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Jurisprudence




Sur le défaut de qualité à agir de M. L. au nom de la CNCEP
Le droit de réponse institué par l'article 6-IV de la loi du 21 juin 2004, comme celui de l'article 13 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse auquel il est renvoyé, est exercé au nom d'une personne morale par le représentant légal de celle-ci, qui doit pouvoir justifier de son titre à agir, mais n'est pas tenu, au contraire du tiers - tel qu'un avocat - intervenant au nom du requérant, de joindre à la demande d'insertion justification de sa qualité à représenter la personne morale, dont il est un des organes.
Si le seul fait qu'à la lettre adressée au nom de la CNCEP par Alain L. le 31 octobre 2007 et contenant la demande d'insertion n'ait pas été joint un pouvoir habilitant celui-ci à agir au nom de la personne morale ne pouvait autoriser le directeur de la publication à ne pas publier la réponse, il incombe, en revanche, à la CNCEP de démontrer que Alain L., qui n'est ni président du directoire, ni directeur général, était régulièrement habilité à agir en son nom, ce qu'elle manque à faire - la seule production d'un contrat signé pour la CNCEP par celui-ci avec deux sociétés ne l'établissant nullement -, de sorte qu'il ne saurait y avoir de trouble manifestement illicite dans la non publication de la réponse ainsi adressée par la CNCEP par une personne dont il n'est pas démontré qu'elle était habilitée à cette fin.
Il y a lieu, en conséquence, de rejeter les demandes formées par cette partie.
Sur l'application de l'article 1er du décret du 24 octobre 2007
L'alinéa 2 de l'article 1er du décret du 24 octobre 2007 dispose qu'il n'y a lieu à exercice de la procédure de droit de réponse que « lorsque les utilisateurs sont en mesure, du fait de la nature du service de communication au public en ligne, de formuler directement les observations qu'appelle de leur part un message qui les met en cause ». Les défendeurs soutiennent que, dès lors que le site Internet www.quechoisir.org comporte un forum de discussion - dont l'existence n'est pas contestée - sur lequel tout internaute peut librement intervenir - ce qui n'est pas davantage contredit -, ces dispositions interdisaient à la CNPA de recourir au droit de réponse.
Il y a lieu, cependant, d'interpréter de façon étroite cette restriction apportée par voie réglementaire à l'exercice d'un droit que l'article 6-IV de la loi pour la confiance dans l'économie numérique ouvre largement et sans autre condition à « toute autre personne nommée ou désignée dans un service de communication au public en ligne [...] sans préjudice des demandes de correction ou de suppression du message qu'elle peut adresser au service ».
Les textes litigieux n'ayant pas été simplement adressés par des internautes sur le forum de discussion du site www.quechoisir.org - étant de surcroît relevé, malgré les liens entre les deux sites, qu'il n'est nullement soutenu que le site www.justeprime.org serait également doté d'un tel espace de libre expression - mais figurant au coeur de la partie rédactionnelle des sites - voire constituant, s'agissant du site second nommé, sa page d'accueil -, l'envoi d'un simple message sur le forum de discussion d'un seul des deux sites contenant les trois textes dans lesquels la CNPA était nommée ne saurait constituer utilement un moyen pour celle-ci de formuler les observations que ces textes appelaient de sa part, au sens des dispositions susvisées.
Sur l'application de l'article 2 du décret
L'article 2 du même décret dispose que « la demande indique les références du message, ses conditions d'accès sur le service de communication au public en ligne et, s'il est mentionné, le nom de son auteur », qu'elle précise s'il s'agit d'un écrit, de sons ou d'images et qu'elle « contient la mention des passages contestés et la teneur de la réponse sollicitée ».
C'est à juste titre, à cet égard, que les défendeurs font observer que la demande de la CNPA ne contient pas la mention des passages contestés.
Le directeur général de cette société se contente, en effet, de relever dans sa demande d'insertion qu'ont été publiées, sur les sites litigieux, « des informations mettant en cause les Caisses d'Épargne et CNP Assurances » et ne fournit aucune précision sur les passages contestés, s'en tenant à indiquer, pour l'application des dispositions de l'article 4 du décret, qui prévoit notamment que la réponse est « soit publiée à la suite du message en cause, soit accessible à partir de celui-ci », les adresses précises des trois textes à la suite desquels l'insertion est sollicitée, qu'elle ne définit pas autrement dans sa demande que par la mention de leur titre et de l'adresse par laquelle ils sont accessibles.
Le texte de la réponse elle-même, qui est inclus dans le courrier, ne comporte aucune autre mention explicite des passages contestés. Or, en distinguant clairement « les références du message, ses conditions d'accès », de la « mention des passages contestés », les dispositions susvisées obligent le demandeur à l'exercice d'un droit de réponse sur Internet à spécifier les propos précis, extraits du texte litigieux, qu'il conteste, soit en les reproduisant in extenso, soit en les identifiant suffisamment précisément au sein dudit texte, de sorte que le directeur de la publication puisse apprécier, notamment, s'il existe une corrélation entre lesdits passages et la réponse elle-même - étant de surcroît relevé, au cas présent, que trois textes différents, dont l'un fort long, et faisant allusion à de nombreux faits, étaient concernés.
La demande d'insertion adressée par la CNPA n'était pas conforme aux exigences de l'article 2 du décret du 24 octobre 2007 pris pour l'application de l'article 6-IV de la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique, en ce qu'elle ne contenait pas la mention des passages contestés. La non-insertion de la réponse ne constitue donc pas un trouble manifestement illicite. (...)