Sont ici en cause les mécanismes essentiels du procès civil, dont les notions fondamentales et la détermination des rôles respectifs du juge et des parties. Ces principes, énoncés dans les dispositions liminaires du code (articles 1 à 24 CPC) constituent un droit commun applicable devant toutes les juridictions, y compris arbitrales (
article 1464 CPC).
La plupart ont valeur de principes généraux du droit et leur application résulte aussi, dans une certaine mesure, de l'article 6 § 1 de la Convention Européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales.
Tous ces principes ne seront pas examinés dans ce chapitre :
- certains du fait de leur moindre importance, tels l'article 20 CPC (faculté pour le juge d'entendre les parties), l'article 23 (conditions de recours à un interprète), l'article 24 CPC (obligation de réserve), et l'article 23-1, issu du décret du 20 août 2004 (situation de la partie atteinte de surdité) ;
- d'autres, annoncés dans les dispositions liminaires, font ensuite l'objet de développements plus techniques dans le code et seront en conséquence étudiés ultérieurement. Il s'agit des articles 18 et 19 CPC (liberté de la défense), de l'article 22 CPC (publicité des débats), et de l'article 21 CPC (pouvoir de conciliation du juge).
Restent deux séries de dispositions qui seront présentée de manière plus détaillée dans ce chapitre : les articles 1 à 13 et 14 à 17 CPC, qui traitent respectivement du principe dispositif et du principe du contradictoire.
En savoir plus : La médiation
L’article 21 CPC a pendant longtemps constitué le seul fondement de la médiation judiciaire, consacrée ensuite par la loi du 8 février 1995, complétée par diverses dispositions réglementaires (D. du 22 juill. 96 et du 13 déc. 96). Les dispositions en cause de la loi du 8 février 1995 ont été modifiées par l’ordonnance n° 2011-1540 du 16 novembre 2011, portant transposition de la directive 2008/52/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2008 sur certains aspects de la médiation en matière civile et commerciale (N. Nevejans, L'ordonnance du 16 novembre 2011 - Un encouragement au développement de la médiation ? JCP 2012 n° 148).
Rq.La transposition n’a pas été limitée au seul domaine des médiations transfrontalières, couvert par la directive, mais a été étendue aux médiations intervenant en dehors de tout contexte transfrontalier. Le texte comportait à l'origine une exception puisque les dispositions ayant vocation à régir les médiations conventionnelles ne s'appliquaient en matière de contrat de travail qu'aux médiations revêtant un caractère transfrontalier. Cette rezstriction a été supprimée par la Loi macron du 6 août 2015.
L’ordonnance a complètement modifié le chapitre Ier du titre II de la loi du 8 février 1995 (qui désormais ne s’intitule plus « La conciliation et la médiation judiciaires » mais « La médiation ») afin d’appréhender le vaste champ d’application de la directive, englobant non seulement la médiation conventionnelle et judiciaire au sens habituel du droit interne, mais également les conciliations menées par les conciliateurs de justice, ainsi que tout processus répondant à la définition de la directive, sans pour autant employer l’appellation de « médiation » ou de « médiateur » :
la médiation s’entend ainsi de tout processus structuré, quelle qu’en soit la dénomination, par lequel deux ou plusieurs parties tentent de parvenir à un accord en vue de la résolution amiable de leurs différends, avec l’aide d’un tiers, le médiateur, choisi par elles ou désigné, avec leur accord, par le juge saisi du litige (art. 21 nouveau L. 8 fév. 1995). La médiation est soumise à des règles générales, énoncées dans la section 1 dudit chapitre 1, sans préjudice des règles complémentaires propres à certaines médiations ou à certains « médiateurs » (Ex. : médiation familiale, dispositions du D. n° 78-381 du 20 mars 1978 relatif aux conciliateurs de justice).
L’article 25 de la loi du 8 fév. 1995 prévoit que les conditions d’application du chapitre 1 sont déterminées par décret en Conseil d’Etat. De telles dispositions existaient déjà en matière de médiation judiciaire (art. 131-1s CPC) et de conciliation par un conciliateur de justice (D. 20 mars 1978 précité).
Rq.Le décret n° 2012-66 du 20 janvier 2012 relatif à la résolution amiable des différends, pris en application de l’ordonnance précitée du 16 novembre 2011, a complété le dispositif en encadrant les procédures de règlement amiable des différends faisant intervenir un tiers : il a créé dans le CPC un livre V intitulé « La résolution amiable des différends », qui régit la médiation et la conciliation conventionnelles avec l’aide d’un tiers, ainsi que la procédure participative assistée par avocat (F. Rongeat-Oudin , Le règlement amiable des différends est en bonne marche ! JCP 2012 n° 157).
Cas particuliers :
-
Tentatives de conciliation prescrites par la loi : il entre dans la mission du juge de concilier les parties et il peut évidemment procéder lui-même aux tentatives de conciliation.
Toutefois, la loi n° 95-125 du 8 fév. 95, telle que modifiée par l'ord. du 16 nov. 2011, lui a donné la possibilité de désigner un médiateur en vue de procéder aux tentatives de conciliation préalables prévues par la loi, sauf en matière de divorce et de séparation de corps.
