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Institutions et principes fondamentaux du procès civil

La juridiction : l'organisation judiciaire : Le personnel judiciaire

La leçon 3 poursuit l'étude des institutions judiciaires, entamée dans la leçon 2. Faisant suite à la présentation des juridictions, cette leçon 3 envisage les différents professionnels qui contribuent par leur activité au fonctionnement du service public de la Justice. Sont passés en revue l'accès à la profession, le statut et les fonctions, d'une part des magistrats et, d'autre part, des auxiliaires de justice.


Les personnes qui contribuent au fonctionnement du service public de la Justice sont classées en deux catégories : d'une part les magistrats (section 1), d'autre part les auxiliaires de justice (section 2).
Les réformes récentes, visant notamment à renforcer la qualité, l'indépendance et l'impartialité de la Justice, ont impacté ces professions à divers titres, qu'il s'agisse de leur statut, de leur organisation ou de leur déontologie.

Rq.Voir, sur le site du Ministère de la Justice, des portraits et témoignages de professionnels sur l’exercice quotidien de leur fonctions (rubrique "Métiers" et vidéos associées).

Actualité
: La loi n° 2023-1059 du 20 novembre 2023 fixe la trajectoire pluriannuelle du budget de la justice d'ici 2027. Celui-ci, d'un montant de 9,6 milliards d'euros en 2023, sera porté à 10,8 Md € d'ici 4 ans, soit une hausse de 21 % en 5 ans. Ces crédits supplémentaires doivent permettre de revaloriser les salaires et de renforcer les effectifs avec le recrutement annoncé de 10 000 fonctionnaires d'ici à 2027, dont 1 500 dans la magistrature et 1 800 pour les greffes ainsi que d'une équipe autour des magistrats.



Section 1. Les magistrats

Les magistrats sont des fonctionnaires auxquels leur statut garantit indépendance et impartialité. Les textes régissant le statut des magistrats, au premier chef desquels l'ordonnance du 22 décembre 1958, sont consultables sur le site internet du Conseil supérieur de la Magistrature). Le contenu de l'ordonnance de 1958 a été modifié à diverses reprises, notamment pour renforcer l'unité du corps judiciaire. Peuvent notamment être signalés :
  • Une loi organique du 25 juin 2001 sur la carrière et la mobilité des magistrats instituant des incitations à la mobilité et limitant notamment la durée d'exercice territorial de certaines fonctions.
  • L'ordonnance du 5 mars 2007, faisant suite à la réflexion menée après l'affaire dite d'Outreau apportant des modifications aux conditions de formation, de recrutement et de discipline des magistrats.
  • L'incidence de la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008, et de la loi organique du 22 juillet 2010, réformant le Conseil supérieur de la magistrature (voir Leçon 2).
  • Les modifications apportées par la loi organique n° 2016-1090 du 8 août 2016 relative aux garanties statutaires, aux obligations déontologiques et recrutement des magistrats ainsi qu'au CSM.
  • La loi organique n° 2019-221 du 23 mars 2019 relative au renforcement de l'organisation des juridictions, en lien avec la réforme de l'organisation judiciaire au 1er janvier 2020. 
  • La loi organique n° 2023-1058 du 20 novembre 2023 relative à l'ouverture, à la modernisation et à la responsabilité du corps judiciaire.

Nous envisagerons la carrière et le statut des magistrats, avant de consacrer des développements particuliers aux magistrats du Parquet.

Seront développées les conditions de recrutement, de nomination et d'avancement des magistrats.

Actuellement, l'accès "normal" à la magistrature résulte d'un passage par l'Ecole nationale de la magistrature (ENM), en qualité d'auditeur de justice, mais il existe aussi des possibilités d'intégration directe.

Actualité 2023-2024 :
La loi organique n° 2023-1058 du 20 novembre 2023, relative à l'ouverture, à la modernisation et à la responsabilité du corps judiciaire modifie l'ordonnance du 22 décembre 1958 sur le statut de la magistrature afin d'en améliorer l'attractivité et d'en faciliter l'ouverture en direction, notamment, des professionnels du droit.
  • Le recrutement sur titres, les voies d'intégration directe dans le corps judiciaire aux deux premiers grades et les concours complémentaires seront supprimés.
  • Un concours professionnel, destiné aux professionnels, notamment aux avocats, sera créé.
  • Un concours spécial pour le recrutement d'auditeurs de justice au profit des élèves des classes « Prépas Talents » va être expérimenté jusqu'à fin 2026 afin d'ouvrir la magistrature à des profils différents.
Cette réforme des voies d'accès entrera en vigueur au plus tard fin 2024 (décrets prévus).La loi vise également à permettre un recours plus large aux magistrats à titre temporaire et aux magistrats honoraires afin de recruter un plus grand nombre de juges issus de la société civile.
Dans sa décision du 16 nov. 2023 le Conseil constitutionnel (CC, 16 nov. 2023, n° 2023-856 DC) a formulé des réserves d'interprétation s'agissant de l'instauration du concours professionnel (L. n° 2023-1058, 20 nov. 2023, art. 1er), du concours spécial pour le recrutement d'auditeurs de justice instauré à titre expérimental (L. n° 2023-1058, 20 nov. 2023, art. 13).
Voir Procédures 2024 Fasc. 1 alerte 2 : Les lois « Justice » sont publiées.

Conditions d'accès

Modalités d'entrée à l'ENM

Il faut :
  • posséder la nationalité française,
  • avoir la jouissance de ses droits civiques,
  • remplir certaines conditions de moralité (exigence jugée constitutionnelle : CC, 5 oct. 2012, D. 2012 2318),
  • justifier d'études de niveau Bac+4 (pas nécessairement en droit - Ajout de la référence à une qualification reconnue équivalente par la L. 2016-1090 du 8 août 2016), d'un diplôme d'IEP (Institut d'Etudes Politiques) ou être ancien élève d'une Ecole Normale Supérieure.
Le recrutement est possible sur concours ou directement sur titres.


Rq.Une réforme de l'ENM est intervenue en 2009 (décret n° 2008-1551 du 31 déc. 2008 et divers arrêtés du 31 déc. 2008, JO 1/1/09).
Elle concernait :
  • le recrutement : création de classes préparatoires, modification des épreuves du concours et de la composition du jury ;
  • la formation : évolution de son organisation, de sa durée et restructuration de l'encadrement pédagogique au sein de l'Ecole.

Le contenu de tous les concours a également évolué à compter de 2020 (décret n° 2019-99 du 13 février 2019).


Recrutement sur concours

Recrutement direct sur titres en qualité d'auditeurs

Trois concours permettent le recrutement d'auditeurs (réforme décret 25/9/95 : art. 17 et s. de l') :
  • Le premier est accessible aux candidats âgés de 31 ans au plus au 1er janvier de l'année du concours (existence de cas de recul de limite d’âge), titulaires d'un diplôme sanctionnant une formation d'une durée au moins égale à 4 années après le baccalauréat (271 places au concours 2023).
  • Le deuxième est ouvert aux fonctionnaires et agents de l'Etat, des collectivités territoriales et établissements publics, âgés de 48 ans et 5 mois au plus le 1er janvier de l'année du concours, et justifiant de 4 ans de services (64 places au concours 2023).
  • Un troisième concerne les personnes justifiant de l'exercice pendant 8 ans d'une ou plusieurs activités professionnelles, d'un ou plusieurs mandats de membre d'une assemblée élue d'une collectivité territoriale ou de fonctions juridictionnelles à titre non professionnel (Loi org. du 25/2/92) (18 places au concours 2023).
Sont concernées les personnes âgées de 40 ans au plus justifiant des diplômes et de l'exercice des activités énumérés par l'article 18-1 de l'ordonnance de 1958, modifié par la loi organique du 8 août 2016. Ces auditeurs sont nommés par le Ministre de la Justice sur avis conforme de la commission d'avancement.

Leur nombre ne peut dépasser le tiers du nombre des places offertes aux concours prévus à l'article 17 pour le recrutement des auditeurs de justice de la promotion à laquelle ils seront intégrés.

NB : par un arrêt du 8 septembre 2021 le Conseil d’Etat a enjoint au Garde des Sceaux de faire procéder sous 3 mois à l'abrogation du premier alinéa de l'art. 33 du D. du 24 mai 1972 qui prévoyait que les candidats au recrutement sur titres devaient être âgés de 31 ans au moins au 1er janvier de l'année en cours.


En savoir plus : Concours complémentaires

L’insuffisance du nombre de magistrats a conduit à opérer depuis 1998 des recrutements exceptionnels (loi organique du 24/2/98 et décret du 2/4/98) et deux concours complémentaires ont été ouverts par la loi organique du 25 juin 2001 créant l’art. 21-1 ord 1958, avec une limitation quantitative :
  • L’un pour le recrutement de magistrats du second grade (100 places au concours 2023). Pour y prétendre, il faut posséder un niveau Bac+4 ou IEP, avoir au moins 35 ans, et justifier de 7 ans d’activité professionnelle.
  • L’autre pour recruter des magistrats du premier grade (10 places en 2014, dat du dernier concours) : les conditions sont identiques, si ce n’est qu’il faut être âgé d’au moins 50 ans et justifier de 15 ans d’activité professionnelle.
La formation : elle est passée de 31 mois à 36 mois, alternant périodes d'études et stages. La durée totale de la phase de spécialisation est désormais de 8 mois au lieu de 5.
Ensuite, la formation a été réorganisée : elle a évolué d'une logique verticale d'apprentissage des techniques des métiers (instance, instruction, JAP, etc.) à une logique transversale d'acquisition des compétences fondamentales communes à toutes les fonctions de magistrats (éthique et déontologie, culture institutionnelle, entretien judiciaire et communication, prise de décision...). La réforme a aussi porté sur les conditions d'évaluation en distinguant évaluation des progrès, de l'aptitude et du classement de l'auditeur.

A la différence de la situation des auditeurs, l'intégration directe peut se faire à des niveaux d'emploi et de grade variables et à titre définitif ou temporaire.
  • Intégration à titre définitif : cette possibilité concerne des personnes ayant occupé, pendant une certaine durée, des fonctions judiciaires, juridiques, administratives ou universitaires répondant aux exigences des articles 22, 23 et 40 de l'ordonnance du 22 déc. 1958.
  • Intégration provisoire : les possibilités d'intégration, qu'elles soient à temps plein ou partiel, ont été étendues et assouplies par la L. org. n° 2016-1090 du 8 août 2016 les regroupant au sein d'un chap. Vbis dans l'ord. du 22 déc. 1958.
    • Intégration provisoire à temps plein :
      • Conseillers et avocats généraux à la Cour de cassation en service extraordinaire (art. 40-1 et s., ord. du 22 déc. 1958). La durée de leurs fonctions a été portée à 10 ans non renouvelables (la L. org du 24/2/98 avait déjà porté cette durée de 5 à 8 ans). Il leur faut justifier de 20 ans de pratique professionnelle (25 auparavant). L'exercice simultané des fonctions antérieures est interdit.
      • Détachement judiciaire : l'article 41 de l'ordonnance de 1958 envisage le détachement judiciaire de professeurs, de maîtres de conférences, de fonctionnaires issus de l'ENA, de fonctionnaires issus de la fonction d'Etat, territoriale et hospitalière, de militaires et fonctionnaires des assemblées parlementaires. Ceux-ci sont nommés sur avis conforme de la commission d'avancement et soumis à un stage préalable de 6 mois. La durée d'exercice des fonctions est limitée à 5 ans non renouvelables. 
    • Intégration provisoire à temps partiel

Les magistrats concernés ne peuvent exercer qu'une part limitée de la compétence de la juridiction dans laquelle ils sont nommés : ils ne peuvent composer majoritairement une formation collégiale ni composer majoritairement la cour d'assises ou la cour criminelle départementale.
  • Magistrats exerçant à titre temporaire (art. 41-10 et s., ord. 22 déc. 1958) : est possible la nomination en 1ère instance de magistrats exerçant à titre temporaire, pour exercer des fonctions de JCP, d'assesseur dans les formations collégiales des tribunaux judiciaires, de juge du tribunal de police ou de juge chargé de valider les compositions pénales. Ces personnes peuvent également être nommées pour exercer une part limitée des compétences matérielles pouvant être dévolues par voie réglementaire aux chambres de proximité des Tribunaux judiciaires. Elles peuvent enfin exercer les fonctions d'assesseur dans les cours d'assises et les cours criminelles départementales.
    Rq.NB : Dans sa décision du 16 nov. 2023 a formulé des réserves d'interprétation sur les fonctions pouvant être exercées par les magistrats à titre temporaire (L. n° 2023-1058, 20 nov. 2023, art. 8), à l'occasion de la modification de l'art. 41 10 al. 2 de l'ord. du 22 décembre 1958 par la loi org. du 20 nov. 2023, qui ajoute à leurs attributions la présidence des audiences de règlement amiable.

    Pour prétendre à cette voie d'intégration, il faut avoir au moins 35 ans (et moins de 75 ans), justifier de l'exercice pendant 5 ans d'une profession libérale juridique ou judiciaire. Ces magistrats sont nommés pour une durée de 5 ans renouvelable une fois. La fonction n'est pas incompatible avec la poursuite de l'activité antérieure mais ils ne peuvent exercer de fonctions judiciaires dans le ressort du tribunal judiciaire où ils ont leur domicile professionnel, ni effectuer aucun acte de leur profession dans le ressort de la juridiction à laquelle ils sont affectés (art. 41-14, ord. 22 déc. 1958).
  • Magistrats honoraires exerçant des fonctions juridictionnelles ou non : la loi organique du 8 août 2016 leur avait donné un statut et leur champ d'intervention a été élargi par celle du 22 décembre 2021 (art. 41-25 s. ord. 22 déc. 1958). Nommés pour une durée 5 ans non renouvelable, ils peuvent exercer les fonctions de juge des contentieux de la protection, d'assesseur dans les formations collégiales des tribunaux judiciaires et des cours d'appel, de juge du tribunal de police ou de juge chargé de valider les compositions pénales, de substitut près les tribunaux judiciaires ou de substitut général près les cours d'appel. Ils peuvent également être nommés pour exercer une part limitée des compétences matérielles pouvant être dévolues par voie réglementaire aux chambres de proximité. Ils peuvent également être désignés par le premier président de la cour d'appel pour présider la formation collégiale statuant en matière de contentieux social des tribunaux judiciaires et des cours d'appel spécialement désignées pour connaître de ce contentieux. Ils peuvent enfin exercer les fonctions d'assesseur dans les cours d'assises et les cours criminelles départementales.

Dans tous les cas, ils ne peuvent exercer ces fonctions au-delà de 72 ans.
Par ailleurs, ils peuvent également, sur leur demande et jusqu'à 75 ans, exercer des activités non juridictionnelles de nature administrative ou d'aide à la décision au profit des magistrats, étant précisé que l'exercice de telles activités est incompatible avec les activités juridictionnelles précitées (art. 41-32, ord. 22 déc. 1948).
En savoir plus : L'intégration à titre temporaire des ex-juges de proximité

L'intégration à titre temporaire concernait aussi les ex-juges de proximité. A l'occasion de la suppression des juridictions de proximité, le 1er juillet 2017, la loi organique du 8 août 2016 avait prévu que les juges de proximité dont le mandat était en cours puissent être nommés, à leur demande, pour le reste de leur mandat, comme magistrats exerçant à titre temporaire dans le TGI dans le ressort dans lequel était située la juridiction de proximité au sein de laquelle ils avaient été nommés.
Tableau récapitulatif : le recrutement des magistrats


Sy.


Voir aussi le site du Ministère de la Justice (rubrique Métiers et concours).
Enquête, La nomination des magistrats du siège et du parquet (JCP G 09, Fasc. n° 28, 90, p. 8).

La nomination des magistrats résulte d'un décret du Président de la République, sur proposition du Ministre de la Justice.
Pour les auditeurs, le jury assortit la déclaration d'aptitude d'une recommandation et, le cas échéant, de réserves sur les fonctions qu'ils peuvent exercer pour leur premier poste. Ensuite, l'auditeur formule un choix et le Ministre saisit pour avis la formation compétente du CSM. Il s'agit d'une procédure d'avis conforme pour les magistrats du siège et d'avis simple pour le Parquet. La prise de fonctions est précédée d'une prestation de serment devant la Cour d'appel ou la Cour de cassation. Il est ensuite procédé à l'installation des nouveaux magistrats en juridiction au cours d'une audience solennelle.

Rq.S'agissant des magistrats du Parquet, un projet de loi constitutionnelle visant à inscrire dans la Constitution la garantie d'indépendance du Parquet et à renforcer les pouvoirs de discipline et de nomination du CSM (avis conforme pour tous les magistrats) avait été adopté le 26 avril 2016. Pour devenir définitif, il devait encore être approuvé par référendum ou par le Parlement réuni en congrès ...
Un nouveau projet a été déposé le 9 mai 2018. La réforme est toujours d'actualité...

L'avancement est fonction de grades et d'échelons, correspondant à différentes fonctions.

Rq.On a observé une tendance au développement des emplois hors hiérarchie. Ceux-ci sont accessibles après au moins 4 ans de services effectifs dans le corps judiciaire et une mobilité statutaire d'un an au cours de laquelle les magistrats concernés ne peuvent exercer de fonctions juridictionnelles. La loi organique n° 2023-1058 du 20 novembre 2023 prévoit de remplacer ces emplois hors hiérarchie par un troisième grade au plus tard le 31 décembre 2025.

Un tableau d'avancement est dressé chaque année par une commission d'avancement commune aux magistrats du siège et du parquet. Elle se compose du doyen des présidents de chambre de la Cour de cassation (président), du plus ancien des premiers avocats généraux à ladite cour (vice-président), de l'Inspecteur général des services judiciaires et de 16 magistrats (art. 35, ord. 22 déc. 1958). Le tableau d'avancement est communiqué à la formation compétente du CSM.
La nomination à des fonctions et promotions de grades se fait par décret du Président de la République sur consultation du CSM et proposition du Ministre de la Justice : le CSM fait des propositions pour les nominations des magistrats de la Cour de Cassation, pour celles des Premiers Présidents de Cours d'appel et présidents de tribunaux judiciaires. La nomination des autres magistrats du siège est soumise à son avis conforme et celle des magistrats du Parquet à un avis simple.

Rq.Actualité : la procédure pourrait à l'avenir être identique pour tous les magistrats (projets de réforme déjà initiés et en cours d'examen. V. aussi Rapport Nadal, « Refonder le ministère public », précité).


Rq.Le décret du 31 décembre 2008 a par ailleurs réformé la formation continue des magistrats, rendant notamment obligatoire une formation de 5 semaines préalablement aux changements de fonctions, afin de les rendre plus vite opérationnels.


Actualité
La loi organique n° 2023-1058 du 20 novembre 2023 contient des dispositions destinées à moderniser la carrière des magistrats en instaurant des nouvelles conditions d’évaluation d’avancement, de représentation et de dialogue social. Un troisième grade -contingenté- est institué, de même qu'une priorité d'affectation pour les magistrats ayant occupé des postes souffrant d’un problème d’attractivité. D’autres dispositions renforcent la protection fonctionnelle et l’égalité professionnelle entre femmes et hommes dans les procédures de nomination, spécialement dans l’accès aux plus hauts emplois de la magistrature judiciaire.
Rq.Depuis une loi organique du 25 juin 2001 sur la carrière et la mobilité des magistrats existent des incitations à la mobilité et une limitation de la durée d'exercice territorial de certaines fonctions et les possibilités d'avancement d'un point de vue géographique (Cadiet, JCP G 01 I 362 n° 3 - CC du 19 juin 2001, JCP G 01 II 10580).

La spécificité de la fonction des magistrats justifie qu'ils soient assujettis à de nombreuses obligations et qu'un manquement puisse donner lieu à des poursuites disciplinaires.

Deux textes du Conseil de l'Europe, adoptés le 17 nov. 2010, mettent l’accent sur les qualités attendues du juge, telles que l'impartialité et l'indépendance :
  • la Recommandation CM/Rec (2010)12, du Comité des ministres aux Etats membres sur les juges, dont l’objectif est de « délivrer des décisions de qualité dans un délai raisonnable et sur la base d'une considération équitable des éléments ».
  • la « Magna Carta des juges » (principes fondamentaux), adoptée par le Conseil consultatif des juges européens.

Les magistrats sont tout d'abord astreints à des obligations liées à la qualité de fonctionnaire mais nous avons vu que leur indépendance est protégée.

En application de la loi organique n° 2023-1058 du 20 novembre 2023, l'article 10 de l'ordonnance de 1958, qui interdit aux magistrats de manifester toute hostilité au principe ou à la forme du Gouvernement de la République ainsi que toute démonstration de nature politique incompatible avec la réserve que leur imposent leurs fonction, mentionnera à compter du 31 déc. 2024 que « l'expression publique des magistrats ne saurait nuire à l'exercice impartial de leurs fonctions ni porter atteinte à l'indépendance de la justice ». Le Conseil constitutionnel a jugé que « ces dispositions, qui se bornent à rappeler certains des devoirs qui s'imposent à tout magistrat, ne méconnaissent aucune exigence constitutionnelle (CC, 16 nov. 2023, n° 2023-856 DC).

Rq.Rappel : Les magistrats du siège bénéficient d'un droit à l'inamovibilité inscrit à l'article 64 de la Constitution. Ce principe ne s'applique pas aux magistrats du Parquet même si les réformes sont allées dans le sens de l'accroissement des garanties (voir la leçon 2).
Un décret du 26 déc. 2003 avait suscité néanmoins des interrogations en instituant un système de primes pour les magistrats (rejet du recours en annulation : CE, 4/2/05, D. 05 2717, note critique H. Pauliat).
Sur la protection fonctionnelle due par l'Etat aux magistrats (art. 11, ord. 22 déc. 1958) : CE, 28 mai 03, D. 04 245 note Petit, JCP G 04 II 10056, note Brun ; B. Matthieu, « Tiers impartial – L'engagement politique est-il compatible avec la fonction de magistrat », JCP G 2015 Fasc. 39 n° 1005.

Ils doivent faire preuve de dignité et de loyauté en toutes circonstances, éviter les manifestations et démonstrations de nature politique, les fréquentations douteuses. Ils font l'objet d'incompatibilités professionnelles et politiques.
Il ne peuvent exercer aucune autre activité, à l'exception d'activités accessoires d'enseignement et de travaux scientifiques, littéraires ou artistiques. Les fonctions d'arbitre leur sont interdites.

Rq.La situation des juges non professionnels est longtemps restée plus libérale (a ainsi été admise la possibilité pour un huissier siégeant dans le collège employeur d'un Conseil de Prud'hommes d'effectuer des actes d'exécution sur le ressort de la juridiction : JCP G 00 II 10305, RTD civ. 00 639), mais les réformes récentes ont aussi renforcé leurs obligations déontologiques (voir leçon 2).

Ils ne peuvent exercer de mandat politique national ou européen et ne peuvent avoir de mandat local sur leur circonscription d'activité. Ces incompatibilités sont maintenues durant 5 ans après la cessation des fonctions sauf en cas de demande de détachement ou de mise en disponibilité.

Dans leur activité, ils doivent faire preuve d'impartialité. A cet égard existent diverses interdictions de juger : ils ne peuvent juger les personnes avec lesquelles ils possèdent des liens de parenté, ni siéger lorsqu'ils ont des liens avec l'une des parties ou son représentant.... Sur le plan procédural, le constat d'une telle incompatibilité se traduira par une décision d'abstention ou, s'ils n'en prennent pas l'initiative, une demande de récusation ou de renvoi pour suspicion légitime (v. art. L. 111-6 du COJ et art. 339 à 350 du CPC) .

Ils doivent enfin respecter le secret des délibérations.

En savoir plus : Les obligations déontologiques des magistrats
  • La Commission d'éthique de la magistrature avait dégagé sept principes qu’elle souhaitait voir figurer dans le serment prêté par les magistrats : impartialité, devoir de réserve, loyauté, intégrité, dignité, diligence et secret professionnel.
  • Le 10 juin 2010, le CSM avait rendu public le « Recueil des obligations déontologiques des magistrats » que le Parlement lui avait demandé de rédiger (L. org. n° 2007-287 du 5 mars 2007) - Charvet, « Les magistrats français et la déontologie : une problématique à clarifier », D. 2008 1634). Y sont identifiées sept valeurs essentielles, sur lesquelles doit reposer l'action de la justice : l'indépendance, l'impartialité, l'intégrité, la légalité, l'attention à autrui, la discrétion et la réserve.
    Ce recueil a vocation à être remplacé par une charte de déontologie des magistrats de l'ordre judiciaire, élaborée et publiée par le CSM (art. 10, L. org. n° 2023-1058 du 20 novembre 2023).
    Voir L. Cadiet, « Ordre judiciaire - D'une déontologie, l'autre (magistrats) », Proc. 2023 Fasc. 11 repère 10.
  • La loi organique du 8 août 2016 a introduit dans l'ord. du 22 déc. 1958 un article 10-2 créant un collège de déontologie des magistrats de l'ordre judiciaire.
  • Signature à la Cour de cassation le 26 juin 2019 de la Charte portant création du Conseil consultatif conjoint de déontologie de la relation magistrat-avocat. Celui-ci a remis trois rapports le 20 juin 2022 (Dalloz Actualités 29 juin 2022 - JCP G 2022 979, Regard critique : J. Danet).

Rq.Actualité :

La loi organique n° 2016-1090 du 8 août 2016 a introduit plusieurs dispositions relatives aux droits et obligations des magistrats.
Certaines intéressent la prévention des conflits d'intérêts (art. 7-1 à 7-3, ord. 22 déc. 1958). Le conflit est défini comme toute situation d'interférence entre un intérêt public et des intérêts publics ou privés de nature à influencer ou à paraître influencer l'exercice indépendant, impartial et objectif d'une fonction.. Les magistrats ont l'obligation de veiller à prévenir ou faire cesser immédiatement les situations de conflits d'intérêts. Pour ce faire ils seront astreints, lors de leur prise de fonctions, et ultérieurement si nécessaire, à remettre une déclaration d'intérêts, laquelle sera suivie d'entretiens déontologiques. Ils seront également tenus de faire des déclarations de situation patrimoniale.
B. Gardey de Soos, « La déclaration d'intérêts des magistrats judiciaires, un nouvel outil qui doit faire ses preuves », JCP G 2017 Fasc. 49 n° 1298.

La loi a aussi introduit dans l'ord. de 1958 un article 10-1 garantissant  aux magistrats l'exercice du droit syndical.
NB : Les dispositifs de protection existants dans la fonction publique en matière de prévention de la santé et de la qualité de vie au travail, de prévention des risques psycho-sociaux, de lutte contre les harcèlements sexuel, moral et les agissements sexistes ainsi que le dispositif relatif aux lanceurs d'alerte sont rendus applicables aux magistrats par la L. org. 2023-1058 du 20 nov. 2023.

La loi du 8 août 2016 a par ailleurs créé une Inspection générale de la Justice, avec un statut d'appartenance au corps judiciaire, dont l'extension de compétences à la Cour de cassation par le décret n° 2016-1675 du 5 déc. 2016  avait suscité une vive réaction de la part de celle-ci (T.-S. Renoux, JCP G 2016, Fasc. 51 n° 1379 - V. aussi L. Cadiet, « Inspecter la justice : vous avez dit gouvernement des juges ? », Proc. 2017 Fasc.4, repère 4), avant que les dispositions en cause (art. 2) ne soient annulées par le Conseil d'Etat (CE, 23 mars 2018, JCP G 2018 Fasc. 14 n° 398 note H. Paulliat, D. 2018 675 - L. Cadiet, « De l'ambiguïté considérée comme un art. : retour sur l'inspection générale de la justice », Proc. 2018 Fasc. 5 repère 5).
V. aussi : D. Allonsius et L. Bettanti, « L'inspection générale de la Justice - Nouvelles missions, nouvelle organisation interne modernisée », JCP G 2020 Fasc. 3 n° 46 - C. Straudo et J.-M. Etcheverry, « L'inspection générale de la justice, une inspection singulière », JCP 2022 Fasc. 25 n° 795.

