Les caractéristiques du monopole d'exploitation

Important

A la différence des droits moraux reconnus aux auteurs, les prérogatives patrimoniales sont temporaires, aliénables et prescriptibles, comme indiqué par le schéma ci-dessous.

Caractéristiques du monopole d'exploitation

Reprenons donc en détails ces trois caractéristiques afin d'en déduire les conséquences pratiques pour le praticien du droit, auteur de contenus protégés dans un contexte professionnel.

1. Des prérogatives temporaires

Important

Tout d'abord, par la transposition de la directive n° 2006/116/CE du 12 décembre 2006 relative à la durée de protection du droit d'auteur et de certains droits voisins, le code de propriété intellectuelle français a l'avantage de prévoir une durée légale de protection des droits patrimoniaux, uniforme à l'ensemble des états signataires de la Convention de Berne, ce qui signifie que ces droits ne sont pas perpétuels mais temporaires.

Comme le précise le considérant 15 de la directive n° 2006/116/CE, « les durées de protection doivent être calculées à partir du 1er janvier de l'année qui suit le fait générateur pertinent, comme elles le sont dans les conventions de Berne ».

A chacune des situations différentes de titularité simple ou plurales (cliquez ici[1]) correspond des règles spécifiques de calcul.

  1. Si le professionnel du droit est seul à créer le contenu (œuvre simple), l'article L123-1 du CPI prévoit une durée légale de protection de 70 années après l'année civile où est survenu le décès de l'auteur.

  2. Si l'œuvre numérique est issue du travail de création de coauteurs (œuvre de collaboration), l'article L123-2 du CPI prévoit une durée légale de protection de 70 années après l'année civile où est survenu le décès du dernier coauteur ou collaborateur.

  3. S'il s'agit d'œuvres pseudonymes, anonymes ou collectives, l'article L123-3 du CPI prévoit une durée légale de protection de 70 ans « à compter du 1er janvier de l'année civile suivant celle où l'œuvre a été publiée ». Concernant la fixation de la date de publication, ce même article précise que « tout mode de preuve de droit commun » est admis pour établir la preuve de cette date, tout en recommandant « le dépôt légal ».

Au cas où l'œuvre pseudonyme, anonyme ou collective est publiée de manière échelonnée, suivant l'aliéna 2 de l'article L123-3 du CPI, le délai de 70 ans « court à compter du 1er janvier de l'année civile qui suit la date à laquelle chaque élément a été publié ».

Remarque

Cette règle n'a de réelle incidence, uniquement si vous communiquez au public vos contenus numériques durant des années différentes (ex : en décembre 2012, puis en janvier 2013...).

Enfin, si le(s) professionnel(s) du droit qui divulgue(nt) son (leurs) œuvre(s) en usant d'un pseudonyme ou sous anonymat, se fait (se font) finalement connaître sous sa (leurs) véritable(s) identité(s), les règles de calcul définies pour l'œuvre simple ou collective s'appliquent ( articles L 123-1 ou L123-2 du CPI).

Attention

Pour conclure sur la durée légale de protection des droits patrimoniaux, il faut savoir que le code prévoit des prorogations de durée pour les œuvres crées avant et pendant la période des deux guerres mondiales (articles L123-8 à L123-12 du CPI), ainsi des règles de calcul spécifiques pour les œuvres posthumes « découvertes » après la période des 70 ans (art. L123-3 al 5 du CPI). Mais, nous ne les détaillerons pas ici, car elles ne sont pas directement applicables au champ de notre module de formation, à savoir les contenus numériques protégés par la propriété intellectuelle et créés par les praticiens du droit dans leur contexte professionnel.

2. Des prérogatives aliénables

La seconde caractéristique des droits patrimoniaux est leur aliénabilité.

Important

Cela signifie concrètement que le praticien du droit, auteur et titulaire initial des droits patrimoniaux peut les céder à un tiers.

Deux situations sont ici légalement envisagées :

- soit l'auteur cède l'exercice de son droit de représentation et/ou de reproduction par voie contractuelle et souvent en négociant une contrepartie financière (art. L 122-7 CPI) ;

- soit l'auteur décide « de mettre ses œuvres gratuitement à la disposition du public » (art. L122-7-1 CPI).

Dans le premier cas, le professionnel du droit adopte une logique commerciale où le contenu numérique est l'objet de contrat de cession ou de licence d'utilisation.

Dans le second cas, le professionnel du droit adopte une logique de partage en souhaitant la diffusion la plus large possible de son contenu sur le réseau. L'usage du contenu est ici encadré par des licences dites « libres » issues du mouvement Open Content.

Remarque

Conséquence directe du caractère aliénable des droits patrimoniaux, nous développerons dans la 3ème partie de ce module de formation, les différentes pratiques contractuelles qui s'offrent à l'auteur en vue de « gérer » son monopole d'exploitation.

3. Des prérogatives prescriptibles

Enfin, la troisième et dernière caractéristique des droits patrimoniaux est leur prescriptibilité.

Important

Autrement dit, le titulaire des droits patrimoniaux voit s'appliquer une prescription extinctive concernant ses éventuelles poursuites civiles ou pénales en cas d'atteinte à son monopole d'exploitation.

En la matière, les règles de droit commun de la procédure civile et pénale s'appliquent : 5 ans pour une action civile (art. 2224 C. civ.) et 3 ans pour une action pénale (art. 8 C. Proc. Pén.). Le point de départ de la prescription est la réalisation de l'acte litigieux, en l'occurrence les faits de contrefaçon.

  1. La titularité des droits

    Se reporter à la partie précédente relative à "La question de la titularité des droits".

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