Dans un premier temps étaient essentiellement concernées les procédures de conciliation menées devant le tribunal d'instance et la juridiction de proximité. Les « médiateurs » visés ont en l'occurrence été les conciliateurs de justice, institués par le décret du 20 mars 1978.
Puis, le décret n° 2010-1165 du 1er octobre 2010, relatif à la conciliation et à la procédure orale en matière civile, commerciale et sociale, a élargi aux tribunaux de commerce et aux tribunaux paritaires des baux ruraux la possibilité de déléguer la tentative de conciliation aux conciliateurs de justice.
Pour l'instant la procédure n'a toujours pas été étendue aux conseils de prudhommes
Rq.Rapport Magendie-Thony, « Célérité et qualité de la justice - Les conciliateurs de justice » (JCP 2010 Fasc 14 n° 377).
Par ailleurs, la désignation du conciliateur de justice était à l'origine subordonnée à un accord préalable des parties. La loi prévoyait que si le juge n'avait pas recueilli cet accord, il pouvait leur enjoindre de rencontrer un conciliateur afin que celui-ci les informe sur l'objet et le déroulement de la mesure. Cette possibilité figure toujours à l'art. 129 CPC mais le décret n° 2015-282 du 11 mars 2015 a supprimé la condition d'accord préalable des parties devant le tribunal d'instance, le juge de proximité et le tribunal de commerce.
-
Médiation judiciaire (L. 8. Fév. 1995 modifiée par ord. 16 nov. 2011 et art 131-1s. CPC) : elle peut intervenir dans toutes les procédures, y compris le référé et en matière de divorce et de séparation de corps, et en tout état de l’instance. Elle consiste en la désignation par le juge d'un tiers, personne physique ou association, en vue de tenter de parvenir à un accord entre les parties. Pour y recourir, il est nécessaire d'obtenir l'accord des parties. Celles-ci ne sont pas tenues de comparaître en personne et peuvent être représentées ou assistées. La durée de la mission de médiation, fixée par le juge, ne peut excéder 3 mois, renouvelables une fois à la demande du médiateur. Le médiateur ne peut cumuler ses fonctions avec celles d'expert et il ne dispose pas du pouvoir d'instruction mais peut entendre des tiers consentants, avec l'accord des parties. Il doit tenir le juge informé des difficultés rencontrées, celui-ci pouvant à tout moment mettre fin à la médiation car il n'est pas dessaisi. Le médiateur est tenu au secret, les déclarations recueillies dans le cadre de la médiation ne pouvant être évoquées devant le juge qu'avec l'accord des parties et ne pouvant être utilisées à l'occasion d'une autre instance (voir aussi art. 21-3 nouveau L. 8 fév. 1995). En cas d'accord, il est possible d'en demander l'homologation afin de lui donner force exécutoire. Le juge fixe la provision à valoir sur la rémunération du médiateur : la décision de recourir à la médiation est caduque en l'absence de consignation dans le délai. Les parties ont la liberté de répartir entre elles les frais de la médiation. A défaut d'entente, ces frais seront répartis à parts égales, sauf si cela est estimé inéquitable par le juge.
Rq.Rapport du groupe de travail Magendie : Célérité et qualité de la justice - La médiation : une autre voie, déposé le 15 octobre 2008.
F. Creux-Thomas, La médiation : opportunité ou gadget ? JCP 09 Fasc. 51 n° 558
Sont ici en cause les rôles respectifs du juge et des parties.
A l'origine, la procédure civile était
accusatoire,
publique,
orale et contradictoire. Le principe dispositif traduisait le fait qu'elle était dirigée par les parties, le juge étant investi d'un rôle d'arbitre neutre.
La procédure a ensuite évolué pour devenir plus
inquisitoriale et
écrite. Cette évolution s'est traduite par un accroissement des pouvoirs du juge, notamment en matière d'instruction, et corrélativement par un encadrement plus strict des pouvoirs des parties.
L'explication de l'évolution réside dans la prise de conscience des risques inhérents à une mise en Ĺ“uvre stricte du principe accusatoire, d'une part pour l'équilibre et le respect des droits des parties, d'autre part car la Justice est un service public qu'on ne peut laisser "
manipuler " par ses usagers. On pourrait objecter à cela que le procès civil n'est pas mené au nom de la société et ne met en cause que les intérêts privés des particuliers. Selon Loïc Cadiet, les articles 1 à 13 CPC définissent les principes de coopération entre le juge et les parties, au regard de l'instance et de l'objet du litige (L. Cadiet et E. Jeuland, Droit judiciaire privé, Litec).
Pour Serge Guinchard,
les articles 1 et
2 CPC constituent le principe d'impulsion du procès, qui serait
stricto sensu le véritable principe accusatoire ou d'initiative (Serge Guinchard, Procédure civile, droit interne et droit communautaire, Dalloz). Le principe dispositif concernerait, lui, le partage des rôles entre le juge et les parties quant à la maîtrise de la matière litigieuse.
