» Ressource

Jurisprudence

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a formé une demande en divorce contre son époux sur le fondement de l'article 242 du Code civil et que celui-ci a conclu aux mêmes fins ;

Sur le premier moyen :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré irrecevables les conclusions et pièces déposées par Mme X... avant l'ordonnance de clôture, alors, selon le moyen, d'une part, qu'en se bornant à énoncer que Mme X... avait déposé des pièces et conclusions 7 et 5 jours avant l'ordonnance de clôture, sans constater qu'une injonction de clôture ou de produire lui avait préalablement été délivrée, la cour d'appel a violé les articles 15 et 16, 764, 766 du nouveau Code de procédure civile ; d'autre part, qu'en statuant ainsi sans caractériser les circonstances qui auraient empêché M. Y... de répondre à ces écritures dont le contenu n'était pas même précisé, la cour d'appel n'a pas caractérisé d'atteinte aux droits de la défense et a, ainsi, privé sa décision de base légale au regard des articles 15 et 16 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui n'avait pas à vérifier qu'une injonction de clôture avait été délivrée à l'appelante, en relevant que les conclusions s'étaient accompagnées non seulement d'une production de 14 pièces mais également d'une sommation de communiquer, a caractérisé les circonstances particulières qui empêchaient la partie adverse de répondre utilement avant la clôture ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu qu'il est reproché à l'arrêt d'avoir prononcé le divorce aux torts partagés des époux, alors, selon le moyen, d'une part, qu'un époux ne peut produire aux débats le journal intime de son conjoint dès lors qu'il s'en est emparé frauduleusement ; qu'en l'espèce, en se fondant sur le journal intime de Mme X... alors qu'elle faisait expressément valoir que son mari le lui avait subtilisé, la cour d'appel a violé les articles 9 et 259-1 du Code civil ; d'autre part, que les propos tenus par Mme X... dans son journal ne pouvaient être considérés comme un aveu des faits qui lui étaient reprochés, faute d'intention caractérisée de reconnaître ces faits à l'égard des tiers ; qu'ainsi la cour d'appel a violé l'article 1355 du Code civil ; de surcroît, qu'il appartenait au mari de prouver le grief d'adultère qu'il invoquait ; qu'en statuant sur ce grief, sans relever d'éléments ou de documents extérieurs à ce journal et susceptibles de corroborer les allégations de M. Y... et en statuant sur le seul fondement du journal litigieux, la cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil ; enfin, que le seul fait de tenir un journal intime, quels que soient les sentiments qui peuvent être exprimés ne caractérise pas une violation grave ou renouvelée des obligations du mariage dès lors qu'il s'agit d'un travail purement personnel de réflexion et que le journal ne doit, par nature, recevoir aucune publicité et ne peut en conséquence faire grief au conjoint ; que la cour d'appel ne pouvait juger le contraire sans violer l'article 242 du Code civil ;

Mais attendu qu'en tirant de la lecture du journal intime de l'épouse, qui se bornait à alléguer que son conjoint le lui avait subtilisé, la conviction de la réalité des relations adultères nouées avec un autre homme, la cour d'appel, qui n'a pas énoncé que ce journal contenait un aveu, n'a fait, sans violer les textes visés au moyen, qu'user de son pouvoir souverain d'appréciation de la valeur et de la portée de cet unique élément de preuve du caractère fautif au sens de l'article 242 du Code civil, du grief allégué par le mari ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Mais sur le troisième moyen :

Vu l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que, pour fixer à un montant déterminé du 20 décembre 1994 au ler juin 1995, le montant de la pension alimentaire due par le père à la mère pour l'entretien de l'enfant Valérie majeur à charge, l'arrêt retient que Valérie a attesté être à la charge de son père depuis juin 1995, que sa mère n'a pas contesté cette affirmation ;

Qu'en statuant ainsi, alors que, dans ses conclusions, la mère déclarait expressément que Valérie était à sa charge, la cour d'appel en a dénaturé les termes clairs et précis ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qui concerne la pension alimentaire, l'arrêt rendu le 9 mai 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse.




Publication : Bulletin 1999 II N° 85 p. 63

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, du 9 mai 1996