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Introduction historique au droit

L'essor du droit français : Commentaire : analyse guidée d'un texte



Analyser le texte suivant :

Les coutumes générales de la ville de Bordeaux, 1728 :

Tx.« Les coutumes des provinces sont le vrai droit français [...] et quand elles nous font défaut, nous avons recours à la coutume générale de France, aux ordonnances de nos rois ou au droit civil romain que nos praticiens appellent droit commun. Et, pour un dernier remède, nous nous servons des arrêts de la cour du parlement qui est le vrai interprète de la coutume. Nous nous servons aussi pour l'interprétation de celle-ci de la nouvelle coutume de Paris parce que la cour l'a corrigée et réformée par ses arrêts ».

Source : L'État royal (XIIème-XVIIIème siècles). Une anthologie, J.-M. Carabasse et G. Leyte, Paris, 2004, p. 236.
  1. Que veut dire le texte par la formule « les coutumes des provinces sont le vrai droit français » ?
  2. Que veut dire le texte par la formule « coutume générale de France » ?
  3. De quoi parle le texte quand il est question de « la nouvelle coutume de Paris » que « la cour a corrigée et réformée par ses arrêts » ?
  4. Que nous apprend le texte de la hiérarchie des sources au milieu du XVIIIème siècle, selon son auteur ?

En savoir plus : Réponses

1. Que veut dire le texte par la formule « les coutumes des provinces sont le vrai droit français » ?

Le vaste mouvement de rédaction et de réformation des coutumes au XVIème siècle a donné naissance à l'idée qu'existe dans le royaume de France un ius commune issu des coutumes, et non pas du droit romain, et à ce titre empreint d'une dimension nationale. C'est à ce droit que les juristes coutumiers confient désormais le rôle de combler les silences des coutumes, et de poser des principes généraux guidant l'interprétation des coutumes par les juges.
 
2. Que veut dire le texte par la formule « coutume générale de France » ?

La doctrine coutumière, tout au long des XVIème-XVIIIème siècles, s'efforce de dégager par la comparaison des principes généraux du droit coutumier, valable au-delà des spécificités locales. Ce sont ces principes qui doivent guider le juge dans le silence de la coutume.

3. De quoi parle le texte quand il est question de « la nouvelle coutume de Paris » que « la cour a corrigée et réformée par ses arrêts » ?

Chef d'Ĺ“uvre de la campagne de réformation, en 1580, en grande partie due à Christofle de Thou, président du parlement de Paris, la coutume de Paris a la particularité d'avoir éliminé le caractère local de ses dispositions aux profits de principes plus généraux. Elle est ainsi devenue rapidement une référence (certaines régions françaises l'ont adopté, délaissant leur propre coutume, le roi l'impose par ailleurs au Canada et aux Antilles). Sa qualité et son grand détachement des contingences locales font que de nombreux auteurs, à commencer par Du Moulin, y voient la matrice du droit commun coutumier.

Encore contestée au XVIème siècle, l'idée de recourir à la coutume de Paris pour déterminer les principes généraux coutumiers s'impose de plus en plus au XVIIème siècle, dans la jurisprudence comme dans la doctrine.

4. Que nous apprend le texte de la hiérarchie des sources au milieu du XVIIIème siècle, selon son auteur ?

Dans le silence des coutumes, l'auteur prescrit le recours au droit commun coutumier, au droit romain, à la législation et à la jurisprudence. L'auteur s'inscrit ainsi dans l'idée qu'il existe un « droit français », un droit national, obéissant à des principes communs à tout le royaume, et fondé conjointement sur les principes coutumiers, la jurisprudence qui les interprète et la législation royale. Il porte donc en lui le droit français n'est pas issue des seules coutumes, mais aussi l'activité législative du monarque et de l'activité jurisprudentielle des cours.
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