La question avait déjà été posée d'un retour à une conception plus accusatoire de l'instance, avec en contrepartie un formalisme accru, à la suite du rapport Coulon (J.M. Coulon, Réflexions et propositions sur la procédure civile, Doc. Française, 1997) et de la réforme issue du décret du 28 décembre 1998. Ce point de vue avait cependant été réfuté par la majorité de la doctrine (J. Normand, RT 98 466 - R. Martin, JCP 99 Fasc. 12 actua : pas de modification de l'article 12 CPC et proposition de réforme - R Martin, JCP 00 Fasc 37 actua).
Le débat est de nouveau clairement soulevé, à la fois au regard de l’évolution de la jurisprudence et au plan textuel :
- obligation de concentration des moyens imposée aux parties en matière d’invocation du fondement juridique de leurs prétentions, avec les conséquences sus-évoquées sur le domaine de l’autorité de chose jugée ;
- limitation de l'obligation d'invocation d'office des moyens de droit par le juge (voir infra, §2B).
Pour un point de vue critique de cette évolution, V. Bolard, L'office du juge et le rôle des parties : entre arbitraire et laxisme, JCP 08 I 156 - Contra : Magendie, Entretien, JCP 08 I 192.
- édiction de nouvelles obligations (sanctionnées), à charge des parties, par le décret du 9 décembre 2009 modifiant la procédure d’appel avec représentation obligatoire, qui est entré en vigueur le 1er janvier 2011.
P. Blondel, La charge de la concentration et le respect d’un principe de complétude, JCP 2012 F. 15 n° 464
Rq.Exemple de coopération entre le juge et les parties au service d’une justice de qualité : le 3 juin 2008, signature d’un protocole sur la procédure civile entre le TGI de Paris et le Barreau de Paris, le but étant d’accélérer la célérité et la qualité des procédures par une série de bonnes pratiques : concentration et limitation du nombre de jeux d’écritures (objectif de modélisation), effort de synthèse, respect des délais, audiences plus interactives (communiqué TGI de Paris 3 juin 2008 et JCP 08 actu 400).
Les parties jouent un rôle essentiel dans la maîtrise de l'instance et la détermination des éléments du procès.
Les parties interviennent dans la détermination de l'existence de l'instance et dans sa conduite.
Le principe est que les parties introduisent seules l'instance, sauf quand le juge est exceptionnellement autorisé à se saisir d'office.
Ex.Le juge peut se saisir d'office de protection des mineurs.
Il le pouvait également en matière de procédures collectives. Saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel a déclaré inconstitutionnelle au regard du principe d'impartialité, la saisine d'office du tribunal de commerce pour ouvrir une procédure de redressement judiciaire. Le motif en était l'absence de garanties ayant pour objet d'assurer qu'en se saisissant d'office le tribunal ne préjuge pas de sa position lorsqu'il statuera sur le fond (DCC 7 déc. 2012, JCP 2012 Fasc. 51 n° 1373 ; M-A. Frison-Roche, Principe d'impartialité et droit d'auto-saisine de celui qui juge, D. 2013 Fasc. 1 chr 28, D. 2013 338 obs.J-L. Vallens ; L'inconstitutionnalité de la saisine d'office, B. ROLLAND , Proc. 2013 Fasc. 2 Etude 3). Une semblable décision d'inconstitutionnalité de la saisine d'office a été prise en matière d'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire (DCC 7 mars 2014, Proc. 2014 Fasc. 4 n° 115 obs. B. Rolland). Même solution en matière de résolution d'un plan de sauvegarde ou de redressement (K. Purut et JP Teboul, Paradoxale réforme – A propos de la saisine d'office du tribunal de commerce). Pour tenter de remédier à cette situation, l'ordonnance n° 2014-326 du 12 mars 2014 a supprimé certains cas de saisine d'office et institué une procédure d'information du ministère public par le président du tribunal, afin que la juridiction soit ensuite saisie par le Parquet (art R 662-12-1 CCom créé par le D. 30 juin 2014)(K. Teboul, Contradictoire réforme, JCP 2014 Fasc. 28 n° 816). D'autres suppressions ont résulté de l'ord. du 26 sept. 2014 (B. Brignon et A. Cerat-Gauthier, Les saisines d'office confrontées aux dernières réformes du droit des entreprises en difficulté, D. 2014 2248).
La saisine d'office du juge ne doit pas être confondue avec l'initiative du Ministère public pour la défense de l'ordre public, lorsque celui-ci agit par voie d'action et est partie principale (voir leçon 3), c'est-à-dire dans la position procédurale d'une véritable partie au procès, en qualité de demandeur ou de défendeur, avec les obligations en découlant. Ainsi, le Procureur de la République est-il désormais compétent pour saisir le juge des tutelles d'une demande d'ouverture d'une mesure de protection des majeurs (art 430 Cciv., entré en vigueur le 1/1/09).
Les parties peuvent mettre fin à l'instance à tout moment sans attendre le jugement, par désistement, acquiescement, ou en cas de transaction.
Les parties conduisent l'instance sous les charges qui en résultent pour elles ( article 2 CPC). Elles doivent notamment effectuer les actes nécessaires à l'avancement de la procédure et respecter les délais.
Rq.Certains ont dit que les parties avaient la maîtrise du litige, tandis que le juge assurait la direction du procès.
