte. Ce sont les rachimbourgs. Ils rendent un jugement conformément à la loi applicable.
Aux temps féodaux, de manière schématique, les seigneurs peuvent rendre la justice d’une double manière. La justice seigneuriale est exercée par un seigneur banal (lié au pouvoir de ban). Il a hérité de cette prérogative du roi carolingien, elle s’applique aux hommes vivant sur le territoire où s’exerce son pouvoir (« les hommes de la poesté »). La justice féodale est différente en prenant sa source dans le contrat féodo-vassalique. Elle intéresse seulement les personnes (vassaux) qui ont de tels liens avec le seigneur. Le jugement par ses pairs prévaut ainsi.
Cette idée de jugement par ses pairs se retrouve avec l’institution du jury. Il est connu et se maintient en Angleterre à la différence du royaume de France. La Grande Charte (Magna Carta) de 1215 reconnaît ce principe.
« Si quiconque a été saisi ou dépossédé de ses terres ou château par Nous, ou qu'il a été privé de ses droits et libertés sans un jugement légal de ses pairs, Nous lui restituerons ceci immédiatement. Et s'il survenait une dispute à ce sujet, la dispute sera alors conciliée par le verdict des vingt-cinq Barons mentionnés ci-dessous en égard pour la paix. Il en sera ainsi pour les biens de quiconque, qui ont été saisis par le Roi Henry Notre père ou le Roi Richard Notre frère, sans le verdict de ses pairs et que Nous avons en Notre possession, ou que Nous tenons par mandat. Mais Nous aurons répit, jusqu'à la fin normale du terme de la croisade, excepté pour ceux pour lesquels un plaidoyer avait été invoqué ou pour lesquels une enquête avait été entreprise par Notre Précepte, avant que Nous ayons pris la Croix. Aussitôt que Nous serons revenus de Notre mission, ou, si par hasard, Nous n'irions pas en mission, Nous leur accorderons immédiatement toute justice dans ces causes. »
Sur la Magna Carta, voir Patrice Delpin, « La Grande Carte (1215) », Clio-Texte .
Ce modèle est réaffirmé par l’Habeas Corpus Act (1679) avec le « grand jury », qui apprécie si les charges sont suffisantes et décide que le procès puisse se poursuivre, et un second jury qui prononce le jugement.
1.1.2. Participer au procès pénal
Le jury anglais est connu dans la France d'Ancien Régime par l'intermédiaire de Montesquieu dans l'Esprit des lois (XI, 6). Cette idée est reprise par les philosophes des Lumières et elle trouve à s'appliquer avec la Révolution française en matière criminelle (lois des 16-29 septembre et 29 septembre-21 octobre 1791). Un jury d'accusation et un jury de jugement sont institués. Des citoyens (8 et 12) sont choisis par tirage au sort sur des listes électorales.
Ce système a été partiellement remis en cause par Napoléon. Seul le jury de jugement est conservé pour connaître des affaires criminelles ordinaires dans le cadre des cours d'assises (1808). Cette cour est formée trois magistrats (un présente et deux assesseurs) ainsi que de jurés tirés au sort. Les jurés décident de la culpabilité et du quantum de la peine (montant ou plus précisément la durée d'une peine privative de liberté en matière correctionnelle ou criminelle). La pratique des jurés, face à la sévérité du Code pénal de 1810, est plutôt clémente. Ils sont accusés d' « acquittements scandaleux ». Le jury est alors réformé par la loi du 28 avril 1832. Les jurés peuvent ainsi reconnaître des circonstances atténuantes.
Alors que le juge ne participait pas au délibéré dans la cour d'assises instituée par le régime napoléonien, depuis la loi du 25 novembre 1941, le juge et deux assesseurs y participent et votent avec les six jurés. Ainsi « les juges et jurés statuent ensemble, en un collège unique, sur le fait et sur le droit » (Jean Pradel, 2001). Ce n'est qu'en 1945, à la Libération, que des femmes peuvent être jurés. La démocratisation du jury se poursuit avec la loi du 28 juillet 1978 : système d'un tirage au sort parmi l'ensemble de la population française à partir des listes électorales (il faut alors être âgés d'au moins 23 ans).
La loi n° 2000-516 du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence a reconnu la possibilité d'un appel contre les décisions criminelles. Cette évolution tout en conservant le poids de l'histoire prévoit un appel de Cour d'assise à Cour d'assises. La loi n° 2002-307 du 4 mars 2002 autorise le parquet à faire appel en cas d'acquittement.