L. org. n° du 8 août 2016  et circ. 27 oct. 2016 (L. Cadiet, Proc. 2016 Fasc. 10 repère 9).

Plusieurs décrets d'application sont intervenus pour mettre en œuvre les dispositions de cette loi :
  • Décret n° 2016-1905 du 27 déc. 2016.
  • Décret n° 2017-894 du 6 mai 2017 (recrutement et formation des magistrats de l'ordre judiciaire, École nationale de la magistrature).
  • Décret n° 2017-898 du 9 mai 2017 (collège de déontologie des magistrats de l'ordre judiciaire, statut et formation des candidats à l'intégration directe dans le corps judiciaire. Augmentation de la rémunération des juges de proximité et du volume de leur participation au service de la justice).
B. Gardey de Soos et J. Dupré, « Renouveler et moderniser la pratique quotidienne des magistrats », JCP G 2017 Fasc. 14 n° 392.

Il a été modifié par diverses lois organiques (L. org 25 juin 2001, 5 mars 2007, 8 août 2016, 23 novembre 2023). La loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 a par ailleurs fait évoluer la composition des formations disciplinaires du CSM, mais n'a pas changé leurs prérogatives.

La faute disciplinaire, définie par l'art. 43 al. 1 de l'ordonnance du 22 déc. 1958, été précisée par la loi organique n° 2023-1058 du 20 novembre 2023 comme « tout manquement par un magistrat à l'indépendance, à l'impartialité, à l'intégrité, à la probité, à la loyauté, à la conscience professionnelle, à l'honneur, à la dignité, à la délicatesse, à la réserve et à la discrétion ou aux devoirs de son état ». Cette loi par ailleurs alourdi certaines sanctions disciplinaires.
Les fautes peuvent même être recherchées dans la vie privée mais n'intègrent pas l'erreur dans la décision. En revanche, constitue un manquement aux devoirs de son état la violation grave et délibérée par un magistrat d'une règle de procédure constituant une garantie essentielle des droits des parties, constatée par une décision de justice devenue définitive (art. 43 al. 2 ord. 22 déc. 1958).


Ex.A propos d'une affaire récente : J. Gicquel, « Twitter ou juger ? », JCP G 2014 Fasc. 21 Libre propos n° 604.

La procédure disciplinaire est une procédure contradictoire menée devant deux formations différentes du CSM (voir leçon 2) :
  • La formation compétente pour les magistrats du siège dispose d'un pouvoir juridictionnel réel et rend des décisions motivées s'imposant pour exécution au Ministre de la Justice. Mais un pourvoi est possible devant le Conseil d'Etat.
  • La formation compétente à l'égard des magistrats du Parquet dispose seulement d'un pouvoir d'instruction débouchant sur un avis. Si le Ministre veut sanctionner alors que l'avis ne retient pas de faute, il doit saisir une commission spéciale, présidée par le Premier président de la Cour de Cassation, dont la décision s'impose à lui. Sinon, il ne peut prononcer de sanction plus grave que celle proposée sans requérir de nouvel avis. S'agissant d'un acte administratif, un recours pour excès de pouvoir est ouvert devant le Conseil d'Etat.
Rq.Remarque : la procédure disciplinaire sera sans doute, à terme, identique pour tous les magistrats même si les divers projets de réforme n'ont pour le moment pas abouti (cf. réflexion sur la justice du XXIème siècle, en particulier Rapport Nadal, « Refonder le ministère public » et projet de loi constitutionnelle du 9 mai 2018).
Le CSM avait remis le 24 septembre 2021 au Président de la République un avis portant sur la responsabilité et la protection des magistrats formulant 30 propositions autour de 4 objectifs : placer la déontologie au cœur de la fonction de magistrat, favoriser la détection des manquements disciplinaires, améliorer le déroulement des poursuites disciplinaires et l'échelle des sanctions et renforcer la protection personnelle et fonctionnelle des magistrats (Entretien avec C. Arens et F. Molins, La sanctuarisation de l'acte juridictionnel est un des grands marqueurs de l'état de droit JCP 2021 Fasc. 42 n° 1084 ).

Il est par ailleurs possible d'engager la responsabilité de l'Etat pour fonctionnement défectueux du service public de la justice (art. L. 141-1 et L. 141-2 du COJ).

En revanche les justiciables ne peuvent agir en responsabilité contre les juges à raison de leur faute personnelle. Ils peuvent uniquement exercer une action contre l'Etat, à charge pour celui-ci d'engager éventuellement une action récursoire contre les magistrats ensuite (art. L. 141-1 et L. 141-2 du COJ).
En savoir plus : La responsabilité de l'Etat pour fonctionnement défectueux du service public de la JusticeCette responsabilité doit se fonder sur un déni de justice ou une faute lourde.
  • La faute lourde s'analyse comme toute déficience caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant l'inaptitude du service à remplir la mission dont il est investi (Ass. Plén., 23 fév. 2001, Affaire Grégory, D. 01 1752 et Fasc. 30 actualité, JCP G 01 II 1058 : cet arrêt a marqué une évolution vers une conception extensive de la faute lourde). L'inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est investi ne peut être appréciée que dans la mesure où l'exercice des voies de recours n'a pas permis de réparer le mauvais fonctionnement allégué (Cass. Civ. 1ère civ., 4 nov. 2010, Proc. 2011 Fasc. 2 n° obs. R. Perrot). La procédure ne concerne par ailleurs que les seuls usagers victimes d’un préjudice direct ou par ricochet (Cass. Civ. 1ère, 12 oct. 2011, D. 2011 3040, note S. Petit).
  • En matière administrative, le Conseil d'Etat considère depuis 2002 que la méconnaissance du délai raisonnable s'analyse en un fonctionnement défectueux du service public de la Justice (CE ass., 28/6/02, Magiera, JCP G 03 II 10151, D. 03 23 : cet arrêt a abandonné l'exigence, auparavant exclusive, de faute lourde en matière de responsabilité des juridictions administratives ; V. aussi, CE, 18 juin 2008, Gestas, JCP G 08 II 10141 - En tirant les conséquences, le décret n° 2005-911 du 28 juillet 2005 a donné compétence directe au Conseil d'Etat pour connaître en premier et dernier ressort des actions en responsabilité dirigées contre l'Etat pour durée excessive de la procédure devant la juridiction administrative).
  • La procédure a été jugée conforme à la Convention EDH (Rev. Proc. 2001 chr. 8). La Cour EDH exige désormais qu'avant sa saisine éventuelle soit exercé un recours interne préalable en responsabilité de l'Etat, conformément à l'art. 13 de la CESDH. Cour EDH, 30 oct. 2014, Palmero c/ France, Proc. 2014 Fasc. 12 n° 321, note N. Fricero : une procédure d'indemnisation fondée sur l'article L. 141-1 du Code de procédure civile qui dure six ans, cinq mois et trois jours pour trois degrés de juridictions, dont trois ans et cinq mois au niveau de la seule Cour d'appel, puis un an et neuf mois au niveau de la Cour de cassation, méconnaît les exigences de l'article 6 § 1 de la Convention EDH en raison de sa durée excessive.
En savoir plus : Les suites de l'affaire dite « d'Outreau »

Les dysfonctionnements de la justice constatés à l'occasion de "l'affaire Gregory" avaient donné lieu, en 2006, à un rapport d'enquête parlementaire et à un rapport de l'Inspection générale des services judiciaires, puis au dépôt devant l'Assemblée nationale de trois projets de loi :
  • équilibre de la procédure pénale
  • formation et responsabilité des magistrats
  • possibilité pour toute personne s'estimant lésée par un dysfonctionnement de la justice de saisir le médiateur de la République.

La procédure a abouti à une loi organique du 5 mars 2007 sur la formation et la responsabilité des magistrats. La formation des magistrats a été renforcée : une formation probatoire a été instituée en cas d’intégration directe et pour les magistrats exerçant à titre temporaire. Les quotas de ces recrutements ont par ailleurs été augmentés. La loi de 2007 a cependant été amputée par le Conseil Constitutionnel de ses dispositions sur la faute disciplinaire des magistrats et la possibilité pour les justiciables de saisir le médiateur de la République (CC, 1er mars 2007, JCP G 07 II 10044, note Schoettl). En tirant les conséquences, la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 a institué la possibilité pour les particuliers de saisir directement le Conseil Supérieur de la Magistrature, possibilité devenue opérationnelle en janvier 2011 (Loi org. du 22 juillet 2010 - Voir leçon 2 section 1 §1B2a).
Il convient de préciser l'organisation (A), puis les attributions du Parquet (B).


Le Parquet constitue un corps indivisible ce qui permet une représentation mutuelle de ses membres.
C'est par ailleurs un corps hiérarchisé, soumis au principe de subordination. Toutefois, il a toujours été admis que « si la plume est serve, la parole est libre ». Cela signifie que si le représentant du Parquet est tenu dans ses réquisitions écrites de respecter les instructions données par sa hiérarchie, il n'y est pas assujetti lorsqu'il prend la parole. Ce faisant, il a les moyens de manifester son désaccord éventuel... Par ailleurs, la possibilité pour le Garde des Sceaux d'adresser aux magistrats du parquet des instructions dans les affaires individuelles a été supprimée en 2013 (L. n° 2013-669 du 25 juillet 2013). Ne subsiste plus à son niveau que la diffusion d'instructions générales relatives à la politique pénale.

Rq.NB : Par une décision du 14 sept. 2021(n° 2021-927 QPC), le Conseil constitutionnel a écarté des critiques de constitutionnalité invoquées contre les dispositions du Code de procédure pénale relatives à la transmission de rapports particuliers par les procureurs généraux au ministre de la justice.

  • Au premier degré, le Ministère public est présent devant toutes les juridictions répressives, où il a la qualité de partie principale. En matière civile, il est représenté en première instance devant le tribunal judiciaire par le Procureur de la République, éventuellement assisté de procureurs adjoints, de vice-procureurs et de substituts.
    Bien que rattaché au seul tribunal judiciaire, il peut intervenir devant toutes les autres juridictions situées sur le ressort territorial de cette juridiction.
  • Devant les Cours d'appel, les membres du Parquet sont le Procureur général, des avocats généraux et des substituts généraux. Le Procureur général est le supérieur de tous les procureurs de son ressort et dépend lui-même directement du Ministre de la Justice.
  • Le Parquet de la Cour de cassation se compose du Procureur Général, assisté d'un Secrétaire général, de six Premiers avocats généraux, 36 avocats généraux et 13 avocats généraux référendaires. Il est placé sous l'autorité du Ministre, n'a pas d'autorité sur les autres parquets, et n'a pas les mêmes fonctions (F. Molins, « Quel avenir pour le parquet général de la Cour de cassation ? », JCP 2023 Fasc. 24, Doctr. 751).

Rq.Procureur de la république financier : la loi n° 2013-1115 du 6 décembre 2013 a institué le procureur de la République financier, rattaché au tribunal judiciaire de Paris mais compétent au niveau national pour les atteintes à la probité (telles que la corruption, le trafic d'influence, la prise illégale d'intérêts, le favoritisme, les détournements de fonds publics, etc.), pour la fraude fiscale, lorsque ces infractions ont un certain degré de complexité, et pour le blanchiment de l'ensemble de ces infractions.

Parquet national antiterroriste : la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 a créé le parquet national anti-terroriste (PNAT), dirigé par le Procureur de la République anti-terroriste et également placé près le Tribunal judiciaire de Paris. La multiplication de dossiers particulièrement techniques traités par le parquet de Paris ces dernières années a justifié la création d'une structure spécialisée indépendante. Ce parquet à compétence nationale traite désormais des infractions terroristes et des crimes contre l'humanité. Il peut requérir de tout procureur de la République la réalisation d'actes d'enquête dans le cadre de la menace terroriste. Il dispose également d'un réseau de procureurs délégués à la lutte contre le terrorisme au sein des parquets de première instance. Il a également repris les attributions et les dossiers de la section antiterroriste du parquet de Paris et du Pôle crimes contre l'humanité et crimes de guerre.
Deux décrets du 24 juin 2019  sont venus préciser l'organisation et le fonctionnement du PNAT.

La loi n° 2020-1672 du 24 déc. 2020 a étendu les compétences des parquets anterroriste et financier et entériné la création du parquet européen (Dalloz actualités 7 janvier 2021 , H. Christodoulou).

Le Parquet européen, organe de l'Union européenne entré en vigueur le 1er juin 2021, est chargé de rechercher et de poursuivre devant les juridictions nationales les personnes soupçonnées de fraude aux intérêts financiers de l'Union. Il comporte un bureau central et des procureurs européens délégués (PED) dans les États membres. Il y a en France cinq PED, qui sont rattachés organiquement au TJ et à la CA de Paris. Ils possèdent des prérogatives plus importantes qu'en droit interne et les règles relatives à la hiérarchie du ministère public et à la définition de la politique pénale nationale ne leur sont pas applicables, leur mission étant exclusivement européenne (J. Leblois-Happe, « Parquet européen : let's go ! », D. 2021 1341 - P. Le Fèvre, « Les premiers pas du Parquet européen », D. 2022 288).
En savoir plus : L'évolution, toujours annoncée, du statut du ministère public

Une première tentative avortée de réforme.
Une proposition de réforme du Parquet avait été envisagée à la fin des années quatre-vingt-dix : réforme de la nomination des magistrats du Parquet, du CSM, plus d'instructions dans les affaires individuelles mais mise en œuvre des politiques pénales, droit d'action directe du Ministre de la Justice, développement de la responsabilité. Mais devant l'opposition parlementaire, le Président de la République avait annulé la réunion du Congrès qui devait voter la révision de la Constitution. Des retouches plus modestes ont été apportées, notamment par la loi organique du 25 juin 2001 et le décret n° 2002-442 du 2 avril 2002 modifiant le mode de scrutin aux élections du CSM.

Une évolution annoncée au regard de la Convention EDH.
Depuis un arrêt du 10 juillet 2008, la Cour EDH met en cause le statut du Ministère public et, en raison de son manque d'indépendance à l'égard du pouvoir exécutif, lui dénie la qualité d'autorité judiciaire au sens de l'article 5§1 de la Convention EDH, qui dispose que la privation de liberté doit être placée sous le contrôle d'une « autorité judiciaire » (Cour EDH, 10/7/08, Medvedev/France, JCP G 09 I 104 n° 4 obs. F. Sudre, qui rappelle que cette décision s'inscrit dans une jurisprudence classique de la Cour EDH selon laquelle le juge ou tout autre magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires doit être indépendant de l'exécutif et des parties, ne pas être susceptible d'intervenir dans la procédure ultérieure à titre de représentant de l'autorité de poursuite ; D. 09 600 note J.-F. Renucci - V. aussi M.-L. Rassat, CCP 09 actu n° 200, Libres propos : Encore et toujours la Cour européenne des droits de l'homme – V. aussi Cour EDH, 29 mars 2010, Medvedyev et a. c/ France, arrêt dans lequel, contre toute attente, la grande chambre de la Cour EDH ne statue pas explicitement sur les qualités du ministère public français chargé du contrôle des gardes à vue : D. 2010 1386, note JR Renucci ; F. Sudre, « La Cour européenne joue à cache-cache avec le parquet ? », JCP G 2010 Fasc. 14, n° 398 et JCP G 2010 Fasc. 16 n° 398, Patricia Hennion-Jacquet, « L'arrêt Medvedev : un turbulent silence sur les qualités du parquet français », D. 2010 1390). Dans un arrêt du 23 novembre 2010, la Cour européenne a de nouveau condamné la France pour violation de l'article 5, § 3, de la Convention, ne considérant pas le Ministère public comme un « juge ou un autre magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires » (Cour EDH, 23 nov. 2010, D. 2010 2776 et F. Rome, Magistrature debout, L’Europe aboie, la Chancellerie passe… D. 2010 2761, JCP G 2010 F. 49 n° 1206 obs. F. Sudre ; J.-F. Renucci, « La Cour européenne persiste et signe : le procureur français n'est pas un magistrat au sens de l'article 5 de la Convention », D. 2011 338).

La position européenne a été reprise par la Cour de cassation dans un arrêt du 15 décembre 2010 (Cass. crim., 15 déc. 2010, J. Pradel, « Quel(s) magistrat(s) pour contrôler et prolonger la garde à vue ? Vers une convergence entre la Cour de Strasbourg et la chambre criminelle de la Cour de cassation », D. 2011 338).
Dans une décision ultérieure, sur le terrain non de la conventionnalité mais de la constitutionnalité dans le cadre d’une QPC, elle a estimé qu’il résulte de la jurisprudence du Conseil Constitutionnel que l’autorité judiciaire comprend à la fois les magistrats du siège et du parquet (Cass. crim., 7 juin 2011).

Le Conseil constitutionnel a rendu le 8 déc. 2017 une décision visant à articuler les contraintes statutaires liées au fait que le Parquet doive mettre en oeuvre la politique pénale et les exigences issues de l'art. 5 Convention EDH en matière de contrôle juridictionnel des arrestations (T.-S. Renoux, « Une nouvelle approche de l'indépendance des magistrats et de la séparation des pouvoirs », D. 2018 953 : à propos de la décision du CC n° 2017-680 QPC du 8 déc. 2017 ; S. Guinchard, Parquet – « L'instrumentalisation de la jurisprudence de la Cour EDH dans les débats français sur le statut du Parquet », JCP G 2018 Fasc. 27 n° 760, Proc. 2018 comm n° 62 obs. J. Buisson, JCP G 2018 51 note H. Matsopoulou).
V. aussi J. Pradel, « L'indépendance fonctionnelle du parquet français face aux interprétations divergentes des deux cours européennes », D. 2020 p.442

Actualité(s) : dans ce contexte, une évolution avait, une fois encore, été annoncée, dans le cadre de la réflexion sur la justice du XXIème siècle (V. Rapport Nadal, « Refonder le ministère public » - P. Lyon-Caen, « Vers un parquet indépendant ? », D. 2013 1359). Un projet de réforme avait été soumis au Parlement afin d'inscrire dans la Constitution la garantie d'indépendance du Parquet et renforcer les pouvoirs de discipline et de nomination du CSM (avis conforme pour tous magistrats).
Les choses n'avaient pas abouti.
Un nouveau projet de loi constitututionnelle a encore été déposé le 9 mai 2018, avec en perspective.... un rapprochement des régimes de nomination et de sanction du Parquet et du siège....
Bis repetita.... (N. Droin, « La révision constitutionnelle maudite ou l'impossible révision du statut du parquet – Tout vient à point à qui sait attendre ? », JCP G 2020 Fasc. 42 n° 1154 (relance projet déposé en aout 2013).

Sy.
Tableau récapitulatif : L'organisation du Ministère public


Niveau d'instance

Composition du Parquet

Cour de CassationProcureur Général près la Cour de Cassation + Secrétaire général + six Premiers avocats généraux + 36 avocats généraux et 13 avocats généraux référendaires
Cour d'appelProcureur général près la Cour d'appel + Avocats généraux + Substituts généraux
Tribunal judiciaire - 1ère instanceProcureur de la République + Procureur adjoint + Vice-procureur + Substituts



Au-delà de ses prérogatives en matière pénale, il s'est vu conférer des attributions extrajudiciaires et des attributions judiciaires importantes et variées en matière civile.

Le Procureur de la République assure la surveillance des registres d'état-civil. Il peut faire procéder à l'annulation d'actes irrégulièrement dressés (art. 99 du C. civ.) et à la rectification administrative des erreurs et omissions purement matérielles (art. 99-1 du C. civ.) (Dispositions modifiées par la loi J21 et le décret n° 2017-890 du 6 mai 2017 :  M. Douchy-Oudot, « Du nouveau en matière d'état-civil : décret n° 2017-890 du 6 mai 2017 », Proc. 2017 Fasc. 7 n° 25).
Il contrôle les établissements pénitentiaires, les greffes et assure la direction de la police judiciaire.
Il fait en outre partie de diverses commissions.
Depuis le décret n° 2009-452 du 22 avril 2009, il n'exerce plus de contrôle sur les auxiliaires de justice du ressort, cette prérogative relevant désormais du Procureur Général près la Cour d'appel.

Au civil, il exerce ses attributions judiciaires soit en qualité de partie principale, soit en qualité de partie jointe.

Partie principale (on dit qu'il agit par voie d'action) : il est alors dans la situation d'une véritable partie à l'instance, comme demandeur ou défendeur, et doit assumer les obligations corrélatives.
Il peut agir ainsi :
  • dans les cas spécifiés par la loi (ex : nullité de mariage, nationalité, contestation de reconnaissance),
  • et pour la défense de l'ordre public (art. 423 du CPC).
F. Arbellot, L'action d'office du ministère public prévue à l'art. 423 du CPC, JCP G 2014 Fasc. 24 n° 698 : l'auteur distingue entre actions fondées sur l'ordre public sociétal (protection des personnes et de la famille) et actions relevant de l'ordre public économique et social.

A l’audience, il prend la parole à son tour comme un plaideur ordinaire : il n'est pas tenu dans ce cas de déposer des conclusions écrites, à condition d'assister aux débats (Cass., 3 mars 93, D. 93 IR 110, RTD civ. 93 641 Perrot, obs. Cadiet, JCP G 93 I 3723 n° 4).

Rq.Rappel : la qualité de partie principale lui est aussi conférée en matière pénale, où il a le pouvoir de déclencher l'action publique en vertu du principe de l'opportunité des poursuites. Si la victime peut aussi agir en se constituant partie civile, le Ministère public jouit ensuite du monopole d'exercice de l'action publique.

- Partie jointe (on dit aussi qu'il agit par voie de réquisition) : dans ce cas, le Ministère public fait connaître, quand il le souhaite, son point de vue sur l'application de la loi dans les affaires dont il a eu au préalable communication (art. 424 du CPC). La communication a plusieurs sources possibles :
  • Elle est parfois obligatoire (on parle alors de communication légale : art. 425 du CPC) : une obligation de communication est ainsi imposée à tous les degrés, pour les affaires gracieuses, les procédures d'inscription de faux contre les actes authentiques, en matière de filiation, de tutelle des mineurs, de procédures collectives, pour les actions engagées sur le fondement des dispositions internationales et européennes relatives au déplacement illicite international d'enfants, en matière de question prioritaire de constitutionnalité (Cass. Soc., 10 juin 2015, Proc. 2015 Fasc. 8 n° 268 obs. A. Bugada)...  La règle est d'ordre public à peine de nullité du jugement. La communication est faite à la diligence du juge, en temps utile : le texte ne contient pas plus de précision (art. 428 du CPC). La preuve du respect de la formalité peut être rapportée au moyen des mentions du jugement ou par des procédés extrinsèques (Mixte, 21/7/78, Gaz. Pal. 1978 2 578).
  • La communication peut aussi résulter d'une initiative du tribunal. Il s'agit ici d'une communication judiciaire (art. 427 du CPC). Dans ce cas, l'intervention du Ministère public devient obligatoire.
  • Enfin il peut enfin y avoir « communication spontanée », dans la mesure où le Ministère public a la faculté d'obtenir communication de toutes les affaires et de déposer des conclusions (art. 426 du CPC).
Quand le Ministère public intervient en qualité de partie jointe, il n'est pas astreint à des obligations procédurales particulières ; il prend la parole à l'audience le dernier, sous forme de conclusions orales ou écrites sauf précision textuelle imposant une forme spécifique. Ce fait pourrait être source d'atteinte au contradictoire et à l'exigence de procès équitable de la Convention EDH, notamment s'il développe des moyens nouveaux. Pour y pallier, les parties se sont vues reconnaître le droit de lui répondre au moyen de notes en délibéré (art. 445 du CPC - CEDH, 20/2/96, RTD civ. 97 992 ; Cass. Civ. 3ème, 10/3/00, Proc. 99 n° 120).

Lorsque le ministère public intervient, le greffe doit en informer aussitôt les parties (E. Madranges, « Le procureur doit-il rester sur son estrade ? », JCP G 2017 Fasc. 25 n° 689).

S'agissant du Procureur général près la Cour de cassation, la loi J21 a précisé qu'il rend des avis dans l'intérêt de la loi et du bien commun et éclaire la Cour sur la portée de la décision à intervenir (art. L. 432-1 du COJ).

En savoir plus : Ministère public partie jointe : procédure devant la Cour de cassation et Convention EDH

S'est posée plus largement la question de savoir si les modalités de mise en œuvre de la fonction de partie jointe n'attentaient pas au contradictoire et à l'exigence de procès équitable imposée par la Convention EDH (R. Martin, « Faut-il supprimer le Ministère public ? », RTD civ. 98 873).

La Cour européenne avait en effet sanctionné la participation au délibéré du commissaire du gouvernement devant le Conseil d'Etat (CEDH, 7/6/01, Kress /Fr, D 01 2619, JCP G 01 II 10578, et Guinchard, JCP G 03 I 152 ; Cour EDH 5/7/05 ; Loyen/France, JCP G 06 II 10016).
Pour faire suite à l'arrêt Kress, le Bureau de la Cour de Cassation avait adopté, fin 2001, des dispositions rigoureuses puisque le Ministère public ne peut plus assister au délibéré, n'a plus communication de la note du rapporteur et ne peut plus participer à la "conférence" préparatoire (JCP G 02 I 156 n° 13 ; Guinchard, « Dialogue imaginaire », D. 03 chr. 152 ; Point de vue crit. Sainte-Rose D. 03 Fasc. 22 ; Burgelin, D. 04 chr. 1249). La Cour EDH avait approuvé cette pratique nouvelle selon laquelle seule la première partie du rapport (étude de l'affaire) est communiquée à l'avocat général et aux parties, pas la seconde (avis et projet d'arrêt) (Cour EDH, 2/11/04, Fabre/FR, JCP G 05 I 103 n° 5 - Nadal, « La jurisprudence de la Cour de Strasbourg : une chance pour le Parquet général de la Cour de cassation », D. 05 chr. 800).Ce nouveau mode de fonctionnement a suscité des difficultés internes, affectant l'activité de la Cour et des magistrats (JL Sainte-Rose, M. Domingo, « L'avocat général à la Cour de cassation va-t-il enfin sortir du purgatoire "conventionnel" qui lui a été imposé ? », JCP 2014 Fasc. 46 n° 1193). Dans un arrêt récent, la Cour strasbourgeoise semble avoir tempéré la position rigoureuse qu'elle avait adoptée au début des années 2000 (Cour EDH 18 mai 2021, Diaz/Belgique Proc. 2021 Fasc. 8 n° 224 note N. Fricero : l'avocat général à la Cour de cassation n'ayant pas la qualité de partie au procès, peut avoir connaissance du projet d'arrêt établi par le conseiller rapporteur, couvert par le secret, non soumis au principe du contradictoire, alors même que ce projet n'est pas communiqué au demandeur au pourvoi, sans qu'il y ait violation de l'égalité des armes ou du contradictoire).


Sy.
Tableau récapitulatif : Les attributions judiciaires du Ministère public en matière civile

Partie principale : action par voie d'action :
  • demandeur ou défendeur à l'instance ;
  • doit en assumer les obligations.
Partie jointe : action par voie de réquisition :
  • fait connaître son point de vue sur l'application de la loi dans les affaires dont il a eu communication ;
  • prend la parole à l'audience le dernier.
  • cas spécifiés par la loi (ex : nullité de mariage, nationalité, contestation de reconnaissance) ;
  • défense de l'ordre public.
  • Communication légale ( ex. : affaires gracieuses, inscription de faux, filiation, tutelle des mineurs, procédures collectives...).
  • Communication judiciaire : initiative du tribunal ; possible pour toutes les affaires.
  • Communication "spontanée" : initiative du ministère public.

Section 2. Les auxiliaires de justice

Nous traiterons de ces acteurs incontournables que sont les greffiers, les avocats, et certains officiers ministériels.

Tous les auxilaires potentiels de la justice ne seront néanmoins pas abordés dans ces développements, d'autant que tous ne se voient pas reconnaître le statut d'auxiliaires de justice « stricto sensu ».
Nous évoquerons néanmoins ces intervenants de plus en plus fréquents que sont les conciliateurs, les « assistants des juges » et le défenseur syndical, introduit dans le code du travail par la loi Macron du 6 août 2015.
En savoir plus : Les auxiliaires de justice

Traditionnellement la qualité d'auxilaire de justice, au sens strict, n'était reconnue qu'aux professions exerçant une activité exclusivement ou essentiellement judiciaire, et à vocation généraliste, c'est-à-dire quelle que soit la nature du litige. Cette qualité n'était donc pas forcément reconnue aux professionnels ne participant que de manière occasionnelle au fonctionnement de la Justice, même s'ils sont bien alors des auxiliaires de celle-ci.