Mais, selon Loïc Cadiet, il n'est pas toujours aisé de distinguer entre la conduite de l'instance, laissée à l'initiative des parties, et son bon déroulement, contrôlé par le juge (L. Cadiet, Droit judiciaire privé, op. cit.). Pour Serge Guinchard, il serait préférable de dire qu'il y a direction de l'instruction par le juge (S. Guinchard, Procédure civile, op. cit.).
Les parties jouent un rôle essentiel dans la détermination des éléments de fait du litige et interviennent également, de manière croissante, dans la détermination des éléments de droit.
-
Les parties déterminent l'objet du litige (article 4 CPC), le juge ne pouvant se prononcer que sur ce qui est demandé (l'article 5 CPC lui interdit de statuer infra et ultra petita : voir leçon 8). L'objet est soumis au principe d'immutabilité, qui interdit en principe de modifier le cadre initial du litige. Il en découle notamment le principe d'interdiction des demandes nouvelles, sauf quand il est possible de tenir compte d'une évolution du litige. Les demandes additionnelles et reconventionnelles sont ainsi admises si elles présentent un lien de connexité avec la demande initiale. Il en est de même des demandes en intervention se rattachant par un lien suffisant aux prétentions des parties (article 325 CPC). Certaines demandes nouvelles sont également recevables en appel. Enfin, il est possible d'invoquer des moyens nouveaux en première instance et en appel, voire de faire état d'arguments nouveaux même devant la Cour de cassation.
-
Les parties ont la charge d'alléguer les faits propres à soutenir leurs prétentions (article 6 CPC), le juge ne pouvant fonder sa décision sur des faits hors du débat (article 7 al 1 CPC).
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Tx.Jurisprudence
Cass. soc., 5 déc. 2012, Proc 2013 Fasc. 5 n° 154 obs. A. Bugada : Attendu que pour évaluer la somme due au salarié pour l'entretien de ses vêtements professionnels, le conseil de prud'hommes, après avoir relevé que l'intéressé ne justifiait pas des frais qu'il avait réellement exposés, s'est fondé sur une recherche réalisée à partir de différents sites Internet, relative à la consommation en électricité et en eau nécessaire au fonctionnement d'un lave-linge, à l'amortissement du matériel utilisé au prorata du volume lavé, au coût de la poudre à laver et au temps nécessaire pour que les vêtements soient prêts à être réutilisés... Qu'en retenant ainsi, des éléments qui n'étaient pas dans le débat, la cour d'appel a violé le texte susvisé (...).
-
Chaque partie doit prouver les faits nécessaires au succès de sa prétention (article 9 CPC), le juge ne pouvant ordonner des mesures d'instruction pour pallier leur carence dans l'administration de la preuve (article 146 CPC). A cet égard, il doit être annexé à l'assignation un bordereau énumérant les pièces sur lesquelles la demande est fondée, celles-ci devant en outre être mentionnées dans l'assignation (article 56 CPC).
Pour les droits dont elles ont la libre disposition, les parties jouissent de prérogatives importantes :
- elles peuvent restreindre ou augmenter les pouvoirs du juge,
- elles peuvent le lier par les qualifications et points de droit auxquels elles entendent limiter le débat (article 12 al 3 CPC),
- elle peuvent aussi, une fois le litige né, lui donner pouvoir de statuer comme amiable compositeur, c'est-à-dire en équité (article 12 al 4 CPC - Nécessité d'un accord exprès : , JCP 97 II 22835 - Brouillaud, Plaidoyer pour une institutionnalisation, D 97 chr 234 - Cadiet, JCP 97 I 4064 n° 11).
Par ailleurs, aux termes de l'article 56 CPC, toutes les assignations doivent à peine de nullité contenir un exposé des moyens en fait et en droit (assignations qualificatives). Une exigence similaire transparaît avec les conclusions qualificatives et récapitulatives devant le TGI et la CA (G. Bolard, JCP 00 I 214, Les écritures qualificatives - Bourdillat, D 00 chr. 427, Les conclusions récapitulatives - Bolard, Les dernières conclusions, JCP 01 I 297 - Cette exigence pose problème pour certains dès lors que l'article 12 CPC n'a pas été modifié).
Désormais, il convient aussi de prendre en considération les exigences posées par l'arrêt de l'assemblée plénière du 7 juillet 2006 et les décisions postérieures (Ass. Plén. 7/7/06, D. 06 2135 note Weiller, JCP 06 actu n° 351 et I 183 n° 15 obs. S. Amrani-Mekki, Proc 06 n° 201, RT 06 825 : Civ. II, 18 oct. 07, RT 08 147 obs. Théry - Civ. II, 25 oct. 07, RT 08 159 n° 7 - voir leçon 6), qui imposent aux parties une obligation nouvelle : la concentration des moyens juridiques susceptibles de fonder leur demande. Selon la Cour de cassation, il incombe au demandeur, au défendeur, et à l'ensemble des parties (Com 20/2/07, Proc 07 n° 128 ; Civ. III, 13 fév. 08, D 08 621, JCP 08 II 10052, D. 08 621), de présenter dès l'instance relative à la première demande l'ensemble des moyens qu'ils estiment de nature à la fonder ou à justifier son rejet. Si un changement de fondement juridique est autorisé en appel, aux termes de l'article 565 CPC, en revanche, à l'occasion d'un nouveau procès, un tel changement ne suffira pas à caractériser la nouveauté de la cause et à faire écarter la fin de non-recevoir tirée de la chose (déjà) jugée, au titre de la demande originaire).