Enfin, si la cour d'assises juge les crimes punis de plus de 20 ans de réclusion, depuis la généralisation le 1er janvier 2023 de la cour criminelle départementale, les auteurs de crimes punis de 15 à 20 ans de réclusion ne sont plus jugés devant un jury populaire. Cette cour criminelle est composée uniquement de cinq juges professionnels.
1.2. Le statut du magistrat
La monarchie a développé au Moyen Age la justice royale par l’intermédiaire de juges. Ils sont très divers depuis les juges inférieurs jusqu’au grands juges des cours souveraines. Ils exercent de manière déléguée le pouvoir reconnu au roi. Son action est encadrée. Son statut va évoluer. Juges et magistrats ont été appréhendés de manière unique depuis la Révolution française au sein du « pouvoir » judiciaire puis de l’ordre judiciaire napoléonien et de l’autorité judiciaire.
1.2.1. Le juge dans l'ancien droit
A partir du Moyen Âge, le juge dans le cadre de la justice déléguée devient un officier royal. La désignation des juges, comme des autres autres officiers royaux, repose sur une nomination après recommandation, impétration ou même après élection en certaines périodes (par exemple avec l’ordonnance du 5 février 1389). Louis XI avec l’ordonnance de 1467 établit que « en nos officiers consiste sous notre autorité la direction des faits par lesquels est policée et entretenue la chose publique de notre royaume ». Le juriste Charles Loyseau (1564-1621) en 1610 précise que « l’office est une dignité ordinaire avec fonction publique » (Traité des Offices). Au service des droits de la couronne et de l’intérêt public, les magistrats bénéficient d’une protection. Ils bénéficient de deux privilèges en tant qu’officiers royaux : la sauvegarde royale si une violence est exercée sur la personne de l’officier et la revendication de l’aveu des gens du roi si sa responsabilité est mise en cause dans le cadre de l’exercice de ses fonctions.
Progressivement la stabilité dans l’exercice d’une charge publique est reconnue tout d’abord de manière implicite avec l’inamovibilité (1467) puis de manière organisée avec la patrimonialisation des offices. Vénalité et hérédité des offices sont instaurées sous le règne de François Ier (1522) puis en 1604 (arrêt du Conseil du roi). L’une des conséquences de ce système est de réduire le droit royal de nomination de ses officiers devenus inamovibles et indépendants.
La question de l’office du juge a intéressé nombre d’auteurs depuis le Moyen Âge. Juge chrétien, le juge médiéval va aussi voir sa conduite être guidée par le droit. Il doit se prononcer en respectant la procédure et selon la norme (loi, coutume) en vigueur. Gratien (XIIème siècle) précise que « le bon juge ne fait rien arbitrairement ou selon sa volonté particulière, mais selon les lois et le droit ». Dans l’ordonnance de réformation du royaume de saint Louis en 1254 une semblable conduite est imposée aux baillis avec la prestation d’un serment.
« Nous Louis, par la grâce de Dieu roi de France, établissons que tous nos baillis, vicomtes, prévôts, maires et tout autre officier, en quelque affaire que ce soit, et en quelque office qu’ils soient, fassent serment que tant qu’ils seront dans leur office ou dans leur baillie, ils feront droit à chacun sans exception, aux pauvres comme aux riches, à l’étranger comme à l’homme du pays, et qu’ils respecteront les us et coutumes qui sont bons et éprouvés. Et s’il advient que les baillis ou vicomtes ou autres, comme les sergents ou forestiers, agissent contre leur serment et qu’ils soient convaincus, nous voulons qu’ils en soient punis en leurs biens et en leurs personnes si le méfait le requiert : les baillis seront punis par nous et les autres par les baillis ».
Des vertus particulières sont requises. L'honnêteté, la rigueur, l’impartialité, le secret sont quelques-unes du modèle développé au cours des temps. Le chancelier d’Aguesseau dans sa première mercuriale en 1698 présentait « l’état de magistrat ». Cela servira de modèle pour les procureurs généraux, les avocats généraux et substituts amenés à prononcer les discours de rentrée aux audiences solennelles au XIXème siècle où ils présentent notamment les qualités du magistrat.
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La pratique des mercuriales se développe à partir du milieu du XIVème s. Ayant pour objet initial tous les 15 jours la discipline des magistrats. Ces discours deviennent semestriels à partir du XVIème s. et leur nature se modifie pour devenir un exercice de rhétorique juridique. L’ordonnance de Villers-Cotterêts en 1539, confirmée par les ordonnances d’Orléans et de Blois, en prescrit la tenue. Etienne Pasquier (1529-1615) dans ses Recherches de la France présente le premier discours de rentrée prononcé par Duménil en 1557. Les mercuriales de l’avocat-général Omer Talon (1595-1652) et plus encore celle de d’Aguesseau (1668-1751) prononcée en 1698 sur « l’état de magistrat » deviennent des références pour tout magistrat chargé de prononcer un tel discours.
