Cour de cassation
chambre civile 1
Audience publique du jeudi 27 avril 1978
N° de pourvoi: 76-14501
Publié au bulletin
Président : M. Charliac, président
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
SUR LE PREMIER MOYEN : VU L'ARTICLE 1334 DU CODE CIVIL ;
ATTENDU QU'IL RESULTE DE CET ARTICLE QUE LES COPIES D'ACTES SOUS SEING PRIVE N'ONT PAR ELLES-MEMES AUCUNE VALEUR JURIDIQUE ET NE PEUVENT SUPPLEER AU DEFAUT DE PRODUCTION DE L'ORIGINAL DONT L'EXISTENCE EST DENIEE ;
ATTENDU QUE DAME A..., DAME X... ET DAME Z... SONT DEVENUES, A LA MORT DE LEUR PERE PROPRIETAIRES CHACUNE POUR UN TIERS DES PARTS DE LA SOCIETE CIVILE LES SOUCHES QUI POSSEDAIT UN DOMAINE A BOIS-LE-ROI ;
QUE DAME X... ET DAME Z... AFFIRMENT QU'APRES LA VENTE DE CE DOMAINE, ELLES "NE SE SOUCIERENT PLUS DE CETTE SOCIETE, CONSIDERANT QU'ELLE N'AVAIT PLUS D'OBJET" ;
QUE, CEPENDANT, DAME A..., SE PRESENTANT COMME GERANTE DE LA SOCIETE CIVILE, ET AUTORISEE A CETTE FIN PAR LES DEUX AUTRES ASSOCIEES, A CONTRACTE UN EMPRUNT DE 500.000 FRANCS AUPRES DE LA BANQUE LA HENIN EN VUE DE LA REALISATION D'UNE OPERATION IMMOBILIERE A TIGNES, SANS TENIR COMPTE DE L'ARTICLE 11 DES STATUTS QUI LUI FAISAIT UN DEVOIR D'OBTENIR DE SA COCONTRACTANTE UNE RENONCIATION FORMELLE AU DROIT D'EXERCER UNE ACTION PERSONNELLE CONTRE LES ASSOCIES ;
QUE, LA SOCIETE CIVILE N'AYANT PU REMPLIR LES ENGAGEMENTS QU'ELLE AVAIT CONTRACTES A SON EGARD, LA BANQUE LA HENIN A POURSUIVI LE REMBOURSEMENT DE CE QUI LUI ETAIT DU AUPRES DES TROIS ASSOCIEES DE LA SOCIETE CIVILE, TENUES CHACUNE POUR UN TIERS EN APPLICATION DE L'ARTICLE 1863 DU CODE CIVIL ;
QUE DAME X... ET DAME Z... ONT SOUTENU N'AVOIR PAS ASSISTE AUX ASSEMBLEES AU COURS DESQUELLES LEUR SOEUR AVAIT ETE NOMMEE GERANTE ET AUTORISEE A CONTRACTER L'EMPRUNT ;
QU'ELLES ONT APPELE EN GARANTIE LE NOTAIRE REDACTEUR DE L'ACTE DE PRET POUR N'AVOIR PAS, NOTAMMENT, VERIFIE LA CONFORMITE A L'ORIGINAL DES PROCES-VERBAUX DES ASSEMBLEES QUI LUI AVAIENT ETE PRESENTES EN COPIE, ET POUR N'AVOIR PAS RAPPELE A LA Y... L'OBLIGATION QUI PESAIT SUR ELLE EN VERTU DE L'ARTICLE 11 DES STATUTS DE LA SOCIETE ;
QUE LA COUR D'APPEL A FAIT DROIT A LA DEMANDE DE LA BANQUE LA HENIN ET A REJETE LA DEMANDE EN GARANTIE DIRIGEE CONTRE LE NOTAIRE ;
ATTENDU QUE POUR FAIRE DROIT A LA DEMANDE DE REMBOURSEMENT DE LA BANQUE LA HENIN DIRIGEE CONTRE DAME X... ET DAME Z..., PRISES EN TANT QU'ASSOCIEES DE LA SOCIETE CIVILE LES SOUCHES, A LA SUITE DE L'EMPRUNT CONTRACTE PAR LA Y... DE CETTE SOCIETE, DAME A..., LA COUR D'APPEL S'EST FONDEE SUR LES COPIES CERTIFIEES CONFORMES DES PROCES-VERBAUX DES ASSEMBLEES DE CETTE SOCIETE, D'OU IL RESULTAIT QUE DAME X... ET DAME Z... AVAIENT NOMME DAME MONTIER Y... ET LUI AVAIENT CONFIE TOUS POUVOIRS POUR CONTRACTER CET EMPRUNT ;
ATTENDU CEPENDANT QUE, DAME X... ET DAME Z... AYANT SOUTENU DANS LEURS CONCLUSIONS QU'ELLES N'AVAIENT PAS ASSISTE A CES ASSEMBLEES, ET AYANT PAR LA-MEME IMPLICITEMENT DENIE L'EXISTENCE DES ORIGINAUX DES PROCES-VERBAUX ET LA CONFORMITE DES COPIES, IL S'ENSUIT QU'EN STATUANT COMME ELLE L'A FAIT, LA COUR D'APPEL A VIOLE LE TEXTE SUSVISE ;
ET SUR LE SECOND MOYEN, PRIS EN SES DEUXIEME ET TROISIEME BRANCHES :
VU L'ARTICLE 1382 DU CODE CIVIL ;
ATTENDU QUE POUR ECARTER LE MANQUEMENT DU NOTAIRE A SON DEVOIR DE CONSEIL INVOQUE PAR DAME X... ET DAME Z... QUI REPROCHAIENT A CELUI-CI DE N'AVOIR PAS RAPPELE A LA Y... DE LA SOCIETE CIVILE L'OBLIGATION QUE L'ARTICLE 11 DES STATUTS FAISAIT PESER SUR ELLE, LA COUR D'APPEL A RETENU QUE LES POUVOIRS SPECIAUX DONNES A LA Y... NE FAISAIENT PAS REFERENCE A CET ARTICLE, DONT LE RESPECT NE POUVAIT LUI ETRE IMPOSE, ET QUE D'AILLEURS SEULE LA Y... ETAIT FONDEE A REPROCHER CETTE NEGLIGENCE AU NOTAIRE ;
ATTENDU QU'EN STATUANT AINSI, SANS PRECISER LES ELEMENTS DONT IL SERAIT RESULTE QUE LES ASSOCIES AVAIENT RENONCE A LA DISPOSITION EN LEUR FAVEUR CONTENUE DANS LEDIT ARTICLE, ET ALORS QUE TOUT INTERESSE PEUT DEMANDER REPARATION DU PREJUDICE QUE LUI A CAUSE LE COMPORTEMENT FAUTIF D'UN NOTAIRE, LA COUR D'APPEL N'A PAS DONNE DE BASE LEGALE A SA DECISION ;
PAR CES MOTIFS, ET SANS QU'IL Y AIT LIEU DE STATUER SUR LA PREMIERE BRANCHE DU SECOND MOYEN : CASSE ET ANNULE, EN SON ENTIER, L'ARRET RENDU ENTRE LES PARTIES LE 18 JUIN 1976 PAR LA COUR D'APPEL DE PARIS ;
REMET, EN CONSEQUENCE, LA CAUSE ET LES PARTIES AU MEME ET SEMBLABLE ETAT OU ELLES ETAIENT AVANT LEDIT ARRET ET, POUR ETRE FAIT DROIT, LES RENVOIE DEVANT LA COUR D'APPEL D'AMIENS.