Peuvent ainsi intervenir des experts, techniciens, conciliateurs, médiateurs, notaires, commissaires-priseurs et, sur mandat, les administrateurs et liquidateurs judiciaires.
Le développement et l'importance du rôle de certains d'entre eux conduit néanmoins le législateur à encadrer de plus en plus leurs conditions d'intervention (experts judiciaires, conciliateurs et médiateurs) ou à renforcer leur statut. C'est par exemple ce qu'a fait la loi J21, du 18 novembre 2016, pour les mandataires et administrateurs judiciaires, afin de renforcer l'indépendance et l'impartialité de la justice commerciale.

Rq.Les professions réglementées avaient été visées en 2014 par plusieurs rapports :
  • juillet 2014 : note du Conseil d'Analyse Economique (F. G'sell, JCP G 2014 Fasc. 41 n° 1003) ;
  • septembre 2014 : publication du rapport 2013 de l'IGF sur les professions réglementées (JCP G 2014 Fasc. 37 n° 936 – A. Coignac, JCP 2014 Fasc. 43 n° 1069) ;
  • novembre 2014 : rapport Ferrand sur les professions réglementées du droit et de la santé (JCP G 2014 Fasc. 46 n° 1200).
Ces rapports ont abouti à l'adoption de la loi n° 2015-990, du 6 août 2015 (loi Macron), qui a fait évoluer diverses professions réglementées, dont  les professions du droit : notaires, avocats, avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, greffiers des tribunaux de commerce, huissiers, commissaires-priseurs, administrateurs et mandataires judiciaires.

L'évolution s'est poursuivie avec l'adoption de divers décrets, ainsi qu'avec la loi J21. Celle-ci a visé notamment à accélérer la modernisation des professions réglementées.
Elle a en effet imposé que les huissiers de justice, les notaires, les commissaires-priseurs judiciaires, les avocats, les avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, les commissaires aux comptes et les experts-comptables proposent à leur clientèle une relation numérique dans un format garantissant l'interopérabilité de l'ensemble des échanges. Ils doivent aussi rendre librement accessibles les données figurant dans leurs annuaires et tables nationales de manière à garantir cette interopérabilité, notamment au moyen d'un standard ouvert et réutilisable, exploitable par un traitement automatisé.

Par ailleurs tous peuvent désormais sans risquer les sanctions pénales du démarchage, recourir à la sollicitation personnalisée, notamment par voie numérique, et proposer des services en ligne (V. notamment le décret n° 2019-257 du 29 mars 2019).

- F. G'sell, « L'accès au droit et la poursuite de la modernisation des professions réglementées dans la loi J21 », JCP G 2016 Fasc. 52 n° 1406.
- A noter  : la Directive 2018/958/UE du 28 juin 2018 visant à encadrer le contrôle de proportionnalité effectué par les Etats membres avant l'adoption d'une nouvelle réglementation relative aux professions règlementées.


Seront envisagés successivement le statut et les fonctions des greffiers.


Ils ont la qualité de fonctionnaires depuis 1965, à l'exception des greffiers des tribunaux de commerce qui sont des officiers ministériels titulaires de leur charge.
Il existait un corps particulier de greffiers pour les Conseils de Prud'hommes jusqu'à un décret du 30/4/92 qui avait unifié l'ensemble de la profession en un corps de greffiers en chef et un corps de greffiers des services judiciaires.

Avec la loi J21, les greffiers en chef sont devenus « directeurs de services de greffe judiciaire ». Le décret n° 2019-913 du 30 août 2019 dispose que le directeur de greffe du tribunal judiciaire exercera toutes les fonctions de direction de greffe du Conseil de prud'hommes, telles que décrites dans le Code du travail.

En savoir plus : Le statut des greffiers
  • Le statut des directeurs de services de greffe judiciaire (ex-greffiers en chef) avait été modifié au 1er janvier 2003 afin d'intégrer les transferts de compétences dont ils avaient fait l'objet depuis 1995 et l'évolution des exigences liées à leurs fonctions (voir infra). Leur formation initiale a été allongée, il a été institué une formation continue et il leur est dorénavant imposé une exigence de mobilité au bout de 7 ans.
  • Le statut des greffiers des services judiciaires a aussi été modifié par un décret n° 2003-466 du 30 mai 2003, précisant notamment leurs fonctions et modalités de recrutement.
La Cour de cassation, les cours d'appel, les tribunaux judiciaires et les conseils de prud'hommes comprennent un greffe composé de fonctionnaires.

Mais depuis le 1er janvier 2020, le directeur de greffe du tribunal judiciaire exerce toutes les fonctions de direction de greffe du Conseil de prud'hommes, telles que décrites dans le Code du travail (décret n° 2019-913 du 30 août 2019). Par ailleurs, lorsqu’un conseil de prud'hommes a son siège dans la même commune que le siège d'un tribunal judiciaire ou de l'une de ses chambres de proximité, le greffe du tribunal judiciaire ou le greffe détaché de la chambre de proximité comprend également le service de greffe du conseil de prud'hommes (art. L. 123-1 et R. 123-1 du COJ).

Le greffe des TPBR était auparavant assuré par les greffes des tribunaux d'instance. Depuis le 1er janvier 2020 il est assuré, selon le cas, par le greffe du tribunal judiciaire ou le greffe détaché d'une chambre de proximité de ce tribunal (décret n° 2019-913 du 30 août 2019).
Leurs missions sont diversifiées, ce qui explique que des dysfonctionnements éventuels puissent être lourds de conséquences pour les justiciables.

Ils sont tout d'abord chargés de l'accueil et de l'information.
Ils assurent ensuite la tenue :
  • des répertoires et registres : répertoire civil auprès du tribunal judiciaire, registre du commerce et des sociétés auprès des tribunaux de commerce, répertoire général, dossiers des affaires, registre d'audience.
  • des archives de la juridiction.

Ils assistent les juges, leurs servent de « témoins » et jouent un rôle dans l'authentification de leurs actes. Ils attestent de la régularité formelle des audiences et auditions.
Ils procèdent aux notifications, délivrent les demandes de communication de pièces, des convocations.
Ils établissent les minutes des décisions, délivrent les jugements, reçoivent certaines déclarations (ex: renonciations à succession, déclarations de surenchères) ...
Ils ont un rôle financier en recevant les consignations et provisions.
Ils sont enfin chargés de la gestion du budget et de l'administration de la juridiction.
En savoir plus : Les fonctions des directeurs de services de greffe judiciaire

Les fonctions des directeurs de services de greffe judiciaire (ex-greffiers en chef), après avoir été étendues par la loi du 8 fév. 1995, ont ensuite été limitées par des textes postérieurs :
  • Les directeurs des services de greffe étaient chargés de délivrer des certificats de nationalité, de vérifier les comptes de tutelle des majeurs (ils peuvent se faire assister par un huissier : décret n° 2011-1470 du 8 nov. 2011). Ils recevaient auparavant les consentements à adoption (art. 348-3 du C. civ. modifié par L. n° 2010-1609 du 22 déc. 2010) et jusqu'au 30 octobre 2017 les déclarations de constitution de PACS, compétence transférée aux officiers d'état-civil depuis le novembre 2017 (la loi du 28 mars 2011 avait déjà permis d'effectuer la formalité devant notaire).
  • Ceux des TGI recevaient les déclarations d'autorité parentale conjointe (avant 2005, ils recevaient aussi les déclarations conjointes de modification du nom des enfants naturels, faites ensuite devant les officiers d'état civil) et vérifiaient les comptes de tutelle des mineurs (L. 12 mai 2009). Enfin, les directeurs de greffe des TGI ou CA assurent, selon les cas, la vice-présidence des bureaux d'aide juridictionnelle.
Les attributions des directeurs de greffes des TGI et TI ont été dévolues aux directeurs des greffes des tribunaux judiciaires.

Rq.Actualité : Le service d'accueil unique du justiciable (SAUJ) :

Le Rapport Guinchard proposait de créer des « greffiers juridictionnels », dotés de compétences élargies. Les rapports sur la "Justice du XXIème siècle" avaient repris en partie cette proposition de renforcement du rôle des greffiers.

Pour faciliter le recours à la justice, la prévoit l'institution « d'un service d'accueil unique du justiciable » (SAUJ) dont la compétence s'étend au-delà de celle de la juridiction où il est implanté. « Le service informe les personnes sur les procédures qui les concernent et reçoit de leur part des actes afférents à ces procédures » (art. L. 123-3 du COJ - F. G'sell, « L'accès au droit et la poursuite de la modernisation des professions réglementées dans la loi ... J21 », JCP G 2016 Fasc. 52 n° 1406).

Un décret n° 2017-897 du 9 mai 2017 est venu préciser le fonctionnement du SAUJ et déterminer les compétences juridictionnelles des agents de greffe qui y sont affectés. Cela a constitué une première étape dans la création du SAUJ qui a vocation à recevoir d'autres actes de procédure et à voir sa compétence étendue sur l'ensemble du territoire national. Par ailleurs, le décret a étendu la liste des personnes habilitées à accéder au bureau d'ordre national automatisé des procédures judiciaires, dit « Cassiopée ».

Le service d'accueil unique du justiciable (SAUJ) est implanté au siège de chaque tribunal judiciaire et de chaque chambre de proximité. Les agents de greffe qui y sont affectés peuvent assurer la réception et la transmission :

« 1° De tous les actes en matière civile, lorsque la représentation n'est pas obligatoire.

2° En matière prud'homale :
  • Des requêtes ;
  • Des demandes de délivrance de copie certifiée conforme, d'un extrait et d'une copie certifiée conforme revêtue de la formule exécutoire ;
3° En matière pénale :
  • Des plaintes déposées auprès du procureur de la République ;
  • Des demandes en consultation ou en exclusion du bulletin n° 2 du casier judiciaire ;
  • Des requêtes en confusion de peines, en relèvement ou en rectification d'erreur matérielle ;
  • Des demandes de copie de décision pénale ;
  • Des oppositions à ordonnance pénale ;
  • Des demandes de permis de visite ;
4° Des demandes d'aide juridictionnelle dans les conditions des art. 32 et 37 du D. n° 2020-1717 du 28 décembre 2020. »
La profession d’avocat est toujours en mutation et son périmètre a évolué à plusieurs reprises.

Une première fusion était déjà intervenue en 1971 : fusion entre les avoués des TGI, les avocats et les agréés près des tribunaux de commerce. La loi du 31 décembre 1990 fut à l'origine de la deuxième, intervenue entre avocats et conseils juridiques, dans une perspective d'unification européenne des professions juridiques et judiciaires (voir aussi décret du 27 nov. 91 modifié par décret du 17 oct. 95 - Sur les difficultés liées à cette fusion : JCP G 96 I 3931 et 3932).

La troisième fusion, entre avocats et avoués, réalisée le 1er janvier 2012, a conféré aux premiers le monopole de la représentation devant les Cours d’appel et consacré la disparition des seconds (voir infra §3B).

La loi "Macron" précitée, du 6 août 2015, a été à l'origine de nouvelles évolutions.

Rq.Statistiques : 68 464 avocats recensés au 1er janvier 2019, dont 42 % appartenant au barreau de Paris. 56,4 % de femmes (Communiqué Min. Justice 16 oct. 2019).
En savoir plus : L'évolution de la profession d'avocat et ses relations avec les autres professions judiciaires et juridiques

En 2008, le Conseil National des Barreaux avait voté une résolution en faveur de la constitution d’une grande profession réunissant avocats, avoués, avocats aux Conseils et notaires, par voie d’unification ou de cumul d’activités (CNB, lettre du Conseil 18 avr. 2008, JCP G 08 actua n° 316 et communiqué du 30/9/08 sur le périmètre d’activité, la formation, les structures d’exercice, la régulation et la gouvernance de la profession, JCP G 08 actu n° 598 – Voir la réponse du Président du Conseil supérieur du notariat, JCP G 08 actu n° 552). La même année, avait été suggéré un autre projet d’unification, entre les professions d’avocat et de conseil en propriété industrielle (Communiqué CNB, 17 mars 2008).

Dans ce contexte, une commission présidée par Jean-Michel Darrois avait été chargée par le Président de la République de formuler des propositions visant à la création d’une « grande profession du droit » et à une réforme des conditions d’exercice des professionnels du droit « pour favoriser la concurrence et leur compétitivité interne et internationale et améliorer la qualité des services rendus aux usagers ». La commission était aussi chargée de mener une réflexion sur le système d’aide juridictionnelle.

Dans son rapport, remis le 8 avril 2009, la commission Darrois avait écarté l’idée d’une profession unique, et notamment la fusion des avocats et notaires, mais encourageait l’interprofessionnalité et le développement de réseaux pluridisciplinaires. Elle souhaitait voir se développer des collaborations pour permettre aux avocats de pénétrer le domaine des ventes immobilières ou la matière successorale, ainsi que leur donner la possibilité d’intervenir davantage dans la rédaction des actes (M. Mekki, « De l'acte sous signature juridique à l'acte contresigné par l'avocat », JCP G 09 n° 61). Elle proposait la création d’écoles communes de professionnels du droit après le Master 2.
  • Site internet de la Commission Darrois.
  • Rapport de la commission Darrois.
  • JCP G 09 I 131 : Entretien avec JM Darrois et propositions de la Commission.

Sur les implications éventuelles pour la profession d'avocat, au regard de ses règles et usages, et des principes déontologiques qui la régissent, voir : H. Ader, R. Martin, J. Villacèque, Manifeste du 20 janvier 2009, JCP G 09 actu n° 57.

La loi n° 2011-331 du 28 mars 2011 a reconnu des effets de droit au contreseing d'un acte sous seing privé par un avocat, tout en modernisant et en renforçant les structures d’exercice de l’ensemble des professions libérales réglementées, afin de faciliter leur développement économique. Ce texte a ouvert également la voie au développement de l'interprofessionnalité capitalistique entre les professions du droit, avant que celle-ci ne soit enfin consacrée par la loi n° 2015-990 du 6 août 2015.
La loi du 18 novembre 2016, sur la Justice du XXIème siècle, a étendu le domaine de la convention de procédure participative et renforcé la valeur de l'acte contresigné par avocat en faisant de celui-ci, d'une part, une voie d'accès au divorce et, d'autre part, un acte susceptible de jouer un rôle procédural (S. Amrani-Mekki, JCP G 2015 Fasc. 41 n° 1052).

Rq.Faisant suite au rapport Prada, déposé le 31 mars 2011 (Rapport sur certains facteurs de renforcement de la compétitivité juridique de la place de Paris), un communiqué du Ministère de la Justice, du 21 juin 2011, avait annoncé un avant-projet de loi sur la création d’un statut d’avocat en entreprise (JCP G 2011, Fasc. 26 n° 757). Les professionnels concernés étaient partagés.
Le projet de loi Macron envisageait également la création d'un statut d'avocat en entreprise (F. Moréas et P. Charles, « Et si la réforme des professions réglementées aidait les avocats », JCP G 2014 Fasc. 38 n° 939), qui a également été abandonné lors des discussions parlementaires.

Les réflexions se sont poursuivies :
  • Février 2017 : rapport Haeri sur l'avenir de la profession d'avocat (F. G'sell, « L'avenir de la profession d'avocat. À propos du rapport "Haeri" », JCP G 2017 Fasc. 9 n° 196).
  • L. Neuers, JCP G 2017 Fasc. 42 n° 1079 : « Avocatus numericus : modes d'emploi ».
  • G. Pillet, « A propos du rapport « Les quatre défis de l'avocat français du XXème siècle », JC G 2017 Fasc. 48 n° 1247.
  • Rapport annuel du CNB pour 2018 : l'unité à la Une, Aperçu rapide par Stéphanie Grayot-Dirx, JCP G 2019 Fasc. n° 24 n° 626.
  • « Etats généraux de l'avenir de la profession d'avocat : résultats de la consultation », JCP G 2019 Fasc. 27 n° 752.
  • Juillet 2020 : rapport Perben relatif à l'avenir de la profession d'avocat.
  • Nouvelles réticences suscitées début 2021 par l'avant projet de loi sur l'avocat salarié en entreprise envisagé par le Ministère de la Justice (le CNB se prononce contre l'avant-projet de loi, JCP G 2021 Fasc. 5 n° 137 - Louis Degos, « L'avocat (salarié) en entreprise : totems et tabous », JCP G 2021 Fasc. 8-9 n° 216 - G. Vautrin, S. Nonorgue et P. Meysonnier, JCP G 2021 Fasc. 8 n° 215).
Nous développerons l'organisation de la profession d'avocat, puis le statut et les missions des avocats, étant précisé que la loi 2015-990 du 6 août 2015 a modifié la territorialité de la postulation et ouvert aux autres professions juridiques et judiciaires le capital social des sociétés d'exercice libéral (SEL) d'avocats.

L'organisation comporte deux niveaux : d'une part des Barreaux près des Tribunaux judiciaires, d'autre part des organismes fédérateurs.

Rq.Bibliographie : JCP G 2011 Fasc. 19, n° 543 : « Au commencement étaient les Ordres - Gouvernance de la profession : réalités et enjeux ».


Un barreau indépendant, constituant un ordre autonome, est rattaché à chaque tribunal judiciaire.

Rq.Incidence de la réforme de la carte judiciaire à la fin des années 2000 :
  • Un décret n° 2008-741 du 29 juillet 2008 a institué une aide à l'adaptation de l'exercice de la profession d'avocat aux conditions nouvelles résultant de la suppression de certains TGI.
  • Sur la mise en place de la nouvelle carte judiciaire et la réorganisation subséquente de la profession d'avocat : F. Creux-Thomas, « Le tribunal disparaît, l'avocat demeure », enquête, JCP G 09 N° 25 p. 10.

Les barreaux sont composés des avocats inscrits au tableau. Chaque barreau a la personnalité morale, gère son patrimoine, édicte un règlement intérieur et possède des organes d'administration.

  • L'un est le Conseil de l'Ordre, élu pour 3 ans par tous les avocats, et qui s'intéresse à toutes les questions concernant l'exercice de la profession (Cass. Civ. 1ère, 14 fév. 2018, n° 16-27909 : caractère non juridictionnel des décisions du conseil de l'ordre refusant une réinscription au tableau de l'Ordre).
    Le Conseil de l'Ordre veille à la protection des droits et devoirs des avocats et vérifie leur comptabilité. Les contrats de collaboration et de travail des avocats doivent lui être communiqués (art. 17 L. 31 déc. 71, in fine). Il peut aussi imposer un contrat d'assurance groupe (JCP G 99 II 10197).
    La loi du 11 février 2004 lui a retiré son pouvoir disciplinaire, au profit d'un conseil de discipline régional unique siégeant dans le ressort de chaque Cour d'appel (exception faite du Tribunal judiciaire de Paris), et composé de représentants désignés par les Conseils de l'Ordre du ressort (décret n° 2005-531 du 24 mai 2005 - JCP G 2005 actua n° 305 et R. Martin, Libre propos, JCP G 2005 actua n° 343). Cette loi a opéré par ailleurs une mise en harmonie de la procédure avec les dispositions de la Convention EDH. Les dispositions relatives à la procédure disciplinaire ont également été modifiées par la loi n° du 21 décembre 2021 et le décret n° 2022-965 du 30 juin 2022 (DA 6 juillet 2022).
    Depuis le 1er juillet 2022, le conseil de discipline doit être présidé par un magistrat du siège de la Cour d'appel lorsque la poursuite disciplinaire fait suite à la réclamation d'un tiers ou lorsque l'avocat mis en cause en fait la demande.
  • L'autre organe d'administration est le Bâtonnier, élu pour 2 ans et désormais assisté d’un vice-bâtonnier (L. n° 2011-331 du 28 mars 2011 et décret n° 2009-1233 du 14 oct. 2009). Le Bâtonnier représente le Barreau dans les actes de la vie civile. Il s'est vu confier par la loi du 22 décembre 2021 un nouveau rôle de contrôleur des lieux de privation de liberté (art. 719 al. 1 du C. Proc. Pén.). Il intervient en cas de réclamations de la part de clients : contestations d'honoraires (art. 174s. D. n° 91-1197 du 27 nov. 1991), appréciation de la validité des conventions d'honoraires (procédure jugée conforme à la Convention EDH : Cass. Civ. 2ème, 29 mars 2012).
Rq.Art 21 II de la loi du 31 déc. 1971 modifié par la loi n° 2021-1729 du 21 déc. 2021 applicable à compter du 1er juillet 2022 : le bâtonnier instruit toute réclamation formulée à l'encontre d'un avocat. Il accuse réception de la réclamation, en informe l'avocat mis en cause et invite celui-ci à présenter ses observations.
Lorsque la nature de la réclamation le permet, et sous réserve des réclamations abusives ou manifestement mal fondées, le bâtonnier peut organiser une conciliation entre les parties, à laquelle prend part un avocat au moins.
L'auteur de la réclamation et l'avocat mis en cause sont informés des suites réservées à la réclamation. En l'absence de conciliation, en cas d'échec de celle-ci ou en l'absence de poursuite disciplinaire, l'auteur de la réclamation est informé sans délai de la possibilité de saisir le procureur.
Le Bâtonnier possède un rôle de conciliation des différends d'ordre professionnel entre avocats (art. 21 III de la L. 31 déc. 1971). Il dispose par ailleurs d'un pouvoir juridictionnel en première instance pour les litiges nés à l'occasion des contrats de travail des avocats salariés (Villacèque, « La juridiction du Bâtonnier », D. 97 chr. 305), de la rupture conventionnelle de ces mêmes contrats (L. n° 2008-596 du 25 juin 2008) et pour les litiges nés à l'occasion d'un contrat de collaboration libérale (L. n° 2009-526 du 12 mai 2009 : obs. Bortoluzzi, JCP G 09 F. 40 n° 295 § 12).
La loi du 12 mai 2009 précise par ailleurs que tout différend entre avocats à l'occasion de leur exercice professionnel est, en l'absence de conciliation, soumis à l'arbitrage du Bâtonnier, selon des modalités précisées par le décret n° 2009-1544 du 11 déc. 2009. Un arrêt (Cass. Civ. 1ère, 9 juillet 2014, Proc. 2014 F. 10 n° 269, JCP G 2014 n° 837) a toutefois considéré que ces dispositions n'étaient pas exclusives de la possibilité d'un arbitrage de droit commun en cas de clause compromissoire le prévoyant. 

Il s'agit des Centres Régionaux de Formation Professionnelle des Avocats (CRFPA) et du Conseil National des Barreaux (CNB).
  • Les CRFPA également appelés « écoles d'avocats » (EDA), sont des établissements d'utilité publique dotés de la personnalité morale. Situés près des Cours d'appel, ils assurent la formation professionnelle initiale et permanente, la préparation au Certificat d'Aptitude à la Profession d'Avocat (CAPA), contrôlent le déroulement des stages et délivrent les certificats de spécialisation. Leurs décisions peuvent être déférées à la Cour d'appel.
  • Le Conseil National des Barreaux (modif. L. 30/12/95 et décret 19/3/96) (CNB) est un établissement d'utilité publique composé de délégués des différents barreaux représentant la profession auprès des pouvoirs publics. Le CNB est chargé d'unifier, par voie de dispositions générales, dans le respect des dispositions législatives et réglementaires en vigueur, les règles et usages de la profession. Il harmonise les programmes, coordonne et contrôle les actions de formation, dont il répartit le financement. Il détermine les conditions générales d'obtention des mentions de spécialisation. Récemment investi d'une mission de défense de l'intérêt collectif de la profession, il peut, devant toutes les juridictions, exercer tous les droits réservés à la partie civile relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession d'avocat (art. 21-1 al. 5 de la L. 31 déc. 1971).

Un décret du 15 mai 2007 prévoit la publication au Journal Officiel des décisions normatives du CNB.
En savoir plus : Règlement intérieur et pouvoir normatif du CNB : retour sur un feuilleton à rebondissements

En octroyant au CNB un pouvoir normatif, la loi du 11 février 2004 était destinée à régler des difficultés qui s'étaient manifestées avant son adoption. En effet, il avait été jugé que le CNB, dans le cadre de sa mission d'harmonisation de la profession, pouvait prendre des décisions s'imposant aux Barreaux et c'est ainsi qu'avait été adopté en 1999 un règlement intérieur harmonisé (RIH) déclaré applicable à tous les Ordres à compter du 1er janvier 2000. La Cour de Cassation avait avalisé cette initiative discutée (Cass. Civ 3ème, 10/1/01: le CNB est chargé de prendre des décisions unifiant les dispositions essentielles des règlements intérieurs des différents ordres) mais sa compétence avait été déniée par le Tribunal des Conflits, qui avait considéré l'ordre administratif comme seul compétent pour connaître du contentieux relatif à l'exercice par le CNB de son pouvoir normatif (T. conflits, 18/6/01, JCP G 01 II 10586). Le Conseil d'Etat avait finalement tranché (CE, 27/7/01, JCP G 01 II 10596, Proc. 01 n° 195, D. 02 365), estimant que le CNB n'avait pas le pouvoir déontologique d'édicter les règles de la profession d'avocat, lesquelles ne pouvaient résulter que d'un décret en Conseil d'Etat, et qu'il ne pouvait qu'émettre des recommandations. La Cour de cassation en avait pris acte, déclarant illégales des dispositions prises par un Barreau en application du RIH (Cass. Civ. 1ère, 21/1/03, D. 03 855 note Blanchard, JCP G 03 I 128 n° 11 obs. Cadiet et II 10030, note R. Martin faisant le point sur la question).

Appliquant immédiatement les dispositions issues de la loi du 11 février 2004, le CNB avait adopté les 20 mars et 24 avril 2004 une décision à caractère normatif instituant un règlement intérieur unifié (RIU) dont les dispositions avaient été notifiées aux Barreaux afin qu'ils les intègrent, conformément à la loi, dans leurs propres règlements intérieurs pour les rendre applicables (R. Martin, « Le RIU est arrivé », JCP G 04 act. 275. A propos de l'article 6.6 RIU sur la prestation juridique en ligne, voir H. Croze, « Le CNB et l'avocat électronique », Proc. 04 chr n° 11 C. Laporte, « De quelques aspects procéduraux traités par le RIU », Proc. 04 chr n° 12).

Mais il est apparu que la question n'était pas réglée pour autant ! En effet le Conseil d'Etat a, dans un premier temps suspendu (ord. 22/6/04, D. 04 2740 note Blanchard, JCP G 04 II 10137 note Bandrac), puis annulé (CE, 17 nov. 2004, JCP 04 II 10188 concl. Aguila ; Martin, « Le RIU en question », JCP G 04 Fasc. 52 act. 675) l'article 16 du RIU réglementant la participation des avocats à des réseaux pluridisciplinaires, estimant que si la compétence du CNB concerne l'unification des règles et usages de la profession, elle trouve en revanche sa limite dans les droits et libertés qui appartiennent aux avocats et dans les règles essentielles de l'exercice de la profession. Il a considéré ainsi que le CNB ne pouvait fixer de prescriptions mettant en cause la liberté d'exercice de la profession ou les règles essentielles qui la régissent et qui n'auraient aucun fondement dans les règles législatives ou dans celles fixées par les décrets en Conseil d'Etat prévus par l'article 53 de la loi du 31 décembre 1971, ou ne seraient pas une conséquence nécessaire d'une règle figurant au nombre des traditions de la profession.

Une partie de la difficulté a été réglée par la publication d'un code de déontologie, par un décret n° 2005-790 du 12 juillet 2005, dont la légalité a été confirmée par le Conseil d'Etat (CE, 15 nov. 2006, JCP G 07 II 10001 note R. Martin, JCP G 07 I 151 n° 3-2). A ensuite été publiée au JO la décision du CNB du 12 juillet 2007 portant adoption du règlement intérieur national de la profession d'avocat (RIN).

Suite aux réformes issues de la loi du 22 déc. 2021, ce premier code a été remplacé après publication du D. n° 2023-552 du 30 juin 2023 portant Code de déontologie des avocats et regroupant les dispositions relatives aux principes de la profession qui se trouvaient auparavant dans le RIN, le D. n° 91-1197 du 27 novembre 1991 et le D. n° 2005-790 du 12 juillet 2005.

S. Grayot-Dirx, « Le nouveau Code de déontologie des avocats : un code à droit constant pour une profession en mouvement », Proc. 2023 Fasc. 10 étude 8.

