Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du jeudi 17 avril 2008
N° de pourvoi: 06-21859
Publié au bulletin
M. Gillet , président
Mme Fouchard-Tessier, conseiller rapporteur
M. Lautru, avocat général
SCP Gatineau, avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon le jugement attaqué rendu en dernier ressort, que la caisse d'allocations familiales de Saint-Etienne (la CAF) a saisi un tribunal des affaires de sécurité sociale pour réclamer à M. X... le remboursement d'un indu d'allocation de logement sociale ; que M. X..., régulièrement convoqué, n'a pas comparu ; que le tribunal a soulevé d'office la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action de la CAF ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu que la CAF fait grief au jugement de dire prescrite son action tendant au remboursement de la somme de 1 159,82 euros représentant un indu d'allocation de logement sociale pour la période de février à avril 2004, alors, selon le moyen, que le juge qui doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en l'espèce, le tribunal a relevé d'office le moyen tiré de la prescription biennale de l'action en remboursement des allocations de logement indûment versées à l'allocataire prévue par l'article L. 553-1 du code de la sécurité sociale ; qu'en l'absence d'une des parties à l'audience, ce moyen ne peut être présumé avoir été contradictoirement débattu ; qu'en relevant d'office, en l'absence du défendeur non comparant, cette prescription et en déclarant prescrite une partie des sommes réclamées par la caisse, le tribunal a violé les articles 16 du code de procédure civile et L. 142-9 du code de la sécurité sociale ;
Mais attendu que la caisse n'est pas recevable à se prévaloir de la violation du principe de la contradiction alléguée au préjudice de son adversaire ;
D'où il suit que le moyen est irrecevable ;
Sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche :
Attendu que la CAF fait grief au jugement de statuer comme il le fait, alors, selon le moyen, qu'aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens ; que l'article R. 142-17 du code de la sécurité sociale dispose expressément que la procédure devant le tribunal des affaires de sécurité sociale est régie par le code de procédure civile, sauf disposition contraire ; que si la procédure est gratuite devant le tribunal des affaires de sécurité sociale, la partie qui a néanmoins été contrainte d'engager des frais pour voir reconnaître ses droits doit pouvoir obtenir la condamnation de la partie perdante à les lui rembourser, aucun texte ne dérogeant à l'article 696 du code de procédure civile ; qu'en déboutant la CAF de Saint-Etienne de sa demande de condamnation de M. X... à payer les frais de citation, le tribunal des affaires de sécurité sociale a violé les articles 696 du code de procédure civile et R. 142-17 du code de la sécurité sociale ;
Mais attendu que la procédure devant les juridictions de sécurité sociale étant gratuite et sans frais, les dépenses liées à la signification effectuée en application des dispositions de l'article R. 142-19, alinéa 4, du code de la sécurité sociale doivent rester à la charge de l'organisme social concerné ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
Vu les articles 2244 du code civil, L. 553-1 et L. 142-9 du code de la sécurité sociale ;
Attendu qu'il résulte de ces textes que le cours de la prescription visée au deuxième est interrompu par l'envoi à l'adresse de l'allocataire d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception valant mise en demeure, quels qu'en aient été les modes de délivrance ;
Attendu que, pour déclarer partiellement prescrite l'action de la CAF, le jugement retient que les lettres de mise en demeure de payer des 31 mai, 30 septembre et 14 novembre 2005 qui ne sont pas parvenues au destinataire ne sont pas interruptives de prescription, et que la prescription biennale instituée par l'article L. 553-1 du code de la sécurité sociale pour les prestations payées antérieurement au 24 avril 2004 était définitivement acquise le 24 avril 2006, date de la saisine du tribunal ;
Qu'en statuant ainsi, le tribunal a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la troisième branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit prescrite l'action de la caisse d'allocations familiales de Saint-Etienne contre M. X... tendant au remboursement de la somme de 1 159,82 euros représentant un indu d'allocation de logement sociale pour la période de février à avril 2004, le jugement rendu le 23 octobre 2006, entre les parties, par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Saint-Etienne ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Roanne ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la CAF de Saint-Etienne ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept avril deux mille huit.