Le juge intervient dans la direction de l'instruction du procès et joue aussi un rôle dans la détermination des éléments de fait et de droit du litige. Son rôle s'est accru de manière notable en matière de mise en état. En revanche, la jurisprudence récente a limité son devoir d’initiative d'office dans le domaine du droit.
-
Le juge veille au bon déroulement de l'instance :
Il peut impartir des délais, ordonner les mesures nécessaires à l'avancement de la procédure (article 3 CPC), et il veille à leur respect. Il peut, par exemple, recourir à l'astreinte. C'est ainsi que lui est reconnue la possibilité de supprimer les débats oraux en s'opposant à une demande conjointe de report d'audience, dès lors que les parties ont été en fait à même d'en débattre, même si elles ne l'ont pas fait (, D 90 25 concl. Cabannes, JCP 90 II 21407 note Cadiet, RT 90 145 obs. Perrot : à défaut de droit au renvoi des débats, la Cour de cassation leur a reconnu le droit de demander conjointement la radiation de l'affaire, officialisé sous la qualification de "retrait du rôle" par le décret du 28 déc. 1998).
Rq.Par ailleurs, dans un arrêt du 3 février 2009, la Cour EDH a précisé que même lorsqu'une procédure est régie par le principe dispositif, qui consiste à donner aux parties des pouvoirs d'initiative et d'impulsion, il incombe aux Etats contractants d'organiser leur système judiciaire de telle sorte que leurs juridictions puissent garantir à chacun le droit d'obtenir une décision définitive sur les contestations relatives à ses droits et obligations de caractère civil dans un délai raisonnable (Cour EDH, 3/2/09, Poelmans/Belgique, JCP 09 II 10070 note N. Fricero).
-
Le juge peut ordonner d'office toutes les mesures d'instruction nécessaires (article 10 CPC et 143 CPC).
Le non-exercice de ce pouvoir processuel peut constituer un déni de justice (Civ II, 28/6/06 RT 06 821).
Selon la conception classique, le fait relèverait des parties, tandis que le droit serait l'apanage du juge (Règle "da mihi factum, tibi dabos jus"). En principe, le juge est donc enfermé dans le cadre de l'instance tracé par les parties (article 7 al 1 CPC), il ne peut statuer infra ou ultra petita, changer la qualité des parties, la cause et l'objet de la demande.
En pratique, s'il apparaît lié par les conclusions des parties, le juge n'est pas dénué de tout pouvoir d'initiative dans le domaine du fait :
- Il peut prendre en considération parmi les éléments du débat même des faits non spécialement invoqués par les parties (article 7 al 2 CPC). Ces faits sont qualifiés de faits adventices. Le fait dans le débat est tout fait que les parties ont été mises en mesure de discuter. Le juge est cependant tenu de respecter le contradictoire quand il soulève ainsi des moyens de fait. Par ailleurs, il est dérogé à l'article 7 al 1 CPC en matière gracieuse (article 26 CPC).
- Il peut inviter les parties à fournir les explications de fait nécessaires (article 8 CPC).
Le juge tranche le litige conformément aux règles de droit applicables, non par celles indiquées par les parties (article 12 al 1 CPC) : c'est la transposition de l'adage "jura novit curia". Il ne peut statuer en équité, tout au moins pas ouvertement (, D 95 626 ; JCP 97 I 4064 n° 11- Cadiet, L'équité dans l'office du juge civil, Justices 98 n° 9 p 87- Dion, Le juge et le désir du juste, D 99 chr. 195).
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Il peut inviter les parties à fournir les explications de droit nécessaires (article 13 CPC).
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Il doit restituer aux faits et actes litigieux leur véritable qualification (Civ I, 22/4/97, JCP 97 II 22944 note Bolard, D 98 272, RT 98 463 (b) : décision considérant qu'il s'agit d'une obligation et prenant en compte concrètement l'objet de la demande sans faire de distinction avec la cause). Il peut donc, ce faisant, interpréter la volonté du requérant et modifier le fondement juridique de la demande (non son objet), dans la limite des éléments de fait invoqués et de leurs conséquences factuelles (incidence possible des faits adventices : voir supra).
-
Il doit aussi rechercher le fondement juridique des prétentions si le demandeur ne l'a pas indiqué (Civ III, 27/6/06, Proc. 06 n° 266). Tout au moins, il devrait a priori le faire (en ce sens, Bolard et Flécheux, L'avocat, le juge et le droit, D 95 chr. 221) mais cette éventualité apparaît limitée depuis le décret du 28 décembre 1998 : ce texte a en effet imposé aux parties d'exposer dans l'assignation (article 56 CPC), et dans les conclusions, s'agissant du TGI et de la Cour d'appel, les moyens de droit dont elles se prévalent.
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Il peut a priori relever d'office les moyens de droit, même s'ils ne sont pas d'ordre public, sauf si les parties ont entendu limiter ses pouvoirs (article 12 al 3 CPC).
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Il a en revanche l'obligation de relever d'office les moyens d'ordre public.
Le juge doit-il soulever (tous) les moyens de droit d'office ?