Seront étudiées les conditions requises pour accéder à la profession puis les droits et devoirs des avocats.

Rq.F. Sicard et A. de la Ferté-Sénectère, « La nécessité de consacrer l'impératif de bénéficier d'une défense efficace dans la Constitution », JCP G 2016 Fasc. 22 n° 603.

- Il faut en principe avoir la nationalité française ou être ressortissant de l'Union européenne, avoir une bonne moralité, ne pas avoir fait l'objet de condamnation pénale, ni de décision de redressement ou de liquidation judiciaire, justifier d'une maîtrise ou d'un master en droit ou d'un diplôme équivalent.

Actualité : La loi n° 2023-1059 du 20 novembre 2023 relève de maîtrise à master en droit, à compter du 1er janvier 2025, le niveau de qualification requis pour accéder à la profession d'avocat, passant ainsi d'un niveau bac + 4 à un niveau bac + 5, en cohérence avec les diplômes désormais délivrés par l'enseignement supérieur. Les personnes justifiant de l'obtention des 60 premiers crédits d'un master en droit ou de l'un des titres ou diplômes reconnus comme équivalents par arrêté conjoint du ministre de la justice et du ministre chargé des universités pourront continuer à passer l'examen du CRFPA permettant d'entrer dans une école d'avocats.
En savoir plus : Situation des avocats étrangers
  • Reconnaissance des qualifications professionnelles : aux termes de l'art. 99 du décret du 27 nov. 1991, les avocats de l'Union Européenne pouvaient accéder directement à un Barreau français, sans passer le CAPA, mais sous condition d'un examen d'aptitude spécial, qui comportait un contrôle linguistique. Leur accès à la profession résultait d'une décision motivée du CNB qui devait être rendue dans les 3 mois de la réception du dossier. Ce régime reste a priori en vigueur pour les avocats étrangers (avec une condition supplémentaire de réciprocité exigée de l'Etat dont ils sont ressortissants), ceux de l'Espace Economique Européen et pour ceux qui souhaitent être intégrés alors qu'ils ne remplissent pas la condition de délai prévue par la loi du 11 février 2004 (voir infra).
    La liste des éléments constitutifs du dossier a été modifiée en 2009 pour transposer la directive 2005/36/CE, relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles et tenir compte des exigences de simplification imposées par la directive 2006/123/CE sur les services dans le marché intérieur. Par ailleurs un décret n° 2009-199 du 18 fév. 2009 a intégré les qualifications professionnelles des avocats des Etats membres de l'Espace Economique Européen (V. aussi l'ord. n° 2018-310 du 27 avril 2018 et le décret n° 2019-849 du 20 août 2019 régissant l'exercice par des avocats inscrits à des Barreaux d'Etats non membres de l'UE de l'activité de consultation juridique et de rédaction d'actes sous seing privé en droit international et droit étranger).
  • Conditions d'exercice de la profession en France : l'exercice par les avocats de leur profession dans les différents Etats membres de l'Union a été facilité par une directive européenne du 16 fév. 1998 qui, n'ayant pas été transposée sous 2 ans, était devenue directement applicable en vertu de l'article 249 du Traité (Dir. n° 98/5, JCP G 98 III 20061 et n° 6 actualités - Cette directive a été jugée valide par la CJCE : CJCE, 7 nov. 00, JCP G 01 II 10637 - Gromek-Broc, « Le Barreau européen franchit les frontières - Vicissitudes de la directive d'établissement pour les avocats », D. 01 chr 641 ; Pau 21/5/01, D. 02 121). Ce manquement de la France avait par ailleurs justifié sa condamnation par la CJCE (CJCE, 26/9/02, D. 03 725).
    La loi du 11 février 2004 réformant le statut de certaines professions judiciaires ou juridiques a finalement transposé cette directive (Martin, JCP G 03 fasc. 18 actua n° 229, C. Nourissat, Proc. 04 chr. n° 6). Elle prévoit pour tout ressortissant de l'Union la possibilité d'exercice à titre permanent de la profession d'avocat, sous son seul titre professionnel d'origine, si ce titre figure sur une liste fixée par le décret n° 2004-1123 du 14 octobre 2004. Il est inscrit de droit (pas de test linguistique : CJCE, 19/9/06, JCP G 06 II 10200, note Zarka) sur une liste spéciale du tableau du barreau de son choix, après production d'une attestation justificative délivrée par l'autorité compétente de son Etat d'origine (Cass. Civ. 1ère, 28 juin 2012, JCP G 2012 fasc. 42 n° 1121 § 2). Il fait partie du barreau concerné et participe à l'élection des membres du CNB.

    L'avocat exerçant sous son titre professionnel d'origine, qui justifie d'une activité régulière et effective sur le territoire national d'une durée au moins égale à trois ans en droit français peut accéder sans autre exigence à la profession d'avocat.
    Si son activité sur le territoire national est au moins égale à 3 ans mais d'une durée moindre en droit français, le Conseil de l'Ordre apprécie le caractère effectif et régulier de l'activité exercée, ainsi que la capacité de l'intéressé à poursuivre celle-ci.
- L'examen d'entrée dans les CRFPA peut être préparé dans les Instituts d'Etudes Judiciaires (IEJ) . L'examen et le programme ont été réformés par un décret n° 2016-1389 du 17 octobre 2016 et un arrêté de la même date.
La formation théorique et pratique dispensée dans les CRFPA (formation en alternance - décret n° 2004-1386 du 21 déc. 04, Martin, JCP G 05 actu 42), d'une durée d'au moins 18 mois, se termine par le passage du Certificat d'Aptitude à la Profession d'Avocat (CAPA, dont le programme est déterminé par un arrêté du 7 déc. 2005).

Il existe des possibilités de dispenses d'examen, voire de formation et même du CAPA. Des modifications à certains de ces accès dérogatoires ont été introduites par le D. n° 2023-1125 du 1er déc. 2023. Depuis le 1er janvier 2024, le doctorat n'est ainsi plus suffisant pour intégrer directement une EDA (art. 54 nouveau du D. n° 91-1197 du 27 nov. 1991).

Ex.Ex : Maîtres de conférences docteurs en droit justifiant de 5 ans d'exercice en cette qualité : Cass. Civ. 1ère, 12 fév. 02, D. 03 375 - Juristes salariés de cabinets d'avocats ou d'offices d'avocats aux Conseils justifiant de 8 années d'expérience : voir CE, 25/7/07, JCP G 07 I 206 n° 1

NB : La dispense de formation et de CAPA pour les personnes ayant exercé durant 8 ans au moins des responsabilités publiques les faisant directement participer à l'élaboration de la loi, instituée par le décret n° 2012-441 du 3 avril 2012, a été abrogée par un décret du 15 avril 2013.
Le CNB avait proposé en 2017 de réformer la formation initiale et de créer un statut d'avocat référendaire (JCP G 2017 Fasc. 7 n° 191).
La formation professionnelle initiale a fait l'objet de modifications par le D. n° 2023-1125 du 1er déc. 2023 (S. Grayot-Dirx, Le décret et la discorde à propos du décret du 1er décembre 2023 relatif à la formation professionnelle des avocats. JCP 2024 Fasc. 1, Aperçu rapide 2).

- L'obtention du CAPA permet de demander une inscription immédiate au tableau d'un barreau en qualité d'avocat.
Les nouveaux avocats n'ont plus à effectuer le stage de 2 ans qui était nécessaire auparavant.

Rq.La formation continue est désormais obligatoire pour les avocats inscrits au tableau de l'Ordre (décret n° 2004-1386 du 21 déc. 2004).

Nous envisagerons successivement les obligations qui s'imposent aux avocats, puis les prérogatives dont ils bénéficient en contrepartie.


Rq.Rappel : la profession dispose depuis 2005 d'un Code de déontologie (décret n° 2005-790 du 12 juillet 2005), qui a été modifié suite aux réformes issues de la loi du 22 déc. 2021 : D. n° 2023-552 du 30 juin 2023 portant Code de déontologie des avocats et regroupant les dispositions relatives aux principes de la profession qui se trouvaient auparavant dans le RIN, le D. n° 91-1197 du 27 novembre 1991 et le D. n° 2005-790 du 12 juillet 2005 (S. Grayot-Dirx, « Le nouveau Code de déontologie des avocats : un code à droit constant pour une profession en mouvement », Proc. 2023 Fasc. 10 étude 8).

A signaler également la signature à la Cour de cassation, le 26 juin 2019, de la Charte portant création du Conseil consultatif conjoint de déontologie de la relation magistrat-avocat.

Les avocats ont une obligation de déférence à l'égard des magistrats (Cass. Civ. 1ère, 28/43/08, JCP G 08 II 10123, JCP G 08 I 184 n° 15 : des propos adressés ad hominem, sans traduire une idée, une opinion ou information susceptible d'alimenter une réflexion ou un débat d'intérêt général ne relèvent pas de la protection du droit à la liberté d'expression prévue par l'art. 10 de la Convention EDH ; Cass. Civ. 1ère, 4 mai 2012, JCP G 2012, Fasc. 42 n° 1121 § 13 - Mais il a été jugé récemment que l'art. 10 de la CEDH permet néanmoins l'extension de la liberté d'expression hors du prétoire : Ass Plén 16 déc. 2016, D. 2017 434 (affaire Morice) note E. Raschel) et de courtoisie, confraternité et délicatesse vis-à-vis de leurs confrères... et du Bâtonnier (Rennes, 23 mai 08, D. 08 2576).

Ils doivent conduire les affaires à leur terme sauf décharge donnée par le client ou à condition de prévenir celui-ci à temps (Cass. Civ. 1ère, 30 oct. 08, D. 08 995 note Avril : obligation d'informer le client en temps utile d'un refus de poursuivre la procédure en appel).

Ils sont astreints au secret professionnel et la loi du 7 avril 1997 confère au secret un caractère absolu couvrant l'activité de conseil et de défense (JCP G 97 n° 18 actualités et I 4041 - Sur cette question, voir (b), infra, la confidentialité constituant à la fois un devoir et un droit).

Il existe des incompatibilités professionnelles.
Ex.Fonctions publiques, salariat, commerce : courtage (D. 97 254), dentiste - Sur l'obligation d'exercer la profession dans la dignité, voir Bordeaux, 3/6/03, JCP G 04 II 10027 : avocate jouant de l'accordéon sur la voie publique.

Mais le décret n° 2016-882 du 29 juin 2016 a ouvert la possibilité nouvelle d'activités commerciales connexes à titre accessoire (art. 4). Sont désormais autorisées l'édition juridique, la formation professionnelle ou la mise à disposition de moyens matériels ou de locaux au bénéfice d'autres avocats ou sociétés d'avocats.

Une décision à caractère normatif (n° 2011-002), adoptée par le CNB le 18 juin 2011, a modifié l'article 1er du RIN en ajoutant un paragraphe 5 relatif au devoir de prudence de l'avocat, qui prévoit notamment que s'il a « des raisons de suspecter qu'une opération juridique aurait pour objet ou pour résultat la commission d'une infraction, l'avocat doit immédiatement s'efforcer d'en dissuader son client. A défaut d'y parvenir, il doit se retirer du dossier ». Le champ d'application général de ce devoir concerne, par exemple, la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme (C. Cutajar, « Le devoir de prudence des avocats et la lutte contre le blanchiment d'argent », D. 2011 1960).

L'interdiction traditionnelle du démarchage a été tempérée. De même, ont été encadrées les possibilités de communication ouvertes aux avocats afin de promouvoir leurs activités, notamment par le biais des nouveaux modes numériques de communication.
En savoir plus : Interdiction du démarchage et communication des avocats

L'interdiction traditionnelle du démarchage avait conduit à condamner l'ouverture du site « Classaction.fr », mis en place en vue en vue d'inciter à l'exercice d'actions collectives (Cass. Civ. 1ère, 30/9/08, JCP G 09 I 120 n° 3) – V. aussi, Justine Lesueur, Enquête : www. avocat.fr - Avocat et publicité sur Internet : une relation à définir, JCP G 2010 Fasc. n° 7, n° 175).

La décision du CNB n° 2010-002 modifiant le RIN a toiletté les règles relatives à la publicité, y compris par internet (B. Blanchard, D. 2011 552).
Puis, dans un arrêt rendu en 2013, le Conseil d'Etat a considéré que les dispositions interdisant à l'avocat toute forme de démarchage, figurant à l'alinéa 2 de l'article 15 du décret n° 2005-790 du 12 juillet 2005 étaient contraires aux dispositions des articles 4 et 24 de la directive « services » n° 2006/123/CE du 12 décembre 2006. De même, les dispositions de l'alinéa 3 de l'article 15 du décret précité, interdisant aux avocats d'adresser une offre de service personnalisée à un client potentiel ont aussi été jugées contraires à la directive, de même que les dispositions des articles 2, 3 et 5 du décret n° 72-785 du 25 août 1972 relatifs au démarchage et à la publicité en matière de consultation et de rédaction d'actes, interdisant et réprimant certaines formes de publicité en vue de donner des consultations, de rédiger des actes ou de proposer son assistance en matière juridique, en ce qu'elles s'appliquaient aux avocats (CE, 13 déc 2013, D. 2014 27).

L'intérêt de cette décision a semblé atténué par l'entrée en vigueur de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 dont l'article 13 permet aux avocats de recourir à la publicité ainsi qu'à la sollicitation personnalisée. Le décret d'application du 28 octobre 2014 autorise donc désormais celles-ci... mais uniquement par envoi postal et courrier électronique... ce qui pourrait se discuter au regard de l'arrêt précité du Conseil d'Etat (F. G'sell, « La libéralisation mesurée de la publicité et de la sollicitation personnalisée », JCP G 2014 Fasc. 48 n° 1235 ; « Publicité des avocats : le décret du 28 oct. 2014 est-il compatible avec la directive Services ? », Proc. 2015 Fasc. 1 alerte 1 - Voir aussi décision du CNB du 13 nov. 2014 portant réforme du RIN quant aux conditions de publicité et sollicitation personnalisée - A. Coignac, « Quand les avocats font leur publicité », JCP G 2015 Fasc. 21 n° 577 - V. aussi T. Wickers, Avocats, D. 2017 74 §IVB). Le Conseil d'Etat a considéré que les restrictions de commmunication de l'art. 10.6.2 du RIN visaient les plaques professionnelles, non les vitrines (CE, 3 oct. 2018, D. 2019 91 - V. aussi D. 2020 109s). Une décision n° 2019-005 du CNB a heureusement modifié l'art. 10 du RIN pour faciliter la communication des avocats (S. Bortoluzzi, « Uniformisation de la communication des avocats : la fin d'une controverse sur les supports et mentions autorisés », JCP G 2020 Fasc. 25 n° 772 - T. Wickers, D. 2021 104 § III - Cass. Civ. 1ère, 3 fév. 2021, JCP G 2021 Fasc. 7 n° 20, P. Lingibé, « Retrait de panneaux professionnels non conformes à l'art. 10 RIN »).

Par ailleurs, en lien avec l'évolution technologique et numérique, on assiste au développement par des tiers de sites internet d'offres de services juridiques, ce qui soulève de nouvelles questions : C. Bléry et JP Teboul, « Entre nullité pour vice de forme, nullité pour irrégularité de fond et exercice illégal de la profession d'avocat : l'audacieux mais périlleux équilibre de DemanderJustice.com », JCP G 2014 Fasc. 20 n° 578. La Cour d'appel de Paris avait confirmé confirmation un jugement du TGI de Paris du 13 mars 2014, prononçant la relaxe des poursuites pour exercice illégal de la profession d'avocat (Paris, 21 mars 2016, JCP G 2016 Fasc. 14 n° 394 et Fasc. 23 n° 670 § 20 obs. F. G'sell, D. 2017 74 §IIA). Le pourvoi a été rejeté (Cass. Crim., 21 mars 2017). S'agissant du volet civil de la même affaire, le CNB et le Barreau de Paris ont aussi été déboutés par la Cour d'appel de Paris (Paris, 6 nov. 2018, JCP G 2018 Fasc. 47 n° 1228 - « La plateforme DemanderJustice n'empiète pas sur le périmètre du droit », JCP G 2019 Fasc. 9-10 n° 255 §19 obs. F. G'sell, H. Slim, « Les contours des prestations juridiques réservées aux avocats à l'ère du numérique », JCP G 2019 Fasc. 1-2 n° 10 : le critère de l'assistance juridique est le raisonnement syllogistique). La Cour de cassation a également rejeté le pourvoi, considérant l'absence de pratique commerciale trompeuse des sites « DemanderJustice.com » et « SaisirPrudhommes.com ». La nullité pour vice de forme de la signature électronique d'un acte de saisine effectué via ces sites est par ailleurs conditionnée à la preuve d'un grief et à l'absence de régularisation par comparution du requérant (Cass. Civ. 1ère, 23 sept. 2020, JCP G 2020 Fasc. 52 n° 1450 note P. Giraud).
V. aussi : « Accessibilité des services juridiques : un marché à conquérir pour les avocats », JCP G 2014 Fasc. 25 n° 708 - S. Smatt et L. Blanc, « Les avocats doivent-ils craindre, l'Ubérisation du droit ? », JCP G 2015 Fasc. 40 n° 1017 - S. Smatt, « Les nouveaux business models du droit », JCP G 2015 Fasc. 49 n° 1345).

Cette dimension a été prise en compte par la loi du 23 mars 2019, qui contient des dispositions intéressant les Legaltechs fournissant des services d'aide à la saisine des juridictions ou induits par l'Open data et la mise à disposition dématérialisée des décisions de justice.

En revanche, après le TGI puis la Cour d'appel de Paris (TGI de Paris 30 janvier 2015 et 20 nov. 2015, JCP G 2015 Fasc. 52 n° 1417 obs. F. G'sell, « Les débuts périlleux d'un comparateur d'avocats - Paris, 18 déc. 2015 », JCP G 2016 Fasc. 1 n° 4, et Fasc. 23 n° 670 § 21 obs. F. G'sell), la Cour de cassation a confirmé l'illégalité des pratiques du site "avocat.net" (devenu alexia.fr) sans toutefois condamner les comparateurs d'avocats (Cass., 11 mai 2017, JCP G 2017, Fasc. 21 n° 596, Fasc. 27 n° 758 note F. G'sell et, sur renvoi Versailles 7 déc. 2018 (renvoi Cass. civ. 1ère, 11 mai 2017, JCP G 2018 Fasc. 52 n° 1399, JCP G 2019 Fasc. 9-10 n° 255 §18 obs. F. G'sell : les comparateurs d'avocats sont licites à condition de respecter le droit des consommateurs). 

A noter : la loi J21, du 18 novembre 2016, ouvre aussi la possibilité de recourir à la sollicitation personnalisée à plusieurs professions réglementées pour proposer les prestations qu'elles fournissent à titre principal ou accessoire.

Voir également :
  • J.-C. Guerrini et V. Selosse, « La sécurité numérique au sein des cabinets d'avocats », JCP G 2016 Fasc. 22 n° 637.
  • Nouvelles formes de travail et d'activités : Avocap 2.2 », JCP G 2016 Fasc. 15 n° 449.
  • Mise en place par le Barreau de Paris d'actions conjointes ou co-mandats d'agir en justice pour faciliter la mise en place de mandats d'assistance et de représentation autour d'un ou plusieurs avocats à l'occasion d'instances concernant de nombreuses victimes (H. Croze, « Regroupons las actions de groupe », Proc. 2016 Fasc. 2 Repère 2).
  • Modification du RIN (CNB, déc. n° 2016-002, 26 janvier 2017) : champ d'activité professionnelle de l'avocat et prestations juridiques en ligne, JCP G 2017 Fasc. 19 n° 548.
  • Sur la "justice prédictive" et les questions soulevées en lien avec l'Open data des décisions de justice :
    • B. Dondéro, « Justice prédictive : la fin de l'aléa judiciaire », D. 2017 532.
    • A. Garapon, « Les enjeux de la justice prédictive », JCP G 2017 Fasc. 1 n° 31.
    • H. Croze, « Justice prédictive », JCP G 2017 Fasc. 5 n° 101.
    • C. Nourrissat, « Justice prédictive et professions d'avocat : entre fantasme(s) et réalité(s) », JCP G 2017 Fasc. 30 n° 878.
    • JM Augagneur, « Justice – D'où jugez-vous ? Un paradoxe entre justice prédictive et réforme de la motivation des décisions », JCP G 2018 Fasc. 13 n° 341.
    • V. Vigneau, « Le passé ne manque pas d'avenir », D. 2018 1095 : libre propos d'un juge sur la justice prédictive.
    • L. Godefroy, « Le code algorithmique au service du droit », D. 2018 734.
    • S.-M. Ferrié, « Les algorithmes à l'épreuve du droit au procès équitable », Proc. 2018, Fasc. 4 Etude 4.
    • F. Rouvière, « 10 problèmes épistémologiques sur la justice prédictive », D. 2021 587
Le non-respect de leurs obligations professionnelles et déontologiques, peut justifier des poursuites disciplinaires et pénales (procédure disciplinaire modifiée depuis le 1er juillet 2022 par la loi n° du 21 décembre 2021 et le D. n° 2022-965 du 30 juin 2022 – S. Bortoluzzi, « Une réforme de la procédure disciplinaire à parachever », JCP 2022 Fasc. 28 n° 871 - V. aussi la circulaire du 9 nov. 2022 présentant la réforme de la discipline des avocats (JUSC2230652C : BOMJ, 9 nov. 2022) : droit des plaignants de saisir directement l'instance disciplinaire mais pouvoir de filtrage du président du Conseil de discipline, possibilité pour le bâtonnier d'organiser une conciliation pour toute réclamation, conseil présidé par un magistrat de la Cour d'appel lorsque la réclamation émane d'un tiers ou si l'avocat mis en cause en fait la demande, introduction d'un échevinage au stade de l'appel).
En savoir plus : Procédure disciplinaire (NB : jurisprudence antérieure au 1er juillet 2022)

La procédure disciplinaire applicable aux avocats : entretien par D. Landry, JCP G 2010 Fasc. 18, n° 521 - L’instruction de la procédure disciplinaire par les rapporteurs doit être impartiale : Cass. Civ. 1ère, 2/4/09, JCP G 09 II 10090). Le Conseil constitutionnel a rejeté une QPC contestant la compétence du pouvoir réglementaire pour fixer les sanctions disciplinaires des avocats (DCC n° 2017-630 du 19 mai 2017, JCP G 2017 Fasc. 22 n° 629 - V. aussi Cass. Civ. 1ère, QPC, 1er mars 2017, n° 16-40.278, JCP G 2017 Fasc. 10 n° 262). De manière plus discutable, une autre décision a validé au regard de la Constitution l'imprescriptibilité des poursuites disciplinaires contre les avocats (CC, 11 oct. 2018, n° 2018-738 QPC - C. Vautrot-Schwarz, « Le Conseil constitutionnel, l'action disciplinaire contre l'avocat et la faux du temps », JCP G 2019 Fasc. 1-2 n° 11).

B. Bonnet et J. Ferron, « Le port de signes religieux par les avocats », JCP G 2018 Fasc. 27 n° 781.
En contrepartie de leurs obligations, les avocats bénéficient de diverses prérogatives.
D'une part ils jouissent de privilèges et d'immunités. D'autre part, pour rémunérer leurs prestations, ils peuvent se prévaloir d'un droit à honoraires.


  • Immunité de parole et d’écrit en relation avec la défense (Cass. Civ. 1ère, 5 avril 2012, pourvoi n° 11-11044 : en dehors du prétoire l'avocat n'est pas protégé par l'immunité et est tenu aux devoirs de modération et de délicatesse : sanction de propos à connotation raciale - V. aussi Lyon 18 avril 2013, JCP G 2013 Fasc. 28 n° 801, note T. Fourrey et A. Guedj - Cour EDH, 12 janvier 2016, Proc. 2016 Fasc. 3 n° 97 note N. Fricero : une sanction pénale infligée à un avocat en raison de propos tenus dans ses écritures dans l'exercice de la défense de son client est disproportionnée, en raison de son « effet dissuasif » sur sa liberté d'expression. Ce n'est qu'exceptionnellement qu'une restriction à la liberté d'expression de l'avocat de la défense, même au moyen d'une sanction pénale légère, peut passer pour nécessaire dans une société démocratique - Cour EDH, 17 mai 2022, Proc. 2022 Fasc. 7 n° 172 obs. N. Fricero : liberté d'expression de l'avocat dans le cadre de l'exercice de la défense et plaisanterie à l'audience).
  • Inviolabilité du cabinet.
    • Cour EDH, 4 oct. 2018, Leotsakos c. Grèce, requête n° 30958/13 : sanction des conditions de perquisition par la police.
    • Cour EDH, 28 août 2018 : validation de la visite domiciliaire du bâtonnier.
  • Confidentialité des consultations et correspondances avec les clients et entre avocats (L. 7/4/97, Martin JCP G 97 I 4041 et 98 I 108).
En savoir plus : Droit au secret professionnel et à la confidentialité
  • V. Nioré, « Le secret professionnel de l'avocat : un chef d'oeuvre en péril », JCP G 2014 Fasc. 43 n° 1095.¶
  • Cass. Civ. 1ère, 25 fév. 2016, JCP G 2016 Fasc. 19 n° 563, RTD civ. 2016 439, Proc. 2016 Fasc. 4 n° 119 obs. Y. Strickler : le secret professionnel des avocats ne s'étend pas aux documents détenus par l'adversaire de leur client, susceptibles de relever du secret des affaires, dont le refus de communication constitue l'objet même du litige.

Le principe de confidentialité des correspondances joue quel qu'en soit le support et doit conduire à faire rejeter des débats judiciaires tout document y portant atteinte. Le secret l'emporte ainsi sur le droit de perquisition du fisc sauf s'il s'agit d'établir la preuve de la participation de l'avocat à la fraude présumée (Cass. Com., 5/5/98, JCP G 98 II 10126 ; 15 déc 99, JCP G 99 I 126 n° 6 - D. 02 som 855).
Le secret professionnel s'applique aussi à toutes les correspondances « non officielles » échangées entre avocats (Cass. Civ 1ère, 4/2/03, JCP G 03 I 128 n° 11 obs. Cadiet et JCP G 03 II 10035 conclusions Sainte-Rose – Y. Avril, « Lettre entre avocats : la fin d'une querelle », D. 2010 p. 1502). Il a été jugé récemment qu'à défaut de porter la mention « officielle », une telle correspondance entre avocats soumise au secret professionnel, ne peut être produite par un avocat que « sous réserve des strictes exigences de sa propre défense » (Cass. Civ. 2ème, 29 sept. 2022, n° 21-13.625, JCP G 2022 Fasc. 46 n° 1289 note S. Grayot-Dirx, RT 2022 897 note H. Barbier).
A l'inverse, entre avocats de l'UE, s'applique le principe de non confidentialité sauf mention contraire (sur les pouvoirs de vérification de la Commission Européenne et l'absence de confidentialité des communications entre les avocats exerçant en entreprise et cette dernière : voir TPICE, 17 sept. 2007 aff. T-253/03, JCP G 07 actua n° 442, JCP G 07 I 206 n° 5 ; CJUE, 14 sept. 2010, D. 2010 2149, D. 2011 552 § IIID obs. B. Blanchard, JCP G 2010 F. 43 n° 1068 § 3, C. Nourrissat, Proc. 2010 Fasc. 11 n° 375).

Le client d'un avocat a toutefois le pouvoir d'ôter à la missive dont il est l'auteur son caractère confidentiel (Cass. Civ. 1ère, 4/4/06, JCP G 06 II 10106, Proc. 06 n° 125 - Cass. Civ. 1ère, 30/4/09, D. 09 2710 §IV VI). L’avocat peut également envoyer à un tiers une note d’entretien, dès lors que ledit tiers a participé à la réunion concernée (Cass. Civ. 1ère, 14 janv. 2010, JCP 2010 Fasc. 4 n° 81, D. 2010 1125, note Moret-Bailly, D. 2011 552 § IIIA obs. B. Blanchard).