Après la Révolution, cette cérémonie est rétablie par Napoléon Ier. Le règlement organique du 30 mars 1808 prévoit que « Tous les ans, à la rentrée [des] cours d’appel, chambres réunies, il sera fait, par [le] procureur général, un discours sur l’observation des lois et le maintien de la discipline » (art. 101). Cette disposition est reprise et complétée par la loi du 20 avril 1810 sur l’organisation judiciaire (article 8). Devant « toutes les chambres de la cour impériale [réunies] en la chambre du conseil, le premier mercredi d’après la rentrée. Le procureur général, ou un avocat général en son nom, [doit] prononcer un discours sur la manière dont la justice aura été rendue dans l’étendue du ressort pendant la précédente année ; il remarquera les abus… ; il fera les réquisitions qu’il jugera convenable… ». Enfin, les articles 33 à 35 du décret du 6 juillet 1810 précisent le déroulement des audiences solennelles pour la rentrée des cours impériales. Le décret du 10 juillet 1903 supprime cette cérémonie puis elle est rétablie en 1931.
Les magistrats au sein des cours souveraines, des juridictions supérieures et de dernier ressort, développent l’idée d’une indépendance et leur faculté de pouvoir juger aussi en équité. Les revendications et oppositions à l’encontre du pouvoir royal se manifestent (fronde parlementaire puis contestations sous le règne de Louis XV).
Progressivement la stabilité dans l’exercice d’une charge publique est reconnue tout d’abord de manière implicite avec l’inamovibilité (1467) puis de manière organisée avec la patrimonialisation des offices. Vénalité et hérédité des offices sont instaurées sous le règne de François Ier (1522) puis en 1604 (arrêt du Conseil du roi). L’une des conséquences de ce système est de réduire le droit royal de nomination de ses officiers devenus inamovibles et indépendants.
La mission du juge au cours de l’Ancien Régime s’inscrit dans le cadre d’une fonction divine. Les magistrats au sein des cours souveraines, des juridictions supérieures et de dernier ressort, développent l’idée d’une indépendance et leur faculté de pouvoir juger aussi en équité. Les revendications et oppositions à l’encontre du pouvoir royal se manifestent (fronde parlementaire puis contestations sous le règne de Louis XV).
« Ce qui s’est passé dans mes parlements de Pau et de Rennes ne regarde pas mes autres parlements… Je n’aurais pas d’autre réponse à faire à tant de remontrances qui m’ont été faites à ce sujet, si leur réunion, l’indécence du style, la témérité des principes les plus erronés et l’affectation d’expressions nouvelles pour les caractériser, ne manifestaient les conséquences pernicieuses de ce système d’unité que j’ai déjà proscrit et qu’on voudrait établir en principe, en même temps qu’on ose le mettre en pratique.
Je ne souffrirai pas qu’il se forme dans mon royaume une association qui ferait dégénérer en une confédération de résistance le lien naturel des mêmes devoirs et des obligations communes, ni qu’il s’introduise dans la monarchie un corps imaginaire qui ne pourrait qu’en troubler l’harmonie ; la magistrature ne forme point un corps, ni un ordre séparé des trois ordres ; les magistrats sont mes officiers chargés de m’acquitter du devoir vraiment royal de rendre la justice à mes sujets, fonction qui les attache à ma personne et qui les rendra toujours recommandables à mes yeux. Je connais l’importance de leur service : c’est donc une illusion, qui ne tend qu’à ébranler la confiance par de fausses alarmes, que d’imaginer un projet formé d’anéantir la magistrature et de lui supposer des ennemis auprès du trône ; ses seuls, ses vrais ennemis sont ceux qui, dans son propre sein, lui font tenir un langage opposé à ses principes ; qui lui font dire que tous les parlements ne font qu’un seul et même corps, distribué en plusieurs classes…
Entreprendre d’ériger en principes des nouveautés si pernicieuses, c’est faire injure à la magistrature, démentir son institution, trahir ses intérêts et méconnaître les véritables lois fondamentales de l’État. Comme s’il était permis d’oublier que c’est en ma personne seule que réside la puissance souveraine, dont le caractère propre est l’esprit de conseil, de justice et de raison ; que c’est de moi seul que mes cours tiennent leur existence et leur autorité ; que la plénitude de cette autorité, qu’elles n’exercent qu’en mon nom, demeure toujours en moi, et que l’usage n’en peut jamais être retourné contre moi ; que c’est à moi seul qu’appartient le pouvoir législatif, sans dépendance et sans partage ; que c’est par ma seule autorité que les officiers de mes cours procèdent, non à la formation, mais à l’enregistrement, à la publication, à l’exécution de la loi, et qu’il leur est permis de me remontrer ce qui est du devoir de bons et utiles conseillers ; que l’ordre public tout entier émane de moi et que les droits et les intérêts de la nation dont on ose faire un corps séparé du monarque, sont nécessairement unis avec les miens et ne reposent qu’en mes mains
Je suis persuadé que les officiers de mes cours ne perdront jamais de vue ces maximes sacrées et immuables, qui sont gravées dans le cœur de tous les sujets fidèles…
Les remontrances seront toujours reçues favorablement quand elles ne respireront que cette modération qui fait le caractère du magistrat et de la vérité, quand le secret en conservera la décence et l’utilité, et quand cette voie si sagement établie ne se trouvera pas travestie en libelles où la soumission à ma volonté est présentée comme un crime et l’accomplissement des devoirs que j’ai prescrits comme un sujet d’opprobre, où l’on suppose que toute la nation gémit de voir ses droits, sa liberté, sa sûreté, prêts à périr sous la forme d’un pouvoir terrible, et où l’on annonce que les liens de l’obéissance sont prêts à se relâcher… ».
