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Responsabilité de l'hébergeur écarté



Remarque

Le tribunal de grande instance de Paris écarte la responsabilité de l'hébergeur en relevant que la notification ne faisait « nulle mention des dispositions légales essentielles pour la vérification par le destinataire du caractère manifestement illicite que doit revêtir le contenu en question » (TGI Paris, 29 octobre 2007).




  • Tribunal de grande instance PARIS Formation des référés Ordonnance 29 Octobre 2007 - WIKIMEDIA FOUNDATION INC.

Résumé : N'est pas nul, pour non-respect des dispositions de l'article 53 de la loi du 21 juillet 1881, l'acte introductif d'instance dont les motifs distinguent clairement ce qui relève de l'atteinte à la vie privée de ce qui relèverait de la diffamation, distinction ensuite clairement reprise dans un paragraphe du dispositif de cet acte. Par ailleurs, rien n'interdit au demandeur de mettre en cause des propos en visant une qualification ressortissant aux dispositions de l'article 9 du Code civil protectrices de l'intimité de la vie privée et à celles de la loi du 2 juillet 1881 protectrice de la liberté d'expression, les principes fondamentaux en cause étant différents, dès lors qu'il ne peut en résulter aucune confusion pour l'exercice par le défendeur de ses droits à s'en défendre. Il ne pouvait en l'espèce résulter de la présentation des faits, une équivoque telle, quant à leur qualification, que la défenderesse n'ait été mise en mesure de s'en défendre.

Peu importe que n'ait pas été assigné directement à sa personne ou à son domicile le représentant légal d'une fondation de droit étranger assignée aux fins de faire cesser un dommage occasionné par le contenu d'un service de communication en ligne, au sens de l'article 6 § I, 8° de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004. C'est en qualité de prestataire d'hébergement que la personne morale est assignée ; elle n'intervient pas dans le choix et le contenu des services et "n'exerce pas de rôle ou de contrôle éditorial". Il n'y a donc pas lieu à nullité de l'acte introductif d'instance.

Est devenue sans objet la demande tendant, par application des articles 6 § I, 2° et 8° de la loi du 21 juin 2004 au retrait, de certains propos, de l'historique d'un site Internet de communication en ligne. Ces propos, prétendument diffamatoires et attentatoires à l'intimité de la vie privée étaient, le jour de l'audience de référé, retirés du site.

Aux termes de l'article 6 § I, 2° de la loi pour la confiance dans l'économie numérique du 21 juin 2004, les prestataires d'hébergement ne peuvent voir leur responsabilité engagée du fait des informations qu'ils stockent s'ils n'avaient pas effectivement connaissance de leur caractère illicite ou de faits et circonstances faisant apparaître ce caractère. Aux termes de l'article 6 § I, 7° de cette même loi, ils ne sont pas tenus d'une obligation générale de surveiller les informations stockées, ni de rechercher des faits ou circonstances révélant des activités illicites. Il ne peut être fait droit à une demande d'allocation de provision de dommages et intérêts, son caractère étant sérieusement contestable en l'absence de faute d'un hébergeur de site Internet de communication en ligne. Il a agi promptement pour retirer ou rendre impossible l'accès à des données dès qu'il a eu connaissance de manière claire et non équivoque par l'acte introductif d'instance de la présence de propos prétendument diffamatoires et attentatoires à l'intimité de la vie privée. Pour apprécier son comportement, il convient de se placer à la date de réception de l'acte ; le retrait est intervenu, en l'espèce, à une date antérieure à l'audience de référé. La responsabilité de l'hébergeur ne peut donc être mise en jeu.

La responsabilité de l'hébergeur d'un site Internet de communication en ligne n'est pas engagée, sa connaissance du caractère illicite des propos mis en ligne dans une encyclopédie n'étant pas établie. La notification par les demandeurs à l'instance n'a pas été faite suivant les formes de l'article 6, § I, 5° de la loi de confiance sur l'économie numérique du 21 juin 2004. Le courriel adressé à l'hébergeur comporte l'adresse précise de la page comportant le contenu litigieux, mais ne fait nulle mention des dispositions légales, essentielles pour la vérification, par le destinataire, du caractère manifestement illicite que doit revêtir ce contenu. Seule se trouve rapportée la preuve de l'envoi de ce courriel et non de sa réception. En outre, la preuve d'envoi d'un courrier par voie postale avec accusé de réception n'est pas rapportée. Dès lors, la connaissance du caractère illicite des propos n'est pas réputée acquise.

Il n'y a pas lieu de faire injonction à l'hébergeur d'un site Internet de communication en ligne, de communiquer les données d'identification de l'utilisateur d'un ordinateur, internaute ayant mis en ligne, dans le cadre d'une encyclopédie, des propos prétendument diffamatoires et attentatoires à l'intimité de la vie privée. Les demandeurs à l'instance disposent de la date et de l'heure de mise en ligne, comme de l'adresse IP (Internet Protocole) et il n'est pas démontré que l'hébergeur dispose d'autres éléments déjà connus par eux.