Le règlement intérieur d’un barreau ne peut toutefois étendre le principe de confidentialité en dehors des hypothèses de secret professionnel visées par la loi (Cass. Civ. 1ère, 22 sept. 2011, JCP G 2011 Fasc. 46 n° 1243 obs. Y. Repiquet ; Y. Avril, « Le secret professionnel des avocats, force ou alibi », D. 2011 2979). Suite à cet arrêt, le CNB a adopté les 14-15 sept. 2012 une résolution visant à renforcer la protection du secret professionnel, la confidentialité des échanges et à modifier le régime des preuves constituées par les correspondances entre avocats et clients (JCP G 2012, Fasc. 39 n° 1028).
V. aussi Paris, 29 sept. 2011, D. 2012 204 note D. Martin, Correspondances d'avocat : la cour d'appel de Paris en état de récidive - Cass. Civ. 1ère, 12 oct. 2016, JCP G 2016 Fasc. 45 n° 1165 obs. S. Grayot-Dirx : la mention "officielle" figurant dans une correspondance entre avocats ne suffit pas pour pouvoir la produire en justice. Le commentateur note le renvoi fait à l'art. 3.2 du RIN qui ne permet de lever la confidentialité que dans deux cas : une correspondance équivalent à un acte de procédure ou bien une correspondance ne faisant référence à aucun écrit, propos ou éléments antérieurs confidentiels, la nécessité s'imposant en outre de respecter les principes essentiels de la profession.

La Cour EDH juge contraire à l'article 10 de la Convention (droit à la liberté d'expression) la condamnation pour violation du secret professionnel d'une avocate s'étant exprimée dans la presse à propos d'un rapport d'expertise couvert par le secret de l'instruction (Cour EDH, 15 déc. 2011, D. 2012 667 obs. S. Lavric ; ibid. note Lyn François).


Secret professionnel et dispositions destinées à lutter contre le crime organisé et le blanchiment
Les années passées, la profession avait  manifesté son inquiétude lors de l'adoption de différents textes, intéressant la procédure pénale ou la lutte contre le blanchiment :
  • Tout d’abord, face à l'art. L. 434-7-2 du C. pén., issu de la loi sur la criminalité organisée, réprimant la révélation d’informations de nature à entraver le déroulement des investigations ou la manifestation de la vérité.
  • Ensuite, à l’occasion de la transposition de la directive européenne anti-blanchiment du 4 décembre 2001 (directive 2001/97/CE, art. 2) qui soumet les avocats à une déclaration de soupçon, sauf en matière d’activité juridictionnelle et de consultation (art. L. 562-1 s. C. monét. Fin.) (JCP G 04 actua. 230 : Aperçu rapide n° 2A, Croze, « Incidences procédurales de la loi du 11 février 2004 », Proc. 2004 chr. n° 5 - V. aussi décret d’application n° 2006-736 du 26 juin 2006). Les avocats avaient déféré au Conseil d’Etat le décret du 26 juin 2006 relatif à la déclaration de soupçons, qui ne conservait de l’exclusion légale que les activités juridictionnelles (omission de la consultation), en considérant qu’il portait notamment atteinte à l’indépendance de la profession. Dans un arrêt du 10 avril 2008, le Conseil d’Etat a jugé que la directive du 4 déc. 2001 et la loi de transposition du 11 février 2004 étaient conformes à la Convention EDH, et que les avocats devaient bien contribuer au dispositif préventif de lutte contre le blanchiment. En revanche, il a estimé que les dispositions réglementaires adoptées contrevenaient à cette loi et devaient être annulées (relations individuelles directes avec la cellule TRACFIN et non-exclusion des consultations juridiques : CE, 10/4/08, D. 08 2322 note Cutajar, JCP G 08 II 10125 note Tinière, JCP 08 I 184 n° 3).
La CJCE a jugé que les obligations d'information et de coopération pesant sur les avocats lorsqu'ils participent à certaines transactions financières ou immobilières n'ayant pas de lien avec une procédure judiciaire ne violent pas le droit à un procès équitable garanti par l'art. 6 de la Convention EDH (CJCE, 26/06/07, JCP G 07 I 205 n° 6 et II 10137 note Cachard).
Le régime de la déclaration de soupçons a été durci davantage encore par la 3ème directive anti-blanchiment, (Dir. n° 2005-60 du 26 octobre 2005 – O. Cachard, « Le secret de l'avocat en Europe », JCP G 06 actu n° 465), transposée par une ordonnance n° 2009-104, du 30 janvier 2009 (CREA/CNB et Jamin, JCP G 09 I 120 n° 4) et trois décrets d’application, mais avec dispense des obligations de vigilance pour les informations reçues par les avocats dans le cadre de leur activité juridictionnelle. Ceci ne semblait pas conforme à la directive mais le Conseil d'État a néanmoins rejeté le recours formé contre les décrets en cause (CE, 14 oct. 2011, n° 332126, Ordre des avocats au barreau de Paris : JCP G 2011, act. 1209, obs. Ch. Cutajar, JCP 2012). La cour EDH a validé la transposition intéressant les avocats, au regard du respect de leur secret professionnel, dès lors que les obligations mises à leur charge ne portent pas sur leur « mission de défense » et que leurs relations avec la cellule TRACFIN imposent l'intermédiation de leur bâtonnier (Cour EDH, Michaud/France, 6 déc. 2012, D. 2013 Fasc. 4 p. 284 note F. Deferrard, JCP G 2013 n° 187, note H. Robert, Proc. 2013 Fasc. 2 n° 43 note N. Fricero).

Voir aussi ord. n° 2020-115 du 12 fév. 2020 transposant la 5ème directive anti-blanchiment (Dir UE 2018/843 du 30 mai 2018) et élargissant dans l'art. L. 561-3, I 3° du CMF le champ des activités soumises aux obligations de vigilance et de déclaration (C. Cutajar, « Avocats et blanchiment – Une sur-transposition problématique de la 5ème directive », JCP G 2020 Fasc. 36 n° 946 ).
Rq.Bibliographie :C. Cutajar, JCP 09 actu n° 70, « Déclaration de soupçon du blanchiment de la fraude fiscale, A propos du décret du 16 juillet 2009 », JCP G 09 n° 36, 189 ;
C. Cutajar et M. Beaussier, « Les avocats et la lutte contre le blanchiment », JCP G 09 Fasc. 48 n° 474 ;¶
H. Robert, « Professions juridiques et prévention du blanchiment Après la transposition de la directive n° 2005/60 du 26 octobre 2005 », JCP G 2010 Fasc. 7 n° 202 ;
F. Sicard et A. de la Ferté-Sénectère, « De l'indépendance de l'avocat en droit constitutionnel français », JCP G 2015 n° 1082 ;
Sur les rôles des CARPA (Caisses des règlements pécuniaires des avocats) pour concilier protection du secret professionnel et de l'ordre public en matière juridique : J.-C. Krebs, D. 2016 2006.
 

Rq.Actualité 2021 : Secret professionnel et procédure pénale.

Le secret professionnel de l’avocat a souvent posé des difficultés dans le cadre de l’instruction pénale, même s’il a pu être jugé qu’une perquisition dans un cabinet ne pouvait avoir pour objet de rechercher des éléments d'incrimination contre l'un des clients de l'avocat (Cour EDH, 24/7/08, JCP 08 I 184 n° 4).
La question des interceptions de conversations téléphoniques a notamment suscité une jurisprudence ambivalente : 
  • Principe d'interdiction des interceptions (Cass. crim., 17/9/08, JCP 09 I 120 n° 7), même dans le cadre d'une commission rogatoire régulière (Cass. crim., 18 janv. 2006, JCP 06 II 10085 note Martin).
  • Contra : D. Soulez Larivière, « Les écoutes et le secret professionnel de l'avocat (libre propos en matière pénale à propos de Cass. crim., 22 mars 2016 -  des écoutes - ayant pour conséquence d'exclure le secret professionnel en matière de conseil et de contentieux en dehors ou avant toute procédure pénale) », JCP 2016 Fasc. 20 n° 581 et Fasc. 23 n° 670 § 9 obs. C. Vautrot-Scchwarz) - Voir aussi Cour EDH, 16 juin 2016, D. 2016 note E. Raschel, dans lequel la Cour valide certaines écoutes incidentes à une instruction pénale, lorsqu'elles sont « prévues par la loi », « visent la défense de l'ordre » et sont « nécessaires dans une société démocratique », dès lors que la personne contrôlée dispose d'un « contrôle efficace » de l'ingérence de l'autorité publique dans sa correspondance.
Dans le cadre de la procédure parlementaire ayant conduit à l’adoption de la loi n° du 21 décembre 2021, un amendement adopté par la Commission des Lois du Sénat le 15 septembre 2021 avait suscité des remous au sein de la profession. Le CNB, lors d’une assemblée générale avait voté une motion contre cet amendement (D. Lévy, JCP 2021 Fasc. 39 n° 973 ; G. Bertrou JCP 2021 Fasc. 45 n° 1184, O. Beaud, D. 2021 2081).
La loi adoptée reconnaît le secret professionnel de l'avocat, tant dans son activité de défense que de conseil. Un § III, ajouté à l'article préliminaire du Code de procédure pénale dispose que « Le respect du secret professionnel de la défense et du conseil, prévu à l'article 66-5 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 (…), est garanti au cours de la procédure pénale dans les conditions prévues par le présent code ».
Des exceptions ont toutefois été apportées en matière de conseil (art. 56-1-2 du CPP) : le secret professionnel du conseil n'est en effet pas opposable aux mesures d'enquête ou d'instruction en cas de fraude fiscale, corruption ou blanchiment de ces délits et de financement du terrorisme, sous réserve que les consultations, correspondances ou pièces détenues ou transmises par l'avocat ou son client établissent la preuve de leur utilisation aux fins de commettre ou de faciliter la commission desdites infractions.
De nouvelles garanties ont par ailleurs été fixées en cas de perquisitions et saisies effectuées au cabinet ou au domicile de l’avocat (art 56-1 du CPP : présence du bâtonnier lors des perquisitions des cabinets, décision préalable du juge des libertés et de la détention). Pour échapper à une saisie, un document doit remplir deux critères cumulatifs : être couvert par le secret professionnel de la défense et du conseil et relever des droits de la défense). Enfin, le secret professionnel couvre désormais les « fadettes » (art. 60-1-1 du CPP).

Le nouveau régime de perquisition a été déclaré conforme à la Constitution et le Conseil constitutionnel n'a pas censuré les art. 56-1 et 5-2-2 du CPP (CC, 19 janvier 2023, n° 2022-1031 QPC et n° 2022-1030 QPC, JCP 2023 Fasc. 6 act. 193 note A-S Chavent-Leclère : aucune disposition constitutionnelle ne consacre spécifiquement un droit au secret des échanges et correspondances des avocats. Dans le domaine des droits de la défense, un tel droit est garanti constitutionnellement par l'art. 16 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen et dans le domaine du conseil, il l'est par l'art. 2 au titre du respect de la vie privée et du secret des correspondances. Dans les deux cas des dérogations sont possibles et donnent lieu à appréciation des intérêts contradictoires en jeu (T. Wickers, JCP 2023 n° 76).

CE, 1er mars 2024, n° 462957 : protection du secret professionnel de l'avocat étendue au secret professionnel du conseil, sauf en matière de fraude fiscale pour les documents qui établissent la preuve de leur utilisation pour commettre ou faciliter la commission de l'infraction.
B. Vouland, « Le secret professionnel de l’avocat. Secret "confisqué", secret "dévoilé" », JCP 2022 Fasc. 1 n° 4 - A.-S. Chavent-Leclère, « Confiance dans l'institution judiciaire : le secret professionnel de l'avocat », Proc. 2022 Fasc. 2, dossier 2.

Pour rémunérer leurs prestations, les avocats bénéficient d'un droit à honoraires.
Les honoraires de consultation, d'assistance, de conseil, de rédaction d'actes juridiques sous seing privé et de plaidoirie sont fixés en accord avec le client.
Depuis la promulgation de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, il en est désormais de même des honoraires de postulation (représentation), qui auparavant étaient réglementés. Une tarification subsiste néanmoins en matière de saisie immobilière, de partage, de licitation et de sûretés judiciaires (art. 10 L. 31 déc. 1971 et art. L 444-1s. CCom.). La suppression du tarif de postulation avait conduit à transférer du président du TGI au Bâtonnier la compétence pour connaître des contestations des honoraires concernés.

Rq.La loi Macron de 2015 a amorcé une déréglementation des tarifs des professions juridiques et judiciaires.
A cet égard, il convient de rappeler qu'en 2006, le Conseil des Barreaux de l'Union Européenne avait manifesté son inquiétude face au projet de directive sur les services dite "Bolkestein". Etait en cause la réflexion lancée par la Commission européenne sur la déréglementation des professions libérales, s'agissant des dispositions susceptibles de constituer des atteintes injustifiées à la libre concurrence. La directive « services », publiée en décembre 2006 (PE et Cons. UE, dir. n° 2006/123/CE, 12 déc. 2006 : JOUE n° L 376 27 déc. 2006), n'a pas affecté les professions déjà réglementées par d'autres dispositions de droit communautaire, comme les avocats (PE, communiqué 15 nov 2006, JCP G 06 actu n° 541). Les notaires ont par ailleurs été exclus de son champ d'application.

Sauf quelques exceptions qu'elle précise, la loi impose désormais aux avocats de conclure par écrit avec tous leurs clients des conventions d'honoraires, précisant notamment, le montant ou le mode de détermination des honoraires couvrant les diligences prévisibles, ainsi que les divers frais et débours envisagés. Ils n'en sont dispensés qu'en cas d'urgence ou de force majeure ou lorsqu'ils interviennent au titre de l'aide juridictionnelle totale ou de la troisième partie de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique (interventions dans les procédures non juridictionnelles).

Cass. Civ. 2ème, 6 juillet 2023, JCP 2023 Fasc. 37 act. 1021: les règles applicables à la fixation des honoraires valent pour tous les honoraires de l'avocat, sans qu'il y ait lieu de distinguer entre activités judiciaires et juridiques.

Rq.Mise en place des conventions d'honoraires :

A l'origine, les conventions d'honoraires n'étaient pas obligatoires.
Le CNB avait adopté en juin 2008 une délibération sur la prévisibilité des honoraires dans laquelle il recommandait d'y recourir et demandait que soit reconnue aux Barreaux la possibilité de publier des barèmes indicatifs, comme préconisé par un rapport de l'OCDE (JCP G 08 actu n° 454).
Les conventions d'honoraires ont ensuite été imposées dans les procédures de divorce, à compter du 1er janvier 2013, en application de la loi du 13 déc. 2011. Des barèmes indicatifs des honoraires pratiqués pour ces procédures, établis à partir des usages observés, étaient publiés par arrêté du Garde des sceaux, après avis du Conseil national des barreaux.
Des conventions d'honoraires avaient enfin été rendues obligatoires lorsque l'intervention de l'avovat était consécutive à une sollicitation personnalisée (L. 17 mars 2014 art. 13). 
Le Bâtonnier et le Premier président de la Cour d'appel sont compétents pour apprécier la validité des conventions d'honoraires.

En revanche, il a été jugé que la réglementation des pratiques anticoncurrentielles ne permet pas aux Ordres d'avocats de diffuser des barèmes indicatifs d'honoraires (Cass. Civ. 1ère, 13 fév. 01, JCP G 01 I 348 n° 10 – Sur la question de savoir si la tarification ne pourrait émaner de l'Etat, à propos des arrêts « Cipolla » et « Macrino » rendus par la CJCE le 5 déc. 2006, voir R. Martin, « L'exemple italien », JCP G 07 actu 64 et David Lévy, JCP G 07 I 151 n° 3-4). Par ailleurs, la Cour EDH a parfois été amenée à contrôler le taux horaire appliqué, sur le fondement de l'art. 41 de la convention EDH (Cour EDH, 5 juillet 2012, JCP G 2012, Fasc. 42 n° 1121 § 7).

La relation entre l'avocat et son client apparaît désormais, à certains égards, relever du droit et de la protection des consommateurs, même si les conventions d'honoraires ne sont pas soumises au contrôle de la DGCCRF. La Cour de cassation a ainsi décidé que l'action en recouvrement des honoraires d'avocat contre une personne physique ayant eu recours à ses services à des fins n'entrant pas dans le cadre d'une activité commerciale, industrielle artisanale ou libérale, est soumise à la prescription biennale de l'art. L. 218-2 (ex art. L. 137-2) du Code de la consommation. A défaut, la prescription est quinquennale conformément à l'art. 2224 du C. civ. (Cass. Civ. 2ème, 26 mars 2015 (2 arrêts), JCP G 2015 Fasc. 23 n° 649 note C. Caseau-Roche, D. 2015 1791 n° 10 - Cass. civ. 2ème, 18 avril 2019, JCP G 2019 Fasc. 18 n° 475 : prescription biennale du Code de la consommation en matière de recouvrement d'états de frais, Zoom par C. Laporte). La prescription de l'action des avocats court à compter de la date à laquelle leur mandat a pris fin et non à compter de la décision (Cass. Civ. 2ème, 26 oct. 2017, JCP G 2018 Fasc. 47 n° 1218 obs. H. Slim, D. 2018 228 note O. Laroque).


En revanche, faute de commercialité, l'art. L 442-6 I 5° du C. Conso. est inapplicable à la rupture de relation entre un avocat et son client (Cass. com., 24 nov. 2015, D. 2016 462 note C. Mouly-Guillemaud).
Dans le même sens, il a été décidé que la directive relative aux clauses abusives s'appliquait à la convention entre un avocat et un client personne physique (CJUE, 15 janvier 2015, D. 2015 213 ; CJUE 12 janvier 2023, n° C-395/21, D. 2023, 825 ; JCP 2023 Fasc. 3 n° 110 veille C. Cazeau-Roche ; JCP 2023 Fasc. 11 doctr 365 obs. C. Caseau-Roche : admission par les juges européens du caractère abusif de la clause prévoyant pour fixer les honoraires uniquement un taux horaire).

L. Molina, « La tarification horaire de l'avocat face au mécanisme des clauses abusives », Recueil Dalloz, 2023, 16, pp. 825.

V. aussi :
  • Cass. Civ. 2ème, 6 juillet 2017, JCP G 2017 Fasc. 29 n° 848, D. 2017 1478 et 1868 §4 : s'agissant des honoraires, les diligences doivent être précisées dans les factures.
  • Cass. Civ. 2ème, 8 fév. 2018, JCP G 2018 Fasc. 9 n° 239 obs. C. Caseau-Roche : la notion de paiement après service rendu n'est pas subordonnée à la fin de la mission mais peut s'entendre de diligences facturées au fur et à mesure de leur accomplissement.
  • Cass. Civ. 2ème, 14 juin 2018, D. 2018 2048 : le défaut de signature d'une convention ne prive pas l'avocat de son droit à honoraires, dès lors que ses diligences sont établies. les honoraires sont fixés selon les critères d'appréciation de l'ancien art. 10 al. 2 de la L. 31 déc. 1971. L'arrêt censure une position restrictive considérant qu'à défaut de convention d'honoraires écrite, l'avocat ne pouvait prétendre au paiement d'honoraires (CA de Papeete, ord. 2 août 2017, n° 17/00008 JCP G 2017 Fasc. 39 - J.-D. Pellier, « L'avocat travaillerait-il gratuitement ? », D. 2017 2410, arrêt cassé par Cass. civ. 2ème, 21 nov. 2019, JCP G 2019 Fasc. 50 n° 1313 obs. P. Gourdon).
  • Cass. Civ. 2ème, 17 janvier 2019, JCP G 2019 Fasc. 5 n° 93 : vision souple de la notion de convention.
  • Cass. Civ. 2ème, 8 juillet 2021, JCP 2021 Fasc. 30 n° 856 Veille par S. Grayot-Dirx : même si deux conventions d'honoraires visant, pour l'une, la première instance et, pour l'autre, l'appel, sont conclues entre un client et son avocat, en prévoyant chacune un honoraire de résultat, un seul est dû ; il n'y a pas de cumul possible.
  • Cass. Civ. 2ème, 10 nov 2021, JCP 2021 Fasc. 48 n° 1283 : annulation d'une convention où les honoraires de diligences apparaissaient dérisoires au regard des honoraires de résultat.
  • Cass. Civ. 2ème, 9 déc. 2021, D. 2022 384 note G. Chantepie, Proc. 2022 Fasc. 2 n° 30 note Y. Strickler : vice du consentement en matière de convention d'honoraires en cas de dépendance économique statutaire de l'avocat vis-à-vis du client (AGS).
  • Cass. Civ. 2ème, 9 mars 2023, Fasc. 11 369, veille C. Caseau-Roche : le taux horaire moyen pratiqué dans le ressort d'une Cour d'appel n'est pas un critère d'évaluation.
  • Cass. Civ. 2ème, 9 fév. 2023, n° 21-10.622, D. 2023, JCP 2023 Fasc. 20 n° 335 : viole l'art. 10 de la loi du 31 décembre 1971 le premier président qui fait application des dispositions d'une convention d'honoraires alors qu'elle n'a pas été signée par la cliente et que le seul règlement partiel des honoraires est insuffisant à suppléer cet écrit. En l'absence d'écrit dûment signé, la preuve de la convention peut encore être rapportée, mais en respectant les articles 1361 et 1362 du code civil.C. Caseau-Roche, Etat des lieux du contentieux des honoraires d'avocat, JCP 2023 Fasc. 23 n° 723 : apport récent de la Cour de cassation sur la compétence du juge taxateur (infléchissement de sa position stricte sur la question de l'appréciation de la validité de la convention d'honoraires).

Les honoraires doivent tenir compte, selon les usages, de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci.

La loi reprend l'interdiction traditionnelle du « pacte de quota litis » en prévoyant que toute fixation d'honoraires qui ne le serait qu'en fonction du résultat judiciaire est interdite.
Si des honoraires dépendant exclusivement du résultat du procès sont ainsi proscrits, la loi autorise toutefois les conventions qui, outre la rémunération des prestations effectuées, prévoient la fixation d'un honoraire complémentaire en fonction du résultat obtenu ou du service rendu.

En savoir plus : Les honoraires complémentaires de résultat

Depuis 1992, en autorisant l'honoraire complémentaire de résultat, l'alinéa 3 de l'art. 10 de la loi du 31 déc. 1971 avait innové par rapport à l'interdiction antérieure totale du « pacte de quota litis ». La jurisprudence avait néanmoins considéré que l'honoraire complémentaire de résultat n'était permis que s'il était stipulé dans une convention préalable et expresse (Cass. Civ. 1ère, 10/7/95 JCP G 95 II 22527 note Martin, D 96 som com 313 - Cass. Civ. 1ère, 3/3/98, JCP G 98 II 10116 et I 159 n° 25s - Cass. avis, 27/9/99, JCP G 99 II 10219).
Il a aussi été jugé que le texte s'appliquait à tous les types d'activités des avocats (Cass. Civ 1ère, 7 déc 99, JCP G 2000 II 10246 - Cass. Civ. 2ème, 22 mai 2014, JCP G 2014 Fasc. 23 n° 644 : impossibilité pour un avocat mandataire d'une transaction immobilière de fixer ses honoraires en fonction du seul résultat de la vente du bien), alors qu'il est parfois difficile de rapporter la preuve de cette convention (JCP G 99 I 173 n° 11).

La Cour de cassation avait suscité un certain émoi au sein de la profession en considérant que le juge avait dans tous les cas - en matière d'honoraire convenu et honoraire de résultat-, la possibilité de modifier les conventions d'honoraires au regard du service rendu (Cass. Civ. 1ère, 3/3/98, JCP G 98 II 10115 et I 159 n° 29 obs. crit. : 7/7/98, JCP G 99 I 126 n° 9 - Cass. Civ. 2ème, 13 mars 03, JCP G 03 I 140 n° 8).

Cette jurisprudence a ensuite été limitée :
  • Tout d'abord par des décisions considérant qu'il n'est pas obligatoire que les modalités mêmes de l'honoraire complémentaire soient déterminées dans la convention (Cass. Civ. 1ère, 6/6/00, JCP G 00 II 10416; 27 fév. 01, JCP G 01 I 348 n° 10 - D. 02 som. 855 - Un arrêt postérieur avait conduit toutefois à s'interroger sur la pérennité de cette solution : Cass. Civ. 1ère, 27/5/03, JCP G 03 II 10125) ou que la convention revête la forme d'un écrit (Cass. Civ. 2ème, 9/7/09, JCP G 09 F 40 n° 295 §9). V. aussi Cass. Civ. 2ème, 16 déc. 2021, JCP 2022 Fasc. 5 n° 164 : il ne peut être dénié toute valeur probante à une attestation établie sans l'accord des clients sur le principe d'un honoraire de résultat au seul motif qu'elle fait l'objet d'une plainte pénale déposée par ceux-ci - Cass. Civ. 2ème, 21 avril 2022, JCP 2022 Fasc. 18 n° 608, note S. Grayot-Dirx : si pour être valablement stipulé l'horaire de résultat doit être convenu avant que le résultat ne soit obtenu, l'accord sur son existence peut avoir lieu après la réalisation de diligences par l'avocat.
  • Ensuite par d'autres arrêts, estimant qu'il n'appartient pas au juge de réduire l'honoraire de résultat dès lors que son principe et son montant ont été acceptés (paiement) par le client après service rendu, que celui-ci ait été ou non précédé d'une convention (Cass. Civ. 1ère, 18 oct. 00, JCP G 01 I 348 n° 10, D. 02 som. 855 ; Cass. Civ. 1ère, 27/5/03, JCP G 03 II 10125 ; Cass. Civ. 2ème, 5 juin 03 et Cass. Civ 2ème, 18/9/03, JCP G 04 I 117 n° 10 ; Cass. Civ. 2ème, 6 mars 2014, JCP G 2014 Fasc. 19 n° 556 note B. Travier et R. Guichard ; contra Cass. Civ. 2ème, 19/2/09, JCP G 09 Fasc. 40 n° 295 § 6 considérant que l'existence d'une convention d'honoraires n'interdit pas au juge de réduire le montant des honoraires lorsque ceux-ci apparaissent exagérés au regard du service rendu).
L'honoraire de résultat n'est néanmoins dû par le client que lorsqu'il a été mis fin à l'instance par une décision juridictionnelle irrévocable (Cass. Civ. 2ème, 10/3/04, JCP G 04 II 10114 - Cass. Civ. 2ème, 10/7/08, 9/4/09, 5/2/09, D. 09 2707 §IV A - L'honoraire de résultat nécessite un encaissement effectif et définitif par le client donc dénué de précarité : Cass. Civ. 2ème, 15 /1/09, D. 09 2708 §IV B ; Cass. Civ. 2ème, 19 nov. 2009, D. 2011 552 § IV F obs. B. Blanchard - Exclusion de l'allocation d'une provision : Cass. Civ. 2ème, 3/4/08, JCP G 08 II 184 n° 12) - Cass. Civ. 2ème, 30 mars 2023, JCP 2023 Fasc. 15 n° 498, veille S. Grayot-Dirx : Une transaction qui, en matière d'indemnisation, réserve certains postes de préjudice et ne met ainsi pas fin au litige ne constitue pas un acte irrévocable ouvrant droit à un honoraire de résultat).
Une convention d'honoraires peut toutefois prévoir les modalités de rémunération d'un avocat en cas de dessaisissement (Cass. Civ. 2ème, 4 fév. 2016, D. 2016 383, JCP G 2016 Fasc. 13 n° 362 note C. Caseau-Roche, T. Wickers, Avocats, D. 2017 74§IVA - Cass. Civ. 2ème, 6/7/2017, JCP G 2017 Fasc. 29 n° 852, D. 2017 1479 et 1868 §4 : n'est pas en soi illicite la clause d'une convention prévoyant le paiement d'un honoraire de résultat dans sa totalité en cas de dessaisissement de l'avocat avant l'obtention d'une décision irrévocable, cet honoraire pouvant faire l'objet d'une réduction s'il présente un caractère exagéré au regard du service rendu). Cette jurisprudence a été consacrée par le décret n° 2017-1226 du 2 août 2017 modifiant l'art. 10 du décret du 12 juillet 2005, lequel prévoit désormais que lorsque la mission de l'avocat est interrompue avant son terme, il a droit au paiement des honoraires dus, dans la mesure du travail accompli et le cas échéant, de sa contribution au résultat obtenu ou au service rendu au client (Cass. Civ. 2ème, 27 mai 2021, JCP G 2021 Fasc. 24 n° 664 obs. C. Laporte, Proc. 2021 Fasc. 1 note Y. Strickler : la convention d'honoraires qui fixe le montant de l'honoraire de diligence s'applique même en cas de dessaisissement).
Cass. Civ. 2ème, 16 juin 2022, JCP 2022 Fasc. 25 n° 798, obs. C. Caseau-Roche : nouvelle précision sur l'office du juge taxateur pour répartir l'honoraire de résultat en cas de succession d'avocats.