1.2.2. Le juge depuis la Révolution
1.2.2.1. Désignation
Avec la Révolution française, le système des offices disparaît faisant place à l’expérience de l’élection des juges entre 1790 et 1802. C’est une des manifestations de la destruction des anciens cadres et de la mise en place d’un nouveau modèle judiciaire. Les juges sont élus à temps soit six années (art. 5 Titre III de la Constitution de 1791) et renouvelables. Le décret du 2 septembre 1790 exige des conditions de capacité (avoir exercé pendant 5 ans la profession de juge ou d’homme de loi tout particulièrement les avocats). Un âge minimum est fixé (30 ans). Les premières élections sont organisées à l’automne 1790. La condition de capacité est supprimée à l’automne 1792.
Cf. L’élection des juges, J. Krynen (sous la direction de), coll. « Droit & Justice », Paris, Puf, 1999.
Élection, nomination, épuration jalonnent l’histoire de la magistrature au gré des régimes politiques au XIXème siècle. Chaque nouveau régime souhaite s’assurer du soutien et du contrôle de la magistrature. L’enjeu est de disposer d’une justice fidèle, « de recruter des amis » (Renée Martinage). Avec la IIIe République, un « processus de républicanisation » intervient tant pour le Conseil d’État (1879) et dans la justice civile et pénale (1883). Une des questions faisant débat est celle de l’inamovibilité des magistrats considérée à l’époque comme incompatible avec la République et d’essence monarchique. Elle est opposée à l’irresponsabilité des juges.
La loi du 11 avril 1946 ouvre le concours de la magistrature aux femmes avec un article unique : « Tout français, de l'un ou de l'autre sexe, répondant aux conditions légales, peut accéder aux fonctions de la magistrature ». Malgré la possibilité ouverte en 1946, les femmes magistrates sont encore peu nombreuses. Seulement 10 femmes accèdent à la magistrature avant 1958. En 1959, elles sont 271 sur 4525 magistrats. Le mouvement se développe au cours des années 1960-1980 à partir de l’instauration du concours comme voie de recrutement par l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature.
1.2.2.2. Pouvoir, ordre ou autorité
Au moment de la Révolution, on affirme que « le pouvoir judiciaire, le pouvoir d’appliquer les lois est le plus voisin du pouvoir de les faire : il y touche de si près qu’il ne peut jamais être aliéné par le peuple » (Roederer). La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789, la loi des 16 et 24 août 1790 et la Constitution de 1791 mentionnent l’existence d’un « pouvoir judiciaire » dont le contenu est débattu.
Le régime napoléonien organise en lien avec la Constitution de l’an VIII (Titre V – Des tribunaux) un ordre judiciaire et un ordre administratif (loi du 28 pluviôse an VIII et loi du 20 avril 1810). L’« ordre judiciaire » est repris par les textes constitutionnels de la Restauration et la Monarchie de Juillet. Le pouvoir judiciaire réapparait sans réelle portée avec la Seconde République (Chapitre VIII de la Constitution du 4 novembre 1848). La constitution de la Vème République prévoit en son titre VIII « De l’autorité judiciaire ».
Aujourd’hui l’office du juge correspond aux devoirs et pouvoirs attachés à l’exercice de sa fonction. Aujourd’hui prévaut sa neutralité affirmé par l’article 6-1 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme (« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial… »).