Un long débat a existé sur le point de savoir si l'article 12 al 1 CPC imposait une obligation au juge, ou s'il s'agissait d'une simple faculté, dans le cas où le demandeur avait donné un fondement juridique précis à sa demande. Après des controverses, toutes les chambres de la Cour de cassation ont peu à peu décidé de retenir une position contraire à celle exprimée par la lettre de l'article 12 CPC alinéa 1. Cette situation peut trouver une justification pratique dans la volonté de limiter l'ouverture du pourvoi en cassation.
Cette position a été entérinée fin 2007 par l'Assemblée Plénière de la Cour de cassation (Ass. Plén. 21 déc. 07, JCP 08 II 10006 note Weiller et JCP 08 I 138 n° 9, D. 08 228, Proc. 08 n° 71, O. Deshayes, L'office du juge à la recherche de sens, D. 08 chr. 1102 ; Bolard, L'office du juge et le rôle des parties : entre arbitraire et laxisme, JCP 08 I 156) : si parmi les principes directeurs du procès, l'art. 12 CPC oblige le juge à donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux invoqués par les parties au soutien de leurs prétentions, il ne lui fait pas obligation, sauf règles particulières, de changer la dénomination ou le fondement juridique de leur demandes. En l'espère, saisie d'une demande fondée sur un vice caché dont la preuve n'était pas rapportée, la CA, qui n'était pas tenue de rechercher si cette action pouvait être fondée sur un manquement du vendeur à son obligation de délivrance conforme, a légalement justifié sa décision.
Bibliographie : C. Bléry, Office du juge : entre activité exigée et passivité permise – Réflexions à partir de la jurisprudence récente sur l’article 12 du Code de procédure civile, Rev. Proc. 2012 Fasc. 11 n° 6.
G. Bolard, L'impartialité du juge au risque de la loi,,JCP 2015 Fasc. 42 n° 1085
En savoir plus : Les controverses antérieures sur la portée de l’article 12 alinéa 1 CPC : obligation ou faculté ?
En doctrine |
Pour Loïc Cadiet (L. Cadiet, op. cit., n° 700 s.), le texte imposait une obligation, que soit en cause un moyen d'ordre public ou non, dès lors qu'il s'agissait d'un moyen de droit, sous réserve de deux exceptions :
- d'une part, si la loi en disposait autrement : cas des textes relatifs aux fins de non-recevoir et exceptions de procédure ;
- d'autre part, si cela devait conduire à la prise en considération de nouveaux faits. A défaut cela aurait rendu obligatoire et non plus facultative la mise en oeuvre de l'article 7 al 2 CPC, relatif aux faits adventices, avec le risque d'une modification de l'objet du litige.
La proposition avait aussi été faite de limiter l'obligation aux moyens de pur droit découlant des faits spécialement invoqués par les parties (en se fondant sur l'article 6 CPC), même s'ils n'étaient pas d'ordre public (En ce sens, S. Guinchard - Contra: J. Normand, G. Couchez, J. Héron). R. Martin est allé jusqu'à estimer que l'article 12 CPC violait les principes de droit au procès équitable et d'impartialité de la juridiction contenus dans la CEDH (R.Martiin, D 96 chr 20 - Contra Normand, obs. RT 96 689s. - V. aussi, R. Martin, D 90 chr. 163 et D 94 308: Le juge a t-il l'obligation de qualifier ou de requalifier?).F. Canut, Le relevé d'office de moyens d'ordre public de protection, D. 07 2257 |
En jurisprudence (évolution antérieure au 21 décembre 2007) |
Selon le Conseil d'Etat, le juge n'avait le devoir d'agir d'office que pour les moyens d'ordre public (CE 12 oct. 79, JCP 80 II 19288 concl. Franc, note Boré).
- La deuxième chambre civile, a très tôt considéré que seuls les moyens de pur droit devaient être relevés d'office, et que sinon il s'agissait d'une faculté (Civ II, 4 nov. 88 D 89 609 Frison-Roche; 8/6/95, D 96 247).
- Cette position a ensuite été reprise par la troisième chambre civile (3/4/97, Bull 75, 25/2/98, RT 98 461) et la chambre sociale (Soc 11/2/97, RT 98 461 - Soc 7/1/98, RGP 98 471 : ce faisant, le juge ne peut être amené à prendre en compte des faits non spécialement invoqués).
- La chambre commerciale avait, dans un premier temps, adopté un point de vue radical, interdisant au juge de changer le fondement juridique de la demande pour les moyens qui n'étaient pas de pur droit, tout en développant une conception large de l'objet du litige, entendu à la fois comme la chose demandée et le fondement de la demande (Com 18/2 et 23/6/92, Bull n° 47 et 244, RT 93 p 414 Normand). Elle s'est, dans un second temps, ralliée à la position de la deuxième chambre civile (Com 14 nov. 95, Proc 96 n°143 - Com 31/5/95, D 97 124).