En cas d'aide juridictionnelle partielle, il résulte de l'article 35 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, que l'avocat a uniquement droit à un honoraire complémentaire forfaitaire de diligence librement négocié avec son client. Il ne peut réclamer d'honoraire de résultat, sauf en cas de retrait de l'AJ dans les conditions de l'article 36 de la loi, à condition que la convention le prévoie (Cass. Civ. 2ème, 6 juillet 2017, JCP G 2017 Fasc. 29 n° 851, D. 2017 1478 et 1868 §4).

Par ailleurs, à l’occasion d’une contestation d’honoraires, le juge ne peut connaître, même à titre incident, de la responsabilité de l’avocat à l’égard de son client résultant d’un manquement à son devoir d’information et de conseil (Cass. Civ. 2ème, 26 mai 2011, D. 2011 2057, note O. Luce-Bouvier - Cass. Civ. 2ème, 16 juillet 2020, JCP G 2020 Fasc. 41 n° 1101 note C. Caseau-Roche). Mais il a été jugé compétent pour statuer sur l'étendue de la mission confiée à l'avocat (Cass. Civ. 2ème, 17 janvier 2019, JCP G 2019, Fasc. 5, n° 93). Par ailleurs, le premier président de la Cour d'appel, statuant sur la fixation des honoraires d'avocat peut examiner la nullité de la convention litigieuse pour vice du consentement ou relever d'office le caractère abusif des clauses des conventions d'honoraires quand un consommateur ou un non-professionnel est partie au contrat (Cass. Civ. 2ème, 27 oct. 2022, JCP G 2022 Fasc. 45 n° 1280, Dalloz Actualités 8 nov. 2022 note C. Hélaine).


Bibliographie
  • A. Lempereur et M. Scodellaro, « Conflits d'intérêts économiques entre avocats et clients : la question des honoraires », D. 03 chr 1380.
  • D. Landry, « Entretien : La contestation des honoraires de l'avocat », JCP G 2010 Fasc. 5 n° 139.
  • F. G'sell, « Vers l'honoraire principal de résultat », JCP G 2017 Fasc. 50 n° 1325.

Nous allons étudier les fonctions des avocats (1), étant précisé qu'une spécialisation professionnelle est possible. Nous présenterons ensuite les diverses modalités d'exercice de la profession (2).

Rq.La spécialisation : il existait, depuis un arrêté du 8 juin 1993, 15 mentions de spécialités, la liste étant limitative (Cass. Civ. 1ère, 10/6/97, D. 98 244). Le régime de spécialisation a évolué en 2011 et les certificats de spécialisation sont désormais délivrés après un entretien de validation des compétences professionnelles avec un jury (L. n° 2011-331 du 28 mars 2011 et décret n° 2011-1985 du 28 déc. 2011). Pour y prétendre, il faut justifier de 4 ans d’activités dans le domaine concerné.
Par ailleurs, la loi votée par le Parlement en décembre 2010, supprimant la profession d’avoué près les Cours d’appel, avait prévu la création d’une spécialisation en procédure d’appel dont les anciens avoués devenus avocats ont bénéficié de plein droit à compter du 1er janvier 2012.
Depuis un arrêté du 20 octobre 2021 il existe désormais 28 mentions de spécialisation.
E. Bonnet, « Réforme des spécialisations des avocats : entre savoir-faire et faire-savoir », JCP G 2011 Fasc. 41 n° 1067.

Au 1er janvier 2019, 8 487 mentions de spécialisations étaient enregistrées, dont la moitié réparties entre droit du travail, droit fiscal et douanier, droit des sociétés, droit de la sécurité sociale et droit des personnes et de la famille (Communiqué Min. Justice du 16 oct. 2019).


Les réformes récentes sont allées dans le sens de l'ouverture et de l'élargissement de la profession d’avocat pour tenir compte de la concurrence à laquelle les juristes français sont confrontés au sein de l'Union européenne et de la nécessité corrélative de restructurer et simplifier les professions judiciaires.
C'est ainsi que la loi n° 2011-331 du 28 mars 2011 a :
  • Créé l'acte contresigné par avocat (référencé dans le Code civil à l'art. 1374 à compter du 1er oct. 2016 : ord. du 10 fév. 2016). L'acte sous signature privée contresigné par les avocats de chacune des parties, ou par l'avocat de toutes les parties, fait foi de l'écriture et de la signature des parties (non de son contenu), tant à leur égard qu'à celui de leurs héritiers ou ayants cause. Dans un avis du 27 mai 2010, l’Autorité de la concurrence avait considéré que cette création n'était pas susceptible de porter atteinte au droit de la concurrence. Un dispositif national de conservation a été mis en place en 2014 (https://www.avosactes.fr). La loi J21 a renforcé l'intérêt de l'acte contresigné par avocat en faisant de celui-ci une voie d'accès au divorce amiable hors du juge (divorce par consentement mutuel par acte sous signature privée contresigné par avocats, déposé au rang des minutes d'un notaire  : art. 229-1 s. du C. civ.) et en permettant son utilisation dans le cadre des procédures participatives (voir infra).
    Rq.F. Rome, L'acte sous seing privé nouveau est arrivé : so what ? », D. 2011 937 ; C. Jamin, « L'acte d'avocat », D. 2011 p. 960 ; H. Letellier, « L'acte d'avocat : c'est parti ! », D. 2011 p. 1208 ; Bénichou, « L'acte contresigné par l'avocat », Entretien JCP G 2011 F. 15 n° 437 ; C. Bléry, « L'avocat nouveau est arrivé », Procédures n° 5, mai 2011, alerte 23 ; M. Bacache, « Acte d'avocat : Acte sous seing privé contresigné par l'avocat – Acte authentique », RTD civ. 2011 403.

    Le décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 a étendu la liste de ces actes, requalifiés d'actes de procédure contresignés par avocat, en permettant qu'ils interviennent dans un cadre procédural consensuel entre parties même en dehors des procédures participatives aux fins de mise en état (art. 1546-3 du CPC). Pour Soraya Amrani-Mekki, il s'agit d'une contractualisation de l'administration de la preuve (S. Amrani-Mekki, JCP G 2020 Fasc. 3 n° 75 § 2). En application de la loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 et du décret n° 2022-245 du 25 février 2022, les actes contresignés par avocat constatant un accord des parties peuvent désormais être revêtus de la formule exécutoire par le greffe de la juridiction compétente (art. L. 111-3 du CPCE -M. Reverchon-Billot, « L'acte contresigné par avocat un nouveau titre exécutoire de la justice participative », Proc. 2022 Fasc. 4 Etude 6).
  • Modernisé les structures d'exercice des avocats.
 

Les avocats exerçaient traditionnellement trois missions, dont les périmètres et contours ont évolué
ces dernières années :
- Une mission de conseil (JCP G 97 II 22948) : au conseil se rattache la rédaction d'actes, qui englobe l'activité des ex-conseils juridiques. Par ailleurs, la possibilité d’être fiduciaires, a été conférée aux avocats par la loi LME du 4 sept/ 2008, et précisée par une ordonnance du 30 janvier 2009 (JCP G 09 actu 86, JCP 09 I 120 n° 5, H. Croze, « Une transformation importante du métier d'avocat : l'avocat fiduciaire », Proc. juillet 2009 – V. aussi décret n° 2009-1627 du 23 déc. 09, JCP G 2010 Fasc. 1 n° 7 et Aperçu rapide par C. Sand, Fasc. 4 n° 76).
Rq.La fiducie est un contrat permettant de transférer à une personne (fiduciaire) des biens ou des droits pour qu’il en assure la gestion ou pour garantir une dette. Les avocats peuvent constituer des fiducies à titre de garantie ou à des fins de gestion, non de libéralité. En cas de fiducie, est prévue une adaptation des règles relatives notamment au secret professionnel, l’avocat devant assumer des obligations déclaratives et des contrôles sur pièces et place afin de prévenir tout risque d’évasion fiscale et de blanchiment (exception : correspondances non officielles adressées par un avocat ignorant la qualité de fiduciaire).

La loi du 5 mars 2007 a aussi ouvert des perspectives aux avocats en matière d'incapacités.
Rq.N. Peterka, L'avocat tuteur », Droit et patrimoine 2009 p. 28S. ; T. Fossier, JCP G 07 I 118.

Ensuite, la loi n° 2010-1609 du 22 décembre 2010 a introduit dans le code civil la convention de procédure participative, exclusivement confiée aux avocats, et destinée à favoriser le règlement amiable des litiges relatifs aux droits dont les personnes ont la libre disposition, sous réserve des dispositions particulières en matière de divorce et séparation de corps (article 2067 du C. civ.). Dans un premier temps, les différends relatifs au contrat de travail individuel étaient exclus du périmètre de la convention mais la loi Macron du 7 août 2015 a levé cet interdit (V. cpdt la réserve de l'art. 2066 du C. civ.). Ces dispositions ont été complétées, au plan réglementaire, par le décret n° 2012-66 du 20 janvier 2012, qui a aussi créé dans le Code de procédure civile le nouveau Livre 5 sur « La résolution amiable des différends » (cf. leçon 1).
La loi J21, du 18 novembre 2016 est allée plus loin, en permettant la conclusion d'une convention de procédure participative, alors que le juge est déjà saisi, afin de donner aux parties la possibilité d'être proactives dans la mise en état de leur litige (art. 2063 du C. civ. et art. 1546-3 du CPC). Cette extension du domaine de la procédure participative constitue une nouvelle illustration de la faveur faite aux modes amiables de résolution des différends. Le décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 a modifié les dispositions réglementaires adoptées en 2017 pour en étendre plus encore la portée.
Rq.
  • H. Poivey-Leclercq, « La Convention de procédure participative "Un pacte de non agression à durée déterminée" », JCP G 2011, Fasc. 4 n° 70.
  • E. Bonnet, « La convention de procédure participative », Procédures n° 3, Mars 2011, alerte 11.
  • S. Amarani Mekki, « La convention de procédure participative », D. 2011 3007.
  • F. Rongeat-Oudin, « Les avocats à la conquête du règlement amiable des différends », JCP 2011 Fasc. 41 n° 1097 (l’auteur évoque aussi l’implication des avocats dans la pratique du droit collaboratif). Le Conseil d'Etat a décidé récemmetn que le CNB n'avait pas le pouvoir de limiter l'usage de la qualité de médiateur pour les avocats (CE, 24 oct. 2018, JCP G 2018, Fasc. 46 n° 1196 note S. Grayot-Dirs).
N.B. : Voir aussi : M. Mas, I. Lacombe-Brisou et N. Abran, « L'aube d'une mutation culturelle : les avocats s'ouvrent à la transaction immobilière », JCP G 2012 n° 429 - JCP G 2017 Fasc. 13 n° 335, Externalisation des prestations juridiques et services juridiques alternatifs, une réorganisation du marché.
En savoir plus :  Actualité 2020 : avocats et MARD

Le 18 décembre 2020, le CNB a adopté une décision portant modification du règlement intérieur national de la profession d'avocat (RIN) dans le but d'inciter ceux-ci à recourir aux MARD et à mieux les intégrer dans leurs réflexes.
L'art. 6.1 du RIN dispose désormais que « Lorsque la loi ne l'impose pas, il est recommandé à l'avocat d'examiner avec ses clients la possibilité de résoudre leurs différends par le recours aux modes amiables ou alternatifs de règlement des différends préalablement à toute introduction d'une action en justice ou au cours de celle-ci, ou lors de la rédaction d'un acte juridique en introduisant une clause à cet effet. ».
De même l'art. 8.2 RIN indique qu' « avant toute procédure ou lorsqu'une action est déjà pendante devant une juridiction, l'avocat peut, sous réserve de recueillir l'assentiment de son client, prendre contact avec la partie adverse ou la recevoir afin de lui proposer un règlement amiable du différend. ».

- Une mission de représentation judiciaire (incluant la postulation) : il s'agit de représenter les plaideurs et d'effectuer les actes de la procédure.
  • En première instance, la postulation est en principe obligatoire devant le tribunal judiciaire (art. 760 du CPC). Sa caractéristique est d'être soumise à un principe de territorialité (art. 5 et 5-1 L. n° 71-1130 du 31 décembre 1971).
    La postulation obligatoire existait devant les TGI où elle avait connu une extension en 2016. En effet, avant le 1er août 2016, seuls les avocats inscrits au Barreau rattaché à un TGI concerné pouvaient assumer la représentation devant celui-ci. Les choses ont évolué avec l'entrée en vigueur de la loi Macron du 6 août 2015 : depuis le 1er août 2016 les avocats pouvaient postuler devant tous les TGI du ressort de la Cour d'appel dans lequel ils avaient établi leur résidence professionnelle. La règle vaut désormais pour le tribunal judiciaire.
    Les avocats ne peuvent toutefois postuler devant un autre tribunal judiciaire que celui auprès duquel est établie leur résidence professionnelle en matière de saisies immobilières, de partage et de licitation, ni au titre de l'aide juridictionnelle, ni dans des instances dans lesquelles ils ne seraient pas chargés également d'assurer la plaidoirie (art. 5 al. 3 L. n° 71-1130 du 31 décembre 1971).
    La postulation devant le tribunal judiciaire est un monopole des avocats, soumis en outre au principe d'unicité : un seul représentant est autorisé (Cass. Civ. 2ème, 10 nov 98, Proc. 1999 n° 5 - « La règle vaut pour les avocats salariés », Proc. 2002 n° 2 - Meunier, « Postulation et bureaux secondaires », JCP G 98 Fasc. 10 actualité).
    Rq.Actualité 2020 : Le décret du 11 décembre 2019 a étendu le domaine de la représentation obligatoire par avocat au premier degré (voir leçon 9). Celle-ci concerne à présent :
    • Des procédures devant le tribunal judiciaire qui étaient auparavant sans représentation devant le TGI et le TI (référé) et sont désormais soumises à postulation. Des cas de dispense de constitution d'avocat figurent cependant à l'art. 761 du CPC (voir leçon 9).
    • Les tribunaux de commerce : depuis le 1er janvier 2020, les parties sont désormais tenues, sauf disposition contraire, de constituer avocat devant le tribunal de commerce (art. 853 du CPC). Il s'agit ici de représentation obligatoire, non de postulation soumise à territorialité. Les parties sont toutefois dispensées d'être représentées lorsque la demande est d'un montant inférieur ou égal à 10 000 euros, ainsi que dans le cadre des procédures liées aux difficultés des entreprises (livre VI du code de commerce) et pour les litiges relatifs à la tenue du registre du commerce et des sociétés.

  • Une mission de représentation en appel
    Depuis le 1er janvier 2012, et la fusion des professions d'avoué et d'avocat (voir infra §3B), les avocats assument également la postulation devant la Cour d'appel dont dépend le Barreau auquel ils sont rattachés. Devant la Cour d'appel les parties sont tenues, sauf disposition contraire, de constituer avocat (art. 899 du CPC).

    Rq.Cas particulier : appel en matière prud'homale :

    En matière prud'homale, la représentation est obligatoire en appel depuis le 1er août 2016. Il n'y a pas monopole des avocats puisque cette représentation peut être exercée par les défenseurs syndicaux (voir infra §4 et leçon 9). Le ministère de la Justice a précisé que la représentation demeurait ouverte à tout avocat sans postulation, donc sans limitation territoriale (JCP G 2016 Fasc. 38 n° 977 note R. Gabriel). Cette position a été confirmée par deux avis de la Cour de cassation le 5 mai 2017 (Cass. avis, 5 mai 2017, JCP G 2017 Fasc. 21 n° 597 et Fasc. 26 n° 732 : les règles de la postulation prévues aux articles 5 et 5-1 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 modifiée ne s'appliquent pas devant les cours d'appel statuant en matière prud'homale, consécutivement à la mise en place de la procédure avec représentation obligatoire).
    En savoir plus : Avocats européens

    En cas de représentation obligatoire, les avocats de l'Union européenne exerçant sous leur titre d'origine doivent élire domicile chez un autre avocat, selon la procédure dite de « l'avocat de concert », issue de la directive du 22 mars 1977 (art. 202-1, décret du 27 nov. 1991).
    L'obligation s'impose lorsqu'ils agissent au titre de la libre prestation de services (art. 49 du traité CEE), mais aussi quand ils exercent à titre permanent, en étant inscrits sur une liste spéciale du Tableau en application de la loi du 11 février 2004. La règle a en effet été maintenue par le décret du 14 oct. 2004, ce qui paraît relativement discutable.

    V. aussi CJUE, 9 mars 2017, JCP G 2017 Fasc. 16 n° 451 note Pertek : La prestation de services ne permet pas aux avocats d'empiéter sur une activité légitimement réservée aux notaires.

- Une mission d'assistance : la mission d'assistance consiste à aider le client durant la procédure et à assurer la plaidoirie. Les avocats bénéficient en la matière d'un monopole devant le tribunal judiciaire et la Cour d'appel sans limitation territoriale, ni obligation de respecter un principe d'unicité comme en matière de postulation : un plaideur peut donc être assisté par plusieurs avocats.
En savoir plus : Missions des avocats et responsabilités corrélatives
 
Il était jugé avant 2023 que le point de départ de la prescription de l'art. 2225 du C. civ., relatif à l'action en responsabilité contre les personnes ayant représenté ou assisté les parties en justice, était fonction de la fin de mission pour chaque acte pour lequel l'avocat avait été mandaté (Cass. Civ. 1ère, 14 janvier 2016, JCP 2016 Fasc. 12 n° 325). Un arrêt du 14 juin 2023 retient désormais que le délai court à compter de l'expiration du délai de recours contre la décision ayant terminé l'instance pour laquelle l'avocat avait reçu mandat de représenter et d'assister son client à moins que les relations entre eux n'aient cessé avant cette date (Cass. Civ. 1ère, 14 juin 2023, n° 22-17520, RTDCiv. 2024 210, note N. Cayrol).

1) Mission de conseil
  • Sur la responsabilité de l'avocat unique rédacteur d'un acte juridique : Cass. Civ. 1ère, 27/11/08, D. 09 706 note C. Jamin.
  • L'avocat, conseiller juridique et fiscal, est tenu d'une obligation particulière d'information vis-à-vis de son client, laquelle comporte le devoir de s'informer de l'ensemble des conditions de l'opération pour laquelle son concours est demandé, et il lui incombe de prouver qu'il a exécuté cette obligation (Cass. Com., 13 oct. 09, D. 09 2842, note Y. Avril). Un nouvel arrêt, rendu dans la même affaire, revient sur la décision et tempère au regard de l'espèce la portée du devoir de conseil de l'avocat (Cass. Civ. 1ère, 31 oct. 2012, D. 2012 2737, obs. Y. Avril).
  • Le rédacteur d'acte, tenu de veiller à assurer l'ensemble des intérêts en présence et de prendre l'initiative de conseiller les deux parties à la convention sur la portée et les incidences, notamment fiscales, des engagements souscrits de part et d'autre, peu important que son concours ait été sollicité par l'une d'elles, doit rapporter la preuve qu'il a rempli cette obligation à leur égard, quelles que soient leurs compétences personnelles (Cass. Civ. 1ère, 25 fév. 2010, JCP G 2010 fasc. 11 n° 282).
  • L'avocat n'est pas tenu de prendre l'initiative de s'assurer de la viabilité économique et financière de l'opération instrumentée, si les éléments dont il dispose ne sont pas de nature à éveiller ses soupçons quant à l'insuffisance des sûretés prévues au regard des risques encourus (Cass. Civ. 1ère, 22 sept. 2011, D. 2011 2644, note B. Bondero, L'avocat n'est pas ducroire, D. 2011 2644).
  • Mission de résiliation d'un bail commercial impliquant le contrôle et la supervision des opérations : Cass. civ. 3ème, 25 oct. 2018, Proc. 2019 Fasc. 1 somm. 4.

2) Défense en Justice

Il incombe à l'avocat :
  • de rapporter la preuve qu'il a bien exécuté son obligation d'information et de conseil (Cass. Civ. 1ère, 28/3/08, JCP G 08 I 184 n° 18).
  • d'attirer l'attention de ses clients sur l'opportunité d'exercer un pourvoi en cassation eu égard aux derniers développements de la jurisprudence (Cass. Civ. 1ère, 5/3/09, Proc. 09 n° 132, note Perrot). Par ailleurs, en matière de recours, la perte de chance subie par le justiciable qui a été privé de la possibilité de former un pourvoi en cassation par la faute d'un auxiliaire de justice (avoué en l'occurrence) se mesure à la seule probabilité de succès de cette voie de recours (Cass. Civ. 1ère, 6 oct. 2011, JCP G 2011 F. 42 n° 1114, F. 50 n° 1380 obs. N. Gerbay).
  • de faire valoir une évolution jurisprudentielle acquise, dont la transposition ou l'extension à la cause dont il a la charge a des chances sérieuses de la faire prospérer car il est tenu d'accomplir, dans le respect des règles déontologiques, toutes les diligences utiles à la défense de intérêts de son client et est investi d'un devoir de compétence (Cass. Civ., 14 mai 09, JCP G 09, n° 28, 94 p. 15, note Hadi Slim ; obs. Pillet Fasc. 40 n° 295 § 6, Proc. 09 n° 263 obs. R. Perrot, D. 2010 183, note K. De la Asuncion Planes).
  • d'être vigilant dans le choix du fondement juridique de l'action, l'erreur éventuelle ne pouvant plus être réparée à l'occasion d'une autre instance, du fait du principe de concentration des moyens (Cass. Civ. 1ère, 16 sept. 2010, JCP G 2011 Fasc. 4 n° 80 note S. Hocquet-Berg).
  • Cass. civ. 3ème, 25 oct. 2018, Proc. 2019 Fasc. 1 n° 4 obs. Y. Strickler.
L'appréciation du préjudice subi est réalisée en termes de perte de chance. S'agissant d'un recours, doivent être appréciées les chances de succès dudit recours (Cass. Civ. 1ère, 6 oct. 2011, D. 2011 2599 ; 16 janv. 2013, D. 2014 169). Selon un arrêt récent, toute perte de chance même minime, liée à la faute de l'avocat, ouvre droit à réparation (Cass. Civ. 1ère, 12 oct. 2016, D. 2017 46 note J. Traullé).


Les obligations de l'avocat comportent néanmoins des limites :
  • il n'est pas tenu de délivrer une information qui aurait eu pour seule justification de permettre au client d'engager un recours abusif (Cass. Civ. 1ère, 23/11/04, Proc. 05 n° 58, JCP G 05 II 10058, note Lamarche) ;
  • il n'engage pas sa responsabilité professionnelle en omettant de soulever un moyen de défense inopérant (Cass. Civ. 1ère, 31/1/08 : JCP G 08 II 10074, note Slim, D. 08 488, D. 08 1448 note A. Aynes, Proc. 08 n° 144) ;
  • il ne peut lui être imputé à faute de n'avoir pas anticipé une évolution imprévisible du droit positif (Cass. Civ., 14 mai 09, précité).
  • les éventuels manquements de l'avocat à ses obligations professionnelles ne s'apprécient qu'au regard du droit positif existant à l'époque de son intervention, sans que l'on puisse lui imputer à faute de n'avoir pas prévu une évolution postérieure du droit consécutive à un revirement de jurisprudence : Cass. Civ. 1ère, 15. Déc. 2011, JCP G 2012 n° 169 note H. Slim, RTD civ. 2012 318, note P. Jourdain.


Sy.
Les missions des avocats

Représentation / Postulation

Assistance

Conseil

Contenu : représentation des plaideurs et réalisation des actes de procédure.

Régime :

Devant le tribunal judiciaire :
  • Principe : postulation obligatoire sauf exception (ex. : art. 761 du CPC).
  • Monopole des avocats.
  • Principe d'unicité : un seul représentant.
  • Principe de territorialité de la postulation : ouverte à tout avocat ayant sa résidence professionnelle dans le ressort de la Cour d'appel dont dépend le tribunal judiciaire concerné (ne s’applique pas en cas de recours à la représentation lorsque la postulation n’est pas obligatoire).

Devant le tribunal de commerce :
  • Principe : représentation par avocat obligatoire sauf exception (art. 853 du CPC).
  • Pas de limitation territoriale (ce n'est pas de la postulation).


Devant la Cour d'appel :
  • Procédure avec représentation obligatoire sauf exception : depuis le 1er janvier 2012, monopole des avocats, sauf en matière prud'homale.
  • Principe d'unicité : un seul représentant.
  • Principe de territorialité : avocats rattachés aux Barreaux situés sur le ressort de la CA, sauf en matière prud'homale.
Contenu : aide et conseil du client durant la procédure, plaidoirie.

Régime :
  • Monopole des avocats devant le tribunal judiciaire.
  • Monopole des avocats devant  la Cour d'appel, sauf en matière prud'homale.
  • Pas de limitation territoriale.
  • Pas de principe d'unicité.
Contenu : rédaction d'actes, consultations.

Rattachement possible de nouvelles missions au conseil, voire à l'assistance : acte sous seing privé contresigné par avocat, possibilité d'être fiduciaire, d'intervenir en matière d'incapacités, convention de procédure participative, incitation aux MARD et accompagnement dans leur mise en oeuvre.

Rq.J. Caussain, « Le palmarès des structures d’exercice de la profession d’avocat », JCP G 2010 F. 22 n° 611.

Autrefois, la forme d'exercice la plus traditionnelle était l'exercice libéral à titre individuel. Mais peu à peu, la profession a vu ses structures se moderniser, s'agissant notamment des formes d'exercice en groupe. Ces conditions d'exercice en groupe sont elles-mêmes encore appelées à évoluer, dans le sens de l'ouverture à l'interprofessionnalité (y compris dans un cadre européen), en lien avec l'entrée en vigueur de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015.


L'article 7 alinéa 1 de la loi du 31 décembre 1971 dispose que :
Tx.« L'avocat peut exercer sa profession soit à titre individuel, soit au sein d'une association dont la responsabilité des membres peut être, dans des conditions définies par décret, limitée aux membres de l'association ayant accompli l'acte professionnel en cause, soit au sein d'entités dotées de la personnalité morale, à l'exception des formes juridiques qui confèrent à leurs associés la qualité de commerçant, soit en qualité de salarié ou de collaborateur libéral d'un avocat ou d'une association ou société d'avocats ou d'une société ayant pour objet l'exercice de la profession d'avocat. Il peut également être membre d'un groupement d'intérêt économique ou d'un groupement européen d'intérêt économique. »

  • L'exercice libéral à titre individuel concerne encore de nombreux avocats (36 % en janvier 2019).
  • Il existe ensuite plusieurs formes d'exercice en groupe :
    • L'association (modifiée par le décret du 15 mai 2007 - Caussain, « La nouvelle donne des associations d'avocats », JCP G 07 I 177) :
      Elle consiste en une mise en commun de moyens (12 % des groupements en 2019).
      L'association peut comprendre des avocats personnes physiques et des personnes morales exerçant la profession d'avocat. Chaque membre de l'association est tenu des actes accomplis par l'un d'entre eux, au nom de l'association, à proportion de ses droits dans celle-ci. Chacun répond en outre sur l'ensemble de son patrimoine des actes qu'il accomplit à l'égard de ses clients. Le décret de 2007 prévoit aussi la possibilité de constituer des associations d'avocats à responsabilité professionnelle individuelle (AARPI), permettant de cantonner la responsabilité professionnelle à l'auteur de l'acte fautif tout en continuant à bénéficier du régime fiscal des sociétés de personnes. L’AARPI connaît un relatif essor auprès des jeunes avocats (8,9 % au 1er janvier 2020).
    • La société civile professionnelle (SCP - SCP – 18,9 % des groupements au 1er janvier 2020) :
      Les fonctions sont exercées au nom de la société.
      Chaque avocat répond indéfiniment et solidairement des dettes sociales et doit consacrer toute son activité à la société. Chacun répond par ailleurs personnellement de ses actes professionnels (Cass. Civ. 1ère, 28/3/08, JCP G 08 I 184 n° 19) et la SCP est solidairement responsable avec lui des conséquences dommageables de ces actes. Dès lors, une action en responsabilité peut indifféremment être dirigée contre la société ou l'associé concerné, ou contre les deux (Cass. Civ. 1ère, 30 sept. 2010, JCP G 2010 F. 41 n° 992, Proc. 2010 n° 396).
    • La société d'exercice libéral (SEL - 55 % des groupements début 2019 étaient des SELARL ou SELURL) :
      Elle est calquée sur le modèle des sociétés commerciales :
      • SELAFA : SEL à forme anonyme ;
      • SELAS : SEL par actions simplifiée, créée par la loi NRE du 16 mai 2001 (7,3 % au 1er janvier 2020) ;
      • SELARL : SEL à responsabilité limitée, qui a supplanté la SCP en nombre (42,3 % au 1er janvier 2020) ;
      • SELURL : EURL légalisée par la loi du 23/6/99 (JCP G 99 I 173 n° 6) (13,4 % au 1er janvier 2020) ;
      • SELCA (SEL en commandite par actions) : chaque avocat est responsable de ses actes mais la société répond solidairement de ceux faits en son nom. Les dispositions les régissant ont été modifiées par le décret n° 2017-801 du 5 mai 2017 afin de tirer les conséquences de la création de sociétés pluri-professionnelles d'exercice (voir b, infra).
      • Les sociétés en participation d'exercice libéral : dans ces sociétés, les associés sont responsables solidairement et indéfiniment à l'égard des tiers des engagements de chacun.
      • La société civile de droit commun, à l'exclusion des SNC et des sociétés en commandite, qui confèrent à leurs associés la qualité de commerçant, ce qui est formellement exclu par l'article 7 précité de la loi du 31 déc. 1971 (B. Dondero, « Le cabinet d'avocats constitué en société de droit commun », JCP 2022 Fasc. 28 n° 889).