Remarque

Dans une affaire mettant en cause Dailymotion à propos de la diffusion d'œuvres arguées de contrefaçon, le juge rappelle « qu'il ne suffit pas prétendre subir une contrefaçon d'œuvres dont on prétend détenir les droits, encore faut-il préciser, en les nommant, les dénombrant et les identifiant, les œuvres dont on revendique la paternité pour justifier de sa qualité à agir et de son intérêt à agir » (TGI Paris, 18 décembre 2007).




  • TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS - Ordonnance de référé, le 29 octobre 2007 - Mme M. B., M. P.T., M. F .D. c/ Wikimedia Foundation Inc.

Extraits : « (...) Attendu qu'aux termes de l'article 6.I.2 les prestataires d'hébergement ne peuvent voir leur responsabilité civile engagée du fait des informations qu'ils stockent s'ils n'avaient pas effectivement connaissance de leur caractère illicite ou de faits et circonstances faisant apparaître ce caractère ;
Qu'il convient également de rappeler qu'aux termes de l'article 6.I.7 de la loi précitée, les prestataires d'hébergement ne sont pas tenus d'une obligation générale de surveiller les informations stockées, ni de rechercher des faits ou circonstances révélant des activités illicites ;
Qu'il ne peut être considéré, comme l'évocation d'une décision que les demandeurs citent le suggèrent alors cependant qu'aucun élément n'est versé au débat en ce sens, que la défenderesse peut craindre que, de manière régulière, des internautes contribuant au contenu de l'encyclopédie présente sur son site peuvent être conduits à tenir des propos portant atteinte à la vie privée de tiers ou présentant un caractère diffamatoire ;
Que force est de constater que la notification invoquée par les demandeurs n'a pas été faite suivant les formes de l'article 6.I-5 de la loi du 21 juin 2004 ; que le courriel du 28 septembre 2007 en particulier, s'il comporte l'adresse précise de la page comportant le contenu litigieux, ne fait nulle mention des dispositions légales, essentielles pour la vérification par le destinataire du caractère manifestement illicite que doit revêtir le contenu en question ; qu'au regard des indications données sur le site (annexe 26, 27 et 33), seule se trouve rapportée la preuve de l'envoi - et non de sa réception - d'un courriel, et non d'un courrier adressé par la voie postale avec la preuve de sa réception ; que dès lors, la connaissance en question du caractère illicite des propos pouvait être d'autant moins réputée acquise du caractère illicite des propos pouvait être d'autant moins réputée acquise s'agissant du défaut de respect de l'intimité de la vie privée qu'en l'espèce l'évocation d'une reconnaissance, réelle ou non, de l'entreprise par des associations défendant les minorités sexuelles comme exemplaire en matière de respect de leurs droits, nécessitait examen de la position des personnes désignées au sujet de la révélation de leur différence, réelle ou supposée (...)
».

Remarque

Dans cette affaire, l'autorité de chose jugée ne s'appliquant qu'aux questions de fond - et donc pas au défaut de qualité à agir - le tribunal de grande instance de Paris a estimé que Dailymotion a engagé sa responsabilité d'hébergeur en ne retirant pas promptement les vidéos au caractère manifestement illicite notifiées par J.-Y. Lafesse (TGI Paris, 15 avril 2008).




  • Tribunal de grande instance PARIS Chambre 3 section 2 - 19 Octobre 2007 - SARL ZADIG PRODUCTIONS / SOCIÉTÉ GOOGLE

Résumé : Constitue une atteinte au droit à la paternité des coauteurs d'un documentaire et à l'intégrité de celui-ci, la diffusion en streaming de ce documentaire sur un site internet sans aucune mention relative aux coauteurs, et avec une durée réduite au regard de la version définitive et une visualisation de mauvaise qualité en raison d'un cadre très réduit. L'hébergeur ne peut invoquer le bénéfice de l'article 6 I 2 de la loi du 21 juin 2004, alors qu'informé du caractère illicite du contenu, il n'a pas mis en œuvre les moyens nécessaires pour éviter la diffusion.
Constitue une atteinte aux droits patrimoniaux sur un documentaire, la diffusion de ce dernier en streaming sur un site internet sans autorisation du titulaire des droits patrimoniaux. L'hébergeur ne peut invoquer le bénéfice de l'article 6 I 2 de la loi du 21 juin 2004, alors qu'informé du caractère illicite du contenu, il n'a pas mis en œuvre les moyens nécessaires pour éviter la diffusion.
Constitue une atteinte aux droits d'un producteur de vidéogramme, la diffusion de ce dernier en streaming sur un site internet sans autorisation du producteur. L'hébergeur ne peut invoquer le bénéfice de l'article 6 I 2 de la loi du 21 juin 2004, alors qu'informé du caractère illicite du contenu, il n'a pas mis en œuvre les moyens nécessaires pour éviter la diffusion.

Remarque

Un raisonnement identique a été tenu à l'encontre de Google, à propos de la diffusion du film « Le monde selon Bush » (T. com. Paris, 20 février 2008).