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L'évolution de la première chambre civile a été plus longue et assez chaotique puisqu'elle a, dans un premier temps, d'abord considéré que l'article 12 CPC imposait aux juges une obligation (Civ. I, 16/4/91, D 93 187 Bretaudeau, RT 92 p 176 Normand: reprenant les termes annulés par le CE de l'article 12 CPC, l'arrêt estime que la CA aurait dû rechercher si un fait n'était pas constitutif d'un dol - Civ I, 22/4/97, précité), avant de revenir sur cette position pour y voir une simple faculté (en matière de vente, elle a tout d'abord considéré que certaines demandes n'étaient pas interchangeables : Civ I, 18/2/92, Bull n° 47, RT 93 p 417), avant de refuser l'extension du domaine de l'obligation de délivrance : Civ I, 13/1/93, Bull n° 7, 10/3/93, Bull. civ. I n° 110, D 93 IR 96 et 5 mai 93 D 93 p. 506 Bénabent). Le problème est que par la suite elle a changé à d'avis à diverses reprises !Les choses ont semblé (une nouvelle fois) fixées par un arrêt du 21 février 2006 considèrant que le relevé d'office d'un moyen de droit constitue une possibilité mais non une obligation pour le juge du fond, dès lors que le demandeur avait précisé le fondement juridique de sa prétention (Civ I, 21/2/06, D. 06 IR 673, Proc 06 n° 98 - R. Martin, Le relevé d'office d'un moyen de droit, suite et fin, D. 06 2201 ; Civ. I, 20/9/06, Proc. 06 n° 266).
Quoi qu'il en soit, l'arrêt de l'Assemblée Plénière du 21 déc. 07, évoqué auparavant, a mis un terme définitif au débat en posant que le relevé d'office des moyens de droit n'est qu'une simple faculté pour le juge (Ass. Plén. 21 déc. 07, JCP 08 II 10006 note Weiller, D. 08 228, Proc. 08 n° 71 ; O. Deshayes, L'office du juge à la recherche de sens, D. 08 chr. 1102). |
En savoir plus : Pouvoir d'initiative du juge en matière de clauses abusives
En matière de clauses abusives, la CJCE considérait que le juge français devait soulever d'office le caractère abusif d'une clause alors même que l'action du consommateur était forclose (CJCE, 21 nov. 02, D 03 486, JCP 03 I 128 n° 18 et II 10082 - CJCE 27/6/00, JCP 2000 II 10513, RT 01 878 : même solution pour un moyen d'inefficacité :). Or, selon la Cour de Cassation, il s'agissait d'un moyen d'intérêt privé (Civ I, 2 oct 02, JCP 02 IV 2797, Fadlallah et Baude Texidor, D 03 chr 750). Dans le même sens, elle jugeait aussi que la méconnaissance des exigences de l'article L 311-9 CConso, même d'ordre public, ne pouvait être soulevée d'office par le juge, car l'ordre public en cause constituait un ordre public de protection, non de direction (Civ I 16/3/04, JCP 04 II 10129, note crit. - Voir aussi, F. Canut, Le relevé d'office de moyens d'ordre public de protection, D. 07 2257).
La loi n° 2008-3, du 3 janvier 2008, a renversé la jurisprudence française en donnant désormais au juge le pouvoir de relever d'office toutes les dispositions du Code de la consommation (art. L 141-4 C.Conso)
- doctrine : Croze, note Rev. Proc. 08 n° 80 – Poissonnier, Office du juge en droit de la consommation: une clarification bienvenue, D. 08 chr. 1285 – B. Gorschs, Le relevé d’office des moyens tirés du code de la consommation : une qualification inappropriée, D. 2010 P. 1300.
- première application jurisprudentielle: Cass. Civ I, 22 janvier 2009, JCP 09 actu n° 66 obs. G. Gout, JCP 09 II 10037 obs. X. Lagarde et I 142 n° 8 obs. Serinet, D. 09 908 note S. Piedelièvre, Proc 09 obs. L. Raschel.
La CJCE a précisé par ailleurs que le juge national a l’obligation d’examiner d’office les clauses qu’il juge abusives au regard du droit communautaire (CJCE, 4 /6/09, Panon GSM/Erzsébet Sustikné Gyorfi, JCP 09 Fasc. 25 n° 27 et Fasc. 42 n° 336 note Paisant, Proc 09 n° 275 obs. C. Nourrissat ; CJCE, 6 oct. 2009, Proc 09 n° 400, obs. C. Nourrissat : la directive « clauses abusives » impose au juge national d'apprécier d'office le caractère abusif d'une clause compromissoire stipulée dans un contrat conclu entre un professionnel et un consommateur).
Dans tous les cas où il agit d'office, le juge a l'obligation de respecter le contradictoire (article 16 CPC) et de ne pas modifier les termes du litige (articles 4, 5 et 7 CPC).
Le juge ne peut par ailleurs se substituer aux parties qui ne satisfont pas à la charge de l'allégation (Civ I, 22/4/97, Bull 127, RT 98 465). En revanche, si le demandeur n'a pas indiqué le fondement de sa demande, il doit rechercher la règle applicable mais n'a pas à respecter la contradiction (Motulsky, Les rôles respectifs du juge et des parties dans l'allégation des faits, Ecrits n°17 ; Prolégomènes pour un futur code de procédure civile, D. 72 chr. 17 - R. Martin, le juge devant la prétention, D 87 chr. 35).