    En savoir plus : Exercice en groupe des avocats européens

    Pour les avocats de l'Union européenne, la directive du 16 février 1998 permet un exercice en groupe selon les modalités d'exercice autorisées dans le pays d'origine, et cela, sans autre condition que la vérification de :
    • leur régularité l'égard de la législation du pays d'origine ;
    • la compatibilité avec l'ordre public du pays d'accueil.
    Le droit européen permet ainsi l'ouverture de succursales et exclut donc toute protection corporative nationale !
    L'avocat exerçant sous son titre d'origine peut, après information du Conseil de l'Ordre, exercer au sein ou au nom d'un groupement d'exercice comportant des capitaux extérieurs, régi par le droit de l'Etat membre où le titre a été acquis, sous certaines conditions liées à la composition du capital social et à la détention du pouvoir de direction (art. 87, L. 31/12/71 modifié par L. 2015-990 du 6 août 2015).
    Bientôt il pourra aussi, dans des conditions fixées par décret en CE, exercer en France au nom ou au sein d'une société régie par le droit de l'Etat membre où il a acquis son titre et ayant pour objet l'exercice en commun de plusieurs des professions judiciaires ou juridiques.
  • Enfin, deux statuts spécifiques, de collaborateur et de salarié, permettent à certains avocats de se mettre au service d'autres membres de la profession :
    • L'avocat collaborateur (29,5 % en 2019).
      Il consacre une partie de son activité au cabinet d'un autre avocat moyennant une rémunération précisée dans le contrat.
      L'avocat est civilement responsable des actes que le collaborateur accomplit pour son compte, mais cette responsabilité n'est toutefois pas exclusive de celle encourue par le collaborateur (solution rendue dans le cadre du statut d’un partnership de droit américain en France : Cass. Civ. 1ère, 17 mars 2011 D. 2011 p. 1463 note B. Dondero). Le collaborateur est maître de son argumentation et peut se constituer une clientèle personnelle. La qualité de collaborateur ne peut être indiquée sur le tableau de l'Ordre.
      Rq.Barthelémy, Idrac, « Vieille, Magnier, Réflexions et propositions à propos d'un statut de l'avocat collaborateur », JCP G 08 I 182

    • L'avocat salarié (4 % en 2019), qui trouve son origine chez les ex-conseils juridiques (Martin, de collaboration en salariat, JCP G 98 I 178).
      L'avocat concerné consacre toute son activité au cabinet de son employeur et ne peut se constituer de clientèle personnelle, d'où la requalification d'un contrat de collaboration si la totalité de l'activité apparaît concernée (Mixte, 12 fév. 99, JCP G 99 I 126 n° 5) ou s'il apparaît, de fait, impossible de se constituer une clientèle personnelle (Cass. Civ. 1ère, 14 mai 09, JCP G 09 actu n° 292 et note Puigelier, « Vers la disparition de collaboration libérale ? », JCP G 09 Fasc. 25 p. 14 - Cass. Soc., 29 mars 2017, D. 2018 87 § E). Le contrat ne doit pas comporter de clauses attentatoires à son indépendance (Taquet, « La clause de conscience », JCP G 94 I 3797), ni à sa liberté d'établissement ultérieure (Cass. Civ. 1ère, 14 oct. 97 JCP G 98 II 10011 Martin ; 17 nov. 98 JCP G 99 II 10006). Cette qualité ne peut être indiquée sur le tableau de l'Ordre.
                       N. Noto-Jaffeux, « L'indépendance de l'avocat », JCP 2022 Fasc. 26 n° 826


Sy.
Les formes d'exercice de la profession d'avocat

Exercice libéral à titre individuel

Exercice en groupe

Statuts spécifiques

 
  • Association : consiste en une mise en commun de moyens. Chaque avocat associé reste responsable à l'égard de ses clients, et possède dans l'association des droits personnels incessibles.
  • Société civile professionnelle (SCP) : les fonctions sont exercées au nom de la société, chaque avocat répond indéfiniment et solidairement des dettes sociales et doit consacrer toute son activité à la société. Chacun répond par ailleurs personnellement de ses actes professionnels.
  • Société d'exercice libéral (SEL) : SELAFA (SEL à forme anonyme), SELAS (SEL par actions simplifiées), SELARL (SEL à responsabilité limitée), SELURL (EURL), SELCA (SEL en commandite par actions).
  • Société en participation d'exercice libéral : les associés sont responsables solidairement et indéfiniment à l'égard des tiers des engagements de chacun.
  • Société civile de droit commun ne conférant pas aux associés la qualité de commerçant.
  • Avocat collaborateur : peut se constituer une clientèle personnelle.
  • Avocat salarié : ne peut se constituer une clientèle personnelle.


Au début des années 2000, la Cour de cassation avait déclaré illégales les dispositions prises par un Barreau en application du RIH relatives à la participation à des réseaux multidisciplinaires réunissant plusieurs professions (Cass. Civ. 1ère, 21/1/03, JCP G 03 II 10030, note R. Martin, D. 03 855 note Blanchard). Puis, en juin 2003, le CNB avait adopté une nouvelle définition des réseaux pluridisciplinaires qui semblait avoir vocation à prendre valeur juridique après la reconnaissance à celui-ci d'un pouvoir normatif par la loi réformant le statut de certaines professions judiciaires ou juridiques. Cette disposition figurait dans l'art. 16 du RIU adopté par le CNB. Mais cet article avait été suspendu, puis annulé, par le Conseil d'Etat dans un arrêt qui fixant de manière restrictive le pouvoir normatif du CNB (CE ord., 22/6/04, D. 04 2740 - CE, 17 nov 2004, JCP G 04 II 10188 concl. Aguila).

L'interprofessionnalité a été longue à se mettre en place, même s'agissant de l'interprofessionnalité capitalistique.
Un pas décisif a été franchi avec l'adoption de la loi n° du 6 août 2015, qui consacre cette possibilité d'interprofessionnalité, tant dans dans le cadre de l'exercice en groupe (sociétés et notamment SEL), qu'au plan capitalistique pour les sociétés de participation financière des professions libérales.


L'interprofessionnalité capitalistique a d'abord été introduite par le biais des sociétés de participation financière de professions libérales (SPFPL). Désormais elle concerne aussi les sociétés d'exercice libéral (SEL).

=> Les SPFL
Les sociétés de participation financière de professions libérales ont été instituées par la loi MURCEF du 11 déc. 2001. Il s'agissait alors de sociétés holding uni professionnelles destinées à regrouper des SEL, et prenant la forme de sociétés commerciales (JCP 02 I 131, JCP 02 I 136 n° 9).
  • A l'origine, leur objet principal était la détention de parts ou d'actions de SEL exerçant la même profession.
  • Dans un second temps, elles ont aussi pu avoir des activités accessoires en relation directe avec leur objet et destinées exclusivement aux sociétés et groupements dont elles détenaient des participations (L. n° 2004-130 du 11 février 2004, art. 72 - JCP G 04 act 230 n° 2B, décret n° 2004-852 du 23 août 2004).
  • La loi LME du 4 août 2008 leur a ensuite donné la possibilité de détenir la majorité du capital social et des droits de vote d'une SEL.
  • La possibilité de constituer des SPFL pluridisciplinaires a par ailleurs résulté d'un décret du 22 septembre 2009 autorisant l'ouverture du capital social des SPFL d'huissiers, commissaires-priseurs et notaires aux membres des professions judiciaires ou juridiques soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé (JCP G 09 Fasc. 41 n° 311). Mais en pratique la faculté d'être associé d'une holding n'a été octroyée qu'aux membres et anciens membres de la profession considérée ou à leurs ayants droit.
En résumé, les SPFPL ont été cloisonnées profession par profession et les holdings de professions libérales sont restées mono-professionnelles, sans pouvoir investir dans des structures d'exercice de professions différentes.

Se posait donc la question de la mise en conformité de notre droit avec la directive « Services » de l'Union européenne du 12 décembre 2006, qui demande aux États membres de veiller « à ce que les prestataires ne soient pas soumis à des exigences qui les obligent à exercer exclusivement une activité spécifique ou qui limitent l'exercice conjoint ou en partenariat d'activités différentes ».

La loi n° 2011-331 du 28 mars 2011 a modifié le régime juridique des holdings des SPFPL et, sous réserve de l’adoption de décrets d’application, consacré le principe d'interprofessionnalité capitalistique des professions libérales. Ont été visés les avocats, notaires, huissiers, commissaires-priseurs, commissaires aux comptes, experts-comptables et conseils en propriété industrielle. Il a donc été mis fin à la logique d’uniprofessionnalité des SPFPL mais l’interprofessionnalité d’exercice était néanmoins demeurée interdite.

En effet, la SPFPL pouvait notamment avoir pour objet « la détention des parts ou d'actions de sociétés ayant pour objet l'exercice de deux ou plusieurs des professions d'avocat, notaire, huissier, commissaire-priseur judiciaire, expert-comptable, commissaire aux comptes ou conseil en propriété industrielle ainsi que la participation à tout groupement de droit étranger ayant pour objet l'exercice de l'une ou de plusieurs de ces professions ». La majorité du capital social de la SPFPL ne pouvait être détenue par une société de participations financières régie par l'article 31-2 qu'à la condition que la majorité du capital et des droits de vote de la société de participation financière soit détenue par des professionnels exerçant la même profession que celle constituant l'objet social de la société d'exercice libéral.

Les choses ont évolué avec l'entrée en vigueur de la loi n° 2015-990, du 6 août 2015, puisque les SPFL peuvent désormais être mono-professionnelles ou interprofessionnelles. Elles peuvent avoir pour objet :
  • la détention de parts et d'actions, soit de sociétés d'une même profession juridique ou judiciaire, soit de sociétés de professionnels du droit (avocat, notaire, huissier de justice, commissaire-priseur judiciaire), du chiffre (expert-comptable, commissaire aux comptes) et de conseil en propriété industrielle,
  • la participation à tout groupement étranger ayant pour objet l'exercice de l'une ou plusieurs de ces professions.
Le capital social et les droits de vote des SPFPL peuvent, selon le cas, être détenus par toute personne exerçant la même profession que les sociétés détenues, par toute personne exerçant une profession juridique ou judiciaire ou par toute personne physique ou morale exerçant une ou plusieurs professions juridiques ou judiciaires, établie en France ou légalement établie dans un Etat membre de l'Union européenne ou partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou dans la Confédération suisse.
Des dispositions spécifiques concernent l'activité professionnelle des mandataires sociaux et membres des organes de contrôle, en lien avec la ou les professions exercées par les sociétés faisant l'objet de la détention des parts ou actions.

=> Les SEL
Avec l'entrée en vigueur de la loi du 6 août 2015, la majorité du capital et des droits de vote des SEL peut aussi désormais être détenue par toute personne physique ou morale exerçant la profession d'avocat ou l'une des professions juridiques ou judiciaires, qu'elles soient établies en France ou dans un autre Etat membre de l'Union européenne ou partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou dans la Confédération suisse.
Dans l'hypothèse de la détention de la majorité du capital par des personnes exerçant une autre profession juridique ou judiciaire que la profession d'avocat, la SEL doit au moins comprendre, parmi ses associés, une personne exerçant la profession d'avocat.


La loi du 6 août 2015, a prévu également la création de sociétés interprofessionnelles ouvertes à toutes les professions du droit mais avec exclusion des capitaux extérieurs à ces professions. Des dispositions en ce sens visent les huissiers, les notaires, les commissaires-priseurs, les avocats, les avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, les mandataires et administrateurs judiciaires. Des décrets en Conseil d'Etat devaient déterminer les conditions d'application de ces dispositions, dans le respect des règles de déontologie applicables à chaque profession.

S'agissant des avocats, l'art. 8 de la loi du 31 décembre 1971 dispose désormais que (...) lorsque la forme juridique d'exercice est une société, le capital social et les droits de vote peuvent être détenus par toute personne exerçant une profession juridique ou judiciaire ou par toute personne légalement établie dans un Etat membre de l'Union européenne, dans un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou dans la Confédération suisse qui exerce, dans l'un de ces Etats, une activité soumise à un statut législatif ou réglementaire ou subordonnée à la possession d'une qualification nationale ou internationale reconnue, et exerçant l'une quelconque desdites professions, et, s'il s'agit d'une personne morale, qui satisfait aux exigences de détention du capital et des droits de vote prévues par la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 relative à l'exercice sous forme de sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé et aux sociétés de participations financières de professions libérales.

Toute société doit au moins comprendre, parmi ses associés, un avocat remplissant les conditions requises pour exercer ses fonctions. Au moins un membre de la profession d'avocat exerçant au sein de la société doit être membre du conseil d'administration ou du conseil de surveillance de la société.

La loi du 6 août 2015 autorisait par ailleurs le Gouvernement à prendre par ordonnances, dans un délai de huit mois à compter de sa promulgation, des mesures destinées à faciliter la création de sociétés ayant pour objet l'exercice en commun de plusieurs des professions d'avocat, d'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, de commissaire-priseur judiciaire, d'huissier de justice, de notaire, d'administrateur judiciaire, de mandataire judiciaire, de conseil en propriété industrielle et d'expert-comptable.

Cette création a été assujettie à diverses conditions dont le fait que la totalité du capital et des droits de vote doivent être détenus, directement ou indirectement, par des personnes exerçant l'une des professions exercées en commun au sein de ladite société ou par des personnes légalement établies dans un Etat membre de l'Union européenne, dans un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou dans la Confédération suisse qui exercent en qualité de professionnel libéral, dans l'un de ces Etats, une activité soumise à un statut législatif ou réglementaire ou subordonnée à la possession d'une qualification nationale ou internationale reconnue et exerçant une ou plusieurs des professions constituant l'objet social de la société. Ces sociétés ne pourront exercer une profession que si l'un de leurs associés remplit les conditions requises pour exercer celle-ci.

Rq.Site du Conseil National des Barreaux : Loi n° 2015-990 sur la croissance et l'activité dite « Macron » ce qui change pour les avocats ».
Plusieurs décrets d'application "Macron" sur les sociétés d'avocats ont été adoptés : D. n° 2016-878, 2016-879 et 2016-882 du 29 juin 2016.

L'ordonnance n° 2016-394 du 31 mars 2016 relatives aux sociétés pluri-professionnelles d'exercice (SPE) (JCP 2016 Fasc. 17 n° 488, aperçu rapide par F. G'sell) prévoit que la SPE peut revêtir toutes formes sociales sauf celles conférant aux associés la qualité de commerçant. L'exercice d'une activité commerciale est possible à titre accessoire et s'il n'est pas interdit à l'une des professions concernées (de fait, il reste impossible car permis seulement aux experts-comptables). Le capital et les droits de vote ne peuvent être détenus par des personnes physiques ou morales exerçant en dehors des professions figurant dans l'objet social. L'ordonnance contient de dispositions sur la déontologie, la prévention des conflits d'intérêts et le secret professionnel, au regard des partages d'information parfois nécessaires.

Le décret n° 2017-794 du 5 mai 2017 modifie les dispositions relatives à l'exercice de la profession d'avocat sous forme de SPE. Il prévoit la possibilité d'un exercice partagé au sein d'une association d'avocats et à titre individuel ou au sein d'une autre structure d'exercice, en particulier au sein d'une société pluri-professionnelle d'exercice. Le choix est laissé aux avocats ou sociétés d'avocats membres d'une association d'avocats à responsabilité professionnelle individuelle de prévoir ou non l'exclusivité de l'exercice professionnel en modifiant dans cette perspective le contrat d'association.

Les décrets n° 2017-795 et 2017-801 du 5 mai 2017 ayant également mis fin au principe d'unicité d'exercice respectivement dans les SCP et les associations, on pouvait considérer qu'il y avait "de facto suppression de ce principe" (L. Jariel, JCP 2017 Fasc. 23 n° 600 § 10). La fin de l'unicité d'exercice a été confirmée par le Conseil d'Etat pour les associés des SEL (CE, 5 juillet 2017, JCP 2017 Fasc. 42 n° 1104) et s'agissant des professions du droit et du chiffre par des arrêts du 17 juin 2019 (CE, 5ème et 6ème ch. réunies, 17 juin 2019, n° 400192 et 412149).

Rq.Actualité 2024 :

Les dispositions de l'ordonnance n° 2023-77 du 8 fév. 2023 prise en application de la loi n° 2022-172 du 14 fév. 2022 en faveur de l'activité professionnelle indépendante entreront en vigueur le 1er septembre 2024. Ce texte regroupe dans un texte unique la réglementation des sociétés des professions libérales, clarifie et simplifie les règles communes applicables et adapte les différents régimes juridiques leur permettant d'exercer sous forme de société :
  • Sociétés civiles : SCP, sociétés en participation, sociétés civiles de moyens et sociétés coopératives
    • Maintien de l'ouverture de SCP pluriprofessionnelles et possibilité d'avoir des SCP unipersonnelles.
    • Consécration des sociétés en participation de professions libérales (SEP).
  • SEL
    • Clarification de leur régime.
    • Formes spécifiques aux trois familles de professions libérales réglementées (Chap. 3 pour les professions juridiques et judiciaires : art. 80 à 84).
    • Les professions juridiques et judiciaires n'ont plus la possibilité qui leur avait été ouverte en 2015 de constituer des sociétés de droit commun en dehors du régime des SEL. Conséquence pour les avocats : abrogation des dispositions spéciales issues des alinéas 2 et 3 du I de l'art 8 de la loi de 1971, de la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 relative aux SCP et la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990. Ne sont pas visées les associations d'avocats ou AARPI.
  • Sociétés pluri professionnelles d'exercice (SPE) : extension de leur périmètre.
  • Sociétés de participation financière de professions libérales : élargissement de leur objet.

S. Bortoluzzi, « Exercice en société des professions libérales réglementées. Du changement dans la continuité ? », JCP 2023 Fasc. 8 act. 269, V. aussi JCP 2023 Fasc. 11 doctr. 365.

Les officiers ministériels sont titulaires d'une charge qui leur confère un monopole d'exercice de leurs fonctions.
Certains sont officiers publics et peuvent dresser des actes authentiques (notaires et commissaires de justice, issus récemment de la fusion des professions d'huissier de justice et de commissaire-priseur) mais tous n'exercent pas une profession judiciaire.
Les conditions d'exercice de ces professions réglementées ont évolué avec l'entrée en vigeur progressive des dispositions de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015. Le texte a notamment modifié les tarifs et les conditions d'installation des officiers ministériels.
Le décret n° 2017-795 du 5 mai 2017 avait par ailleurs modifié les dispositions relatives à l'exercice sous forme de SCP, des professions de notaire, d'administrateur judiciaire, de mandataire judiciaire, de conseil en propriété industrielle, de commissaire-priseur judiciaire, d'huissier de justice, d'avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation et d'avocat.

Nous allons rappeler brièvement les règles communes à tous les officiers ministériels (A), puis présenter ceux dont la mission est principalement judiciaire (B).


- La patrimonialité des offices ministériels
:
Il existe un principe traditionnel de distinction entre le titre et la finance.
  • Le titre : il est hors du commerce et une investiture par l'autorité publique est nécessaire. Il existe cependant un droit de présentation du successeur.
  • La finance : l'office est un élément du patrimoine de son titulaire.
En savoir plus : Tarifs des professions réglementées

La loi n° 2015-990 du 6 août 2015 a introduit une révision de la réglementation des tarifs applicables aux prestations des commissaires-priseurs judiciaires, greffiers des tribunaux de commerce, huissiers de justice, administrateurs judiciaires, mandataires judiciaires et notaires, ainsi qu'aux droits et émoluments des avocats en matière de saisie immobilière, de partage, de licitation et de sûretés. Ces tarifs sont désormais arrêtés conjointement par les ministres de la justice et de l'économie en lien avec l'Autorité de la concurrence. Par ailleurs est désormais possible une redistribution entre professionnels, afin de favoriser la couverture de l'ensemble du territoire par les professions judiciaires et juridiques et l'accès du plus grand nombre au droit. Cette redistribution a entraîné la création d'un fonds dénommé "fonds interprofessionnel de l'accès au droit et à la justice".

Textes d'application :
  • Décret n° 2016-216 du 26 février 2016 prévoyant les modalités d'établissement de la carte déterminant les zones dans lesquelles la création de nouveaux offices d'huissiers, notaires et commissaires-priseurs judiciaires apparaît utile pour renforcer la proximité ou l'offre de service.
  • Décret n° 2016-230 du 26 fév. 2016, modifié par le décret 2018-200 du 23 mars 2018, relatif aux tarifs des professions juridiques réglementées (notaires, officiers publics et ministériels) et au fonds interprofessionnel de l'accès au droit et à la justice (installation ou maintien de professionnels dans certaines zones géographiques).
  • Arrêtés du 26 fév. 2016 intéressant notamment les greffiers de tribunaux de commerce, les notaires et les huissiers (F. G'sell, JCP G 2016 Fasc. 11 n° 311). Ces textes, intégrés dans le Code de commerce, opérent une distinction entre activités régulées et activités concurrentielles, définissent les notions de coût pertinent et rémunération raisonnable. Ils sont entrés en vigueur le 1er mars 2016.
  • Arrêté du 28 avril 2020 reportant la date d'entrée en vigueur des nouveaux tarifs des professions réglementées du droit du 1er mai 2020 au 1er janvier 2021 (décret n° 2020-179 et quatre arrêtés du 28 fév. 2020).
C. Laporte, « Tarifs des professions réglementées (hors avocats) : la saga continue », JCP G 2020 Fasc. 11 n° 297.

- Le regroupement en corporations professionnelles
:
Les professions concernées sont hiérarchisées aux niveaux départemental, régional et national.
Les officiers ministériels sont soumis à des règles professionnelles et déontologiques sanctionnées sur le plan disciplinaire.
Ce régime disciplinaire a connu une évolution, en lien avec l'entrée en vigueur de la loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021.
En savoir plus :  L'évolution du régime disciplinaire des officiers ministériels.

La réforme fait suite à un rapport de l'Inspection Générale de la justice sur la discipline des professions du droit et du chiffre, qui a fait le constat d'une grande diversité et complexité des régimes disciplinaires, conduisant à une répression limitée. Ce rapport a proposé une refonte complète de l'architecture disciplinaire (Jean-Marie Brigant, « Aux grands maux, les grands remèdes », JCP G 2021 Fasc. n° 3 n° 37).
La loi du 21 décembre 2021 contenait des dispositions applicables aux avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, aux commissaires de justice, aux greffiers des tribunaux de commerce et aux notaires. Elle prévoyait qu'un code de déontologie propre à chaque profession soit préparé par son instance nationale et édicté par décret en CE. Des collèges de déontologie dans lesquels étaient présents des magistrats ont été institués auprès des instances nationales de chacune de ces professions. Ils ont participé à l'élaboration du code de déontologie de la profession et émis des avis et des recommandations sur son application à la profession concernée. La justice disciplinaire a par ailleurs été réorganisée (voir infra).

Le Gouvernement avait été habilité à intervenir par ordonnances dans les 8 mois de la promulgation de la loi, afin de mettre en œuvre, préciser, adapter et harmoniser toutes les dispositions relevant du domaine de la loi propres aux professions concernées. Les dispositions nouvelles entrées en vigueur le 1er juillet 2022 sont issues de l'ordonnance n° 2022-544 du 13 avril 2022 et du décret n° 2022-900 du 17 juin 2022.
V. aussi la circulaire du 9 nov. 2022 présentant la réforme de la déontologie et de la discipline des officiers ministériels (JUSC2231173C : BOMJ, 9 nov. 2022 - NB : régime unifié mais jusqu'à l'édition des codes de déontologie et des règles professionnelles propres à chaque profession, les règles en vigueur antérieures ont continué à s'appliquer.

E. de Lamaze, « In déontologie we trust. Une refondation nécessaire de la déontologie et de la discipline des professions du droit », JCP 2022 Fasc. 7 n° 259

Depuis le 1er mai 2009 ces professions, à l’exception des avocats aux Conseils, sont placées sous le contrôle du Procureur général près la Cour d’appel : le procureur général exerce une mission de surveillance de la déontologie et de la discipline des officiers publics et ministériels du ressort de la cour d'appel.

Nous évoquerons successivement les greffiers des tribunaux de commerce (1), les avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation (2) et les commissaires de justice (3). Ces derniers sont issus de la fusion au 1er juillet 2022 des professions d'huissier de justice et de commissaire-priseur judiciaire.
A noter par ailleurs : la profession d'avoué a quant à elle disparu. Les avoués disposaient d'un monopole de représentation devant la Cour d'appel. Cette mission est désormais assurée par les avocats du ressort de chaque Cour d'appel.
En savoir plus : La suppression des avoués en 2012

La profession avait tout d'abord été remise en cause par le Rapport Attali puis, dans un communiqué du 10 juin 2008, le Ministre de la justice avait annoncé qu'avoués et avocats devraient fusionner en 2010, dans le but de simplifier la procédure d'appel.
La loi n° 2011-94 du 25 janvier 2011 a prévu qu'au 1er janvier 2012 les avoués deviendraient automatiquement avocats et que la représentation devant la Cour d'appel serait assurée par les avocats du ressort (Aperçu J . Junillon, JCP G 2011 F. 5 n° 99 - C. NOURISSAT, À propos de la décision n° 2010-642 DC du 20 janvier 2011 relative à la loi portant réforme de la représentation devant les cours d'appel, Procédures 2011 Fasc. 3, repère 3).
Une période transitoire de 3 mois a été instituée pour permettre aux avoués qui le souhaitaient d'exercer en même temps la profession d'avocat. Des voies d'accès privilégiées vers les autres professions judiciaires et juridiques ont été prévues pour les avoués qui ne voulaient pas devenir avocats et pour leurs collaborateurs. La loi a envisagé aussi les conditions d'indemnisation des avoués pour la perte de valeur de leur office et les conditions d'accompagnement de leurs salariés (principal problème en suspens). Faisant suit à une décision du Conseil constitutionnel (CC, décision n° 2010-624 du 20 janvier 2011), la Cour de cassation a décidé que ne peuvent être indemnisées les demandes d'indemnisation du préjudice de carrière, économique et de préjudices accessoires (Cass. Civ. 1ère, 6 juillet 2016, JCP G 2016 Fasc. 40 n° 1037 note B. Beignier et A. Andorno).

On dénombrait, au 1er janvier 2008, 231 offices d'avoués au sein desquels exercent 433 avoués employant 1852 salariés.