Ce principe s'inscrit dans le cadre plus large du respect des droits de la défense, dont les articles 18 à 20 CPC envisagent par ailleurs d'autres aspects spécifiques.
Tx.Jurisprudence
Le principe du respect des droits de la défense et le droit d'être assisté par un défenseur se sont vus reconnaître un caractère constitutionnel
, JCP 95 II 22478, D 95 513 concl. Jéol note Drago).
Cette règle postule, d'une manière générale, un déroulement loyal de la procédure entre les parties.
Les principales illustrations en sont les suivantes : il est tout d'abord nécessaire d'informer l'adversaire de l'existence de la procédure menée contre lui. L'article 14 CPC postule la nécessité d'être entendu ou au moins appelé.
Il convient ensuite de respecter les délais de comparution destinés à l'organisation de la défense (ex. : délai de 15 jours pour constituer avocat devant le TGI).
Si les parties ont la liberté de porter à la connaissance du juge tous les points de fait et de droit qu'elles estiment utiles, les éléments ainsi invoqués sont soumis à discussion contradictoire : l'article 15 CPC leur impose l'obligation de communiquer et signifier leurs conclusions, pièces, moyens et preuves en temps utile.
Par ailleurs, quand la loi autorise une procédure unilatérale ou que les circonstances ne permettent pas d'instaurer " ab initio " le contradictoire (ex. : ordonnances sur requête, procédure par défaut), son respect est néanmoins garanti a posteriori par l'existence d'une possibilité de recours contre les décisions faisant grief rendues au cours d'instances non contradictoires (article 17 CPC).
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Le juge doit tout d'abord faire respecter le principe du contradictoire par les parties (même en cas d'urgence et dans le cadre d'une procédure orale : Dijon, 29/1/04, Proc 05 n° 249).
Il dispose pour ce faire d'un pouvoir d'injonction et de sanction : fixation de délais, d'astreintes, pouvoir d'écarter les pièces communiquées tardivement.
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Il doit aussi respecter lui-même ce principe.
Cette exigence a conduit à l'annulation de dispositions du décret du 5 déc. 75 en ce qu'elles permettaient au juge de relever des moyens de droit d'office (ex-article 12 al. 3 CPC) sans être tenu au respect du contradictoire (ex-article 16 al. 1 CPC) (CE 12 oct. 79 D 79 606 Bénabent, JCP 80 II 19288 conc.l Franc note Boré, RT 80 145 Normand).
Selon la nouvelle rédaction de l'article 16 CPC, issue du décret du 12 mai 81, le principe de la contradiction s'impose dans tous les cas.
Tx.Jurisprudence
Le juge ne peut ainsi retenir dans sa décision des éléments dont les parties n'auraient pas discuté contradictoirement (Civ. II, 11/1/06, D 06 1149 : viole l'article 16 CPC le juge qui statue sans avoir invité les parties à s'expliquer sur l'absence au dossier des pièces qui figuraient au bordereau de pièces annexé aux dernières conclusions et dont la communication n'avait pas été contestée).
Il doit les inviter à présenter leurs observations lorsqu'il soulève un moyen, même de droit ou d'ordre public (Mixte 10/7/81, D 81 637 Cabannes; GP 81 627 Viatte). Cette règle ne s'applique pas en revanche à son pouvoir normal de qualification des faits dans le débat (Civ III, 28 mai 86, Bull civ. III n° 82, RT 87 390). Il en va en principe de même lorsqu'il procède à une requalification (contra: Civ. I, 16 avr. 2015, Proc 2015 Fasc. 6 n° 182 obs. Y. Strickler : Le demandeur ayant invoqué l'existence d'une promesse de porte-fort, la juridiction n'introduit aucun élément nouveau dans le débat en vérifiant si les conditions de celle-ci étaient réunies. Il ne peut dès lors lui être reproché de ne pas avoir invité les parties à présenter leurs observations).
La plupart des auteurs considérait que l'article 16 CPC ne s'appliquait pas non plus aux moyens considérés comme nécessairement dans la cause.
Cette position était critiquée par J. Héron, au motif qu'il y avait une évolution et qu'en toute hypothèse il s'agissait de moyens non discutés par les parties. Sur ce point, la Cour EDH a indiqué que le principe du contradictoire s'applique devant la Cour de cassation elle-même, y compris s'agissant de moyens de pur droit déjà dans la cause ou le débat (Cour EDH, 13/10/05, Clinique des Acacias/France, JCP 06 I 109 n° 6).
Le juge ne semble en revanche pas non plus tenu au contradictoire lorsqu'il utilise son pouvoir de police, notamment dans le cadre de l'article 24 CPC. Il a été jugé qu'il pouvait ordonner, sans porter atteinte aux droits des parties, le retrait d'une pièce de procédure figurant dans le dossier avec la mention "erreur grossière" et présentant un caractère injurieux et outrageant pour la justice (Com 21 oct. 97, Proc 98 n° 84 obs. crit. - Atias, L'erreur grossière du juge, D 98 chr. 280).
Par ailleurs, la Cour de cassation estime qu'il y a présomption de discussion contradictoire (Soc 29/9/88, Bull 582), ce qui est encore plus critiquable pour certains (en ce sens, J.Héron, op. cit. n° 249 p. 186).
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