Incidences financières pour les justiciables de la suppression des avoués :
Le Ministère estimait le coût de la fusion à environ 205 millions d'euros (L'indemnisation des avoués a finalement été fixée à 800 millions d'euros par le Parlement). Comme prévu, le financement est opéré au moyen d'une taxe imposée aux justiciables agissant en matière civile devant les Cours d'appel lorsque la constitution d'avocat est obligatoire devant la cour (décret n° 2011-1202 du 28 sept. 2011 relatif au droit affecté au fonds d'indemnisation de la profession d'avoué près les cours d'appel et à la contribution pour l'aide juridique). Le droit est acquitté par l'avocat postulant pour le compte de son client soit par voie de timbres mobiles, soit par voie électronique. Il n'est pas dû par la partie bénéficiaire de l'aide juridictionnelle. Le produit de ce droit est affecté au fonds d'indemnisation de la profession d'avoués près les cours d'appel.
Actualité : le montant de la taxe s'élevait à l'origine à 150 €. Il a été porté à 225 € par la loi de finances pour 2015, qui en a en outre prolongé le versement jusqu'en 2026 (M. Attal, Le prix de l'accès à la justice en appel, JCP 2014 Fasc. 46 n° 1167). Le Ministère de la Justice a indiqué que ce droit ne serait pas exigible pour les appels formés en matière prud'homale, la représentation par avocat n'étant pas obligatoire.

Textes complémentaires :
  • Décret n° 2001-361 du 1er avril 2011, relatif aux modalités d'indemnisation des avoués et de leurs salariés (JCP G 2011, F. 15 n° 409) : seule l'indemnisation du préjudice lié à la perte du droit de présentation est prévue ; sont écartées l'indemnisation du préjudice de carrière, du préjudice économique et des préjudices accessoires (CC, décision du 20 janv. 2011, n° 2010-624 DC).
  • Décret n° 2011-419 du 18 avril 2011 relatif aux modalités de fonctionnement du fonds d'indemnisation de la profession d'avoué.
  • Décret du 21 avril 2011 : modalités d'adhésion ou de renonciation à la profession d'avocat.
  • Décret du 22 avril 2011 : modalités d'accès des avoués et de leurs collaborateurs aux professions juridiques et judiciaires. Ce décret prévoit que : « Tous les deux ans dans le premier mois de l'année civile, les bâtonniers des barreaux d'une même cour d'appel désignent à la majorité celui d'entre eux chargé, en qualité de bâtonnier en exercice, de les représenter pour traiter des questions mentionnées au dernier alinéa de l'article 21 de la loi du 31 décembre 1971 [délégation de pouvoirs possible dans les cas de différends entre avocats à l'occasion de leur exercice professionnel] (...). En l'absence de désignation à l'expiration du délai prévu à l'alinéa précédent, le bâtonnier du barreau du tribunal judiciaire situé au siège de la cour d'appel ou, à défaut, du tribunal judiciaire le plus proche de la cour assure cette représentation ».


On en dénombrait 243 fin décembre 2022. Leur statut a été modifié à diverses reprises : 
  • Décret du 5 juillet 1995 renforçant leur mission d'assistance administrative et technique vis-à-vis du président de la juridiction.
  • Loi n° 2004-130 du 11 février 2004 et décret n° 2004-1462 du 23 déc. 04 faisant évoluer le régime disciplinaire.
  • Loi n° 2010-1609 du 22 décembre 2010 contenant des dispositions visant à rénover les conditions d’exercice de certaines professions réglementées, dont les greffiers des tribunaux de commerce. Elle leur a permis d’exercer leur profession en qualité de salarié d’une personne physique ou morale titulaire d’un greffe de tribunal de commerce (art. L. 743-12 s., C. com.). Les conditions en ont été précisées par le décret n° 2011-1270 du 11 octobre 2011 (JCP G 2011 Fasc. 43 n° 1161).
  • Décret n° 2011-1541 du 15 novembre 2011, pris en application de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990, déterminant les modalités de constitution, de fonctionnement et de contrôle des sociétés de participation financière de greffiers des tribunaux de commerce. Il a aussi permis la création de sociétés d'exercice libéral par actions simplifiées.
  • Loi n° du 21 décembre 2021 : une cour nationale de discipline, instituée auprès du Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce, connaît des poursuites contre ces professionnels. Elle est composée d'un magistrat du siège de la Cour de cassation et de quatre membres de la profession. Ses arrêts peuvent faire l'objet d'un recours devant la Cour de cassation.
H. Croze, « Greffier du tribunal de commerce : irremplaçable ? », Proc. 2023 Fasc. n° 10 repère 9.

Rq.Le rapport Marshall, sur les juridictions du XXIème siècle, avait suggéré la suppression de ces officiers ministériels et la reprise de leurs activités par les fonctionnaires des greffes.
La loi n° 2015-990 du 6 août 2015 n'a pas validé pas cette proposition mais l'ordonnance n° 2016-57 du 29 janvier 2016, ratifiée par la loi J21, prévoit désormais un recrutement par concours (JCP G 2016 Fasc. 6 n° 155 veille C. Bléry).

Par ailleurs l'accès aux données du Registre national du commerce et des sociétés via l'INPI est désormais gratuit et les tarifs et conditions d'exercice de la profession ont été modifiés.
Décret n° 2016-230 du 26 fév. 2016, modifié par le décret n° 2018-200 du 23 mars 2018, relatif aux tarifs des professions juridiques réglementées et au fonds interprofessionnel de l'accès au droit et à la justice et Arr. 26 fév. 2016 intéressant les greffiers des tribunaux de commerce e.v. le 1er mars 2016 (F. G'sell, JCP G 2016 Fasc. 11 n° 311).

Les "avocats aux Conseils" constituent un corps unique, exerçant à la fois les fonctions d'avocat et d'avoué devant le Conseil d'état et la Cour de cassation.
S'ils jouissent ici d'un monopole, ils peuvent également plaider devant les juridictions du fond.


Ex.Responsabilité professionnelle et déontologie des avocats aux conseils.
  • Les avocats aux Conseils peuvent faire l'objet d'une action en responsabilité devant la Cour de cassation ou le Conseil d'Etat après avis du Conseil de l'Ordre : Paris, 2/6/99, JCP G 99 II 10134.
  • Commet une faute l'avocat au Conseil d'Etat qui omet de présenter un pourvoi en cassation après avoir accepté par courrier de le présenter. Le requérant n'est cependant fondé à demander réparation que dans la mesure où la faute a entraîné pour lui la perte d'une chance sérieuse d'obtenir la cassation de l'arrêt qu'il entendait attaquer : CE, 2 oct. 06, JCP G 06 actu n° 487.
  • Sur la responsabilité professionnelle des avocats aux Conseils, voir aussi JCP G 07 actu n° 211, à propos de trois arrêts de l'Assemblée plénière du 13 avril 2007.
  • Loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 : une cour nationale de discipline, instituée auprès de l'ordre des avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, connaît des poursuites disciplinaires contre ces professionnels. Elle est composée d'un membre du Conseil d'Etat, d'un magistrat du siège de la Cour de cassation et de cinq membres de la profession. Ses arrêts peuvent faire l'objet d'un recours porté, devant le Conseil d'Etat lorsque les faits ont trait aux fonctions exercées devant le Tribunal des conflits ou les juridictions de l'ordre administratif, et devant la Cour de cassation dans les autres cas.
  • D. n° 2023-146 du 1er mars 2023 : code de déontologie des avocats au Conseil d'État et à la Cour de cassation, entré en vigueur le 2 mai 2023.
  • M. Barba, « Des cours suprêmes à la doctrine praticienne - Sur les apports "extra déontologiques" du code de déontologie des avocats aux Conseils », JCP 2023 Fasc. 20 doctr. 621.

Accès à la profession
L'exigence de posséder le CAPA a été supprimée en 1999 afin de permettre l'intégration des avocats européens. Désormais pour accéder à la profession, il suffit d'avoir été inscrit au moins un an en tant que stagiaire ou avocat sur un tableau. Au terme d'une formation de 3 ans, il y a passage d'un examen spécial. Le décret n° 2016-652 du 20 mai 2016 a remanié les conditions d'accès à la profession (JCP G 2016 Fasc. 22 n° 638, H. Pauliat).

Rq.Nombre de charges.

Il était fixé à 60 depuis 1817, chaque cabinet pouvant comprendre trois associés. Depuis 2009 de nouvelles charges étaient susceptibles d'être créées par le Ministre de la Justice (décret n° 2009-452 du 22/4/09 - D. Le Prado, Point de vue des avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation sur le rapport de la commission Darrois : JCP G 09 actu n° 184 et D. 09 958). En outre les avocats aux conseils ont aussi eu la possibilité d'être salariés (ord. n° 2014-239 du 27 fév. 2014 et décret n° 2016-651 du 20 mai 2016 organisant le statut des avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation salariés (JCP G 2016 Fasc. 22 n° 639, H. Pauliat).

Au-delà, comme pour tous les officiers ministériels, la question des conditions d'installation des avocats aux Conseils a été abordée par la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, dont l'art. 57 dispose que l'Autorité de la concurrence rend au ministre de la justice, qui en est le garant, un avis sur la liberté d'installation des avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation. Le décret n° 2016-215 du 26 fév. 2016 a fixé les critères à prendre en considération et quatre offices d'avocats aux Conseils ont été créés par arrêté du 5 déc. 2016, ce qui a porté leur nombre à 64. Dans un avis du 25 oct. 2018, l'autorité de la concurrence a recommandé d'en créer encore quatre.

V. aussi décret n° 2017-798 du 5 mai 2017 modifiant les conditions d'exercice de la profession d'avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation sous forme de société autre qu'une société civile professionnelle et applicable aux sociétés pluri-professionnelles d'exercice.

Rémunération des avocats aux Conseils :

La postulation est soumise à tarification réglementée.
En revanche, s'agissant de leurs honoraires, la loi prévoit des dispositions similaires à celles encadrant les honoraires des avocats, applicables à compter du 1er février 2016 :
  • Les honoraires de consultation, d'assistance, de conseil, de rédaction d'actes juridiques sous seing privé et de plaidoirie doivent être fixés en accord avec le client.
  • Sauf en cas d'urgence ou de force majeure ou lorsqu'il intervient au titre de l'aide juridictionnelle totale, l'avocat aux Conseils doit désormais conclure par écrit avec son client une convention d'honoraires, précisant notamment, le montant ou le mode de détermination des honoraires couvrant les diligences prévisibles, ainsi que les divers frais et débours envisagés. Ces honoraires doivent tenir compte, selon les usages, de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation, de sa notoriété et des diligences de celui-ci.
  • Toute fixation d'honoraires qui ne le serait qu'en fonction du résultat judiciaire est interdite. Est licite la convention qui, outre la rémunération des prestations effectuées, prévoit la fixation d'un honoraire complémentaire en fonction du résultat obtenu ou du service rendu.
La profession, issue du regroupement des fonctions d'huissier et de commissaire-priseur, existe depuis le 1er juillet 2022. Fin décembre 2022, il y en avait 3 821.

Rq.Conditions de création des commissaires de justice
L'ordonnance n° 2016-728 du 2 juin 2016 a planifié le regroupement des professions d'huissiers de justice et de commissaire-priseur judiciaire en une nouvelle profession de commissaire de justice :
  • 1er janvier 2019 entrée en fonctions de la Chambre nationale des commissaires de justice.
  • 1er juillet 2022 : naissance de la nouvelle profession.
  • 1er juillet 2026 : disparition définitive des deux professions.
L. Lauvergnat, « L'huissier de justice et le commissaire-priseur judiciaire sont morts, vive le commissaire de justice ! », Proc. 2022 Fasc. 7 alerte 16

- Accès à la profession : pour accéder à la profession d'huissier, il fallait jusqu'en 2019 justifier d'une maîtrise en droit, effectuer un stage de 2 ans et passer un examen professionnel. Le décret n° 2019-1185 du 15 novembre 2019 relatif à la formation professionnelle des commissaires de justice et aux conditions d'accès à cette profession prévoit qu'il faut désormais :
  • justifier, d'un master en droit ou d'un titre ou diplôme reconnu comme équivalent par arrêté du garde des sceaux ;
  • sous réserve des cas de dispense prévus, avoir réussi l'examen d'accès à la formation professionnelle initiale de commissaire de justice, dont le contenu a été fixé par un arrêté du 13 décembre 2019. ;
  • sauf dispense autorisée, avoir suivi la formation professionnelle initiale de deux ans comportant un enseignement théorique et un stage professionnel ;
  • avoir subi avec succès l'examen d'aptitude à la profession de commissaire de justice (cas de dispenses).
 - Conditions d'installation : En France, le nombre d'offices ministériels a longtemps été déterminé et limité. La loi n° 2015-990 du 6 août 2015 a prévu de faire évoluer cette situation et d'améliorer l'accès aux offices publics ou ministériels afin de renforcer la cohésion territoriale des prestations et d'augmenter de façon progressive le nombre d'offices sur le territoire. Par suite, depuis le 1er février 2016, les huissiers de justice, à l'instar des notaires et commissaires-priseurs, ont pu librement s'installer dans les zones où l'implantation d'offices apparaissait utile pour renforcer la proximité ou l'offre de services. Ces zones sont déterminées par une carte établie conjointement par les ministres de la justice et de l'économie, sur proposition de l'Autorité de la concurrence. Dans les zones, où l'implantation d'offices serait de nature à porter atteinte à la continuité de l'exploitation des offices existants et à compromettre la qualité du service rendu, le ministre de la justice peut refuser une demande de création d'office, après avis de l'Autorité de la concurrence (décret n° 2016-216 du 26 février 2016 prévoyant les modalités d'établissement de la carte déterminant les zones dans lesquelles la création de nouveaux offices d'huissiers, notaires et commissaires-priseurs judiciaires apparaît utile pour renforcer la proximité ou l'offre de service).
Rq.La loi n° 2010-1609 du 22 décembre 2010 avait permis aux huissiers d'exercer leur profession en qualité de salarié d'une personne physique ou morale titulaire d'un office d'huissier de justice.
D'autres évolutions avaient été introduites par la loi n° 2011-331 du 28 mars 2011.
- Attributions : ayant "repris" les activités des huissiers et des commissaires-priseurs judiciaires, les commissaires de justice exercent des attributions variées, listées par l'article 1 de l'ordonnance n° 2016-728 du 2 juin 2016. Les activités visées par le I du texte font l'objet de monopoles, celles qui relèvent du II sont exercées concurremment avec d'autres professionnels. Les activités monopolistiques sont soumises à des tarifs réglementés (art. L. 444-1 s., R. 444-1 s., tableaux 3-1, 3-2 et 3-3 annexés à l'art. R. 444-3 et R.444-10 du Code de commerce), tandis que les activités concurrentielles font l'objet d'honoraires librement déterminés (art. L. 444-1 du Code de commerce).
En savoir plus : Découvrir la profession

Voir le site de la chambre nationale des commissaires de justice.

NB : création en 2012 de la Chambre européenne des huissiers de justice (CEHJ).

Rq.Activités des huissiers dévolues aux commissaires de justice :

Au titre des activités qui relevaient auparavant des huissiers, figure la signification des actes et l'exécution des décisions et titre exécutoires.
Certains commissaires de justice assurent le service intérieur des cours et tribunaux (commissaires de justice audienciers): ils ont une fonction de police, interviennent en matière de notification des actes d'avocat à avocat...Sur commission du juge, ou à la requête de particuliers, ils peuvent dresser des constats et procès-verbaux qui, sauf en matière pénale, font foi jusqu'à preuve contraire.
Ils peuvent par ailleurs effectuer le recouvrement amiable ou judiciaire de créances.
La loi n° 2015-990 a introduit dans le code civil (art. 1244-4, C. civ.) une procédure simplifiée de recouvrement des petites créances d'origine contractuelle ou statutaire (L. Lauvergnat, « La procédure simplifiée de recouvrement des petites créances de l'art. 1244-4 du C. civ. : vers une exécution participative ? », D. 2015 1860). La loi a été complétée par un D. n° 2016-285 du 9 mars 2016 (P. Samino, JCP 2016 Fasc. 13 n° 385, crit. L. Sousa, Rev. Proc. 2016 Fasc. 6 n° 6). Cette procédure peut être mise en œuvre par les commissaires de justice à la demande des créanciers pour les créances d'un montant de moins de 5000 euros. La profession dispose d'une plateforme dédiée (crédicys.fr).

Depuis novembre 2017, l'ordonnance n° 2016-722 du 2 juin 2016 (ratifiée par la loi J21) permettait aux huissiers de justice et aux commissaires-priseurs judiciaires d'exercer les fonctions de mandataire judiciaire à titre habituel, dans le cadre des procédures de rétablissement professionnel et des procédures de liquidation judiciaire ouvertes à l'égard des entreprises ne comptant aucun salarié et dont le chiffre d'affaires annuel hors taxes est inférieur ou égal à 100 000 €. La loi a été complétée par un décret n° 2016-1851 du 23 décembre 2016.

Les huissiers s'étaient investis dans la médiation et avaient mis en place une plateforme de médiation en ligne  qui avait été agréée par la Commission d'évaluation et de contrôle de la médiation de la consommation (CECM).

NB : Les commissaires de justice peuvent se voir délivrer des certificats de spécialisation (art. 30 D. n° 2019-1185 du 15 nov. 2019 et arrêtés d'application).
  
L'activité des commissaires de justice est pour partie soumise à territorialité : à l'origine, les huissiers ne pouvaient intervenir que dans le ressort du TI. Leur compétence s'est élargie au ressort du TGI en 2009, avant d'être étendue à tous les ressorts du département lorsqu'il y avait plusieurs TGI (décret du 28/08/2014), puis à compter du 1er janvier 2017, au ressort de la Cour d'appel.
L'essentiel des dispositions antérieures a été repris par l'art. 1 du décret n° 2021-1625 du 10 décembre 2021 :
  • pour les activités monopolistiques soumises à tarification, visées par le I de l'article 1 de l'ordonnance du 2 juin 2016 (à l'exclusion du 4°), la compétence territoriale des commissaires de justice s'exerce dans le ressort de la Cour d'appel au sein de laquelle ils ont établi leur résidence professionnelle ;
  • pour les activités prévues au I 4° et au II de l'article 1 de l'ordonnance du 2 juin 2016, exercées en concurrence avec d'autres professionnels du droit ou avec des sociétés commerciales, ainsi que pour l'activité de prisée et vente judiciaire à titre occasionnel, leur compétence est nationale.

- Régime disciplinaire (L. n° 2021-1729 du 21 décembre 2021) : des chambres de discipline interrégionales connaissent en premier ressort des poursuites disciplinaires contre les commissaires de justice. Elles sont composées d'un magistrat du siège de la cour d'appel et de deux membres de la profession. Une cour nationale de discipline connait des appels formés contre leurs jugements. Elle est composée d'un magistrat du siège de la Cour de cassation, de deux magistrats du siège de la cour d'appel et de deux membres de la profession. Ses arrêts peuvent faire l'objet d'un pourvoi devant la Cour de cassation.

La loi Macron du 6 août 2015 a introduit dans le code du travail le statut de défenseur syndical, chargé de fonctions d'assistance et de représentation devant les Conseils de prud'hommes et les Cours d'appel (art. L. 1453-4 du C. trav.).

Devant les Conseils de prud'hommes, la référence au défenseur syndical s'est substituée à la mention des délégués permanents ou non permanents des organisations d'employeurs et de salariés. Ces dispositions sont entrées en vigueur le 1er août 2016. Le Conseil d'Etat a validé le fait que le défenseur syndical puisse assister et représenter les justiciables dans les contentieux du travail (CE, 30 janvier 2019, JCP G 2019-Fasc. 9-10 n° 255 §17, obs. S. Bortoluzzi).

Le défenseur syndical fait partie des salariés protégés. Dans les établissements d'au moins onze salariés, il doit disposer du temps nécessaire à l'exercice de ses fonctions, dans la limite de dix heures par mois. Il peut également bénéficier d’autorisations d’absence pour formation. Durant ses absences, il est rémunéré par son employeur, lequel est ensuite remboursé par l’Etat (art. L. 1453-5 à 1453-9 du C. trav.). L'exercice de cette mission ne peut être une cause de sanction disciplinaire ou de rupture du contrat de travail et le licenciement d'un défenseur syndical est soumis à procédure d'autorisation administrative.

La liste des défenseurs syndicaux est arrêtée dans chaque région par le préfet de région, cette liste étant établie par la DREETS (Direction Régionale de l'Économie, de l'Emploi, du Travail et des Solidarités), sur proposition des organisations d'employeurs et de salariés représentatives au niveau national et interprofessionnel, national et multiprofessionnel ou dans au moins une branche, dans des conditions définies par le décret n° 2016-975 du 18 juillet 2016, entré en vigueur le 21 juillet 2016. Ce critère de représentativité vient d'être censuré par le Conseil Constitutionnel, qui a estimé qu'il ne traduisait pas la capacité d'une organisation syndicale à désigner des candidats aptes à assurer la fonction de défenseur syndical et que ces dispositions méconnaissaient le principe d'égalité devant la loi (CC, 14 sept. 2021, Proc. 2021 Fasc. 11 n° 298 obs. A. Bugada).

Le conseil d'état avait par ailleurs invalidé, par un arrêt du 17 novembre 2017, les dispositions de l'art. D. 1453-2-4 du C. trav. qui limitaient les possibilités d'intervention des défenseurs syndicaux au plan géographique. L'ordonnance n° 2017-1718 du 20 décembre 2017 a réintroduit, cette fois à l'art. L. 1453-4 du C. trav., l'indication selon laquelle « le défenseur syndical intervient sur le périmètre d'une région administrative » (limitation territoriale validée, avec une réserve d'interprétation pour la Loire Atlantique : CC, 12 mars 2020, QPC, Proc. 2021 Fasc. 1 chr. 1 P. Deumier).

Le défenseur syndical est assujetti à des obligations déontologiques : secret professionnel pour les questions intéressant les procédés de fabrication, obligation de discrétion à l'égard des informations présentant un caractère confidentiel et données comme telles par la personne qu'il assiste ou représente ou par la partie adverse dans le cadre d'une négociation. Le Conseil Constitutionnel a validé, dans une décision du 7 avril 2017, le cadre légal des obligations de secret professionnel et de discrétion du défenseur syndical (CC, 7 avril 2017, JCP 2017 Fasc. 17 n° 477).

Le défenseur syndical exerce ses fonctions à titre gratuit.

A. Bugada, « Ce qu'il faut savoir sur la réforme du contentieux du travail avant l'été 2017 , Proc. 2017 Fasc. 7 n° 26.

Tx.Textes : décret du 20 mars 1978, modifié suite à la loi du 8 fév. 1995 par les décrets du 22 juillet 1996, du 13 déc. 1996, du 1er octobre 2010, n° 2012-66 du 20 janvier 2012, n° 2018-931 du 29 oct. 2018, n° 2019-913 du 30 août 2019 et n° 2022-880 du 10 juin 2022.

Ils étaient 2 749 fin décembre 2022. Leur rôle consiste à faciliter en dehors de toute procédure judiciaire le règlement amiable des différends portant sur des droits dont les intéressés ont la libre disposition.

Ils peuvent également procéder aux tentatives de conciliation prévues par la loi, selon les modalités mentionnées aux articles 128 à 131 du CPC.
Avant décembre 2010, la délégation judiciaire de la tentative de conciliation n'était autorisée que devant le tribunal d'instance et le juge de proximité. Le décret du 1er octobre 2010 en a élargi la possibilité au tribunal de commerce et au tribunal paritaire des baux ruraux.

Peuvent être nommées conciliateurs de justice les personnes qui justifient d'une formation ou d'une expérience juridique et que leurs compétences qualifient particulièrement pour exercer ces fonctions mais le législateur en exclut les officiers publics et ministériels, ainsi que toute personne exerçant une activité judiciaire.

Nommés pour une première période d'un an par ordonnance du premier président de la cour d'appel, après avis du procureur général, sur proposition du magistrat coordonnateur de la protection et de la conciliation de justice, ils peuvent ensuite être reconduits dans leurs fonctions pour une période renouvelable de trois ans.
Leurs interventions se font à titre bénévole mais ils peuvent prétendre au remboursement de leurs frais.

Rq.C. Mollard-Courtau, « Réflexions sur une refonte du statut des conciliateurs de justice », D. 2011 1913.

La rédaction d'un constat d'accord est obligatoire en cas de renonciation à un droit, ou si la conciliation a été obtenue dans le cadre d'une tentative préalable déléguée par un juge. L'homologation du constat est en outre nécessaire pour lui conférer force exécutoire.

Cette équipe se compose actuellement de juristes assistants et d'assistants de justice. L'article 37 de la loi n° 2023-1059 du 20 nov. 2023 a créé d'une part la fonction d'attaché de justice, qui se substituera à celle de juriste assistant, et d'autre part celle d'assistant spécialisé. Ces dispositions doivent entrer en vigueur au plus tard le 1er novembre 2024.
G. Joly-Coz et E. Corbaux, « L'équipe autour du juge ou le juge et son équipe ? figures sociales et assistance juridique », JCP 2022 Fasc. 13 n° 438 ; P. Delmas-Goyon, « Un constat lucide mais des propositions timides - A propos du rapport Lottin (mission sur la structuration des équipes autour des magistrats) », JCP 2023 Fasc. 2 act. 49).

- Les juristes assistants ont été institués auprès des juridictions par la loi J21 du 18 novembre 2016 (art. L. 123-4 du COJ - F. Charlon, « Les juristes assistants », D. 2018 288) : ils peuvent être nommés auprès des magistrats des tribunaux judiciaires et des tribunaux de première instance, des cours d'appel ainsi qu'à la Cour de cassation. Sont concernées les personnes titulaires d'un diplôme de doctorat en droit ou sanctionnant une formation juridique au moins égale à cinq années d'études supérieures après le baccalauréat avec une année d'expérience professionnelle dans le domaine juridique et que leur compétence qualifie particulièrement pour exercer ces fonctions (conditions modifiées par la L. 22 déc. 2021). Ces juristes assistants sont nommés, à temps partiel ou complet, pour une durée maximale de trois années, renouvelable une fois. Ils sont tenus au secret professionnel et peuvent accéder aux dossiers de procédure pour l'exercice des tâches qui leur sont confiées. Un décret en Conseil d'Etat précise les modalités d'application du dispositif.

- Les assistants de justice
apportent leur concours aux travaux préparatoires réalisés, pour l'exercice de leurs attributions, par les magistrats des Tribunaux judiciaires, des Cours d'appel, de la Cour de cassation, ainsi qu'aux activités de l'ENM. Ils doivent posséder une formation juridique de niveau Bac+4 (ce sont souvent des étudiants). Nommés pour 2 ans, renouvelables deux fois, ils ne peuvent pas exercer d'activité auprès des membres des professions libérales juridiques ou judiciaires sans accord, selon le cas, du Premier Président de la Cour d'appel, de la Cour de cassation ou du directeur de l'ENM. Ils prêtent serment et sont soumis au secret professionnel. Ils effectuent au maximum 80 heures par mois dans la limite de 720 heures par an.
Tx.Textes : loi du 8 fév. 1995, décret n° 96-513 du 7 juin 1996 (modifié par des décrets ultérieurs).

- Les attachés de justice, se substitueront aux juristes-assistants (art. L. 123-4 du COJ) : ils pourront exercer, auprès des magistrats du siège et du parquet de la Cour de cassation, des cours d'appel et des tribunaux judiciaires, des fonctions d'assistance, d'aide à la décision et de soutien à l'activité administrative ainsi qu'à la mise en œuvre des politiques publiques. Sous la responsabilité des magistrats, ils participeront au traitement des procédures sans pouvoir (sauf certaines exceptions) recevoir de délégation de signature. Ils pourront assister aux audiences et accéder au dossier de la procédure pour l'exécution des tâches qui leur sont confiées. Les attachés de justice exerçant auprès des magistrats du siège pourront assister au délibéré. Ils auront la possibilité d'intégrer l'ENM après 3 ans grâce à une passerelle dédiée.

- Des assistants spécialisés qui pourront être nommés afin de participer au traitement de procédures relevant de contentieux techniques ou spécifiques conduites sous la responsabilité de magistrats du siège ou du parquet des tribunaux judiciaires. Ils auront la possibilité, dans le cadre de tâches qui leur seront confiées, d'accéder accéder au dossier de la procédure. Les documents de synthèse ou d'analyse qu'ils remettront aux magistrats pourront être versés au dossier. Ces assistants pourront être fonctionnaires ou contractuels.
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